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Etude comparative des privilèges et immunités en droit congolais et droit belge : cas du ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale


par Raphael KABAMBA KAZADI
Université de Mwene-Ditu - Graduat en droit, département de droit public 2021
  

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Section 1 : Etendue de la protection diplomatique

§1. Le chef de l'Etat

Le chef de l'Eta est l'organe des relations extérieures principales de l'Etat car il est le premier représentant supérieur de l'Etat. (34)

L'évolution contemporaine des relations internationales a conduit à faire une place toujours grande aux chefs d'Etats à travers des contacts institutionnalisés comme les réunions périodiques au sommet ; les contacts directs entre chefs d'Etats en cas des problèmes particulier. Bien plus le rôle au premier plan joué par le chef de l'Etat dans les relations extérieures ne se trouve renforcés que par le fait que c'est lui qui « accrédite les ambassadeurs et envoyés extraordinaires auprès des puissances étrangères, qui reçoit les lettres des créances des ambassadeurs et de leurs envoyés extraordinaires des puissances extérieures ou étrangères » tout en jouant également un rôle important en ce qui concerne les traités et accords internationaux. (35)

C'est à ce titre qu'il a droit à des honneurs spéciaux et quand il est à l'étranger, il a un régime d'immunités complètes, c'est-à-dire l'inviolabilité de sa personne, les immunités de juridiction pénale, civile, administrative d'exécution. (36)

En d'autres termes, le chef de l'Etat bénéficie à l'étranger d'une protection absolue contre toute poursuite judiciaire afin de pouvoir exercer ses fonctions en toute liberté.

(34) CHARPENTIER, op.cit., P. 202

(35) Idem

(36) Louis LEFUR, Précis de droit international public, 4ème édition ; DALLOZ, Paris, P. 252.

(37) La convention de vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961 entrée en vigueur le 24 avril 1964 dans ses dispositions.

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§2. Le premier ministre

En tant que chef du gouvernement, le rôle du premier ministre dans la participation à la politique internationale de l'Etat est en proportion inverse avec celui du chef de l'Etat car dépendant de la constitution de chaque pays. En effet, dans le régime présidentiel où le chef de l'Etat dispose des pouvoirs réels, le premier ministre, s'il existe, n'est qu'un coordonnateur de l'action gouvernementale. Par contre dans les régimes parlementaires, nous voyons le chef du gouvernement prendre une grande place sur la scène internationale, le président ou le chef de l'Etat n'y jouant qu'un rôle honorifique.

C'est le cas en Allemagne, Belgique, où c'est le premier ministre qui est habilité à engager l'Etat et qui joue le principal rôle dans l'élaboration et la conduite de la politique étrangère. Ainsi tenant compte de la grande charge qu'a le premier ministre sur le plan international et suivant chaque pays, il faut le souligner, lui également bénéficie des immunités complètes le préservant contre les poursuites pénales dans l'exercice de ses fonctions lui assignées. (37)

§3. Le ministre des affaires étrangères

Les ministres qui sont membres du gouvernement participent également à la définition et à l'application de la politique étrangère et jouent de plus en plus un rôle très important dans les relations extérieures mais il convient de noter d'abord que c'est le ministre des affaires étrangères qui coordonne et conduit cette politique étrangère. Cela étant, le ministre des affaires étrangères est le membre du gouvernement spécialisé dans l'élaboration et la conduite de la politique étrangère de son pays. A l'origine il n'était qu'un simple porte-parole de son gouvernement, par la suite ; il prend de plus en plus de l'importance dans les affaires de l'Etat et quand il possède une personnalité marquante, il jouit d'une autonomie et peut contribuer à déterminer la politique étrangère du pays. Devenu aujourd'hui instrument privilégié des rapports internationaux de l'Etat, le ministre des affaires étrangères représente l'Etat, se déplace facilement à l'étranger, participe à des nombreuses conférences diplomatiques occasionnelles, à des conseils et autres assemblées d'organisations internationales et même pour l'Etat des négociations diverses, c'est pourquoi il doit voir l'autorité d'engager l'Etat par ses propos ou par sa signature.

