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La gratuité de l'enseignement primaire dans l'arrondissement de Koutaba: analyse sociologique des obstacles


par Zounka LIKOUSSOU
Université de Dschang - Master  2018
  

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CONCLUSION

D'une manière générale, la question à laquelle répondait ce chapitre est de savoir comment comprendre et interpréter les frais d'APEE en contexte de gratuité de l'enseignement primaire. A partir des réalités concrètes collectées dans l'arrondissement de Koutaba et après analyse, nous validons l'hypothèse selon laquelle : les frais d'APEE traduisent la non-gratuité effective pour les parents d'élèves et des voix de survie du système scolaire primaire pour les directeurs de ces écoles. De ce fait, la gratuité de l'enseignement primaire face aux APEE est égale à un non-évènement pour les parents d'élève55. Notamment avec les frais d'APEE qui ont pris le sillage des frais exigibles d'autres fois et de leurs augmentations dans les écoles primaires de Koutaba. La deuxième partie de ce chapitre présentait l'appropriation des APEE par les responsables des écoles primaires et survie du système scolaire primaire à Koutaba. Les directeurs des écoles primaires ont fait des parents d'élèves leurs partenaires en zones rurales. De même ils utilisent les APEE comme des supports matériels et financiers pour assurer la subsistance des écoles primaires publiques à Koutaba. Le recourt aux élites locales n'est pas de reste. C'est aussi une stratégie pour assurer le fonctionnement des écoles primaires, surtout dans un contexte éducatif traversé par une gratuité qui manque des ressources.

65

55 L'évènement étant la politique de la GEP

CHAPITRE 4 : LA GRATUITE DE L'ENSEIGNEMENT

PRIMAIRE FACE AU MANQUE DE RESSOURCES DANS LES ECOLES PRIMAIRES A KOUTABA

66

INTRODUCTION

Quand l'Etat adopte la politique de la GEP, cela suppose que les charges afférentes lui reviennent. Ainsi il est censé mettre des moyens financiers à la disposition des écoles primaires publiques56. Cela afin de garantir leurs fonctionnements et parallèlement pour que l'école soit effectivement gratuite. Autrement dit, lorsque nous posons une telle problématique sur la table, la réflexion s'oriente vers les conditions de sa faisabilité. C'est-à-dire, les conditions à réunir pour qu'il y ait gratuité de l'éducation dans les faits. Il s'agit notamment des ressources nécessaires : financières, humaines et matérielles etc. Ce chapitre présente les difficultés que rencontre la politique de la GEP relativement au manque et à l'insuffisance des ressources sus-évoquées dans les écoles primaires de Koutaba. D'abord, les difficultés liées au manque et à l'insuffisance des moyens financiers suffisants dans les écoles primaires. Dans sa deuxième partie, le présent chapitre met en exergue le déficit des personnels instituteurs intégrés dans l'arrondissement de Koutaba. La dernière partie ici, porte sur un déficit observé des ressources matérielles dans les établissements scolaires primaires à Koutaba.

1. INSUFFISANCE DES RESSOURCES FINANCIERES DANS LES ECOLES PRIMAIRES

Les ressources sont de véritables moteurs de fonctionnement de tout système. Or la politique de la gratuité du sous-système éducatif camerounais ici à l'honneur, connait

56 Circulaire n°08/B1/144/MINEDUB du 22 AUG 2014 portant modalités d'exécution du budget de fonctionnement des écoles maternelles et primaires.

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d'énorme déficit des ressources financières. Qui se manifeste avec acuité en zones rurales ou mieux en ZEP. Cette partie présente l'insuffisance des ressources financières dans les écoles primaires dans l'arrondissement de Koutaba. Elle s'articule autour des sources de revenus concrètes, et des budgets desdites écoles.

1.1. Les sources de revenu des écoles primaires à Koutaba

En dehors du paquet minimum et du fonctionnement que l'Etat met à la disposition des écoles primaires, les textes prévoient une gamme complexe d'acteurs sociaux qui doivent fournirent à ces écoles tout ce dont elles ont besoin. Mais dans les faits, seuls quelques-uns sont et agissent inlassablement dans les écoles primaires. Il s'agit principalement des parents d'élèves. La commune et les élites agissent aussi sporadiquement.

