A- Les figures de la sous-traitance dans le Chapitre
VIII
L'article 52 enjoint les organismes régionaux et donc
la CEEAC et l'UA de régler pacifiquement les différends
(1) tandis que l'article 53 lui, confère un pouvoir
d'utilisation et/ou d'autorisation au CS sur ces organismes régionaux en
matière de coercition (2).
97 BEBR (Gerhard), « regional organizations : A united
nations Problem », AJIL, vol. 49, 1955, pp. 169-170.
98 SALMON (Jean), « Les accords régionaux dans les
travaux préparatoires de la Charte des Nations Unies (San Francisco
1945) », dans Jorge CARDONA LLORENS (dir.), La ONU y el mantinimiento
de la paz en el siglo XXI, Valencia, Tirant lo Blanch, 2008, pp.
405-416.
99 Cette formulation trouve son fondement dans la
compréhension extensive du Chapitre VIII, étant entendu que la
CEEAC et l'Union Africaine sont aussi des organismes régionaux.
100 Norme spécifique parce que cette résolution
concerne clairement et uniquement la situation en RCA.
101 BOISSON DE CHAZOURNES (Laurence), art. cit., p.
238.
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La régionalisation du maintien de la paix et de la
sécurité internationales. Etude appliquée au conflit en
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1- L'article 52 ou injonction donnée aux
organismes régionaux en vue d'un Règlement Pacifique des
Différends (RPD)
La notion de règlement pacifique des différends
couvre les moyens diplomatiques, institutionnels et juridictionnels,
bilatéraux ou multilatéraux, qui facilitent la résolution
des différends entre Etats102. Le paragraphe 2 de l'article
52 prévoit le devoir des Etats de régler de manière
pacifique au niveau régional leurs différends d'ordre local
« avant de les soumettre au Conseil de sécurité ». Dans
la même logique, le Conseil de sécurité est invité
à encourager le règlement pacifique régional, pouvant
renvoyer ces différends auxdites organisations (par. 3) sous la
condition du respect des articles 34 et 35 de la Charte portant sur le droit du
Conseil d'enquêter et le droit des Etats de saisir le Conseil de ces
différends (par. 4). Les différents paragraphes de l'article 52
mentionnent à plusieurs reprises les compétences du Conseil de
sécurité qui, généralement, a le pouvoir de traiter
les différends « dont la prolongation est susceptible de menacer le
maintien de la paix et de la sécurité internationales »
(Chapitre VI).
La CIJ a aussi souligné la possibilité d'un
certain chevauchement entre les négociations au niveau régional
et le droit des organes onusiens d'exercer leurs fonctions respectives dans le
domaine de la paix et de la sécurité
internationales103. L'idée est qu'il n'y a pas deux
compétences concurrentes, mais plutôt une situation de
coopération fondée sur l'aide mutuelle et la
complémentarité, avec en arrière fond une idée
d'efficacité104.
Quoi qu'il en soit, le Secrétaire
général, dans son Supplément à l'Agenda pour la
paix repousse, quant à lui, l'idée d'un partage à
parité des tâches entre l'ONU et les organismes régionaux
en soulignant le principe de la primauté des NU105. Ce qui
confirme et renforce la thèse de la sous-traitance évoquée
plus haut ; laquelle donne d'ailleurs doit au Conseil de sécurité
d'utiliser et/ou d'autoriser les organismes régionaux à des fins
précises.
102 EIDE (Asbjorn), « Peace-Keeping and Enforcement by
regional organizations », Journal of Peace Research, vol. 3,
1966, pp. 125-144, passim.
103 Affaire des Activités militaires et
paramilitaires au Nicaragua, op. cit., p. 440, par. 106 (« la cour
considère que l'existence même de négociations actives
auxquelles les deux Parties pourraient participer ne doit empêcher ni
le Conseil de sécurité ni la cour d'exercer les fonctions
distinctes qui leur sont conférées par la Charte et par le Statut
») (l'italique est de nous).
104 Rapport annuel du Secrétaire
général sur l'activité de l'Organisation, doc.
A/46/1, 13 septembre 1991, p. 4, où le secrétaire
général de l'ONU observe qu'on ne peut pas déduire de
l'article 52 une hiérarchie d'instances ou une graduation de celles-ci.
Dans la même logique, l'Assemblée générale souligne
le rôle complémentaire des organismes régionaux en
matière de règlement pacifique des différends, doc.
A/RES/49/57, 9 décembre 1994, par. 2.
105 Supplément à l'Agenda pour la paix, op.
cit., par. 88, al. b).
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2- L'article 53 ou consécration du pouvoir
d'utilisation et/ou d'autorisation des organismes régionaux par le
Conseil de sécurité
Alors que l'article 52 est une disposition de texture «
régionaliste », l'article 53 revêt plutôt une texture
« universaliste106 », (...). Au-delà de la clause
contre les Etats ex-ennemis (article 53, paragraphe 1 (dernière phrase)
et paragraphe 2, de la Charte), l'article 53 prévoit deux types
d'engagement des accords et organismes régionaux en matière
d'action coercitive : celles-ci sont soit utilisées par le
Conseil de sécurité pour la mise en oeuvre des mesures
coercitives prises par ce dernier (art. 53, par. 1, premier alinéa),
soit autorisées par le Conseil à entreprendre une action
coercitive (art. 53, par. 1, deuxième alinéa). Dans le premier
cas, c'est le Conseil qui décide de l'utilisation de la force et
délègue le pouvoir d'exécution à un organisme
régional. Selon certains auteurs, celui-ci devient alors, de
manière informelle, un organe subsidiaire du Conseil107. Dans
la deuxième situation, le Conseil de sécurité donne une
autorisation aux organisations régionales, celles-ci décidant
ensuite de manière discrétionnaire de recourir ou non à la
force108. Dans ce cas, les forces régionales
autorisées n'utilisent pas les emblèmes de l'ONU et elles sont
financées de manière autonome, et non par le budget de
l'ONU109.
Cette double modalité d'activation de l'article 53 et
de mise en oeuvre des mesures coercitives consacre clairement la subordination
des organisations régionales au Conseil de sécurité ; et
les critères de validité ne sont pas du reste.
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