Riveraineté et urbanité d'une voie
Initiée par Marcelle Demorgon, la notion de
"riveraineté" définit le caractère des voies
passantes en fonction des occurences d'arrêts qu'elles proposent. Elle
esquisse les conditions de cette riveraineté au regard de l'implantation
progressive d'établissements commerciaux sur les rives d'une route
nationale prise en exemple. Cet établissement, pour peu qu'il
précède à une urbanisation de type résidentielle,
marque le passage de la route "de la linéarité à la
riveraineté". Ce passage marque la voie par l'apparition de voies
d'accès latérales ou encore de "tourne-à-gauche". Elle
décrit également les contraintes apparaîssant pour le
piéton: "Cette remise en ordre ponctuelle contribue à
amoindrir la lisibilité de l'espace de la route. Des séparations
médianes construites désolidarisent l'une et l'autre rive. En
l'absence de passage piétonnier matérialisé, on se
débrouille comme on peut pour traverser. Assurer la
sécurité des piétons devient donc une
priorité". Dans la continuité de ce travail,
Geneviève Dubois-Taine traite des "boulevard urbains", en
partant de "l'image" mythique du boulevard urbain, pour en dresser les
caractéristiques et les conditions. Elle revient sur leurs
spécificités à l'origine de leur existence: la
présence d'un trafic automobile important à l'origine de
cabotage, terme rappelant la dimension économique et pas seulement
circulatoire d'un tel modèle. Deux aspects sont selon elle
décisifs quant à la différenciation entre voie rapide et
boulevard urbain: la multiplication des accès (contre-allées,
voies de ralentissement...) et des carrefours, car ils favorisent
l'implantation des activités, entraînant le raccordement des
parcelles à la voie; et le ralentissement des vitesses
pratiquées, condition technique indispensable à la
halte. Dubois-Taine pose ainsi le problème de la
sécurisation automobile de ces axes, incarnée notamment par les
tournes-à-gauche et les demis-tours. Son approche reste limitée
par le peu de traitement accordé à la question de l'espace
nécessaire au stationnement automobile; espace compris dans son sens
large, c'est à dire depuis le ralentissement préalable sur la
voie, jusqu'à la place de stationnement en elle-même.
Les différents concepts abordés permettent
d'évaluer l'inscription urbaine des différents types de
mouvements: les aspects "fonctionnels", mis en lumière par Amar et
Demorgon, qui permettent d'appréhender l'adhérence du mouvement
automobile et des modalités de sa halte, mais aussi Dubois-Taine qui
introduit la question de la maîtrise de la vitesse; la condition de
l'intermodalité, identifiées par Amar et Demorgon; la coexistence
nécessaire entre fonctions riveraines et circulatoires sur un même
lieu (FLEURY, 1998); et la perception des lieux de l'interface, mise en
lumière par Lynch à travers les concepts de lisibilité,
d'imagéabilité et d'intéligibilité de la Ville.
Malgré leurs insuffisances pour appréhender de manière
intégrée îlots et voies, ces concepts revêtent une
importance certaine dans l'analyse. Il convient aussi d'aborder la question de
l'inscription territoriale du mouvement par les concepts
développés par Amar, Demorgon et Bres. L'échelle
d'adhérence des mouvements en fonction du mode de transport (du
transport aérien au transport pédestre), articulée
à la riveraineté permise par les caractéristiques de la
voie empruntée, permet ainsi de définir un certain nombre de
"haltes" potentielles, points de frottement à partir desquels
naît l'urbanité d'un lieu.
|