SECTION 1. BREF APERCU SUR LA CHEFFERIE DE LUHWINJA
La chefferie de Luhwinja se trouve à 65 Km au sud-ouest
de la ville de Bukavu. Sa superficie est de 182 Km2. C'est la
collectivité la moins étendue du territoire de Mwenga. Elle
représente 1,5% de la superficie totale du territoire de Mwenga (11.172
Km2).94
La chefferie de Luhwinja a une densité d'environ 246
habitants par Km2 et sa population est répartie en neuf
groupements (Bujiri, Burhembo, Cibanda II, Idudwe, Luciga, Luduha, Kabalole,
Karhundu et Mulama).95
L'économie de cette chefferie de repose essentiellement
sur l'agriculture (60%), l'élevage (10%) et l'exploitation
minière artisanale de l'or (30%). Le sous-sol de Luhwinja est
suffisamment riche en or.96
L'artisanat minier se poursuit encore à Kadumwa et
Goné jusqu'à la Rivière Kadubo en dépit de la
présence de Twangiza Mining avec l'exploitation industrielle de
l'or.97
Sur le plan juridique, la chefferie de Luhwinja a
été créée par Décret du 02 mai 1910 portant
création des chefferies et sous chefferies
indigènes.98
94 Justice pour tous Asbl, « impacts
socio-économique et environnemental de l'exploitation minière sur
les communautés locales au Sud-Kivu : un regard analytique sur la
filiale Twangiza Mining à Luhwinja. », 2015, p. 16-17, disponible
sur www.congoforum.bepdf,consulté le 15 Aout 2016.
95 Ibidem.
96 Ibidem.
97 Ibidem.
98 Ibidem.
29
L'une des principales activités est l'agriculture
à petite échelle. Beaucoup de ménages ont un champ
où ils cultivent principalement des produits à usage personnel.
Dans ces champs, on trouve des bananiers, des haricots, des patates douces, du
manioc et du maïs. Cependant, l'agriculture seule ne suffit souvent pas
pour générer suffisamment des revenus pour répondre aux
besoins. La cause se trouve dans les sols qui ne sont pas très fertiles,
et les champs qui ne sont pas suffisamment grands. Une autre raison est qu'il
est pratiqué une agriculture traditionnelle sans techniques modernes ou
semences améliorées. Finalement, comme beaucoup de champs se
trouvent sur des pentes raides, ils sont ravagés par l'érosion,
ce qui a causé une diminution des récoltes au fil des
années.99
SECTION 2. IMPACTS DU PROJET TWANGIZA MINING SUR LE
CADRE DE VIE
DES HABITANTS DE TWANGIZA
§1. Impacts positifs du projet Twangiza
Mining
La présence de Banro Corporation à travers sa
filiale Twangiza Mining SARL a eu des effets positifs non seulement sur
l'environnement physique de Luhwinja, mais aussi sur son environnement
socio-économique et culturel.1°°
Lors de son installation, la société Twangiza
Mining SARL a réussi à rendre praticable la route de Bukavu vers
Luhwinja qui était devenue impraticable depuis plusieurs
années.
La société a accompli plusieurs
réalisations sociales dans la chefferie de Luhwinja et ailleurs dans la
province du Sud Kivu, notamment dans les domaines de santé et
d'éducation.
L'équipe de recherche de la Maison des Mines du Kivu
(MMKi ASBL) a pu inventorier les réalisations ci-après :
1. La réhabilitation de l'hôpital d'Ifendula ainsi
que l'offre d'une ambulance ;
2. La réhabilitation/construction de sept écoles
dans la chefferie de Luhwinja ;
3. La construction des marchés de Nabuntalaga et de
Lubanda ;
4. La construction des stations de captage et d'adduction d'eau
;
5. Les bourses octroyées aux
élèvesterminant leurs études secondaires avec la mention
distinction ;
99 Justice pour tous Asbl, Op. Cit, p.
16-17.
100 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit, p.
17-19.
30
6. L'appui financier fourni aux enseignants de certaines
écoles (école primaire Chiburhi, institut Naluhwinja,
école primaire Bigaja, école primaire Mwana, institut Luciga,
etc) ;
7. Prêts à intérêts à
quelques entrepreneurs locaux à travers la Société
Financière d'Investissement des Grands Lacs (SOFIGEL) ;
8. L'alphabétisation des adultes et la création
de certains emplois en faveur des habitants tels que le cartonnage manuel, le
gardiennage et la sécurité routière ;
9. Le rétablissement de la paix dans la région
depuis le début des activités du projet Twangiza Mining ;
10. Le financement du processus de réinsertion
socio-économique des creuseurs artisanaux à travers les petits
projets de développement avec l'accompagnement de la
SOFIGEL.101
Certaines de ces réalisations ont été
exécutées par la Fondation Banro, agence de Banro Corporation
chargée du développement des communautés dans les domaines
de la santé, de l'éducation, des infrastructures et des
opportunités d'emploi.
