Chapitre II : La dramatisation comme
« ruse de la raison orale»
L'idée appelle à la mise en scène. Elle
ne s'exprime efficacement que par la médiation d'une
théâtralisation organisée à cette fin.
I. Il était une fois...le conte
Dans le champ de l'orature, le conte tient lieu de
dramatisation le plus ample et le plus systématique. Le conte est le
développement ou l'explication d'une histoire que les récits
fragmentaires ne font que suggérer
C'est une duplication de la pièce qui se joue dans
l'histoire concrète des hommes (lieu scénique = l'imaginaire
social). La théâtralisation du conte apparaît dans les
formules d'ouverture et de fermeture ; les périodes ; les
moments.
La finalité est une vérité qui concerne
le récit, la vérité du récit. Cette finalité
est première, ce n'est pas conclure. Le savoir de la fin se
dévoile dès le commencement. Sa ruse consiste à
réussir à présenter comme découverte et
nouveauté ce qui au fond, est un savoir déjà disponible.
Son fonctionnement à rebours lui donne un caractère retors.
L'essentiel se situe dans la dramatisation entre l'occultation
inaugurale et le dévoilement terminal.
Pourquoi la narration si la fin est déjà
connue ? On narre pour se rappeler. On met en branle la fonction
mnémotechnique et d'archivages.
C'est ainsi que l'imaginaire peut capter la
réalité et la tenir en otage, par la simple magie du verbe.
L'attention de l'assistance maintenue en éveil et polarisée de
cette façon. Le conte use de procédé de dramatisation,
d'expérimentation autant d'exportation.
II. Au commencement était le
mythe
Le conte serait « comme l'avatar populaire - et
pédagogique - des mythes » (Christiane Seydou, Kaïdara -
récit - conte) 16
Le mythe est protégé par la règle du
secret. Les événements rapportés transcendent toute
expérience historique. Les récits mythiques fournissent des
principes explicatifs plausibles de certaines réalités. Sa
dramatisation amène progressivement l'esprit vers une
vérité.
La narration est une commémoration. Elle livre un
modèle non seulement remémoré, mais encore
commémoré, c'est - à - dire rejoué selon une
périodicité et des modalités plus ou moins
codifiées. C'est un récit sacré, soustrait à la
contestation.
Parti d'un constat empirique sur le caractère
imaginé ou « concret » des pratiques discursives en
Afrique noire, le Pr. Diagne a tenté de rendre compte de ce fait massif.
Le recours à l'image et à la dramatisation dans un contexte
d'oralité constitue une caractéristique fondamentale,
liée à des impératifs de stratégies et
d'efficacité dans la transmission des acquis culturels.
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