CHAPITRE II : L'AMELIORATION DU CADRE POLITIQUE
On pourrait entendre par cadre politique l'ensemble des
politiques et stratégies mise en oeuvre par les pouvoirs publics pour
atteindre des objectifs définies. Ainsi, fasse aux insuffisances
constatées et décelées, il revient aux pouvoirs publics de
repenser ce cadre politique et cela passe par la prise en compte de la
coopération internationale.
SECTION I : L'INTENSIFICATION DE LA COOPERATION
INTERNATIONALE DE LA CÔTE D'IVOIRE EN MATIERE DE PROTECTION DU
LITTORAL
Les instruments internationaux ont tous pour finalité
le développement d`une coopération intellectuelle internationale,
indispensable en effet pour assurer leur efficacité. Cette
coopération repose tantôt sur une obligation de portée plus
générale, tantôt sur une obligation spécifique,
selon le degré de précision des instruments.
Dans ce cadre-là, les organismes ont également
acquis une telle importance que leurs initiatives, tout en
précédent celles des Etats, les doublent, les complètent
ou participent à leur mise en oeuvre.
La Côte d'ivoire soucieuse de la protection de son
littoral devra donc multiplier les coopérations intellectuelles en
faveur de ce littoral.
Mais ces coopérations intellectuellesdevraient se
caractériser en une coopération scientifique (Paragraphe I) d`une
part. A la base de cette démarche, il devrait y avoir une mobilisation
financière d`autre part (Paragraphe II) pour la soutenir.
PARAGRAPHE I : DU DEVELOPPEMENT DE LA COOPERATION
SCIENTIFIQUE
Tout en incitant au développement des recherches sur un
plan national, le droit international a ici pour objet d'encourager la
coopération en la matière. Bien entendu, dans la mesure où
les activités scientifiques ne peuvent être menées dans un
cadre strictement national, la coopération intellectuelle a
précédé les instruments internationaux274.
La conscience de sa nécessité avait en effet
conduit très tôt les scientifiques à amorcer une
coopération, bien souvent informelle. Les instruments internationaux
viennent la renforcer et devraient contribuer à la rendre plus
régulière, plus systématique. Il s`agit là,
essentiellement, de favoriser la coordination des recherches, par des
programmes communs. Cette coopération contribue à assurer une
mise en oeuvre plus effective des conventions, tout d`abord en les fondant sur
des connaissances meilleures et plus précises et en leur permettant
d`évoluer pour prendre en compte ces dernières.
Elle a ainsi une dimension prénormative. Puis, en
représentant un profit pour l'Etat de la Côte d'ivoire, elle
favorise une plus large participation aux instruments.
Les programmes non gouvernementaux réalisent en fait
l`essentiel de cette coordination. Sur le plan gouvernemental, les actions
consistent, outre la recherche proprement dite, à financer des actions
privées, organiser la coordination et le récolement des
données.
274 Cf. en 1928 la création par les scientifiques de
l'Office international de documentation et de corrélation pourla
protection de la nature. Voir à ce sujet R. BOARDMAN, International
Organization and the Conservation of Nature, Indiana Press, 1981, pp. 32 et ss.
Cité par ZOGNOU (Théophile), op.cit., P.377
102
Pour l'essentiel, nous envisagerons ici la coopération
sur le plan intergouvernemental (A) et la coopération sur le plan non
gouvernemental (B).
A- DE LA COOPERATION SUR LE PLAN INTERGOUVERNEMENTAL
La coordination des recherches sur la conservation de la
nature qui favorise la réalisation d`atlas et de banques de
données internationales et requiert des investissements relativement
coûteux et lourds en personnel, a amené très tôt les
Etats dont ceux du Golfe de Guinée à chercher à
coopérer en la matière275. Les instruments de
protection de l`environnement marin et côtier appellent la Côte
d'ivoire à collaborer dans ce domaine particulier276. La
volonté de disposer d`informations fiables, pour établir des
instruments efficaces, est à l`origine de cette coopération.
Des instruments non contraignants se révèlent,
à ce titre, aussi utiles que des conventions. Ce principe très
présent également dans l`Agenda 21, signifie que la
coopération, par voie d`accords bilatéraux ou
multilatéraux est indispensable pour limiter, prévenir,
réduire et éliminer les atteintes à l`environnement marin
et côtier et leurs ressources. L'Action 21 insiste
particulièrement sur la nécessité de renforcer la
coopération scientifique internationale, l`interdisciplinarité,
l`indépendance de la communauté scientifique internationale. Elle
reflète le souhait de placer la science au service d`un
développement durable, par une amélioration de
l`évaluation scientifique à long terme, le renforcement des
capacités scientifiques, etc.277.