D'autres activités plus spécifiques telles que
le financement des actions de plaidoyer, la création d'un fond
spécial d'assistance humanitaire en cas de désastre et
l'approvisionnement en électricité ont été
prévues. Parmi ces prévisions, les unes ont été
réalisées à la satisfaction de la population et d'autres
pas encore. Les communautés bénéficiaires des
réalisations sociales positives énumérées
précédemment ont exprimé leur satisfaction et ont reconnu
la contribution de ces réalisations à l'amélioration de
leur cadre de vie.102
§2. Impacts négatifs du projet Twangiza
Mining
Outre les réalisations positives susmentionnées,
les activités du projet Twangiza Mining ont été à
la base d'impacts négatifs documentés par l'équipe de
recherche de la MMKi à travers les interviews réalisées
auprès des habitants de Twangiza, l'observation directe, les descentes
sur terrain et l'analyse des rapports d'autres organisations de la
société civile locale.
Parmi les impacts constatés, il y a notamment
l'occupation de grands espaces de terres arables qui empêche les
habitants de pratiquer normalement les activités agro-pastorales
provoquant
101 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit, p.
17-19.
102 Ibidem.
31
ainsi une crise alimentaire dans la chefferie, la pollution de
l'environnement, le chômage, la précarité des emplois, la
perte des valeurs culturelles, la baisse du niveau de vie, la division au sein
de la communauté, les mauvaises conditions de vie des habitants
relocalisées à Cinjira.103
SECTION 3. IMPACTS LIES AU PROCESSUS DE DELOCALISATION
DES HABITANTS DE TWANGIZA
A l'issue des travaux d'exploration de la
société Twangiza Mining SARL, il s'est avéré que le
gisement d'or est situé dans la zone habitée des villages de
Nyorha, particulièrement du sous village de Mbwega. Ainsi, l'entreprise
était confrontée aux défis de la délocalisation de
ces habitants en vue de construire les installations d'exploitation de la
mine.104
D'après l'équipe de recherche de la MMKi, la
majorité des habitants rencontrés déclarent qu'ils
n'étaient pas suffisamment éclairés sur le processus de la
délocalisation et de la succession des étapes y relatives. Ils
poursuivent en disant que la société se contentait de contacter
une poignée de personnes avec lesquelles elle collaborait mais qui ne
relayaient pas l'information comme il se doit aux habitants.
Dans sa note des réponses aux questions
adressées par l'équipe de recherche de la MMKi, l'entreprise a
indiqué les 8 étapes qu'elle affirme avoir suivies dans le
processus de délocalisation des habitants affectés.
Ces 8 étapes ont comporté :
1. La consultation/information ;
2. Le choix du site de relocalisation par les
bénéficiaires ;
3. L'évaluation conjointe et transparente du patrimoine
;
4. Le désintéressement des personnes
affectées par la société et la signature du document de
paie dont copie à la chefferie, à Twangiza Mining SARL et
à la personne affectée ;
5. L'acte de déménagement (en français
et en swahili) contresigné par la personne délocalisée et
Twangiza Mining SARL à travers le Forum communautaire ;
6. Le visa de l'Etat congolais à travers le chef de
poste d'encadrement administratif ;
7. Le délai accordé aux ménages pour
déménager ;
8. Et enfin la relocalisation proprement dite.
103 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit,
p.18.
104 Idem, p. 20-38.
32
Au regard des informations collectées, l'équipe
de recherche la MMKi a subdivisé le processus de délocalisation
en 5 étapes essentielles ci-après :
1) l'exploration des alternatives à la
délocalisation ;
2) le processus d'information, de consultation et de choix du
site de réinstallation ;
3) le processus d'indemnisation des habitants affectés
;
4) les délais accordés pour le
déplacement et l'usage de la force dans le processus d'évacuation
des habitants ;
5) et enfin, les voies de recours et les cas de
réclamations.
§1. Alternatives à la
délocalisation
Au regard des impacts négatifs potentiels qu'elle peut
engendrer dans le cadre de vie des habitants affectées, la
délocalisation est une mesure exceptionnelle et extrême qui
requiert l'exploration préalable des alternatives pouvant
l'empêcher et ainsi permettre aux populations de vivre dans leur milieu
naturel. L'exploration des alternatives au déplacement forcé des
habitants découle des pratiques et standards internationaux qui posent
le principe d'interdiction de déplacement des populations pour raisons
de développement des projets d'investissement.105
Dans le cas du projet Twangiza Mining, les habitants
affectés étaient initialement opposés à leur
délocalisation. Et la recherche menée par l'équipe de
recherche de la MMKi a démontré que ni les services
étatiques ni les représentants de la société
Twangiza Mining SARL n'ont réalisé d'étude
préalable ayant pour but d'éviter le déplacement de ces
populations.Ceci est confirmé par la société Twangiza
Mining SARL qui, non seulement dans sa note de réponses mais aussi lors
des entretiens tenus avec l'équipe de recherche de la MMKi, a reconnu
n'avoir pas exploré d'autres alternatives à la
délocalisation. De même, la cheffe de la chefferie Luhwinja
confirme l'absence d'alternatives offertes aux habitants lors des
négociations sur le processus de délocalisation.106
En revanche, la société et la cheffe de
chefferie ont affirmé avoir proposé aux habitants d'autres sites
jugés plus viables pour leur réinstallation en lieu et place du
site de Cinjira que les représentants des communautés
regroupés au sein du forum communautaire ont rejetés.