Il sied alors de souligner qu'il bénéficie des privilèges et immunités diplomatiques sur base du droit international et de la courtoisie internationale afin de lui permettre de bien exercer

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ses fonctions en toute tranquillité ; sur base également d'une interprétation large de la convention de vienne de 1961 dans son fond. (38)

Ainsi donc, autant que le chef de l'Etat, le ministre des affaires étrangères bénéficie des immunités diplomatiques complètes lui assurant l'indépendance et la liberté nécessaire à la bonne conduite de la politique extérieure du pays.

S'agissant des autres ministres, ce sont des ministres techniques qui participent à la vie politique internationale et qui pourraient concurrencer le ministre des affaires étrangères et c'est ainsi qu'il est nécessaire d'établir un organe ou une procédure de coordination sous le contrôle des affaires étrangères. (39) Le statut des autres ministres du gouvernement s'apparente à celui des fonctionnaires en mission, car ils jouissent entant que représentant de l'Etat des immunités réelles, limitées à la durée de leur séjour à l'étranger. (40)

Quoiqu'il en soit, on doit noter que les organes gouvernementaux des relations extérieures que sont : le chef de l'Etat, le ministre des affaires étrangères, le premier ministre et les autres ministres techniques bénéficient d'une protection diplomatique totale qui les placent pour l'intérêt de leur fonctions, à l'abri de toute atteinte à leur personne, liberté ou dignité c'est-à-dire à l'abri de toute forme de détention ou d'arrestation et de toute compétence juridictionnelle des Etats étrangères.

A. Les limites à la protection diplomatique

Les agents diplomatiques jouissent nous l'avons dit, d'une protection diplomatique internationale faite d'immunités et privilèges divers. Mais comme toute règle, la protection diplomatique connait des limitations dans le cas de violation de certaines normes du droit international.

1. Les principes du « jus cogens »

Le jus cogens est défini par la convention de vienne de 1969 dans son article 53 comme une norme acceptée et reconnue par la communauté internationale des Etats dans son ensemble entant que norme à laquelle aucune dérogation n'est permise et qui ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le même caractère.(41)

Quoique le problème du processus de formation de ces normes du jus cogens n'est pas réglé aujourd'hui de façon satisfaisante et définitive. (42)On peut dire que les valeurs

(38) CHARPENTIER, Op.cit., P. 101

(39) Idem, P. 40

(40) BORGHI, L'immunité des dirigeants politiques en droit international, Genève 2003, P. 48

(41) DREYFUS, Op.cit., P. 54.

(42) VERHOLVEN, Op.cit., P. 202.

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d'humanité et des droits de l'homme font partie intégrante des normes de jus cogens. Ainsi donc, comme l'affirme SIANGANU DIMBUNGU « les violations des valeurs d'humanité entant que des valeurs qui constituent des infractions du droit international humanitaire, lui-même partie intégrante du jus cogens sont incompatibles à la notion des immunités diplomatiques ». Les immunités diplomatiques tombent de façon tout à fait automatique devant les normes du jus cogens parce qu'insusceptibles de toute dérogation.

2. La mise en oeuvre de la protection diplomatique

A qui revient la compétence de réprimer la violation du principe du jus cogens ? Cette question simple en apparence, est d'une importance capitale. En effet, à l'anarchie qui aurait prévalu sur la scène internationale, si tous les Etats se réclamaient la compétence ou compétents pour réprimer ces violations, les Etats ont préféré l'institution d'un ordre juridique dotée du principe de la compétence universelle.