1.1.1. Les parents d'élèves : partenaires principaux des écoles primaires publiques en zones rurales

Les parents d'élèves sont les principaux partenaires aujourd'hui dans les écoles primaires à Koutaba. Ils sont présents à tous les niveaux. Que ce soit dans le recrutement du personnel et de leurs prises en charge, ou même de la construction des infrastructures et de leur entretien. En effet, 59,07% des instituteurs qui ont tenu les enfants pour le compte de l'année académique 2017/2018 sont payés par les parents d'élèves. Il est presque impossible de penser le fonctionnement de écoles primaires aujourd'hui sans les parents d'élèves. Cela traduit dans les faits le manque d'accompagnement consistant des écoles primaires en contexte dit de gratuité avec les ressources suffisantes. A cet effet, « les parents d'élèves qui sont sensés dire un ouf de soulagement) sont les principaux acteurs qui font fonctionner les écoles primaires. Puisqu'il n'y a pas d'autres solutions pour le moment. Les établissements manquent de tout et le gouvernement ne réagit pas toujours favorablement »57 (Entretien réalisé le 13 Avril avec Jules).

La majorité des directeurs des établissements scolaires primaires avouent que sans les parents d'élèves, les rentrées scolaires seraient presque impossibles dans leurs écoles. Ainsi, pour Paulin : « les élites et les parents d'élèves sont nos sources de

57 Ce en fournissant des ressources de toutes sortes à ces institutions

68

69

revenus. Voilà les deux partenaires qui brillent en zones rurales. Cependant, les parents viennent en premiers ; parce que les élites interviennent quand ils veulent et où ils veulent » (entretien réalisé le 7 Mai 2018 avec Paulin). Ces propos mettent en exergue non seulement le fait que les parents sont devenus les principaux supports des écoles primaires, mais aussi le caractère sporadique des actions des autres acteurs de la CE dans ces institutions.

La GEP a été proclamée en faveur des parents d'élèves. Le fait qu'ils soient désormais les acteurs principaux dans les écoles primaires, traduit d'une certaine manière les difficultés de cette politique. Ils existent dans les zones rurales comme l'arrondissement de Koutaba, d'autres acteurs prioritaires qui doivent fournir les ressources aux écoles primaires. Il s'agit notamment des CTD.

1.1.2. La commune : une appropriation encore insuffisante

« Transferts des compétences sans ressources conséquentes » ; voilà les maitres mots des agents communaux dans l'arrondissement de Koutaba. Bien qu'au courant des besoins criards dans les écoles primaires, la commune de Koutaba agit de manière inattendue. Or en contexte de décentralisation, l'application de la GEP dépend en partie de la consistance et de la régularité de ses interventions dans les écoles concernées. Compte tenu de ce que les contributions statutaires des collectivités territoriales décentralisées sont obligatoires dans les écoles primaires58. Cependant dans cette localité, les actions de la commune se dénombrent au bout des doigts. En effet, « la commune porte de lourdes responsabilités depuis 1996 avec les transferts de compétences. Mais il y a encore des aspects qui freinent ses actions sur le terrain. Notamment l'aspect ressources » (Entretien réalisé le 18 Avril 2018 avec Ousmane). Les actions de la commune sont irrégulières compte tenu de ses nombreuses responsabilités. Les déclarations d'Abdoulaye décrivent les actions communales de la manière suivante :

Depuis la rentrée nous sommes partis voir le maire ; il nous a promis les bancs sans rien donner. Il m'avait promis arranger le bâtiment là (indexant un vieux bâtiment de l'école, rien. [...]il fut une année ou il nous avait donner trois tables bancs. Il est descendu ici à plusieurs reprises ; mais rien. A la rentrée, le toit était déchiqueté. Le maire avait dit qu'on devait refaire le

58 Décret n°2001/041portant organisation des établissements scolaires publics et attribution des responsables de l'administration scolaire

70

toit, mais jusqu'ici, rien. C'est l'APEE qui a couvert ça comme vous voyez là (Entretien réalisé le 18 Avril avec Abdoulaye).

