Introduction
L'Office central de la Coopération à
l'École est une association fondée en 1928, appartenant aux
mouvements d'éducation populaire nés à la suite de la
Première Guerre mondiale. Ceux-ci revendiquent un modèle social
reconnaissant la capacité de tous à participer à la vie de
la Cité. Créé en milieu scolaire, l'OCCE a initialement
pour but de permettre aux élèves de bénéficier de
fonds pour réaliser des projets dont ils sont les initiateurs. Il s'est
développé au cours du XXe siècle en mettant en
avant l'importance de la coopération entre enfants. Les valeurs
associées : solidarité, développement de l'esprit
critique, engagement citoyen, ouverture aux autres, respect des principes
républicains, sont autant de valeurs fondatrices d'un idéal
sociétal où la réflexion et la prise de décision en
collectif permettraient l'épanouissement des individus autant qu'elles
garantiraient la stabilité d'une société juste,
démocratique et respectueuse de tous et de chacun. Reconnu
d'utilité publique en 1968, l'OCCE est devenu à cette date
association partenaire et complémentaire de l'École. Depuis 1999,
une Convention pluriannuelle d'objectifs fixe les termes de cette collaboration
avec le Ministère de l'Éducation nationale et de la Jeunesse. Une
des missions confiées à l'OCCE réside notamment dans la
formation et l'accompagnement des acteurs de l'Éducation nationale et de
la Jeunesse, afin de développer le parcours citoyen et de participer
à la réussite de tous les élèves, à partir
de modules traitant des principes et des pratiques du travail coopératif
entre élèves et entre adultes. Afin de garantir un accompagnement
qui tienne compte de la spécificité d'un public adulte
professionnel, de cadres théoriques régulièrement
actualisés et des valeurs promues, l'OCCE met aujourd'hui l'accent sur
la professionnalisation des animateurs pédagogiques
départementaux, pour lesquels ces missions de formation sont inscrites
dans le contrat de travail. Pour cette raison, la formation des animateurs
porte pour partie sur la mise en coopération des publics
formés.
Initialement professeur des écoles, ayant par ailleurs
exercé plusieurs années la fonction de directrice d'école,
j'ai sollicité un détachement de la part du Ministère de
l'Éducation nationale et de la Jeunesse afin de me consacrer à
plein temps à la diffusion des valeurs et des pratiques
coopératives en milieu scolaire, dans le cadre associatif de la
fédération OCCE. C'est donc d'abord en tant qu'animatrice
pédagogique du département du Puy-de-Dôme que j'ai
été confrontée aux difficultés que soulève
la mise en coopération de publics professionnels. En effet, dans le
cadre de mes missions, je suis amenée à accompagner des
équipes d'enseignants et à animer des actions de formation
(animations pédagogiques, stages de formation continue), dans lesquelles
la coopération est mise en avant tant dans le contenu que dans les
modalités d'intervention. En particulier, j'ai
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coordonné pendant une année scolaire un
collectif intercatégoriel composé de professionnels de
l'enseignement : enseignants du premier degré, conseiller
pédagogique de circonscription, inspectrice de l'Éducation
nationale et chercheurs/experts issus du monde de la recherche. Ce travail,
conduit selon une méthodologie inspirée de la clinique de
l'activité a permis de produire des ressources destinées à
la formation des enseignants, auxquelles se rajoutait la possibilité de
développement professionnel pour les participants. Les dynamiques en
interaction dans de tels collectifs interrogent fortement la mise en oeuvre de
la coopération et sa réalité, dans un contexte
marqué par l'affirmation de valeurs humanistes. Dans un deuxième
temps, et toujours en tant qu'animatrice pédagogique, c'est dans les
échanges entre pairs, lors de temps de formation
institutionnalisés pour les animateurs, ou lors de moments informels,
que la question de la mise en coopération des publics formés
s'est de nouveau posée. La difficulté à s'accorder sur des
pratiques professionnelles favorisant la coopération m'a amenée
à constater la multiplicité des définitions données
au terme même de « coopération ». Par ailleurs, ces
échanges ont mis en évidence ce qui pourrait apparaître
comme une croyance selon laquelle il existerait une échelle de valeur
des modalités de travail et d'apprentissage, échelle au sommet de
laquelle se trouverait la coopération. Tout se déroule alors,
pour les animateurs avec lesquels j'ai pu aborder la question, comme s'ils se
devaient de mettre en coopération tous les publics avec lesquels ils
travaillent, sans questionner ce que cela signifie, ni les avantages et les
inconvénients que cela comporte.
Or, l'objectif des formations proposées par l'OCCE
n'est pas seulement de promouvoir des valeurs, mais bien de participer à
la professionnalisation des enseignants en leur permettant une réflexion
sur l'intérêt des modalités coopératives en
situation. En pratique, cela reviendrait à penser la formation comme le
résultat d'une composante dont la coopération fait seulement
partie sans en être la fin. A partir de ce constat, j'ai
été amenée à me demander quels sont les principes
qui sous-tendent la prescription relative à la formation des acteurs de
l'Éducation nationale. Comment les animateurs s'emparent-ils donc de
cette prescription, selon leur territoire, leur expérience et leur
propre personnalité ?
C'est à partir de ces premières questions issues
de mon contexte professionnel que j'ai souhaité approfondir, à
travers un travail de recherche, la question de la mise en coopération
des publics formés par les animateurs pédagogiques. Il est
difficile pour l'OCCE d'en avoir une vision précise et c'est la raison
pour laquelle ce travail se propose d'interroger les pratiques de terrain
à partir de l'analyse de l'activité de plusieurs animateurs
pédagogiques, de contextes et expériences
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divers. Cette recherche a donc pour objectif de comprendre ce
que les animateurs font de la question de la coopération en situation de
formation.
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1 - Revue de littérature
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