105 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit, p.
21
106 Ibidem.
33
La société a proposé les sites de Lubanda
dans la vallée et celui de Cibanda à Nabuntalaga dans le
groupement de Cibanda, mais les responsables locaux, en l'occurrence le chef de
groupement Luciga, s'y étaient opposés de peur de voir leurs
administrés s'installer dans un autre groupement et être soumis
à l'autorité d'un autre chef de groupement.107
En l'absence d'une autre proposition tendant à garder
la population dans son milieu naturel, les représentants des
communautés regroupées au sein du forum communautaire, ont choisi
le site de Cinjira par défi, pensant que la société serait
incapable de le rendre viable.108
§2. Processus d'information, de consultation et de
choix du site de réinstallation
Les résultats de cette recherche ont
démontré que les représentants de la société
Twangiza Mining SARL avaient organisé plusieurs réunions
populaires sur l'importance du projet minier dans la région sans que la
question de délocalisation ne soit suffisamment abordée.
Les habitants délocalisés et
réinstallés à Cinjira ont déploré le fait
que les consultations de l'entreprise s'étaient essentiellement
limitées aux membres du forum communautaire choisis par
l'autorité coutumière. Les habitants, y compris ceux qui
étaient membres du forum communautaire, ont affirmé que personne
parmi eux n'avait de connaissances requises en ce qui concerne la
législation minière et toutes les exigences liées au
processus de délocalisation d'autant plus qu'il n'y avait jamais eu un
cas dans la province du Sud-Kivu auquel ils pouvaient se
référer.109
Les habitants délocalisés, dans leur
majorité, ont affirmé que les membres du forum communautaire
n'ont pas été désignés par eux pour les
représenter. La société Twangiza Mining SARL a reconnu par
contre que c'est avec ce forum que tout le processus de délocalisation a
été mené tout en affirmant que les populations
affectées ont été suffisamment informées. Dans ses
réponses, l'entreprise ajoute que concernant le forum communautaire, les
populations étaient libres de choisir leurs représentants et la
société ne devait pas s'y mêler. Pour l'entreprise, la
présence des leaders communautaires dans les réunions du forum
communautaire était la seule garantie de la représentation des
habitants alors que ces derniers
107 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit, p.
21.
108 Ibidem.
109 Ibidem.
34
ne rendaient pas compte à la base comme l'ont
démontré les interviews réalisées par
l'équipe de recherche de la MMKi auprès des membres dudit forum
et auprès des habitants affectés.
Pour se rassurer du bon déroulement du processus de
délocalisation, l'entreprise Twangiza Mining SARL dit avoir
recruté un consultant indépendant (SRK Consulting) qui a
veillé à la formation du forum communautaire à la base, au
niveau provincial et du groupe de travail où ont participé les
services techniques (division provinciale de l'intérieur, division
provincial des mines, inspection provinciale de l'agriculture, pêche
élevage ainsi que le ministère de tutelle, la coordination de
l'environnement, la division de l'urbanisme et habitat, le cadastre minier et
la division provinciale des titres fonciers).110
Les conclusions de l'équipe de recherche de la MMKi sur
le processus de consultation étaient que les leaders locaux n'avaient
pas transmis l'information aux habitants du groupement de Luciga qui abrite
l'usine. Il s'avère aussi qu'ils n'avaient pas des compétences
nécessaires pour négocier un processus de délocalisation
dans le cadre de l'implantation d'une entreprise minière.
S'agissant du choix du site de Cinjira, la recherche
menée par la MMKi à travers son équipe, a
démontré que ce site avait été choisi par les
membres du forum communautaire. La société Twangiza Mining SARL a
confié à l'équipe de recherche de la MMKi qu'elle
n'était pas d'accord avec ce choix et avait tenté en vain de
dissuader les membres dudit forum en leur proposant d'autres sites. Ceci avait
également été confirmé par la cheffe de
chefferie.
§3. Processus d'indemnisation des habitants
affectés
L'indemnisation des habitants affectés a
été faite sur base d'un protocole d'accord sur la compensation
signé entre la société Twangiza Mining SARL et la
chefferie de Luhwindja le 28 janvier 2010 dans le cadre du forum communautaire.
Ce protocole d'accord et le document additionnel en annexe ont
déterminé le taux et les biens à
indemniser.111
Le barème du taux d'indemnisation et les
modalités pratiques de remplacement des biens immobiliers fixés
dans le document en annexe au protocole d'accord indiquent les montants
à payer pour chaque culture par mètre carré des champs et
les arbres fruitiers des personnes à
110 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit, p.