De cette déclaration nous pouvons comprendre que la commune brille par des actes isolés dans les écoles primaires. En plus, faire une doléance à la commune n'est pas d'emblée une cause gagnée. Bien qu'étant au courant des besoins, la commune n'agit pas toujours. En déplorant cette manière avec laquelle la commune mène des actions dans les écoles primaires ; Mohamed affirme que : « l'action de la commune dans mon école est unique depuis pratiquement huit ans que je suis là-bas. La commune est venue uniquement donner les bancs, par le truchement du conseiller qui est du quartier de l'école en question » (Entretien réalisé le 5 Mai 2018 avec Mohamed). Ainsi donc, on peut comprendre que les actions de la commune ne sont pas de nature à garantir la GEP. Quand on analyse d'avantages ses actions, à la limite elles sont politisées. Roger BOULLA MEVA'A et KINKEU George (2016) étaient parvenus à une telle conclusion. Pour eux les acteurs sont parfois à la recherche d'une « visibilité sociopolitique ».

Dans les dispositions légales, les fonds des écoles primaires peuvent venir aussi des dons et des aides effectués par les élites. Ainsi, elles interviennent dans ces institutions. La difficulté se retrouve dans leur mode d'intervention.

1.2. Les fonds des établissements scolaires primaires publics

Cet élément présente une difficulté que rencontre la politique de la GEP ; en liaison aux fonds des écoles primaires publiques.

1.2.1. La caisse des établissements

Les institutions scolaires primaires en contexte de gratuité manque de caisses propres et indépendantes. Il est difficile de penser une institution d'une telle envergure que l'école primaire, sans un fond ou une caisse propre, permanente et opérationnelle. Or c'est une réalité que nous a appris cette étude. Ces institutions fonctionnent sans fonds et sans caisses propres et indépendantes. Les caisses des établissements scolaires ont disparu avec les frais annuels exigibles. Ce qui fait que d'un point de vue des fonds, ces institutions n'ont pas une autonomie financière. Dans cette dynamique, les propos de Stéphane permettent de comprendre que :

Quand avec la gratuité on a suspendu les frais exigibles, ces derniers n'ont plus étés remplacés avec des ressources matérielles et financières conséquentes. Quand on payait par exemple 2500 FCFA, 1000 ou 500 FCFA partaient dans les caisses de l'Etat et le reste

71

l'inspecteur et le directeur s'en chargeaient pour gérer les écoles primaires. Maintenant cet argent n'existe plus. Ce qui fait que les écoles jouent à la survie en se rabattant sur les parents d'élèves. Donc les seules caisses permanentes et opérationnelles dans lesquelles les écoles

primaires retirent de l'argent maintenant sont celles des APEE. (Entretien réalisé le 7 Avril avec Stéphane)

Compte tenu de tout ce qui précède, nous pouvons comprendre que les difficultés de la GEP ont commencé dès son adoption. Notamment avec la suppression des frais qui contribuaient au fonctionnement desdites écoles et cela sans compensation financière conséquente. Ainsi, non seulement les écoles primaires sont sans caisses propres, mais surtout certaines prestations scolaires manquent des fonds nécessaires pour leurs exercices. Ce qui fait qu'en fin de compte tout revient à la charge des parents d'élèves. Dans cette situation, il est difficile de mettre sur pied une école primaire concrètement gratuite. On peut bien parler du « fonctionnement », mais qu'en est-il réellement aujourd'hui dans les écoles primaires en zones rurales ?

1.2.2. Le budget de « fonctionnement » : entre inconsistance et retard

Le budget de « fonctionnement » est un argent que le gouvernement camerounais donne généralement aux institutions scolaires pour l'exercice de leurs activités. Comme son nom l'indique, c'est un fonds destiné au fonctionnement, voire à la bonne marche des écoles primaires. Mais aujourd'hui les écoles primaires connaissent d'énormes difficultés financières à cause de l'inconsistance et du retard qu'accuse ledit argent. En déplorant la corruption et la lenteur administrative dont est victime ledit « fonctionnement », Idriss décrit la voix par laquelle il leur arrive en prenant l'image d'un entonnoir. Il s'exprime en ces termes :

Le « fonctionnement » arrive dans les écoles primaires suivant un canal en forme d'entonnoir. C'est beaucoup d'argent que l'Etat débloque pour distribuer aux écoles primaires à titre de « fonctionnement ». Mais ce qui arrive effectivement entre les mains des directeurs ne peut même pas permettre à une école de passer un trimestre [...]. Quand c'est beaucoup c'est 100 mille FCFA pour une année académique. Je rappelle qu'on donne parfois même 21 mille FCFA. (Entretien réalisé le 18 Avril avec Idriss)