Ainsi donc, c'est avant tout la compétence territoriale de l'Etat qui s'affirme ici, sauf disposition expresses contraires. Cependant parce que certains Etats recouvraient les auteurs des violations graves des principes de jus cogens des immunités pénales du droit interne, certains Etats invoquaient la compétence universelle, pour prétendre à la répression de ces crimes. Ce qui entraine que les immunités ou des règles de procédure spéciale, qui peuvent s'attacher à la qualité officielle d'une personne, en vertu du droit international ou du droit interne n'interdisent pas à la cour pénale internationale d'exercer sa compétence à l'égard de cette personne. (43) De ce qui précède, nous pouvons retenir que la mise en oeuvre de la violation des principes du jus cogens, spécialement des normes du droit international humanitaire, appartient concurremment à l'Etat dans lequel le délit a été commis et à la cour pénale internationale dans le respect des principes du jus cogens et de « non, bis in idem ». Les autres Etats ne peuvent intervenir qu'à titre secondaire en respectant les immunités, dont pourraient jouir certains personnes lesquelles doivent préalablement être levées pour permettre les poursuites judiciaires. (44)

(43) AKELE ADAU P. et SITA AKELE MWILA, le crime contre l'humanité en droit congolais, CEPAS, Kinshasa 1999, P. 30

(44) Cour international de justice, affaire du mandat d'arrêt du 11 avril 2002 contre mémoire de la Belgique.

[22]

Section 2 : Les juridictions en droit congolais

§1. Les règles générales en matière de compétence

La compétence peut se définir comme l'aptitude d'une juridiction à connaitre d'une affaire. C'est une portion du pouvoir juridictionnel qui est conféré par la loi à une juridiction pour connaître de certaines affaires données. Bien que le pouvoir juridictionnel soit confié par la constitution en RDC aux cours et tribunaux, un tribunal ne peut examiner n'importe quelle affaire qui peut lui être soumis ; en effet le pouvoir juridictionnel de chaque juridiction est limité.

Il faut distinguer le pouvoir juridictionnel de dire le droit reconnu à toutes les juridictions de la compétence qui délimite l'étendue du pouvoir juridictionnel pour chaque juridiction. La compétence est subordonnée à l'existence du pouvoir juridictionnel partagé par tous les types de juridiction. Ainsi, un tribunal est compétent quand le litige peut être jugé par lui en vertu d'une portion du pouvoir qui lui est dévolu en cette matière. Par contre, le tribunal est incompétent lorsque le litige sort de ses prérogatives du pouvoir. (45)

§2. Les ordres de juridiction

En République Démocratique du Congo, il existe trois ordres de juridiction notamment :

? L'ordre judiciaire ;

? L'ordre constitutionnel ;

? Et l'ordre administratif.

S'agissant des juridictions de l'ordre judiciaire, c'est la loi organique N° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétence des juridictions qui est d'application.

S'agissant des juridictions de l'ordre constitutionnel, c'est la constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi de 2011 à son article 157, qui est d'application y compris la loi organique N° 13/016 du 15 octobre 2013 portant organisation de la cour constitutionnelle.(46)

S'agissant des juridictions de l'ordre administratif c'est la loi organique N° 16/027 du 16 octobre 2016 relative à l'organisation au fonctionnement et à la compétence qui est d'application. (47)

(45) Constitution de la RDC modifiée par la loi N° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la constitution du 18 février 2006

(46) Idem, art 157

(47) La loi organique N° 16/027 du 16 octobre 2016 relative à l'organisation ; au fonctionnement et à la compétence des juridictions de l'ordre administrative ; lire dans son ensemble.

[23]

Les juridictions de l'ordre judiciaire sont les suivantes :

a) Les juridictions civiles : il s'agit :

+ Du tribunal de paix ;

+ Du tribunal de grande instance ;

+ Du tribunal de commerce ;

+ Du tribunal du travail ;

+ De la cour d'appel

+ Et de la cour de cassation.

Cela étant, il nous faut souligner ici que le tribunal du travail et le tribunal de

commerce sont régis par des lois particulières qui les instituent c'est-à-dire par la loi

N° 002/2001 du 03 juillet 2001 portant création, organisation et fonctionnement des

tribunaux de commerce et par la loi N° 016/002 du 16 octobre 2002 portant création ;

organisation et fonctionnement des tribunaux du travail en RDC.

b) Les juridictions militaires : il s'agit du, de :

+ Tribunal militaire de police ;

+ Tribunal militaire de garnison ;

+ La cour militaire ;

+ La cour militaire opérationnelle ;

+ La haute cour militaire.