La Convention d`Abidjan relève « la
nécessité devant laquelle (les Parties Contractantes) se trouvent
de coopérer afin de pouvoir maintenir, grâce à une approche
coordonnée et globale, un rythme de développement soutenu sans
nuire à l'environnement »278. Les obligations en
matière de coopération sont déclinées dans la
Convention d`Abidjan en trois axes.
Le premier axe porte sur la coopération en
matière de gestion environnementale. La Convention d`Abidjan
reconnaît que la coopération entre les Parties contractantes est
un moyen adapté de parvenir à la réalisation des objectifs
de protection et de mise en valeur du milieu marin et des zones
côtières de la région. Elle préconise la conclusion
d`accords bilatéraux ou multilatéraux, régionaux et
sous-régionaux, sous réserve de leur adéquation avec ses
dispositions et le droit international. En matière de lutte contre la
pollution (qui est l`un des enjeux marqués de la Convention), les
Parties Contractantes ont pour obligation de prendre toutes les mesures
appropriées pour mettre fin aux situations critiques
génératrices de pollution, et de réduire ou
d`éliminer les dommages qui en résultent279. Cette
obligation a un double corollaire, d`une part, l`exigence d`informer toute
autre partie contractante qui risque
275En 1913, ils créaient la Commission
internationale consultative pour la protection de la nature. Celle-ci
étaitchargée de la collecte, la classification et la publication
des données relatives à la protection internationale de lanature.
La Première Guerre mondiale a balayé cette institution, dont la
première assemblée générale ne s'estjamais tenue.
R. BROADMAN, International Organization and the conservation of nature, op.
cit., pp. 29-30.Cité par ZOGNOU (Théophile), op.cit., P.393
L'accent est mis encore aujourd'hui sur la
nécessité d'un renforcement de la coopération
scientifiqueintergouvernementale. 276 La coopération est présente
dans la convention sur la diversité biologique (article 5) ; dans
l'ensemble desconventions sur les mers régionales et dans la convention
sur le droit de la mer (ainsi selon l'article 197 lacoopération est une
obligation pour protéger le milieu marin).
277Action 21, A/CONF.151/26/rev. 1, chapitre 31, p.
209 et s. et chapitre 35, p. 22 et s.
278Préambule de la Convention d'Abidjan.
279Article 12 de la Convention d'Abidjan.
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d`être touchée par cette situation critique, et
d`autre part, la détermination des responsabilités, la
réparation et l`indemnisation des dommages résultant de la
pollution.
Le deuxième axe porte sur le renforcement de la
coopération technique (volet que nous développerons dans le
paragraphe 2 de cette section). La gestion des espaces marins est
extrêmement complexe car elle met en connexion une gamme variée de
ressources, de menaces et d`enjeux. Toute politique marine adaptée doit
donc reposer sur des bases scientifiques solides servant de soubassement
à la détermination des stratégies d`action et politiques
de régulation. La Convention d`Abidjan s`inscrit dans ce paradigme en
mettant en relief la « nécessité d'adopter, du fait du
manque de renseignements scientifiques sur la pollution des mers dans la
région de l'Afrique de l'Ouest et du Centre, un programme de recherche,
de surveillance et d'évaluation soigneusement planifié
»280. A cet effet, les Parties Contractantes sont
invitées à procéder à des échanges de
données et renseignements scientifiques en matière de
surveillance et d`évaluation de la pollution, à élaborer
des programmes d`assistance technique en vue de la gestion rationnelle de
l`environnement marin et côtier de la région281. Cet
aspect a connu un certain succès durant les décennies 80-90 avec
la conduite sur le terrain de plusieurs programmes de recherches sur le milieu
et les écosystèmes marins et côtiers de la
région282.
Le dernier axe porte sur le renforcement des politiques
nationales en matière de gestion environnementale. Parce que la gestion
des questions marines se passe en partie dans le cadre national -espace de
souveraineté par excellence- la Convention a pour finalité
d`élaborer des directives techniques et normes de régulation dont
l`objectif est de réduire au maximum l`impact néfaste que
pourraient avoir des projets nationaux sur la région. Elle encourage la
coordination des programmes nationaux de recherche et de surveillance des
menaces pouvant affectées la région, la mise en réseau des
instituts et centres nationaux de recherche, l`inclusion de mesures
d`évaluation des impacts sur l`environnement dans le cadre de
développement des zones côtières. L`objectif final est en
filigrane l`harmonisation des politiques nationales aux fins de la bonne
exécution des obligations contractées en vertu de la Convention
d`Abidjan283.
Les instruments de protection de l`environnement ont
également prévu la coopération technique afin de permettre
aux pays les moins avancés d`édicter des règles juridiques
efficaces.
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