Cette affirmation met en exergue l'insuffisance ou mieux l'inconsistance du budget de « fonctionnement » alloué effectivement aux écoles primaires. Ce malaise, pourrait-on dire est dû aux détournements incessant qui amenuisent ces fonds. Au point

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ou, ce qui arrive entre les mains des directeurs des écoles primaires, n'est pas assez pour qu'ils puissent appliquer les dispositions de la GEP. De même, Alex déclare aussi qu'

Il y a le « fonctionnement » de l'école, c'est vrai mais ça n'aide pas assez. Voilà ici, normalement il fallait que je recrute encore cinq enseignants. J'ai vu que c'est lourd, on a pris quatre. Rien que le petit traitement de 20 mille pour chacun, le « fonctionnement » ne peut même

pas. On nous donne un taux forfaitaire. (Entretien réalisé le 18 Avril avec Alex)

L'inconsistance n'est pas la seule difficulté que nous avons observée sur le terrain avec le « fonctionnement ». A côté, nous avons constaté que le « fonctionnement » est un élément très retardataire dans les écoles primaires à Koutaba. En effet, jusqu'en fin deuxième trimestre début troisième trimestre, lesdites écoles n'avaient pas encore perçu ledit « fonctionnement »59. Un directeur d'école primaire se prononçant sur la question déclare : « je puis même te dire que depuis la rentrée de 2017/2018, on a rien (claquement des mains) jusqu'à l'heure où nous parlons, le « fonctionnement » n'est même pas encore là. Tu auras à passer dans d'autres écoles, on n'a rien ». Du coté des responsables administratifs du système éducatif à Koutaba, « les écoles primaires auront le fonctionnement, ça ne peut pas manquer. Il faut juste attendre un peu »60. Avec ce retard et l'exigence de fonctionnement des écoles primaires, l'éducation de base ne peut pas être gratuite. Les parents continuent d'assumer les charges financières liées à l'éducation de leurs enfants. Encore qu'à cela s'ajoute d'autres blocages à la GEP.

2. LE DEFICIT DES PERSONNELS ENSEIGNANTS INTEGRES DANS LES ECOLES PRIMAIRES

Le déficit est dans ce point, l'absence de proportionnalité entre les instituteurs intégrés et les besoins en enseignants observés dans les écoles primaires. Dans l'arrondissement de Koutaba, on note un déficit réel du personnel enseignant intégrés dans les écoles primaires. Une situation qui ne permet pas à ces écoles de pouvoir garantir aux enfants et à leurs parents une scolarité effectivement gratuite. A l'absence des personnels complets qui émargent dans les caisses de l'Etat, la politique de la gratuité reste un slogan éducatif. Car ne peut être effective. Le déficit du personnel intégré (166) que nous avons constaté dans les établissements scolaires primaires à

59 Deux semaines après la rentrée du troisième trimestre, les écoles primaires n'avaient pas encore perçues le « fonctionnement ».

60 Entretien effectué avec un agent de bureau de l'inspection d'arrondissement d'enseignement primaire et maternel de Koutaba

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Koutaba, obligent parfois les responsables de ces institutions à s'écarter des normes officielles relatives à la GEP.

2.1. Un poids important du financement supporté par les usagers

On observe que, suite aux contraintes macroéconomiques fortes qu'a supportées le pays au début des années 90, il reste des séquelles encore très visibles des défaillances de l'Etat dans la fourniture des services éducatifs. Ainsi, observe-t-on le développement du nombre des maîtres des parents dans les écoles primaires. Ce qui au fond constitue une charge considérable pour les élèves et leurs parents ; et de ce fait une entrave à la gratuité effective de l'éducation de base au Cameroun et dans les zones rurales en particulier. Aucun établissement scolaire primaire aujourd'hui n'a un effectif complet des instituteurs qui émarge dans les caisses de l'Etat. Sur un total de 281 instituteurs qui enseignent dans les établissements scolaires primaires dans l'arrondissement de Koutaba, 166 n'émargent pas dans les caisses de l'Etat. Ce chiffre représente environ 59,07% des personnes qui enseignent dans les écoles primaires publiques au cours de l'année académique 2017/2018 dans l'arrondissement de Koutaba. C'est en réalité un indicateur des charges que supportent les usagers de l'éducation de base dans cette localité. Un poids qui ne permet pas une école véritablement gratuite. Le fait est qu'ils ne sont pas rémunérés par l'Etat, mais par les associations de parents d'élèves et d'enseignants. Une réalité qui alourdie les dépenses qu'effectuent les parents d'élèves dans un contexte éducatif dit de « gratuité ».

Ce phénomène est particulièrement pénalisant pour les familles rurales, généralement plus pauvres, qui doivent payer davantage pour l'éducation de leurs enfants. Cela entrave non seulement la politique de la GEP, mais accentue les inégalités et les facteurs dissuadant les parents de scolariser leurs enfants.

La gratuité dans un tel contexte n'est qu'un slogan éducatif. Les enseignants et les parents d'élèves déplorent d'énormes obstacles à la GEP. A ce sujet, le constat de Benjamin est très clair : « le principal obstacle de la gratuité, c'est le manque du personnel enseignant intégrés » (Entretien réalisé le 9 Avril avec Benjamin). Pour lui, la GEP peut être effective à condition que le personnel intégré soit suffisant dans les écoles primaires. D'autres vont même jusqu'à croire qu'on pourrait « catégoriquement rayer les frais d'APEE du vocabulaire scolaire primaire ». Mais encore faut-il d'abord doter les établissements scolaires primaires des ressources suffisantes.

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2.2. Du personnel intégré dans les écoles primaires : des chiffres peu

satisfaisants

Il est très peu aisé de concevoir une gratuité d'écolage avec des personnels dont peu émarge et dont la majorité sont des MP. Pour donner une visibilité claire des instituteurs intégrés dans les écoles primaires de Koutaba, nous avons réalisé le tableau suivant :

Tableau n° 03 : synthèse du personnel enseignants dans les écoles primaires de Koutaba

Ordre

d'enseignemen t

 

Effectif d'élèves

Personnels enseignants

Total

Emargeant dans

les caisses de
l'Etat

N'émargeant

pas dans les
caisses de l'Etat

H

F

T

H

F

T

H

F

T

Total des

écoles publiques

46

808 4

777 5

158

59

62

56

118

56

11 0

16 6

281

Total des

écoles

catholiques

2

143

164

307

0

0

0

4

2

6

6

Total des

écoles

protestantes

4

156

157

313

0

0

0

7

15

22

22

Total des

écoles privées

islamiques

6

391

425

816

0

0

0

20

5

25

25

Total des

écoles privées

laïques

4

389

380

769

0

0

0

14

8

22

22

Total général

62

916

890

186

62

56

118

101

14

24

356

75

 
 

3

1

4

 
 
 
 

0

1

 

Source : données enquête de terrain (Mars-Mai 2018)

Ce tableau montre que sur 356 instituteurs que comptent les écoles primaires, 75 sont dans le privé. De la même manière, sur 281 instituteurs qu'on rencontre dans les écoles publiques à Koutaba, 166 n'émargent pas dans les caisses de l'Etat. Si on ajoute à ce dernier chiffre, le deuxième, on peut donc comprendre que 241 enseignants du primaire contre 115 sont à la charge des parents d'élèves. Avec ces chiffres la GEP, est compromise et obstruée.

Un autre fait n'est pas à négliger dans ce tableau : les écoles privées en contexte de la GEP. 2205 enfants sont dans les écoles privées, soit 41,10% de leur effectif total dans les écoles primaires à Koutaba. Voilà des charges qui reviennent pratiquement aux parents d'élèves. Le fait est que les écoles privées d'enseignement primaire, ne facilitent pas l'encrage de la politique de la GEP au Cameroun et dans les ZEP singulièrement. D'ailleurs voici ce que pensent certains acteurs de la CE : « la gratuité est une notion constitutionnelle. C'est la loi qui dit que l'école publique primaire est gratuite. Ce qui fait qu'il ne devrait même pas avoir d'école primaire privée. Ça n'a pas de sens ». Cela donne lieu à un poids, deux mesures.

3. LA PROBLEMATIQUE DU PAQUET MINIMUM

Cette partie traite des obstacles à la GEP en rapport avec le fameux paquet minimum. Ce paquet qui aujourd'hui constitue avec le « fonctionnement », l'essentiel des ressources matérielles et financières que l'Etat met à la disposition des écoles primaires. La problématique du paquet minimum est telle que désormais, il n'est plus que le minimum de lui-même.

3.1. Le paquet minimum toujours en retard

Le paquet minimum est un ensemble de matériels didactiques que l'Etat met souvent à la disposition des écoles primaires pour le démarrage de l'année académique. Aujourd'hui la disponibilité de ce paquet est très problématique. Jusqu'au mois de mai, les écoles primaires de Koutaba n'avaient pas encore le paquet minimum. Le matériel didactique était jusque-là fourni par les APEE. Ce retard est dû en partie à la mauvaise procédure d'achat des matériels constituants ce paquet. En effet, quand on passe le

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marché d'achat de ces matériels, ça prend beaucoup de temps. A côté de cela, il y a des tractations qui s'y mêlent.

Pour passer le marché, il y a des tractations qui font en sorte qu'on regarde le coté familial. On prend le marché, on donne à quelqu'un qui n'a pas les moyens. Un truc de huit million, il part acheter ce qui coute trois millions. Résultat, on lui demande un stylo de 100 (cents) FCFA, il acheté ce qui coute 50 (cinquante) FCFA. Maintenant quand ça arrive, l'inspecteur qui est le technicien et qui avait passer la commande, vérifie. Quand il constate que tout est faux, et bien il refuse de les réceptionné. C'est ainsi que d'autres négociations commencent avec lui. En fin de compte, c'est le temps qui passe, jusqu'à ce qu'on se retrouve sans paquet minimum au début du troisième trimestre (Entretien réalisé avec Franck le 7 Mai 2018).

Il ressort de cette déclaration, plusieurs facteurs qui construisent le retard du paquet minimum. D'abord on note le processus de passation de marché d'achat des matériels constituant ce paquet. C'est une opération administrative qui prend beaucoup de temps. Car le technicien passe la commande des matériels et le ministère des marchés publics (MINMAP) lance l'appel à candidature. Pour que ce paquet arrive au niveau des CTD, c'est après des mois de scolarité. Quand ça arrive, l'inspecteur prend encore du temps pour vérifier sa conformité. Un autre facteur du retard du paquet minimum est liée aux nouvelles négociation causées par la non-conformité des matériels achetés. On peut comprendre ainsi pourquoi à Koutaba, on n'a pas eu le paquet minimum à temps. Sans ce paquet dès le mois de septembre de chaque année, les écoles primaires continueront de facturer les matériels didactiques aux parents d'élèves.

Le retard du paquet minimum le rend inutile et périssable. On donne ces paquets aux directeurs vers la fin d'année scolaire, ils deviennent de potentiels commerçants pour l'année suivante. Dans l'arrondissement de Koutaba, certains instituteurs et certains directeurs des écoles primaires en particulier, vendent des boites de craies, des paquets de stylos et des cahiers travaux pratiques entre autre au « potto »61. Le fait est que personne ne viendra l'année suivante leur demander des comptes à rendre. Or ces paquets n'ont pas véritablement servi l'année où ils ont étés distribués. Compte tenu de leur retard. Parallèlement à ce retard, il y a aussi l'inconsistance de ce paquet.

3.2. Du « minimum » du paquet minimum

Les paquets minimums que perçoivent les écoles primaires sont vraiment minimums. Ils sont assez minimums pour ne pas pouvoir participer à la promotion d'une école primaire réellement gratuite. Désormais, c'est même le minimum du paquet

61 Terme utiliser couramment pour désigner les vendeurs des livres en pleine aire, généralement installer sur les petits contoirs en bordures de routes.

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minimum qui est mis à la disposition de ces institutions. Le fait est que dès le départ, les bénéficiaires ne savent pas à quoi s'attendre de manière qualitative et quantitative. Ce qui fait qu'ils sont obligés de prendre sans droit de murmure, ce qu'on leurs donne. A ce sujet, Suzanne rapporte que : « quand le carton arrive, il est déjà cassé. On te donne juste le nécessaire (un cahier de 288pages, deux stylos et peut être une boite de craie) en fonction du temps qui reste pour l'année en cours » (Entretien effectué le 11 Mai avec Suzanne). Compte tenu du temps scolaire et du vide juridique concernant sa consistance, les responsables du paquet minimum ne donnent plus que le minimum de ce paquet aux écoles primaires. Le retard dont nous avons parlé plus haut y est pour quelque chose. Puisque ceux qui donnent savent souvent que l'année scolaire est presque finie.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo