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La préservation de la zone côtière en droit ivoirien


par Bokoua Yao OUAGA
Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody - Diplomes d'Etudes Approfondies (DEA) ou Master 2 Recherche 2014
  

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SECTION II : LES FAIBLESSES DU CADRE INSTITUTIONNEL

Le champ d'organisation dans le domaine de l'environnement reste marqué par la pluralité des structures créées soit à l'occasion de l'application de la politique de l'environnement soit dans le cadre des conventions internationales. Le réseau organisationnel en matière d'environnement est à la fois dense, complexe et peu cohérent. Il est utile de noter qu'à côté des organisations internationales à vocation générale telles que l'ONU et ses organes spécialisés, se retrouvent juxtaposées des structures propres aux conventions internationales en matière d'environnement, notamment les conférences des parties, les secrétariats des conventions198.

Les politiques nationale en matière d'environnement en général n'échappe pas à ce réseau organisationnel puisse que directement influencer par tout ce qui se fait au plan international. Ainsi, les imperfections du cadre normatif et institutionnel recèlent des conséquences dans la mise en oeuvre nationale des politiques environnementales. La Côte d`ivoire, à l'instar des pays africains, font les frais de ces incohérences comme en témoigne les faiblesses de son cadre institutionnel.

197HALLE (Birgit) et BRUZON (Véronique), Profil Environnemental de la Côte d'ivoire, rapport final, Commission européenne,AFG Consult, Belgique, 128p, p60

198 Voir GADJI (Abraham), Thèse de Doctorat, Université de Limoges, 2007, p175

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Cet éparpillement du réseau institutionnel (PARAGRAPHEI) fragilise l'application de la politique globale de protection de l'environnement malgré l'argumentaire de la spécialisation. Ce qui entraîne la multiplicité des institutions. Mais aussi ces faiblesses s'expliquent par les limites du contrôle des activités pouvant endommager le littoral (PARAGRAPHEII).

PARAGRAPHE I : L'EPARPILLEMENT DES INSTITUTIONS NATIONALES COMPETENTES

En Côte d'Ivoire, la protection de l'environnement incombe à diverses structures administratives. Il en sera ainsi pour la protection de la zone côtière.

En effet, le mécanisme de protection du milieu marin se caractérise par un éparpillement des institutions nationales compétentes. Cette situation annihile substantiellement l'efficacité escomptée des mesures de protection.

Aussi, Cet éparpillement résulte de la diversité des institutions étatiques compétentes (A) et l'absence de coordination institutionnelle (B).

A- LA DIVERSITE DES INSTITUTIONS ETATIQUES IMPLIQUEES

La gestion de l'environnement marin, eu égard à son caractère transversal, fait intervenir plusieurs ministères. L'Administration publique ivoirienne chargée de gérer et/ou protéger le milieu marin est protéiforme. Cette Administration se répartit en une pluralité de départements ministériels eux-mêmes ayant sous leur tutelle ou leur direction une diversité d'organes techniques199.

Ainsi, le littoral devient le lieu où interviennent plusieurs départements ministériels selon la ligne de partage classique entre la mer pour la marine marchande et les travaux public, et la terre pour l'urbanisme, l'agriculture, l'industrie, les transports.

Le cadre institutionnel relatif à l'environnement et à la protection de la nature en Côte d'Ivoire se caractérise par une multiplicité d'intervenants et par des restructurations récurrentes.

Les institutions s'occupant des questions environnementales se retrouvent pratiquement dans tous les ministères ; une situation qui provoque des chevauchements, des lacunes de compétences et la confusion par rapport aux mandats et responsabilités.

L'instabilité institutionnelle amoindrit l'efficacité des actions et empêche le suivi efficace des programmes.200

Historiquement c'est le ministère en charge de l'environnement qui avait principalement la mission de gérer et protéger l'environnement et donc le littoral. La spécificité et transversalité des problèmes environnementaux ont nécessité une approche globale ou toutes les composantes de la société dans son ensemble sont mobilisées pour une protection efficiente. Mais au lieu de mieux les résoudre, cette approche participative favorisant la multiplicité des intervenants dans la protection alourdit plutôt le processus.

199Il s'agit notamment du Centre ivoirien antipollution (CIAPOL), l'Agence nationale de l'environnement (ANDE), le Fonds nationale de l'environnement (FNDE) et l'Office ivoirien des parcs et réserves (OIPR) placés sous la tutelle du Ministère de l'environnement des Eaux et Forêts ; de l'Office nationale de la protection civile (ONPC) relevant de la tutelle du Ministère de l'Intérieur ; du Centre de recherche océanologique (CRO) placé sous la tutelle du Ministère de l'Enseignement Supérieur ; la Police maritime, une direction du Ministère des Transports. Cité par TIEBLEY (Didier Yves), op.cit. , p49

200 HALLE (Birgit) et BRUZON (Véronique), op.cit. , 128p, p53

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1- Des distributions de responsabilités trop larges aux autres autorités ministérielles

Hormis les Ministère de l'environnement et de l'urbanisme, la gestion et la protection du milieu marin et côtier incombent à plusieurs départements ministériels201. Cette multitude d'intervenants pose un réel problème de coordination. Ainsi pèle mêle on peut citer comme départements ministériels compétents sur le littoral et sa protection :

Le Ministère de l'intérieur intervient dans la mise en oeuvre du Plan POLLUMAR ;

Aussi, le Ministère de l'intérieur se voit être concerné en raison de l'implication des collectivités territoriales et locales (Communes, Districts,...) qui en dépendent. La décentralisation confère, de plus en plus, un rôle prépondérant aux collectivités locales et territoriales en matière de gestion de l'environnement mais plus spécifiquement aux collectivités littorales.

Le Ministère de l'Agriculture dont l'un des objectifs est de parvenir à une pratique raisonnée de l'agriculture respectueuse de l'environnement a créé en son sein une Sous-Direction de l'environnement en 2003. Depuis fin 2005, cette entité administrative a démarré ses activités. Des structures sous tutelle comme l'ANADER (Agence Nationale d'Appui au Développement Rural) mènent des actions de vulgarisation des bonnes pratiques agricoles et d'encadrement des populations rurales. Elle bénéfice du soutien du LANADA (Laboratoire National d'Appui au Développement Agricole) qui possède sept laboratoires thématiques (Pathologie animale, Eco toxicologie, Hygiène alimentaire, Analyse des semences, Aquaculture, Nutrition Animale, Insémination artificielle).

Le Ministère de l'Industrie dispose d'une Sous-Direction "Environnement" chargée de la sensibilisation des entreprises pour l'utilisation des technologies moins polluantes. Le Ministère a la tutelle du LANEMA (Laboratoire National d'Essais, de Métrologie et d'Analyses) pour assurer le suivi des émissions des industries.

Le Ministère des mines et de l'énergie qui délivre les permis d'exploration et d'exploitation des ressources pétrolières offshore ; aussi contrôle l'exploration minière et des hydrocarbures. La direction de l'énergie est chargée de l'électrification rurale et des énergies renouvelables. Le Ministère et des Ressources Animales Halieutiques est chargé entre autres de la gestion et du suivi des ressources halieutiques. Aussi, il délivre les autorisations de pêche en mer ;

Le Ministère de la Recherche Scientifique intervient dans le secteur de l'environnement au travers des structures de recherche placées sous sa tutelle.

En outre, le Ministère de l'Enseignement Supérieur est impliqué dans la problématique de la gestion de l'environnement côtier et marin à travers ses universités, centres et instituts de recherches et ses laboratoires dont les champs de compétences touchent les problèmes visés par les conventions. Rattachés pour la plupart aux Unités de Formation et de Recherches (UFR), ces centres, instituts et laboratoires existent au plan national.

Le Ministère des Infrastructures Economiques : gère les infrastructures et le domaine public de l'Etat. La Direction de l'Hydraulique Humaine de ce Ministère s'occupe de l'alimentation des populations en eau potable, de la collecte des données et des mesures hydrologiques. Des sociétés d'Etat comme les Ports d'Abidjan et de San Pedro sont sous la tutelle du Ministère des Infrastructures Economiques.

201 Voir Décret n° 2012-625 du 06 juillet 2012portant attributions des Membres du Gouvernement de la république de Côte d'ivoire.

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La Direction de la Météorologie Nationale (DMN/SODEXAM) collecte les données climatologiques. Ses relations avec les structures sous régionales lui donne un rôle dans l'Organe National de Coordination de la Convention pour la Lutte contre la Désertification.

Le Ministère des affaires étrangères est chargé du suivi de la procédure de ratification des accords et traites internationaux, de leur mise en application et de leur conservation. Il est donc clair que tous traités, accords ou instruments en rapport avec le littoral leur sera soumis.

Les Ministères, comme celui de la famille, de la femme et de l'enfant ; de la culture et de la francophonie ; de la promotion des jeunes, enfin de la communication entreprennent tous des actions qui ont des impacts plus ou moins importants en matière de gestion environnementale.

En définitive, la protection du littoral et même de l'environnement est le théâtre d'intervention d'un grand nombre d'acteurs qui débouche quelque fois sur un cafouillage quant à qui fait quoi. L'on ne sait finalement qui est compétent, ce que confirmera le Pr. KAMTO lorsqu'il dit « à l'éclatement normatif correspondait une fragmentation institutionnelle qui soulevait et soulève encore entre autres problèmes celui des conflits de compétence dus aux chevauchements des missions »202 .

2- Une implication massive des organisations dans la gestion du littoral

Le mouvement des ONG et associations apparaît relativement récents en Côte d'Ivoire. Il a commencé dans les années 90 avec la récession économique créant des conditions de vie plus difficiles. Depuis 1999, l'éclosion des ONG est plus forte dans la mesure où après le Coup d'Etat de 1999, la modification de la constitution a conduit à une sorte de mobilisation sociale.

Dans le domaine de l'environnement, il existe une centaine d'ONG en grande partie organisée en réseaux. Environ 80 ONG constituent la FEREAD (Fédération des Réseaux des ONG et Associations de l'Environnement) et 40 autres sont en train de créer une union des associations partenaires d'un programme PNUD ; programme qui finance les micro-projets environnementaux des ONG locales.

Il existe une volonté politique d'associer la société civile et, de plus en plus, les ONG participent au dialogue politique.

Malheureusement, cet éparpillement des institutions nationales compétentes est source de

dysfonctionnement dû à l'absence de coordination entre les différents services administratifs.

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