21.
111 Idem, p. 24.
35
délocaliser. Toutefois, d'autres cultures telles que le
tabac, les bambous et les plantes mixtes plantées hors normes
étaient exclues de calculs ; et en cas de polyculture dans un même
champ, seule la culture dite la plus chère était prise
en compte.112
S'agissant des maisons d'habitation, le protocole d'accord
avait prévu le remplacement des maisons principales par d'autres
construites dans le nouveau site de Cinjira, les dépendances ou ouvrages
secondaires (annexes) devaient être compensés par une somme
d'argent équivalente à leur valeur plus la moitié, soit
150% de la valeur vénale.
En ce qui concerne les infrastructures sociales de base telles
que les églises, les écoles, les centres de santé, le
protocole indique que la référence sera faite au plan d'action
sur le déplacement tel qu'inclus dans l'étude de
faisabilité de Twangiza Mining préparée par les
consultants indépendants lequel prévoit la reconstruction des
infrastructures communautaires dans le site de relocalisation.113
S'agissant des terres de remplacement, il avait
été convenu que la chefferie de Luhwinjda allait octroyer des
terres arables aux membres des populations relocalisées.
Lors des différentes interviews effectuées par
l'équipe de recherche de la MMKi avec les habitants relocalisés,
ceux-ci ont fustigé plusieurs irrégularités liées
au processus d'indemnisation, notamment en ce qui concerne les modalités
de détermination des biens à indemniser, la base de calcul des
indemnités/compensations ainsi que le processus de versement de ces
indemnités. Ces populations relocalisées ont affirmé
n'avoir pas été associées au processus de
détermination tant des biens à indemniser que des bases de calcul
des indemnités.114
Un délocalisé habitant le site de Cinjira a
confié à l'équipe de recherche de la MMKi ce qui suit :
« Nous n'avons pas participé aux discussions sur le taux
d'indemnisation et tous nos champs en jachère, les
cimetières,...n'ont pas été pris en compte. Le
barème a été discuté avec les membres du forum
communautaire qui n'avaient aucune expertise en la matière, et que nous
n'avons pas délégués.»
112 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit, p.
21.
113 Ibidem.
114 Ibidem.
36
Pour ce qui est du processus de versement d'indemnités,
la majorité des habitants interrogés par l'équipe de
recherche de la MMKi ont indiqué que ce processus avait
été jonché d'irrégularités en ce sens que
les représentants de la société chargés de
l'évaluation des biens à indemniser pratiquaient une
discrimination si bien que parfois certains biens étaient pris en compte
chez les uns et non chez les autres.
La société Twangiza Mining SARL a affirmé
à l'équipe de recherche de la MMKi que le processus
d'indemnisation était régulier en ce sens qu'il respectait les
bonnes pratiques en la matière et consistait en une évaluation
conjointe et transparente du patrimoine, en un désintéressement
de la personne affectée et en la signature du document de paie dont
copie était réservée à la chefferie, à
l'entreprise et à la personne affectée. L'entreprise a
également indiqué que le barème et le taux des
indemnités avaient été discutés avec les
représentants de la communauté au sein du forum communautaire et
que le protocole d'accord y relatif avait été signé par la
cheffe de la chefferie qui représente la population de Luhwinja.
Interviewée par l'équipe de recherche de la MMKi
sur ces questions, la Cheffe de chefferie soutient avoir consulté des
services spécialisés de l'Institut de Recherche Agronomique qui
ont donné des indications à la base des discussions.
S'agissant de l'engagement pris par la chefferie d'octroyer
des terres de remplacement aux habitants relocalisés, l'équipe de
recherche a enregistré sur terrain les réclamations de ces
derniers sur le non accès à la terre pour les activités
agro-pastorales en déplorant le fait que la chefferie ne veut pas
exécuter son engagement et exige une demande de terre pour chaque
délocalisé et une redevance coutumière.
§4. Délais accordés pour le
déplacement et usage de la force dans le
processus d'évacuation des habitants
Les informations et documents collectés auprès
des habitants par l'équipe de recherche de la MMKi montrent que la
société Twangiza Mining SARL avait accordé des
délais aux populations affectées avant leur déplacement
vers le site de Cinjira. Ces délais variaient entre 6 et12 mois selon
les cas.
37
Les populations affectées ont par ailleurs
affirmé que l'entreprise avait fourni les moyens de transport
(véhicules et engins de manutention) qui ont facilité leur
déplacement et l'évacuation de leurs biens lors du
déménagement.115
Dans un document de réponse transmis à la MMKi
en date du 15 Janvier 2015 sur la question du rôle joué par la
police dans le processus de délocalisation, l'entreprise Twangiza Mining
affirme que les éléments de la police avaient pour mission
d'exécuter les actes de procédure lorsqu'ils étaient
réquisitionnés par les autorités compétentes sur
plainte de la société. Cette dernière a nié
l'implication de ses services et matériels dans l'évacuation des
habitants délocalisés.116
Cependant, les délocalisés se sont plaints de
l'usage de la force par la police dans le processus de leur évacuation
vers le site de relocalisation. Certains d'entre eux ont rapporté
à l'équipe de recherche de la MMKi que la police a donné
un appui aux bulldozers de l'entreprise en vue de déguerpir de force
toutes les personnes qui avaient refusé la délocalisation.
Certains biens ont été saisis par la police et n'ont jamais
été retrouvés.
§5. Voies de recours et cas des
réclamations
Pour la majorité des habitants interrogés par
l'équipe de recherche de la MMKi, l'information sur l'existence des
voies de recours mises à leur disposition par la société
n'a pas été suffisamment diffusée.
Les habitants délocalisés ont affirmé que
certains cas de revendications déposées devant les structures de
règlement de différends de l'entreprise n'ont pas trouvé
de solutions satisfaisantes si bien qu'il y a encore des
délocalisés qui n'ont pas été bien
indemnisés.
La société Twangiza Mining SARL a affirmé
par contre que la population a été suffisamment
sensibilisée sur la procédure de réclamation interne
à travers différentes approches (églises, troupes
théâtrales, sensibilisation dans les villages) et supports comme
des photos et autres documents de sensibilisation se trouvant au centre
d'information. Pour l'entreprise, les résultats ont été
remarquables en ce sens que les recours introduits ont, pour la plupart,
trouvé des solutions à ce jour.117
115 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit, p.
26
116 Ibidem.
117 Idem,p. 27.
38
Au mois de janvier 2015, la société a, dans sa
note de réponse adressée la MMKi, reconnu l'existence de 7 cas
des réclamations documentés par l'équipe de recherche de
la MMKi.
Lors de la dernière rencontre avec l'équipe de
recherche de la MMKi en mars 2015, la société a indiqué
que tous les cas litigieux ont été résolus.
L'équipe de recherche de la MMKi a pu vérifier la
résolution de ces 7 cas litigieux répertoriés et a
constaté que ces personnes ont été effectivement
désintéressées.
Toutefois, les habitants relocalisés ont, dans leur
majorité, exprimé leur insatisfaction au sujet des
indemnités versées surtout en ce qui concerne le non accès
à la terre et aux infrastructures sociales de base.
SECTION 4. APPLICATION DES DISPOSITIONS LEGALES
RELATIVES AU DEPLACEMENT DES POPULATIONS DANS LE CAS DES HABITANTS
DE TWANGIZA Dans la présente section, il sera question de
vérifier si les dispositions légales relatives
au déplacement des populations ont été
respectées dans le cas des habitants de Twangiza à travers une
analyse des obligations et responsabilités des parties prenantes (l'Etat
congolais et la société Twangiza Mining SARL) en les
confrontant aux impacts négatifs liés à
la délocalisation de ces habitants en vue de déterminer
l'imputabilité de chaque partie prenante.
§1. Obligations et responsabilités des
parties prenantes en matière de déplacement des populations
affectées par les projets miniers
1. obligations et responsabilités de l'Etat
congolais en matière de déplacement des populations
affectées par les projets miniers
Au niveau international, les obligations et
responsabilités de la RDC en la matière sont consacrées
par les instruments juridiques internationaux et régionaux
ratifiés par elle.
Au niveau national, la RDC dispose de plusieurs textes de lois
qui ont incorporé directement ou indirectement les droits populations
affectées par les projets miniers garantis par ces instruments
internationaux et régionaux. Les lois qui garantissent le respect de ces
droits abordés dans le cadre de notre travail sont principalement la
Constitution du 18 février 2006 telle que revissée à ce
jour, le Code minier et ses mesures d'exécution tel que le
Règlement
39
minier ; la Loi n°73-021 du 20 Juillet 1973 portant
régime général des biens, régime foncier et
immobilier et régime des suretés telle que modifiée et
complétée par la Loi n°80-008 du 18 Juillet 1980 ; la Loi
n°77/01 du 22 Février 1977 sur l'expropriation pour cause
d'utilité publique telle que complétée par la Loi
n°11-2004 du 26 Mars 2004 portant procédure d'expropriation pour
cause d'utilité publique, etc.
2. obligations et responsabilités de la
société Twangiza Mining SARL en matière de
déplacement des populations affectées par les projets
miniers
Au niveau international, la société Twangiza
Mining via sa maison-mère Banro Corporation, s'est engagée
à respecter notamment les normes et critères de performance
environnementale et sociale de la Société Financière
Internationale (SFI), les normes relatives à l'exploitation
aurifère sans conflit du World Gold Council, les normes et les
directives de l'Organisation de Coopération et de Développement
Economiques (OCDE),les normes de la Conférence Internationale sur la
Région des Grands Lacs (CIRGL), l'Initiative pour la Transparence dans
les Industries Extractives(ITIE) ainsi que les principes volontaires sur la
sécurité et les droits humains.118
Au niveau national, les entreprises minières ont
l'obligation de se conformer à toutes les lois du pays d'accueil ainsi
que d'honorer leurs engagements volontaires vis-à-vis des populations
affectées par leurs activités. Pour le cas du projet Twangiza
Mining, la convention minière du 13 février 1997 entre la RDC et
Banro Corporation et ses deux avenants soumettent la société
Twangiza Mining SARL au respect de la législation minière
congolaise et spécifiquement en ce qui concerne les questions sociales
et environnementales.119
§2. Imputabilité des parties prenantes
issue des impacts négatifs liés au déplacement des
habitants de Twangiza au profit de la société Twangiza Mining
SARL
Les impacts négatifs liés au déplacement
des habitants de Twangiza au profit de la société Twangiza Mining
SARL décrits par l'équipe de recherche de la MMKi constituent des
violations des droits humains garantis aux populations affectées par les
projets miniers par les différents instruments juridiques tant
internationaux, régionaux que nationaux analysés
précédemment.
118 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit, p.
40
119 Ibidem.
40
Dans le cadre de notre travail, nous nous limiterons à
dégager l'imputabilité des parties prenantes issue des impacts
négatifs liés au déplacement de ces habitants de leur
milieu naturel, documentés par l'équipe de recherche de la MMKi
en ce qui concerne entre autre :
1) L'inadéquation des mécanismes d'information,
de consultation, de participation des habitants de Twangiza au processus de
délocalisation ;
2) L'insuffisance et l'inadéquation des
indemnités/compensations versées aux habitants affectés
par le projet minier Twangiza Mining ;
3) L'inefficacité des voies de recours pour les cas
des réclamations ;
4) Les mauvaises conditions de vie des relocalisés
dans le nouveau site de réinstallation à Cinjira
(inadéquation des logements, manque d'accès à la terre,
manque d'accès aux infrastructures sociales de base).
1. Imputabilité des parties prenantes
découlant de l'inadéquation des mécanismes d'information,
de consultation, de participation des habitants de Twangiza au processus de
délocalisation
Dans le cadre de l'exploitation minière en RDC, le
droit à l'information et à la consultation des populations
affectées est garanti par les articles 69 al.8 du Code minier ainsi que
les articles 451, 452, 477 et suivants du Règlement minier, avant
l'obtention du Permis d'Exploitation.
En ce qui concerne spécifiquement la
délocalisation des populations pour raisons d'investissement,
l'Observation Générale n°7 du Comité des droits
économiques, sociaux et culturels relative à l'interdiction des
expulsions forcées en tant que l'une des garanties du droit au logement,
les principes de base et directives des Nations Unies concernant les expulsions
et les déplacements liés au développement ainsi que les
critères et normes de performance de la Société
Financière Internationale (SFI) garantissent le droit à
l'information et à la participation des populations affectées par
les déplacements involontaires.
Les normes de performance n°1 et 5 de la SFI relative
à l'évaluation et gestion des risques sociaux et environnementaux
et à l'acquisition des terres et la réinstallation involontaire
imposent l'obligation de conduire une consultation et une participation
éclairées lorsqu'un projet peut avoir des impacts négatifs
significatifs sur les populations affectées. Ces normes insistent sur le
fait que le processus de consultation et de participation devra donner lieu
à des échanges de vues et d'informations plus approfondis, ainsi
qu'à des consultations organisées
41
et ayant un caractère itératif, qui aboutissent
à la prise en compte dans le processus de prise de décision, des
opinions des populations affectées sur les questions qui les touchent
directement.120
Mais comme mentionné précédemment, le
processus d'information et de consultation des populations de Twangiza sur le
processus de délocalisation et qui a débouché sur le choix
du site de réinstallation s'est essentiellement limité aux
membres du forum communautaire sans que toutes les personnes directement
affectées ne soient suffisamment associées à ces
échanges.Ceci démontre clairement que le droit à
l'information et à la participation des populations affectées par
le processus de délocalisation initiée par le projet Twangiza
Mining a été violé. Les deux acteurs détenteurs
d'obligations énumérés ci-haut, L'Etat congolais et la
société Twangiza Mining SARL, ont chacun une part de
responsabilité dans cette violation du droit fondamental des populations
à l'information et à la participation.121
S'agissant de l'Etat congolais, les autorités
étatiques nationales, provinciales et locales, particulièrement
celles de la chefferie de Luhwinja qui avaient procédé à
la désignation des membres du forum communautaire issus des populations
locales, n'ont pris aucune mesure pour s'assurer que tous les membres des
populations affectées participent au processus de consultation populaire
et donnent leurs points de vue sur les décisions qui les touchent
directement.
En ce qui concerne la Société Twangiza Mining
SARL, au regard de ce qui précède, elle aurait dû appliquer
les standards internationaux en la matière notamment les critères
et normes de performance de la SFI que Banro Corporation, sa
maison-mère, s'est engagée à respecter. Mais,
l'équipe de recherche de la MMKi a constaté qu'à part les
déclarations faites par les responsables de Banro Corporation et de
Twangiza Mining, les orientations pertinentes fournies par ces normes de
performance n'ont pas été suffisamment appliquées par
l'entreprise Twangiza Mining SARL dans le cadre du processus d'information et
de consultation habitants de Twangiza affectés par la
délocalisation.
120 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit, p.
46.
121 Ibidem.
42
2. Imputabilité des parties prenantes issue de
l'insuffisance et de l'inadéquation des indemnités/compensations
versées aux habitants affectés par le projet minier
Twangiza Mining
L'indemnisation et la compensation des biens perdus à
la suite d'un déplacement forcé lié aux projets
d'investissement minier constituent un droit fondamental des personnes
affectées. Le droit à une indemnité/compensation juste et
équitable est le corolaire du droit à la propriété
garanti par plusieurs instruments juridiques de protection des droits humains
notamment par la Constitution du 18 février 2006 telle que
révisée à ce jour en son article 34 al. 4 qui dispose :
« Nul ne peut être privé de sa propriété
que pour cause d'utilité publique et moyennant une juste et
préalable indemnité octroyée dans les conditions
fixées par la loi.»
L'article 281 al. 1er du Code minier garantit
également le droit à la propriété des occupants du
sol en ces termes: « Toute occupation de terrain privant les
ayants-droits de la jouissance du sol, toute modification rendant le terrain
impropre à la culture entraîne, pour le titulaire ou l'amodiataire
des droits miniers et/ou de carrières, à la demande des
ayants-droits du terrain et à leur convenance, l'obligation de payer une
juste indemnité correspondant soit au loyer, soit à la valeur du
terrain lors de son occupation, augmentée de la
moitié.»
Dans le cadre du déplacement forcé des
populations pour raisons de projets d'investissement, le droit à des
indemnités justes et équitables constitue l'une des garanties
fondamentales reconnues aux personnes affectées lorsque leurs biens font
l'objet d'expropriation.122
Mais concernant le processus d'indemnisation et de
compensation des biens des habitants affectés par la
délocalisation conduite par la société Twangiza Mining
SARL, le constat est que le barème et le taux des indemnités et
de compensation ont été définis par les membres du forum
communautaire sans expertise appropriée en la matière et d'autres
biens de valeur comme les cultures du tabac, des bambous et des plantes
situées dans des champs polycultures n'ont pas été pris en
compte dans le calcul sans qu'aucune raison objective ne soit
donnée.123
S'agissant de la compensation des maisons d'habitation, se
basant sur la documentation nous fournie par l'équipe de recherche de la
MMKi, nous fustigeons l'inadéquation de l'approche
122 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit, p.
49.
123 Ibidem.
43
adoptée consistant au remplacement de seules maisons
principales par d'autres construites dans le nouveau site de Cinjira et le
paiement des indemnités pécuniaires pour les dépendances
ou ouvrages secondaires communément appelés annexes.
Par ailleurs, dans le cadre de la compensation des sources de
revenus en vue de la restauration de moyens de subsistance des populations
délocalisées, les terres arables de remplacement promises dans le
cadre du protocole d'accord signé entre la société et la
chefferie de Luhwinja ne sont pas encore offertes aux
délocalisés.
Il se dégage de ce qui précède que le
droit à des indemnités/compensations justes et équitables
des habitants de Twangiza affectés n'a pas été
respecté selon l'esprit des instruments et standards tant nationaux
qu'internationaux mentionnés ci-dessus.
L'Etat congolais engage sa responsabilité en ce sens
que les services étatiques provinciaux et locaux qui ont
été impliqués dans le processus de délocalisation
n'ont pas assuré la protection des habitants déplacés de
Twangiza en ce qui concerne l'indemnisation et la compensation de leurs biens
expropriés.
Pour sa part, l'entreprise Twangiza Mining SARL a
profité du manque d'expertise des membres du forum communautaire en
versant des indemnités et compensations inadéquates aux habitants
délocalisés. En plus, la société n'a pas
appliqué entièrement les engagements découlant de la
politique de responsabilité sociétale de sa maison-mère,
Banro Corporation, particulièrement les normes et critères de
performance de la SFI en matière d'indemnités/compensations et de
restauration des moyens de subsistance aux populations affectées par le
déplacement involontaire.
3. Imputabilité des parties prenantes issue de
l'inefficacité des voies de recours pour les cas des
réclamations
Dans le cadre du processus de délocalisation des
habitants affectés par le projet par Twangiza Mining, les voies de
recours prévues tant par l'appareil judiciaire étatique (cours et
tribunaux) que par l'entreprise (mécanisme de règlement des
différends) se sont avérées inefficaces de par leur
fonctionnement et par le fait qu'elles n'ont pas donné lieu à
des
44
réparations adéquates face aux
réclamations des victimes, tel que cela a été
décrit précédemment.124
La responsabilité de l'Etat congolais se trouve
engagée du fait du dysfonctionnement de son pouvoir judicaire qui est le
garant des droits et libertés des citoyens. Cela n'a pas facilité
la réparation des atteintes aux droits humains commises par la
société Twangiza Mining SARL comme on l'a vu pour les cas de
réclamations portées devant les instances judiciaires.