Il convient de préciser que la loi distingue parmi les juridictions de l'ordre judiciaire

les juridictions civiles et celles pénales ou répressives. Il s'agit en réalité de mêmes

organes généralement qui connaissent des procès civils et répressifs avec les mêmes

magistrats, la distinction réside en ce que les procès civils sont jugés selon les règles

de la procédure civile tandis que les procès pénaux sont les règles de la procédure

pénale. (48)

S'agissant des juridictions de l'ordre administratif, nous distinguons :

+ Les tribunaux administratifs ;

+ Les cours administratives d'appel ;

+ Le conseil d'Etat.

(48) Pierre KANSEWU ; Notes de cours de l'introduction au droit judiciaire G2 droit, UMD 2016 - 2017, inédites.

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Il existe également des juridictions administratives spécialisées notamment la cour de compte, les juridictions disciplinaires des administrations publiques ou des ordres professionnels, lesquelles juridictions sont régies par les lois particuliers visées par l'article 149 alinéa 5 de la constitution congolaise. (49)

Pour ce qui est de l'ordre constitutionnel il ne doit être fait mention que la cour constitutionnelle régie par la loi organique N° 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement.

§3. Le caractère d'ordre public en matière de compétence pénale

Les lois pénales sont d'ordre public parce qu'elles ont pour but de régler les conflits pouvant intervenir entre Etat, gardien de l'ordre, et de la sécurité et certains particuliers qui refusent ou négligent de s'y soumettre.

Il est donc logique que les règles de compétence en matière pénale entrainent les conséquences suivantes :

? L'incompétence d'un tribunal peut être soulevée en tout état de cause même pour la première fois en cassation ;

? Elle peut être invoquée, par toutes les parties ;

? Elle doit être soulevée même d'office par le juge ;

? On ne peut pas déroger à la compétence d'un tribunal répressif au moyen des conventions particulières.

§4. Les diverses distinctions à faire en matière de compétence

a) La compétence matérielle : elle consiste dans l'étendue ou la portion du pouvoir de dire le droit confiée à un tribunal pour connaître d'une affaire. En matière pénale, elle est relative aux prérogatives de différents types des juridictions et porte sur la nature et l'importance des poursuites ainsi que sur les circonstances de faits fixant le taux de la peine.

b) La compétence personnelle : elle est définie en fonction de la qualité de l'inculpé ; elle peut se référer soit au statut, au grade ou encore à la fonction publique etc.

c) La compétence territoriale : chaque juridiction ne peut exercer sa compétence qu'à l'intérieur d'une portion géographique appelée « ressort » au-delà des limites de ce ressort ; elle devient incompétente.

La compétence territoriale est l'étendue territoriale du pouvoir juridictionnel confié à une juridiction. En matière pénale, les règles de la compétence territoriale sont d'ordre public

(49) Art. 149 alinéa 5 de la Constitution de la RDC, Op.cit.

[25]

contrairement à la matière de droit privé où l'incompétence doit être soulevée « in limine litis ».

Alors de nos jours, il faut noter qu'aucune juridiction en droit congolais ne peut siéger sans le concours du ministère public, y compris le tribunal de paix qui, autrefois pouvait siéger sans celui-ci.

La présence du ministère est d'une grande importance car il a un grand rôle à jouer en ce qui concerne la justice, qui se résume en ce qui suit :

+ Rechercher les infractions, traduire les présumés coupables devant les juridictions et soutenir les accusations ;

+ Instruire les affaires pénales ;

+ Mettre l'action publique en mouvement, apprécier l'opportunité des poursuites car tout acte contraire ne doit pas obligatoirement être poursuivis ;

+ Représenter les parties lésées en cas d'allocation des dommages et intérêt d'office par un tribunal ;

+ Exécuter les jugements en ce qui concerne la peine de mort, la servitude pénale, des dommages et intérêts d'office et contrainte par corps ;

+ Condamner les témoins absents ou récalcitrants etc. (50)

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote