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Production de domaines recombinants PRODH en vue de l'analyse structurale & Caractérisation de la région 51-160 de la protéine KIN17 humaine par RMN et Modélisation Moléculaire

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par Ludovic Carlier
Université de Rouen - Doctorat de biologie structurale 2006
  

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CHAPITRE 3

Stratégie d'étude par RMN et Modélisation

Moléculaire du domaine K2

La radiocristallographie et la Résonance Magnétique Nucléaire sont à ce jour les deux

techniques qui permettent d'obtenir la structure 3D d'une protéine à l'échelle atomique. Comparée à la RMN, les avantages principaux de la radiocristallographie sont d'une part, la précision de l'information obtenue et d'autre part, l'accès à des masses moléculaires élevées

(> 200 kDa). Il en découle que la grande majorité des structures publiées sont résolues par cette technique moins restreinte, et souvent moins coûteuse en terme de temps d'interprétation des données. La spectroscopie de RMN n'est donc, à priori, pas la méthode de choix pour déterminer la structure tridimensionnelle d'une protéine. Cependant, elle est le seul recours lorsque l'obtention d'un monocristal ou la détermination des phases est impossible. Sa principale qualité se situe dans l'étude des dynamiques moléculaires et d'interactions entre les molécules, étape clef de l'exploration des relations structure activité. Ces quinze dernières années ont fait l'objet d'importants développements techniques et méthodologiques qui rendent

la spectroscopie de RMN plus efficace dans la résolution de structures macromoléculaires. Ces progrès ont notamment visé à améliorer la résolution et la sensibilité de la technique.

La fréquence de résonance du proton, qui traduit l'intensité des aimants supraconducteurs, peut atteindre à présent jusqu'à 950 MHz. L'augmentation de résolution qui

en découle a été accompagnée par l'apparition de sondes de mesure, à une température proche

de celle de l'hélium liquide (cryosondes), qui offrent un gain de sensibilité d'un facteur 2 à 4

comparée aux sondes classiques. Ces grandes avancées technologiques n'auraient cependant

pas été suffisantes sans le développement, de séquences RMN 3D et 4D (Marion et al., 1989 ; Clore & Gronenborn, 1991), et de méthodes de marquage(s) isotopique(s) des noyaux 15N, 13C,

et 2D (Redfield et al., 1989 ; Xu et al., 1999), qui permettent l'étude structurale de

biomolécules de taille de plus en plus importante. Parmi ces progrès méthodologiques, figure notamment la spectroscopie TROSY (Transverse Relaxation Optimized spectroscopY) (Pervushin et al., 1997) utilisée à hauts champs pour des protéines de masse supérieure à

20 kDa, et dont la combinaison à un marquage au deutérium 2D, apporte un gain considérable

en résolution et en sensibilité. En amont du calcul de la structure, l'émergence de programmes d'attribution automatique ou semi-automatique, des résonances (Zimmerman et al., 1997), ou

des pics nOe (Nilges et al., 1997), rend la collecte des contraintes structurales RMN moins lourde, et donc moins coûteuse en temps. L'application de l'ensemble de ces développements permet aujourd'hui de trouver dans la littérature des reports d'attribution de protéines de plus

de 80 kDa (Tugarinov et al., 2004), ainsi que des structures tridimensionnelles de protéine de

48 kDa résolues par RMN (Williams et al., 2005). Cela étant, pour des protéines de cette taille,

les moyens employés en termes de production d'échantillons (nécessité de différents marquages spécifiques et onéreux), temps d'enregistrement des expériences, et temps d'interprétation des données, deviennent alors considérables.

Stratégie générale de l'étude structurale de K2 par RMN et Modélisation Moléculaire

La stratégie adoptée pour caractériser la structure d'une protéine par spectroscopie de

RMN et Modélisation Moléculaire dépend de sa masse moléculaire, ainsi que des outils d'analyse et de traitement à disposition du structuraliste. Le domaine K2 de KIN17 est une protéine de 111 acides aminés, que l'on peut qualifier de taille moyenne pour une étude par RMN. Les différentes étapes de la méthodologie employée pour résoudre la structure de K2 sont schématisées en Figure 3.1, et sont détaillées dans ce chapitre.

Préparation des échantillons

de protéine marquée 15N, et

15N / 13C

Attribution des raies de résonance de la protéine

Détermination de la topologie

- chaîne principale

- chaînes latérales

- déplacements chimiques

- nOe 1H-1H caractéristiques des structures secondaires

- constantes de couplage 3JHN-Há

- nOe hétéronucléaire 1H-15N

- vitesses d'échange 1H-2D

Calcul de la structure par Modélisation

Moléculaire sous contraintes RMN

- attribution automatique des nOe

- dynamique moléculaire sous CNS

Recueil des contraintes structurales

- nOe 1H-1H

- angles dièdres et

- liaisons hydrogène

Structure 3D

Figure 3.1 : Résumé des principales étapes de la stratégie d'étude structurale du domaine K2

1) Méthode d'attribution des raies de résonance

Après avoir préparé un échantillon de protéine pur, concentré, et stable, l'enregistrement des expériences RMN peut débuter. Les informations et contraintes structurales ne peuvent être directement extraites des spectres RMN. Il est tout d'abord nécessaire de déterminer les déplacements chimiques de chacun des atomes de la biomolécule. Le choix de la stratégie à employer pour attribuer les raies de résonance est dicté par la taille de la protéine étudiée. Pour une protéine de 111 résidus comme le domaine K2, l'attribution peut être menée par

deux méthodes distinctes qui dépendent du type de marquage isotopique de l'échantillon.

La première de celles-ci est basée sur l'enregistrement d'expériences 3D hétéronucléaires de type 15N-TOCSY-HSQC et 15N-NOESY-HSQC. L'attribution des résonances 1H et 15N est alors réalisée selon la stratégie décrite dans l'ouvrage de Wüthrich (Wüthrich, 1986) qui repose sur les couplages homonucléaires scalaire et dipolaire 1H-1H. Cette méthode est généralement applicable à des protéines contenant jusqu'à 130 acides aminés, et présente l'avantage de ne nécessiter qu'un simple marquage 15N. Toutefois, pour

des polypeptides de cette taille, qui adoptent une structure tertiaire, ce type de stratégie basée

sur l'identification du nOe présente un caractère ambigu. De plus, dès 100 résidus, l'augmentation de la taille peut conduire à une réduction de l'efficacité du transfert TOCSY

1H-1H, qui engendre une diminution du nombre de résonances, et notamment dans les régions

structurées en hélice où les constantes de couplage 3JHN-Há sont faibles. C'est le cas de la protéine K2 où la quantité d'information recueillie sur le spectre 15N-TOCSY-HSQC est insuffisante pour envisager l'attribution complète des fréquences 1H et 15N par cette stratégie.

Il existe pour les protéines doublement marquées 15N / 13C une attribution séquentielle alternative basée uniquement sur des transferts de cohérence via les couplages scalaires homonucléaires et hétéronucléaires. La méthode repose sur l'enregistrement d'une combinaison d'expériences 3D hétéronucléaires de double ou triple résonance qui corrèlent chacune 2 ou 3 types de noyaux différents. Cette stratégie, utilisée pour attribuer l'ensemble des résonances de la chaîne principale de la protéine K2, est présentée dans le paragraphe

suivant.

1.1) Attribution des carbones de la chaîne principale et des 13Câ

1.1.1) Stratégie générale

Les expériences 3D de triple résonance utilisées classiquement pour l'attribution du squelette d'une protéine doublement marquée sont, pour la plupart d'entre elles, basées sur le même principe : la corrélation du proton amide d'un résidu i avec respectivement, l'azote qui

le porte, et un carbone Ci (CO, Cá, ou Câ) du résidu précédent et/ou du même résidu. Ces corrélations, dépendant du chemin de cohérence sélectionné, se font par le transfert successif

de l'aimantation à travers plusieurs liaisons covalentes via des couplages scalaires 1,2J

relativement élevés (1JC-C, 1JC-N, 1JH-N, 1JH-C, 2JC-N, et 2JC-C). Les six expériences 3D couramment utilisées pour l'attribution complète des noyaux 1HN, 15N, 13CO, 13Cá, et 13Câ sont : HNCA, HN(CO)CA, HNCO, HN(CA)CO, CBCANH, et CBCA(CO)NH (Pour revues : Cavanagh et al., 1996 ; Sattler et al., 1999 ; Kanelis et al., 2001). Le nom de ces expériences indique les noyaux qui sont impliqués dans les chemins de cohérence suivis. Les noyaux mis entre parenthèses ne sont pas édités en fréquence et servent uniquement à relayer l'aimantation. On peut classer ces six expériences en deux catégories distinctes :

- La première corrèle le groupement amide du résidu i avec les carbones 13C du résidu i-1,

et permet ainsi d'obtenir les déplacements chimiques du triplet (Ni ; HN ; C ).

i i-1

- Dans la seconde catégorie, le groupement amide du résidu i est relié aux carbones 13C

du résidu i et du résidu i-1. L'information obtenue est alors double, et les déplacements

chimiques recueillis constituent le quadruplet (Ni ; HN ; C

; C ).

i i-1 i

La combinaison de ces deux types d'expériences peut donc permettre de déterminer

sans ambiguïté les déplacements chimiques des carbones 13CO, 13Cá, et 13Câ des résidus i et

i-1 relatifs à chaque groupement amide. Il est alors possible de connecter les résidus deux à deux en comparant les valeurs de déplacements chimiques Ci des uns aux valeurs de Ci-1 des autres (Figure 3.2). Finalement, le rapprochement de cette attribution séquentielle à la séquence primaire est initié en recherchant les acides aminés particuliers qui présentent des valeurs de déplacement chimique caractéristiques. C'est le cas de la glycine qui ne possède

pas de Câ, et des résidus thréonine, sérine et alanine, dont les valeurs de déplacement

chimique de Cá et Câ sont spécifiques.

Liste de déplacements chimiques (Ni ; HNi ; Ci-1 ; Ci)

C C

N C C N C C

C C

N C C N C C

C C

N C C N C C

H H O H H O

H H O H H O

H H O H H O

 

C

 
 

C

 
 

C

 
 

C

 
 

C

 
 

C

 

N

C

C

N

C

C

N

C

C

N

C

C

N

C

C

N

C

C

H

H

O

H

H

O

H

H

O

H

H

O

H

H

O

H

H

O

C C C

C C C

N C C N

C C N

C C N

C C N

C C N C C

H H O H

H O H

 

i

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

i+6

 

C

 
 

C

 
 

C

 
 

C

 
 

C

 
 

C

 
 

N

C

C

N

C

C

N

C

C

N

C

C

N

C

C

N

C

C

 

H

H

O

H

H

O

H

H

O

H

H

O

H

H

O

H

H

O

 

H O H

H O H

H O H H O

Figure 3.2 : Principe de l'attribution séquentielle basée sur l'enregistrement d'expériences 3D

i

de triple résonance 1H, 15N, 13C. Chaque groupement amide (HNi ; NH ) est associé aux triplets

de déplacements chimiques (13COi ; 13Cái ; 13Câ ) et (13CO

; 13Cá

; 13Câ

) relatifs aux

i i-1

i-1

i-1

résidus i, et i-1. Les connexions de la séquence peptidique sont retracées résidu par résidu en comparant les valeurs de déplacements chimiques 13Ci aux valeurs de 13Ci-1 triplet par triplet.

Les valeurs de déplacement chimique des noyaux 13CO, 13Cá, et 13Câ sont respectivement déterminées, par les couples d'expériences HNCO et HN(CA)CO, HNCA et HN(CO)CA, CBCANH et CBCA(CO)NH. Ces expériences s'interprètent par paire et chaque couple fournit un chemin d'attribution potentiel.

1.1.2) Description des expériences 3D triple résonance

Les séquences d'impulsion des expériences 3D de triple résonance utilisées pour l'attribution séquentielle sont toutes du même type : la séquence débute par un transfert de polarisation de type INEPT (Insensitive Nuclei Enhanced by Polarisation Transfert) du proton

1H vers l'hétéroatome (15N ou 13C) qui le porte (Figure 3.3). L'aimantation évolue ensuite en

fonction de différents couplages scalaires et du déplacement chimique 13Ci avant d'être transférée vers le noyau amide 15NH via le couplage 15N-13Cá ou 15N-13CO. Finalement, un

transfert de polarisation de type INEPT-inverse permet de détecter l'aimantation sur le noyau

amide 1HN.

J

1

C-H

(130 Hz)

J

1

X-H,

13CO

13Cá

1

1JN-CO

2

1JN-H (90 Hz)

2JX-H, ...

13Câ

JN-Cá ,

JN-Cá

1JN-H (90 Hz)

1HN/á/â

INEPT

15NH 13

C

13 Ci

á/â

15NH

INEPT-inverse

1HN

(t1) (t2) (t3)

Figure 3.3 : Représentation schématique du transfert de l'aimantation dans une expérience

3D triple résonance de type HNCA, HN(CO)CA, HNCO, HN(CA)CO, CBCANH, ou

CBCA(CO)NH.

a) Attribution des Cá

L'expérience HNCA corrèle le groupement amide au carbone Cá via le couplage scalaire 15N-13Cá. Sur les spectres correspondants, deux pics peuvent apparaître par résidu :

une première corrélation du groupement amide avec le Cái, et une seconde avec le Cái-1

(Figure 3.4). Ceci s'explique par les valeurs de constante de couplage 1JN-Cá (11 Hz) et 2JN-Cá

(-7 Hz) qui sont du même ordre de grandeur. La différence d'intensité des deux pics, due au

fait que |1JN-Cá| > |2JN-Cá|, pourrait permettre de distinguer le déplacement chimique provenant

du Cái, de celui du Cái-1. Il est cependant préférable de vérifier une telle attribution à l'aide de l'expérience HN(CO)CA complémentaire. Celle-ci corrèle le groupement amide au seul carbone Cá-1 en deux étapes via le carbonyle 13COi-1 non édité. La différence de constante de couplage 1JN-CO (15 Hz) et 2JN-CO (1 Hz) permet d'orienter sélectivement l'aimantation vers le

13COi-1, puis vers le Cái-1 via la liaison 1JCO-Cá (55 Hz).

Ces deux expériences fournissent un premier chemin d'attribution séquentielle et pourraient suffire à connecter tous les résidus deux à deux. Cependant, pour la majorité des acides aminés, les déplacements chimiques de Cá ne sont pas caractéristiques, et ne permettent une attribution sans ambiguïtés. De plus, le recouvrement des pics de corrélation dans les régions encombrées des spectres peut induire une incertitude sur certaines valeurs de

déplacement chimique de Cá.

HN(CO)CA

HNCA

 
 

H

O

H

H

O

 

H

O

H

H

O

A)

 

C

C

N

C

C

 

C

C

N

C

C

 

H

C

H

H

C

H

H

C

H

H

C

H

13Cá

B)

X-1

Y-1

15N

13Cá

CáY

X Y-1

X-1

15N

HX HY

NY

NX

1HN

HX HY

NY

NX

1HN

Figure 3.4 : Expériences 3D de triple résonance utilisées pour l'attribution des 13Cá d'une protéine. A) Schéma du transfert de l'aimantation dans les expériences HN(CO)CA et HNCA.

Les noyaux édités en fréquence sont indiqués par des cercles noirs, alors que ceux uniquement relayés, sont indiqués par des cercles blancs. B) Exemple illustré de spectres HN(CO)CA et HNCA correspondants à un segment de 2 résidus consécutifs X-Y ; mise en évidence de la connectivité séquentielle.

b) Attribution des CO

Selon le même principe, les expériences HNCO et HN(CA)CO procurent les corrélations entre les résonances 1HN et 15NH et les 13CO intra- et inter-résidus (Figure 3.5). L'expérience HNCO fournit uniquement une corrélation avec le carbonyle 13COi-1 via la constante de couplage 1JN-CO. La HN(CA)CO utilise les couplages scalaires 1JN-Cá, 2JN-Cá, et

1JN-CO pour relier le 13COi et le 13COi-1 au groupement amide via le noyau (CA) non édité. A

l'instar de l'expérience HNCA, l'intensité du pic inter-résidu est généralement plus faible que celle du pic intra-résidu du fait que |1JN-Cá| > |2JN-Cá|.

Alors que la HNCO est l'expérience de triple résonance la plus sensible, la HN(CA)CO est la moins sensible. Toutefois, il existe d'autres expériences, comme la (HCA)CO(CAN)NH, qui permettent d'obtenir les corrélations des 13CO intra- et inter-résidus,

et qui sont plus sensibles que la HN(CA)CO. Cependant, la quantité d'information présente

sur les spectres n'est pas toujours suffisante pour retracer les connexions de la chaîne

peptidique résidu par résidu. D'autre part, la dispersion des déplacements chimiques des

carbonyles étant faible (de l'ordre de 10 ppm), le risque d'ambiguïtés et de recouvrement spectral en est plus important. Ces deux types d'expériences ne constituent donc pas le couple privilégié permettant l'attribution séquentielle, mais apportent cependant une information supplémentaire pour lever d'éventuelles ambiguïtés.

HNCO

HN(CA)CO

 
 

H

O

H

H

O

 

H

O

H

H

O

A)

 

C

C

N

C

C

 

C

C

N

C

C

 

H

C

H

H

C

H

H

C

H

H

C

H

13CO

COX-1

13CO

COX-1

COY-1

B)

15N

COX

COY-1

COY

15N

HX HY

NY

NX

1HN

HX HY

NY

NX

1HN

Figure 3.5 : Expériences 3D de triple résonance utilisées pour l'attribution des 13CO d'une protéine. A) Schéma du transfert de l'aimantation dans les expériences HNCO et HN(CA)CO. Les noyaux édités en fréquence sont indiqués par des cercles noirs, alors que ceux uniquement relayés, sont indiqués par des cercles blancs. B) Exemple illustré de spectres HNCO et HN(CA)CO correspondants à un segment de 2 résidus consécutifs X-Y ; mise en évidence de la connectivité séquentielle.

c) Attribution des Câ

Les expériences CBCA(CO)NH et CBCANH sont sans aucun doute les expériences majeures dans la stratégie d'attribution. Elles fournissent les mêmes informations que le couple HN(CO)CA et HNCA et de plus, mettent en évidence les corrélations du groupement amide avec les 13Câ intra- et inter-résidus (Figure 3.6). Outre l'apport d'une information de fréquence supplémentaire, la connaissance du déplacement chimique du 13Câ permet une identification partielle du type de résidu, et de relier les chaînes latérales à l'attribution séquentielle du squelette.

Les deux expériences débutent de la même façon : après transfert de l'aimantation des

protons aliphatiques vers leur carbone, l'aimantation provenant du 13Câ est transférée au 13

via la constante de couplage 1JCá-Câ (35 Hz). Elle est ensuite orientée sélectivement vers le

15NH pour la CBCANH, ou vers le 13CO (puis vers le 15NH) pour la CBCA(CO)NH. Au final, l'expérience CBCANH fait apparaître les corrélations du groupement amide avec les noyaux

13Cá et 13Câ des résidus i et i-1, et la CBCA(CO)NH procure uniquement les corrélations avec

les noyaux 13Cá et 13Câ du résidu i.

CBCA(CO)NH

CBCANH

 
 

H

O

H

H

O

 

H

O

H

H

O

A)

 

C

C

N

C

C

 

C

C

N

C

C

 

H

C

H

H

C

H

H

C

H

H

C

H

13Cá/â

B)

X-1

X-1

HX HY

Y-1

Y-1

1HN

15N

NY NX

13Cá/â

CâX

X-1

CáX

X-1

HX HY

Y

Y-1

CáY

Y-1

1HN

15N

NY NX

Figure 3.6 : Expériences 3D de triple résonance utilisées pour l'attribution des 13Câ d'une protéine. A) Schéma du transfert de l'aimantation dans les expériences CBCA(CO)NH et CBCANH. Les noyaux édités en fréquence sont indiqués par des cercles noirs, alors que ceux uniquement relayés, sont indiqués par des cercles blancs. B) Exemple illustré de spectres CBCA(CO)NH et CBCANH correspondants à un segment de 2 résidus consécutifs X-Y ; mise

en évidence des connectivités séquentielles.

1.2) Attribution des protons Há et Hâ

Les 3 couples d'expériences décrits précédemment ne sont pas toujours suffisants pour reconstituer l'ensemble de la chaîne peptidique. En effet, certains inconvénients inhérents à l'analyse d'une protéine par RMN comme le recouvrement spectral, et la dégénérescence partielle du signal, nuisent à la qualité et à la quantité d'information présente sur les spectres,

et ne permettent généralement pas de relever la totalité des déplacements chimiques 13Cá,

13Câ, et 13CO des résidus i et i-1 relatifs à chaque groupement amide. L'attribution

séquentielle peut cependant être complétée et vérifiée à partir du déplacement chimique 1

fournit par les expériences 3D HNHA et HBHA(CO)NH.

L'expérience HNHA (Vuister & Bax, 1993) est classiquement utilisée pour corréler le

groupement amide (1HN ; 15NH ) au seul proton 1Há

intra-résiduel. Cette expérience de double

i i i

résonance 1H, 15N ne nécessite qu'un échantillon de protéine simplement marquée 15N. Cependant, l'intensité des pics observés sur les spectres est proportionnelle à la constante de couplage 3JHN-Há, et pour des valeurs faibles, il est parfois difficile d'observer une tache de corrélation. Cet inconvénient ne se retrouve pas avec l'expérience triple résonance HBHA(CO)NH (Grzesiek & Bax, 1993), qui permet de relier chaque groupement amide aux noyaux 1Há et 1Hâ du résidu précédent (Figure 3.7). En effet, cette expérience, plus sensible

que la HNHA, est tout à fait comparable à la CBCA(CO)NH et met en jeu un transfert de

l'aimantation, via des couplages scalaires forts, de la chaîne latérale i-1 au groupement amide

i via le noyau 13COi-1 non édité.

La combinaison des expériences HNHA et HBHA(CO)NH permet donc d'identifier le déplacement chimique des protons 1Há des résidus i et i-1 relatifs à chaque groupement amide, et ainsi de consolider l'attribution séquentielle. Le déplacement chimique des protons

Hâi-1, dont l'ordre de grandeur fournit une indication du type d'acide aminé, peut également

être utilisé pour contrôler l'attribution.

HBHA(CO)NH

1Há/â

Hâ2i-1

Hâ1i-1

H O

A) C C

H C H

H H O

N C C B)

H C H

i-1

15N

NHi

HNi

1HN

Figure 3.7 : Attribution des protons 1Há et 1Hâ avec l'expérience 3D de triple résonance HBHA(CO)NH. A) Schéma illustrant le transfert de l'aimantation : les noyaux édités en fréquence sont indiqués par des cercles noirs, et ceux uniquement relayés, sont indiqués par

des cercles blancs. B) Illustration des corrélations observables sur un spectre HBHA(CO)NH

pour un groupement amide i.

1.3) Attribution des chaînes latérales

1.3.1) Description des expériences 3D HCCH-COSY et HCCH-TOCSY

Les expériences utilisées pour l'attribution des chaînes latérales sont généralement des expériences 3D de double résonance 1H et 13C. C'est le cas de la HCCH-COSY, et de la HCCH-TOCSY, qui permettent d'identifier les protons et carbones des chaînes aliphatiques et aromatiques (Kay et al., 1993 ; Majumdar et al., 1993) . Ces deux expériences peuvent être interprétées comme des 2D 1H-1H COSY et TOCSY, et la troisième dimension disperse l'information selon la fréquence du carbone 13C. Les chemins de cohérence suivis sont

cependant très différents de ceux observés dans des expériences 2D homonucléaires 1H.

Ainsi, la séquence d'impulsions HCCH-TOCSY contient un motif TOCSY 13C-13C pendant lequel l'aimantation est transférée le long de la chaîne carbonée (Figure 3.8). Comparé au TOCSY classique 1H-1H basé sur les constantes de couplage 2JH-H et 3JH-H (4-10 Hz), ce type

de transfert est bien plus efficace car il repose sur le couplage fort 1JC-C (35-55 Hz). Il en est

de même pour le transfert COSY 13C-13C de l'expérience HCCH-COSY qui est basé sur cette même constante de couplage 1JC-C. La bonne sensibilité de ces expériences s'explique également par des transferts de cohérence rapides entre les noyaux 1H et 13C via la constante

de couplage 1JC-H (125-250 Hz).

HCCH-TOCSY

1H i

i

H

A) H

N H H H

C C C C B)

Hâi

Hái

13C

á â ã ä

Cãi

O C H H H

Hái

Hãi 1H

Cái

Figure 3.8 : Attribution des noyaux 1H et 13C des chaînes latérales aliphatiques et aromatiques. A) Description du transfert de l'aimantation dans une expérience 3D de double résonance HCCH-TOCSY. Les noyaux édités en fréquence sont indiqués par des cercles noirs

et le transfert TOCSY 13C-13C est indiqué par un trait ondulé. B) Exemple illustré de spectre HCCH-TOCSY. Mise en évidence du système de spin de 2 protons Há et Hã appartenant au même résidu et respectivement portés par les carbones Cá et Cã.

1.3.2) Attribution des chaînes latérales aliphatiques

Les fréquences de résonance des noyaux 1H et 13C de chaîne latérale aliphatique se déterminent à partir des spectres HCCH-TOCSY et HCCH-COSY édités sur la région

aliphatique. Dans l'optique d'obtenir des spectres de bonne qualité, il est préférable

d'enregistrer ces 2 expériences sur un échantillon de protéine doublement marquée 15N / 13C, préalablement lyophilisé, et repris dans 100 % de D2O. Les valeurs de déplacement chimique

de 13Cá, 13Câ, 1Há et 1Hâ servent de point de départ pour identifier les autres résonances

aliphatiques de chaîne latérale.

1.3.3) Attribution des chaînes latérales aromatiques

Les raies de résonance des protons et carbones de chaîne latérale aromatique s'attribuent en deux étapes. Dans un premier temps, les systèmes de spin aromatiques se déterminent à partir de l'expérience HCCH-TOCSY, éditée sur la région aromatique, et enregistrée sur un échantillon doublement marqué en solvant D2O. Les valeurs de déplacement chimique 13C des cycles aromatiques sont spécifiques du type d'acide aminé, ils permettent ainsi la distinction entre les différents cycles. L'attribution de ces systèmes se réalise ensuite en recherchant les nOe intra-résiduels qui corrèlent les noyaux 1Há et 1Hâ aux noyaux 1H aromatiques sur le spectre 13C-NOESY-HSQC, édité sur la région aliphatique et enregistré sur le même type d'échantillon.

Dans le cas du domaine K2, les expériences 3D HCCH-COSY et HCCH-TOCSY suffisent pour identifier la quasi-totalité des résonances aliphatiques et aromatiques. Cependant, la forte similarité de déplacement chimique de certains types de noyaux aliphatiques 1H et 13C induit généralement la présence de nombreuses zones de recouvrement

sur les spectres, qui ne permet pas toujours une attribution sans ambiguïté. Pour une protéine

de cette taille, la stratégie peut alors consister à enregistrer d'autres expériences de type 3D ou

4D, qui corrèlent les noyaux 1H ou 13C aliphatiques au groupement amide du résidu suivant

(Grzesiek et al., 1993 ; Logan et al., 1993).

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