Le multilinguisme et l'expression de la philosophie de khudi dans la pensée d'iqbalpar Hibah Shabkhez University of the Punjab - Master of Arts 2002 |
4.42. La poésie en ourdou, en arabe et en persanLes ressources littéraires de la poésie persane, arabe et ourdoue exerçaient une influence importante sur l'expression d'Iqbal. Sa poésie surtout est profondément marquée au plan stylistique autant qu'au plan thématique par ses lectures extensives de la tradition poétique ourdoue-persane classique. Iqbal ne se content pas de suivre aveuglement les traditions ou d'en faire les simples emprunts ; il innove et modifie pour mieux servir ses propres fins et exprimer ses propres idées. Le mot « Khudi » est un bon exemple d'innovation chez Iqbal : il a trouvé le mot dans la poésie classique ourdoue-persane, comme un adjectif qualitatif avec une connotation négative. Dans l'oeuvre d'Iqbal, « Khudi » devient un substantif au genre féminin pour signifier l'ego, le simple fait sans couleur de l'existence. Ainsi, il a repris un mot de la tradition poétique ourdoue-persane, et il l'a renouvelé pour exprimer sa propre philosophie de Khudi.49 Syed Abdullah explique comment Iqbal emprunt ses images de la poésie ourdoue-persane classique, en la modifiant et en y ajoutent ses propres métaphores : Àí Ñêã
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ÑËÇ La plupart des images ont été construits à partir des symboles et métaphores traditionnelles. Mais ses métaphores ne semblent pas démodées ; sa langue est classique mais elle donne partout l'impression de nouveauté et de fraicheur. La lampe et le papillon de nuit, la fleur, le vin, le serviteur du vin et le temple sont tous là. Et il y en a quelques symboles comme ... le faucon et l'aigle ... qui sont ses propres symboles dérivés de leur sens traditionnel, alors que le symbole de l'étoile et la luciole sont ses symboles originaux. Iqbal a beaucoup apprécié les poètes classiques ourdous. S'il trouvait leurs formes et sujets traditionnels peu aptes à l'expression des idées pertinentes à l'actualité quotidienne, il les 49 Nazeer S. « Traduire la Khudi iqbalienne », p. 35-44, e-CRIT3224 [en ligne], 4, 2012, mis en ligne le 14 mai 2012. URL : http://e-crit3224.univ-fcomte.fr 50 Abdullah, S. (Janvier 1962). « _gui ayA ,-5`,1.1 - J141» (Iqbal - un artiste littéraire). (M. Rafiuddin, Ed.) Iqbal Review, 2 (4), Karachi, Iqbal Academy Pakistan, p. 14. Hibah Shabkhez 100 regardait néanmoins avec admiration. Jeune homme, il a écrit un poème enthousiasmé à la louange de Ghalib51, poète classique. À la même époque, il est devenu étudiant par correspondance de Dagh Dehlavi, un des poètes classicistes les plus prestigieux. Sir `Abd Al-Qadir, éditeur de Makhzan, une revue ourdoue pour laquelle Iqbal écrivait dans sa jeunesse, décrit cette relation: Sheikh Muhammad Iqbal ... sent [Dagh] some ghazals for correction. In this way Iqbal established a relationship in Urdu with a litterateur who, in his days, was considered unique in the art of linguistic excellence in the field of ghazal... Dagh discerned the beginnings of an extra-ordinary writer in this student from a remote Punjab district. Very soon he pronounced his verdict that Iqbal did not need any further coaching in the art ofpoetry ... Iqbal has respect even for this short period and in absentia relationship; and ... Dagh ... was proud of considering Iqbal among the people whose poetry he had corrected.52 Sheikh Muhammad Iqbal ... a envoyé quelques ghazals [à Dagh] pour correction. Ainsi Iqbal a établi une relation en ourdou avec un littéraire qui, à son époque, a été considéré unique à l'égard de la maitrise de langue dans le champ du ghazal... Dagh a discerné les germes d'un écrivain extraordinaire dans cet étudiant d'une région lointaine du Panjab. Bientôt il se prononça qu'Iqbal n'avait plus aucune besoin de cours de l'art poétique ... Iqbal a du respect même pour cette relation courte et in absentia; et ... Dagh ... était fier de compter Iqbal parmi les personnes dont il avait corrigé la poésie.53 La poésie persane avait toujours un charme particulier pour Iqbal. Muhammad Riaz compte plus que soixante poètes persans dans l'oeuvre d'Iqbal - beaucoup plus que les poètes ourdou et arabes. Il mentionne entre autres Firdausî, Manûchihrî, Nâ?ir Khusrau, Mas'ûd, Sanâ'î, Anwarî, Khâqanî, Ni?âmî, `A??âr Nishâpûrî, Ma?mûd Shabistarî, Rûmî, Hafiz et Ghalib54. Iqbal avait écrit presque 9000 couplets en persan, et seulement 6000 en ourdou; et sa diction dans les deux langues, constate Riaz, « reste explicitement persane, parce qu'il a bu longtemps à la fontaine persane »55 Iqbal n'a pas écrit en arabe, mais ces lectures de la poésie arabe ont sans doute influencée son style lorsqu'il écrivait dans les autres langues. S. T. Khan nous en donne un exemple: 51 [Cf. Iqbal, M. Bâng-e darâ (L'appel de la cloche) 1924; Kulliyâ t-e Iqbal (ourdou), Lahore, Iqbal Academy Pakistan, 2013, p. 55.] 52 Iqbal, M. (1924) The Call of the Caravan Bell (Bâng-e darâ) trad. eng. M. A. K. Khalil (avec une preface de Sir `Abd Al-Qadir, Barrister At Law, Editor Makhzan) [Url: http://www. allamaiqbal. com/] 53 Ibid. 54 Riaz, M. (Avril, 1979) « A Comparative Appraisal ofIqbal's Persian Poetry» (Une evaluation comparative de la poésie persanne d'Iqbal). ((M. Moizuddin éd.) Iqbal Review, 20 (1), Iqbal Academy Pakistan, date d'accès : 07-11-2013, [Url : http://www.allamaiqbal.com/publications/journals/review/apr79/2.htm] 55 Ibid. Hibah Shabkhez 101 íÈÇ óÈ ÑíÀÒ ÿÀ ÇóÀ íãáÓ : ÀóáÎ óíÔãí ãÇÑóÇæ óíÚúÇÇÈ ãËÌã ø óã óÖäí ÇúæøØÇ æ ( ÿ äÇ ÿçí ÿçí ÿ äÇ ÑæÇ ·íÀ ÿóÀÑ ÿóãæê äÑÀ ÏíÓ ÑæÇ ·íÆÇê øíä ·ÇÀæ ·íÀ ·ÇæÏ ·ÇæÑ Ñ æç ÿäÇ ÿçÈ)56 ??? áÇÈÞÇ Àãøó: ãÇÑÎ ÇæÑ ÿÈ ÇæÀ Àæ À ÿáí ÿ ÊíÑ5758 Zuhair ibn abi Sulma dit: Dans Asrar-e Khudi, Iqbal a indiqué en note de bas de page l'influence d'un vers de Bussairi : ãÇíÇ áÍÞ ÇÞ ÒÇ ÞäæÑ ÇÑ ÇÑ ãÇæÞÇ ÇÞ æ ãÊÎ ÇÑ áÓÑ æÇ59 Le monde est animé à cause de nous Il est le dernier prophète60 et nous sommes la dernière nation íÑíÕæÈ ÿÀ ÑÚÔ Ç : ÇäíÚÇÏ Ç ÇÚÏÇÞá ÀÊÚÇØá ãÞáÇ ãÑÇ Çä áÓÑáÇ ãÑÇ61 Puisqu'Allah a nominé le prophète, qui nous a appelé à la vénération d'Allah Le plus noble des prophètes, nous sommes, en conséquence, la plus noble des nations 56 Khan, S. T. (Juillet-Septembre 1993) « ÊÇÑËÇ ÿ ÈÏÇ íáÀÇÌ íÈÑÚ Ñ íÑÚÇÔ æÏÑÇ í áÇÈÞÇ ÀÞáÚ » (L'impact de la poésie arabe préislamique sur la poésie ourdou d'Iqbal). (M. Munawwar, Ed.) Iqbaliat (Iqbal Review), Lahore, Iqbal Academy Pakistan, p. 63. 57 Ibid. 58 Iqbal, M. Bâng-e darâ (L'appel de la cloche) 1924; Kulliyât-e Iqbal (ourdou), Lahore, Iqbal Academy Pakistan, 2013, p. 286. 59 Iqbal, M. Asrâr-e Khudi, 1915, Romûz-e bîKhudi, 1918, (Les secrets du soi & Les mystères du non-moi) : les deux recueils publiés sous le nom de `Asrâr-o Romûz' en Kolliyât-e Iqbâl, (Fârsi), tome 1, Lahore, Sheikh Ghulam Ali & Sons Ltd., 1992, p. 230 60 Le prophète Muhammad (paix et salut soient sur lui) 61 Munawwar, M. (Juillet 1968). «ÊÇÑËÇ ÿ ÈÏÇ íÈÑÚ Ñ áÇÈÞÇ ãá» (l'impact de la littérature arabe sur l'oeuvre d'Iqbal). (B. Dar, Ed.) Iqbal Review, 9 (2), Karachi, Iqbal Academy Pakistan, p. 67. Hibah Shabkhez 102 Iqbal se réfère de ses lectures pour enrichir ses critiques littéraires comparées : par exemple, dans ce discours sur la poésie du poète afghan Khushal Khan Khattak, Iqbal compare son style avec la poésie arabe afin d'en approfondir son analyse ·íÀ ÿóú ?æÀ ÿÊj ÀjÕÈÊ j ?jóÇÔ í ·ÇÎ áÇÍÔæÎ ??? áÇÈÞÇ Àãøó: «Throughout his poetry the major portion of which was written in India, and during his struggles with the Mughals, breathes the spirit of early Arabian poetry. We find in it the same simplicity and directness of expression, the same love offreedom and war, the same criticism of life »62, 63 Allama Iqbal ... écrit lors d'un commentaire sur la poésie de Khushal Khan Khattak: « Partout dans sa poésie, dont la plupart a été rédigé en Inde, et pendant ses luttes contre les Mughals, souffle l'esprit des tous débuts de la poésie arabe. Nous y trouvons la même expression simple et directe, le même amour de la liberté et de la guerre, la même critique de la vie. 62 Le commentaire d'Iqbal sur Khushal Khan Khattak a été publié dans la revue Islamic Culture à Hyderabad, en Mai 1928. 63 Rahi, A. (Juillet-Octobre 1977). «áÇÈÞÇ ÑæÇ ?Î ·ÇÎ áÇÍÔæÎ » (Khushâl Khân Khattak et Iqbal). (S. G. M. Tabassum, Ed.) Iqbal Review, 18 (2-3), Lahore, Iqbal Academy Pakistan, p. 175. Hibah Shabkhez 103 |
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