L'entreprise Twangiza Mining SARL, pour sa part, a certes mis
en place le mécanisme de règlement des différends
conformément à la norme de performance 5 de la SFI, mais celui-ci
n'a pas bien fonctionné faute d'une sensibilisation adéquate des
populations concernées. C'est ce qui a expliqué l'existence des
cas de réclamations jusqu'en 2015, soit environ 5 ans après la
délocalisation.
4. Imputabilité des parties prenantes liée
aux mauvaises conditions de vie dans le site de réinstallation à
Cinjira
Comme cela a été mentionné
précédemment par l'équipe de recherche de la MMKi, les
conditions de vie des communautés relocalisées à Cinjira
se sont détériorées suite notamment à
l'inadéquation des logements de remplacement construits par
l'entreprise, au manque d'accès à la terre et à
l'inaccessibilité aux infrastructures sociales de base.
Dans le cadre de notre travail, se basant sur la documentation
nous fournie par l'équipe de recherche de la MMKi, nous nous limiterons
à résumer l'imputabilité des parties prenantes en ce qui
concerne les impacts négatifs violant les droits au logement et à
l'alimentation des populations relocalisées à Cinjira.
4.1. Imputabilité issue des impacts
négatifs violant le droit au logement
Comme souligné précédemment, les maisons
de remplacement construites à Cinjira par l'entreprise Twangiza Mining
SARL ne répondent aux critères d'un logement convenable tel que
défini par l'article 11 du Pacte International relatif aux Droits
Economiques, Sociaux et Culturels (PIDESC), l'article 25 de la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (DUDH) ainsi que par
l'Observation Générale n° 4 du Comité des droits
économiques
124 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit, p.
50
45
sociaux et culturels des Nations Unies. L'isolement du site de
Cinjira par rapport au reste des villages de la chefferie de Luhwinja, les
conditions climatiques, l'inaccessibilité aux infrastructures sociales
de base par les habitants, le non-respect des coutumes locales, la
qualité des matériaux et la taille rendent ces logements
inappropriés au sens des instruments juridiques de protection des droits
humains évoqués ci-haut.125
En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat
congolais, le Ministre national des Mines avait adressé à la
société Twangiza Mining SARL une correspondance pour fustiger
l'inadéquation des logements construits, mais aucune mesure de suivi de
l'application des recommandations du Ministre n'a été
documentée par l'équipe de recherche de la MMKi.
Pour sa part, l'entreprise Twangiza Mining SARL n'a pris
aucune précaution pour s'assurer que les logements de remplacement
fournis aux habitants relocalisés répondent aux exigences d'un
logement convenable tel que défini par les instruments juridiques de
protection des droits humains en la matière.
4.2. Imputabilité issue des impacts
négatifs violant le droit à l'alimentation
Au niveau national, le droit à l'alimentation est
protégé par l'article 47 de la Constitution du 18 février
2006 telle que révisée à ce jour qui dispose :
«Le droit à la santé et à la
sécurité alimentaire est garanti. La loi fixe les principes
fondamentaux et les règles d'organisation de la santé publique et
de la sécurité alimentaire.»
La portée et le contenu de ce droit, comme pour le
droit au logement, sont décrits, au niveau international, dans le Pacte
International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels (PIDESC) en
son article 11, la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (DUDH)
en son article 25 ainsi que dans l'observation générale n°
12 du Comité des droits économiques, sociaux et culturels des
Nations Unies. Aux termes de cette observation, le droit à
l'alimentation implique notamment la disponibilité,
l'accessibilité de la nourriture.
Pour le cas habitants relocalisés à Cinjira, le
constat est que depuis leur réinstallation, les terres arables pouvant
leur permettre de pratiquer les activités agro-pastorales susceptibles
de leur procurer de la nourriture ne sont pas encore octroyées par
l'autorité coutumière qui exige
125 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op. Cit, p.
53.
46
le paiement de la redevance coutumière par ces
habitants devenus vulnérables. Le manque d'accès à des
terres arables a de graves conséquences sur l'ensemble de mode de vie de
ces habitants dont les activités agro-pastorales constituent la
principale source des revenus.126
L'implication de l'entreprise Twangiza Mining SARL dans
l'acquisition des terres en faveur des relocalisés depuis 2014 est
intervenue avec retard et ne permet pas à tous les habitants de
pratiquer les activités agro-pastorales et nourrir convenablement leurs
familles comme auparavant.127
126 Maison des Mines du Kivu (MMKi ASBL), Op.
Cit,p. 53.
127 Ibidem.
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