La doctrine Monroe après la fin de la bipolarisationpar Gautier DE CHANTERAC Université de Toulon - Master 2 Droit public parcours sécurité défense 2017 |
B. L'interventionnisme économique : le sauvetage du Mexique« En 1994, le Mexique plongeait dans une crise, celle du peso mexicain, appelée couramment crise « Tequila », et considérée par l'ancien directeur du FMI, Michel Camdessus, comme la première crise financière du XX° siècle, présageant des crises thaïlandaise (1997), russe (1998), brésilienne (1999), argentine (2000) et turque (2001). »87(*) 1.Les Origines de la crise Après plusieurs années d'efforts d'ajustement ayant abouti à la résorption des déficits publics, un niveau bas d'inflation et à la résolution du problème de la dette extérieure, le Mexique connût en 1995 une importante crise de change liée à la surévaluation du peso et à des troubles politiques88(*). La rébellion du Chapias89(*) et l'effondrement de l'économie Mexicaine inquiétaient Washington et Wall Street. Ils craignaient officiellement une propagation aux autres économies émergentes mais craignaient surtout une propagation à l'économie américaine. En effet, les banques américaines et les fonds de pension ; et par ricochets les épargnants américains ; avaient investi au Mexique et se trouvaient donc fragilisés. De plus, les économies Canadiennes, Américaines et Mexicaines du fait de l'ALENA étaient imbriquées. Le Mexique pouvait donc entraîner les Etats-Unis dans sa chute. 2. Le plan de Sauvetage Le 12 janvier 1995, le président Clinton demanda au Congrès des Etats-Unis d'accorder au Mexique 40 milliards de dollars sous forme de garanties de prêt, pour permettre au pays de rouler la dette et de restaurer la confiancedes investisseurs. Mais la proposition de Clinton souleva de fortes protestations au Congrès notamment de la part des anti-Alena. Clintondû se résoudre à réduire l'aide de moitié. Néanmoins, par l'intermédiaire du FMI, l'administration Clinton pût augmenter l'aide au Mexique. L'aide apportée par le FMI fût d'une ampleur exceptionnelle (cinquante milliards) contribuant à redonner confiance à la communauté internationale et limitant les conséquences internationales de la crise. En échange le Mexique dû réduire ses dépenses publiques et libéraliser encore un peu plus son économie. Les banques mexicaines passèrent sous contrôle d'institutions étrangères. Le taux de chômage tripla, le PIB mexicain chuta de sept pourcents et la pauvreté augmenta. En sauvant l'économie mexicaine, l'administration Clinton imposa une domination économique unilatérale. « Cette limitation de la souveraineté mexicaine pousse certains observateurs à qualifier le pays de « semi-colonie » ».90(*) Ernesto Zedillo serrant la main de Bill Clinton, accueilli en visite officielle le 6 mai 199591(*) C. le triomphe de l'industrie d'armement L'industrie d'armement a toujours été la pierre angulaire de la puissance américaine. La fin de la guerre froide laissait présager une baisse du budget de la défense mais il n'en fût rien Clinton décida de maintenir le budget (400 milliards en 2016) pour l'armement à un haut niveau comme sous l'administration Bush car la « démocratie » de marché permettrait d'équiper de nouveaux alliés. « L'année prochaine, les Etats -Unis produiront pour la première fois plus d'avions de combat pour les marchés extérieurs que pour le Pentagone lui-même. A l'évidence, les Etats-Unis ont définitivement ravi à l'Union Soviétique le titre de champion du monde des ventes d'armes. Soutenue par l'administration Clinton, l'industrie américaine de l'armement a connu l'an dernier sa meilleure année de toute son histoire en termes d'exportation. Elle a en effet vendu pour 32 milliards de dollars d'armes à l'étranger »92(*) Clinton poursuivit donc la politique de Bush. En 1999, il leva l'interdiction sur les armes de haute technologie qui pesait sur l'Amérique latine. Grâce au plan Colombie, Lockheed Martin et Mc Donnel Douglas trouvèrent de nouveaux débouchés. Clinton ne se contenta pas d'établir une hégémonie économique aux Etats d'Amérique latine et des Caraïbes, il intervînt directement ou indirectement via les institutions internationales en Haïti, Colombie et Cuba.
L'intervention en Haïti en 1994 montrait bien que la politique étrangère était bipartisane et que rien ne changeait : la doctrine Monroe avait toujours court dans la relation entre Haïti et les Etats-Unis. L'utilisation de la force armée sous prétexte d'objectifs humanitaires * 87 http://les-yeux-du-monde.fr/histoires/12319-la-crise-du-peso-mexicain-premiere * ANNEXE 88 Crise mexicaine de 1994 Le contexte économique et politique De 1990 à 1993, l'économie mexicaine connaît une période de forte prospérité marquée par la perspective d'un accord de libre-échange avec les voisins nord-américains (Alena) et permise par l'arrimage du peso mexicain au dollar américain, selon une parité fixe. Les capitaux étrangers affluents alors (quelque 100 milliards de dollars en 3 ans), et les crédits bancaires au secteur privé croissent de plus de 25 %. Les investisseurs étrangers sont attirés par des taux d'intérêt élevés, plus élevés en tout cas que les taux directeurs de la Fed (la banque centrale américaine) et même que les taux d'intérêt affichés par la plupart des grandes banques centrales en Europe. Au plan économique, une tendance inflationniste érode peu à peu la compétitivité de l'économie mexicaine, cependant que le peso devient de plus en plus clairement surévalué. Au plan politique, l'insurrection zapatiste de janvier 1994 donne clairement le signe du début d'une période d'instabilité. Le mécanisme de la crise : l'effondrement du peso après une crise de liquidité La balance commerciale mexicaine ne cesse de se dégrader tout au long de l'année 1994, alors que la situation de surévaluation du peso par rapport au dollar aggrave un tel déficit. Dans le même temps, le président de la Fed, Alan Greenspan, décide d'augmenter sensiblement le principal taux d'intérêt directeur américain, les réserves mexicaines baissant alors rapidement et les fonds des investisseurs ayant naturellement tendance à se porter à nouveau vers les USA. C'est une crise de liquidité qui touche l'Etat mexicain, le déficit de la balance des paiements atteignant rapidement près de 10 % du PIB mexicain dans le courant de l'année 1994, et les obligations à court terme prises par l'Etat ne pouvant quasiment plus être honorées. La panique gagne alors tous les rouages de l'économie mexicaine, et la décision de dévaluer le peso, prise début décembre 1994 par le nouveau président du Mexique, est trop tardive et disproportionnée. Les sorties de capitaux s'accélèrent et le peso dévisse. Suites et conséquences Dans les mois qui suivirent le mois de décembre 1994, le PIB mexicain chuta de 10 %, le PIB par habitant de 8 % et le taux de chômage fut multiplié par trois. Dès 1996 cependant, une reprise était au rendez-vous, avec une croissance moyenne du PIB de plus de 5 % par an qui allait perdurer jusqu'en 2000. Il faut dire que dès le début de la crise mexicaine, les Etats-Unis décidèrent d'agir en prêteur de dernière instance : la Fed débloqua une ligne de crédit de 9 milliards de dollars, auxquels vinrent s'ajouter un swap de 13 milliards de dollars engagé sur les futurs revenus du pétrole ainsi qu'une aide directe de 18 milliards de dollars de la part du Fonds Monétaire International. Sans doute les banques mexicaines changèrent-elles de propriétaires, mais l'économie mexicaine connut un redressement rapide. https://www.mataf.net/fr/bourse/edu/formation-bourse/la-crise-mexicaine-de-1994 * 89 Le premier janvier 1994, date de mise en application de l'accord du Libre Echange ALENA, l'armée zapatiste de libération nationale (EZLN) attaquait San Cristóbal, 3ème ville du Chiapas et une dizaine d'autres localités. Après quelques heures de combat, elle s'emparait de la mairie défendue par quelques policiers incapables de résister aux centaines de rebelles * 90 https://chroniquesfinancieres.wordpress.com/2014/01/16/la-crise-economique-mexicaine-de-1994-1995/ * 91 https://chroniquesfinancieres.wordpress.com/2014/01/16/la-crise-economique-mexicaine-de-1994-1995/ * 92 Baltimore Sun 1994, une histoire populaire des Etats-Unis |
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