3 - Méthodologie de l'étude
3.1. Contexte et participants
3.1.1. L'Office central de la Coopération à
l'École 2
L'Office central de la Coopération à
l'École3 est une association fondée en 1928,
appartenant aux mouvements d'éducation populaire nés à la
suite de la Première Guerre mondiale. Il promeut des valeurs humanistes
fondées sur la coopération économique et sociale. A
l'origine créé pour permettre la réalisation de projets
nécessitant des moyens financiers, l'OCCE a évolué au
cours de son histoire. Il s'est ainsi progressivement approprié une
dimension pédagogique, et tente, depuis quelques années,
d'affirmer sa qualité de mouvement pédagogique.
Reconnu d'utilité publique en 1968, il est devenu
à cette date association partenaire de l'École. Depuis 2001, une
convention pluriannuelle d'objectifs fixe les termes de ce partenariat avec le
Ministère de l'Éducation nationale et de la Jeunesse, qui
s'articule autour de trois ambitions :
- Une ambition pédagogique : la réussite scolaire
de tous
- Une ambition républicaine : le développement du
parcours citoyen
- Une ambition pour les alliances éducatives : la
formation et l'accompagnement des acteurs
de l'éducation
Pour permettre à l'OCCE de mener à bien les
missions qui lui sont confiées, le Ministère de
l'Éducation nationale et de la Jeunesse s'engage à fournir les
personnels nécessaires. Les premiers animateurs recrutés, dans
les années 1950, étaient ainsi mis à disposition de
l'OCCE4. Puis, le statut de ces personnels a changé en 1987,
donnant lieu à des détachements, gérés
administrativement par la fédération, statut
généralisé depuis 2008. En contrepartie de ces
évolutions et en tant que ministère
2 Les informations générales
relatives au contexte de l'étude ont été obtenues du fait
de notre proximité avec ce terrain. Elles proviennent des textes qui
régissent le fonctionnement associatif, de présentations à
destination du grand public ainsi que d'échanges menés avec des
membres élus et salariés de l'OCCE.
3 OCCE : Office Central de la Coopération
à l'École | (occe.coop)
4 L'ensemble des données sur la partie
historique, les mutations idéologiques de l'organisation et
l'évolution du statut des animateurs provient d'un mémoire
rédigé par Jean-François VINCENT, Président de la
fédération nationale OCCE de 2001 à 2008, pour le Centre
d'Etudes Sociologiques du Travail et de l'Entreprise, Conservatoire National
des Arts et Métiers, document aimablement mis à notre disposition
par son auteur.
26
de tutelle, le Ministère de l'Éducation
nationale et de la Jeunesse contribue depuis financièrement aux
activités de l'OCCE par le versement d'une subvention tout au long de la
durée de la convention pluriannuelle. Un dialogue de partenariat,
mené chaque année aux niveaux national et académique,
permet de faire état des travaux engagés et de leur
évolution. La motion d'orientation fédérale, si elle
discutée par les adhérents, tient compte des objectifs
fixés par la convention pluriannuelle d'objectifs.
L'OCCE est habilité à intervenir auprès
de tous les acteurs du système éducatif, directement dans les
classes avec les élèves, mais aussi dans les plans de formation
académiques, départementaux et de circonscription. Par ailleurs,
outre les partenariats institutionnels (DSDEN, INSPE, CANOPE), l'OCCE tisse des
partenariats associatifs, au niveau national comme avec le Collectif des
Associations Partenaires de l'École (CAPE) et au niveau local.
En tant que mouvement pédagogique laïc, l'OCCE
adresse ses actions à tous les niveaux de l'école publique, de la
maternelle au lycée, ainsi qu'aux acteurs de l'École et autour de
l'École (enseignants, parents d'élèves, services
périscolaires, équipes de circonscription, DSDEN...). Les
écoles et établissements qui le souhaitent peuvent adhérer
à l'association départementale pour bénéficier de
son accompagnement ainsi que de la possibilité de gérer une
coopérative scolaire. Les élèves et adultes
adhérents sont appelés coopérateurs. Pour l'année
2021-2022, plus de cinq millions d'élèves et enseignants sont
ainsi coopérateurs à l'échelon national, essentiellement
dans le premier degré.
Depuis quelques années, l'OCCE cherche à se
doter d'une caution scientifique. Un partenariat avec des chercheurs en
sciences sociales et en sciences de l'éducation a été
développé en ce sens. La motion d'orientation mentionne la
création d'un conseil scientifique, ainsi que l'appui du travail de
chacun sur les ressources produites dans le cadre d'un
Observatoire/Conservatoire des pratiques coopératives. Ce dernier,
créé sur le modèle de la plate-forme
Néopass'action, en partenariat avec l'Institut français de
l'éducation, se veut une ressource pour la formation des acteurs de
l'Éducation nationale.
3.1.2 Le fonctionnement de la fédération OCCE
Le siège fédéral regroupe les dirigeants
au niveau national : le président fédéral ainsi que son
conseil d'administration, composé de bénévoles
élus, bénéficient d'une décharge associative
partielle ou totale pour assurer leurs missions. Le président
fédéral assume également la fonction
27
d'employeur pour l'ensemble des salariés,
administratifs et animateurs pédagogiques, qui contribuent à
l'accomplissement des missions portées par la
fédération.
La fédération est représentée dans
chaque département par le biais d'une association départementale
OCCE autonome. Chaque association départementale (AD) dispose d'un ou
plusieurs salariés ainsi que d'un conseil d'administration
constitué de bénévoles issus du milieu de l'enseignement.
Chaque AD, affiliée à la fédération nationale,
bénéficie d'une autonomie de gestion et de décision, qui
lui permet de mettre en oeuvre la motion d'orientation fédérale
en tenant compte des contraintes de son territoire. Elle possède des
statuts qui lui sont propres, déclinaison locale des statuts
fédéraux.
3.1.2.1 Le fonctionnement des associations
départementales
Un animateur pédagogique est mis à disposition
dans chaque AD pour mettre en oeuvre les orientations fédérales
au niveau départemental, en concertation avec le Conseil
d'Administration départemental et en fonction des besoins et des
ressources dont dispose le territoire. Certaines AD bénéficient
également d'un secrétaire-comptable, qui s'occupe de la gestion
administrative et peut seconder l'animateur sur la partie qui concerne les
coopératives scolaires.
Trois missions sont confiées à l'animateur
pédagogique :
- l'accompagnement des mandataires dans la gestion de leur
coopérative scolaire
- l'animation en classe d'actions et de projets
pédagogiques qui visent le développement de la coopération
entre élèves
- la formation des enseignants aux pratiques
coopératives
3.1.2.2 Un échelon intermédiaire : l'Union
régionale
Les départements se regroupent
régulièrement dans des ensembles géographiques plus
vastes, appelés « Unions régionales » (UR), qui
correspondent aux académies de l'Éducation nationale. Ces UR
permettent la mutualisation des énergies à un niveau
intermédiaire, facilitant notamment l'organisation
d'événements qui pourraient être lourds à porter
pour une AD seule. C'est le cas de certaines formations longues de plusieurs
jours notamment. L'organisation de l'UR permet également de mettre
à disposition du territoire davantage de ressources, variées, au
bénéfice des partenaires institutionnels au niveau
académique. Enfin, c'est à cet échelon que s'effectue le
dialogue de partenariat de proximité, de manière annuelle, en
complément du dialogue national que la fédération
réalise avec le Ministère de l'Éducation nationale et de
la Jeunesse.
28
3.1.3 L'organisation du travail au sein de la
fédération OCCE
Au niveau national, l'OCCE regroupe 102 AD, 120
salariés et plusieurs centaines de bénévoles actifs,
membres de Conseils d'administration départementaux et/ou
régionaux et/ou national. Les bénévoles qui exercent la
fonction de Président d'AD sont responsables des animateurs
pédagogiques qui sont mis à disposition de leur
département, sans pour autant en être les supérieurs
hiérarchiques.
Les animateurs pédagogiques sont directement en lien,
dans le cadre de leur travail, avec le « pôle pédagogie et
formation », constitué d'une équipe de cinq salariés,
dont quatre coordinateurs pédagogiques nationaux et une responsable
nationale du pôle (Figure 2 - Organigramme du fonctionnement de la
fédération OCCE). Cette équipe
définit l'orientation et les priorités à donner dans le
cadre du plan de formation des animateurs.
Figure 2 - Organigramme du fonctionnement de la
fédération OCCE
3.1.4 Le contexte de travail des animateurs participant à
l'étude
La fédération nationale a été
informée de ce travail dans les grandes lignes. Un échange
préalable a permis de s'accorder sur un objectif d'intérêt
commun de cette recherche : faire émerger
29
le travail réel des animateurs en termes de mise en
coopération des publics formés. Il a été
envisagé, selon les conclusions de cette étude, d'élaborer
une grille d'observation/évaluation de fin de formation, à
destination des participants, afin de mesurer le degré de
coopération et voir si celle-ci a fonctionné lors de la
séance. La création d'un cadre de travail commun à tous
les animateurs pédagogiques est une possibilité qui a
été évoquée également. Un suivi
régulier de l'avancée du travail est demandé par la
responsable du pôle pédagogie/formation de la
fédération. Néanmoins, afin de limiter les interactions
entre cette recherche et la vie de l'association, les informations
données lors de ces rendez-vous préservent l'anonymat des
animateurs pédagogiques engagés, ainsi que les
éléments de nature à modifier les comportements respectifs
des uns et des autres. Les constats personnels sont par ailleurs laissés
de côté.
Voici une présentation des animateurs participants
à cette étude et de leur contexte de travail : Animatrice A -
(Anim A)
Enseignante du premier degré, détachée
auprès de l'OCCE pour la 15e année ; expérience
en tant qu'enseignante en pédagogie Freinet ; animatrice dans un
département comptant de nombreuses écoles, elle est en charge des
missions d'ordre pédagogique, un secrétaire-comptable effectuant
les tâches administratives.
Animatrice B - (Anim B)
Enseignante du premier degré, en disponibilité
et embauchée par un contrat de droit privé au titre de la «
convention de l'animation » pour la deuxième année.
Animatrice dans un département qui comporte peu d'écoles et
possède trop peu de ressources pour embaucher un secrétaire, elle
est donc en charge des tâches administratives en plus de ses missions
d'animation en classe et de formation des acteurs de l'Éducation
nationale.
Animatrice C - (Anim C)
Enseignante du premier degré, titulaire du CAFIPEMF
(certification qui reconnaît ses compétences et lui donne le
statut officiel de formatrice au sein de l'Éducation nationale), elle
est détachée auprès de l'OCCE pour sa 5e
année. Ses missions et conditions de travail sont proches de celles de
l'animatrice A, avec cependant un nombre d'écoles supérieur.
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Animateur D - (Anim D)
Enseignant du second degré, détaché
à l'OCCE pour sa 12e année. Il travaille dans un
département doté de peu d'écoles, mais les ressources de
son association départementale permettent d'embaucher des
salariés de droit privé, notamment pour la partie administrative,
en supplément du détachement ministériel. Ainsi,
l'ensemble des tâches dévolues au travail d'animateur sont
partagées entre tous les salariés.
3.2. Contractualisation avec les participants
Afin de recueillir le point de vue des acteurs sur leur
activité, nous avons choisi une approche qualitative, de type
recherche-action. Notre méthodologie s'inscrit dans une démarche
inspirée de la «clinique de l'activité » telle que
définie par (Clot, 2007). Cette approche nous permet, par le biais
d'auto-confrontations simples puis croisées, d'accéder au
réel de l'activité des animateurs tout en leur permettant de le
conscientiser, ouvrant de fait la possibilité, pour eux, d'un
développement professionnel.
Les données issues des différentes captations
sont couplées à une analyse lexicométrique des textes
prescripteurs qui régissent l'activité des animateurs, afin de
mesurer l'écart entre prescription et activité réelle.
Un cadre éthique a été établi entre
les animateurs et nous :
- L'animateur reste libre de se rétracter à tout
moment si la captation ou l'entretien lui semble trop difficile.
- Il a le droit de ne pas répondre à toute
question ou sur tout sujet sur lequel il se sentirait mal à l'aise.
- La confiance est de mise entre l'animateur et nous, ainsi
qu'entre les animateurs dans le cadre des auto-confrontations croisées :
les questions qui sont posées ne portent aucun jugement et ont pour seul
objectif de comprendre les choix du professionnel, tout en lui permettant de
les verbaliser pour mieux se comprendre lui-même.
- Aucun élément, dans la diffusion des
résultats de nos travaux, ne permet de reconnaître l'animateur
dont il est question ; si cela devait advenir, l'autorisation expresse sera
demandée à la personne concernée.
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3.3. Le recueil des données 3.3.1
Données écrites
Notre recherche nous a conduit à approfondir la lecture
de l'ensemble des documents qui sont mis en possession des animateurs
pédagogiques départementaux, à savoir :
- le contrat de travail de l'animateur (il convient de noter
que les contrats varient selon le statut de l'animateur - détaché
ou recruté hors Éducation nationale et selon certaines
déclinaisons locales)
- la Convention collective nationale de l'animation, texte de
loi qui régit la rédaction des contrats de travail des
salariés
- la Convention pluriannuelle d'objectifs (CPO), qui fixe les
conditions de partenariat entre l'OCCE et le Ministère de
l'Éducation nationale et de la Jeunesse
- le projet associatif, qui fixe les priorités de
l'association pour les six ans à venir, soit à l'horizon 2025 en
ce qui nous concerne
- la Motion d'orientation, texte cadre interne,
déclinée du projet associatif, qui fixe pour trois ans les
priorités nationales du mouvement, soit la période 2020/2023
ici
- le projet d'activité de la fédération pour
l'année en cours
- le règlement intérieur de la
fédération
- les statuts fédéraux de la
fédération
Les missions confiées aux animateurs, listées dans
le contrat de travail, sont les suivantes :
- Mise en oeuvre de la Motion d'orientation et du projet
d'activité fédéral
- Mise en oeuvre et suivi des actions pédagogiques
nationales, régionales, académiques et départementales en
cohérence avec les orientations fédérales définies
en Assemblée Générale, suivant un partage optimisé
du temps de travail aux différents niveaux d'intervention pour favoriser
le bon fonctionnement de l'OCCE
- Relations avec les adhérents et partenaires de l'OCCE
- Informations, animations et aides pédagogiques
- Missions de formation
- Mise en oeuvre des conventions académiques
conformément à la Convention pluriannuelle d'objectifs
signée avec le Ministère de l'Éducation nationale et de la
Jeunesse
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- Proposition de création et/ou d'amélioration de
projets pédagogiques coopératifs
Le contrat de travail des animateurs mentionne un statut de
cadre de l'animation, ce qui leur confère une totale liberté
d'action dans l'organisation des tâches qui leur sont confiées.
Ils doivent articuler efficacement leur action et leur temps de travail, en
lien étroit avec le Conseil d'administration de leur OCCE
départemental, lequel décide des orientations prioritaires et du
budget alloué à chacune pour l'année scolaire. A la
lecture du contrat de travail, il apparaît en outre que l'activité
de formation des animateurs est essentiellement cadrée par la motion
d'orientation, le projet d'activité fédéral et la CPO.
Cela est confirmé par d'autres sources de communication internes.
Cependant, nous n'avons pas pu avoir accès au projet d'activité
2021/2022. Pour la suite de notre recherche, nous nous appuierons donc
essentiellement sur les deux textes restants (Motion d'orientation et CPO) pour
obtenir les éléments relatifs à la prescription.
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