Section 1 : les méthodes d'évaluation
économique des actifs naturels
Les experts de l'environnement ont développé
plusieurs approches permettant d'approximer les différents types de
coûts liés soit au maintien (coûts de purification de l'air
par exemple), ou au remplacement (paysage artificiel) des biens et services
environnementaux, soit aux
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Ononino Jean Charles
conséquences anthropiques négatives ou positives
sur ces derniers (coûts des impacts environnementaux). Pour
déterminer le prix d'un actif naturel, trois scénarii peuvent
être envisagés :
Dans le cas idéal, le bien environnemental est
proposé sur un marché de concurrence pure et parfaite. Au niveau
d'équilibre, le prix de marché reflète le consentement
à payer pour acquérir le bien. Le prix est alors égal
à la valeur économique(i). Il est plus fréquent qu'un
actif naturel soit disponible sur un marché qui n'obéit pas
pleinement aux règles de la concurrence. Dans ce cas, le prix de
marché est une donnée financière et il n'est pas
égal à la valeur économique du bien. Il convient de
procéder à un certain nombre de rectifications du prix de
marché pour obtenir la valeur correcte ("shadow price") du bien
environnemental. La valeur économique du bien environnemental
dérive alors d'un prix corrigé de marché(ii). Enfin, pour
la majorité des actifs naturels, il n'existe aucun prix de marché
spécifique qui permette de fonder l'estimation de leur valeur
économique. Il devient nécessaire de recourir à une ou
plusieurs techniques d'évaluation économique de
l'environnement(iii).
Il existe de nombreuses typologies de méthodes
d'évaluation. La littérature distingue en général
trois grandes familles de techniques d'évaluation d'actifs
environnementaux : Les techniques basées sur les
préférences exprimées, les techniques
basées sur les préférences
révélées (techniques d'évaluation directe) et
les méthodes indirectes, en sont ces trois groupes de
techniques d'évaluation (OCDE, 1996 et Varde, 1992).
1.1. L'évaluation économique par les
préférences révélées
Bien qu'un marché pour les biens et les services
environnementaux n'existe pas, il est possible de se faire une idée de
leur valeur monétaire en examinant des marchés de
substitution. L'évaluation directe d'un actif naturel
signifie que sa valeur est estimée à partir des
préférences des agents qui s'expriment sous la forme d'une courbe
de demande sur le marché. Lorsque ces préférences sont
exprimées à partir de données constatées sur le
marché, on parle de préférences
révélées. On distingue cependant les informations
disponibles sur le marché réel et celles sur
marché-substitut. Dans le premier cas, les prix de nombreux biens
marchands dépendent de manière directe de l'état du milieu
naturel. Trois techniques permettent alors d'estimer la valeur des
bénéfices procurés par la conservation d'un environnement
de bonne qualité : l'évaluation économique de
l'environnement peut être réalisée par l'impact qu'il a sur
la production de biens et services marchands. La variation attendue de la
quantité produite d'un bien marchand à cause de la
dégradation du milieu naturel permet de donner une valeur
monétaire minimale à l'actif
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Ononino Jean Charles
naturel conservé(i). L'évaluation
économique des actifs naturels peut se faire par l'estimation des
dépenses réelles de protection que sont prêts à
engager les acteurs économiques pour prévenir la
dégradation de l'environnement. A partir des dépenses
réelles des ménages, il est possible de tracer une courbe de
demande pour la protection contre ces nuisances, mettant en relation la
quantité de protection demandée et le prix de cette
protection(ii). Si l'on admet que deux biens d'usage équivalent ont des
valeurs d'échange comparables, alors la valeur économique d'un
actif naturel non-marchand utilisé pour un usage déterminé
peut être estimée à partir du prix des biens marchands qui
fournissent le même service(iii).
Il est envisageable de décomposer le prix de ces biens
marchands pour connaître la valeur implicite des actifs environnementaux
qui y sont incorporés. Sur le marché immobilier, par exemple, le
prix des maisons dépend partiellement de la qualité du milieu qui
les environne10. Dans cette famille de méthodes
d'évaluation on retrouve : La méthode du coût de transport,
la méthode des prix hédonistes (MPH), la dépense de
protection,
1.1.1. La méthode du coût de transport
L'idée est que les individus sont disposés
à supporter des coûts pour visiter un site environnemental. Ces
coûts comprennent le coût de voyage, le temps passé pour se
rendre sur le site. Les dépenses engagées représentent en
quelque sorte les préférences des individus pour le site. La
méthode du coût de transport part de l'idée que le
coût de transport consenti pour se rendre sur un site touristique fournit
un indicateur monétaire de la valeur que le visiteur donne à ce
bien. Dans ce cas, c'est donc la valeur récréative du bien qui
est estimée à travers le coût de déplacement. Il
s'agit d'une valeur d'usage puisque le comportement la visite touristique d'un
site remarquable, n'intègre pas des valeurs d'existence, telle que la
valeur d'usage que pourra avoir ce bien pour les générations
futures. Grewell (2004) cité par Louinord Voltaire (2011) montre que la
demande d'un site protégé dépend davantage du coût
de transport que du droit d'entrée.
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