Section 1 : Etendue de la protection diplomatique
§1. Le chef de l'Etat
Le chef de l'Eta est l'organe des relations extérieures
principales de l'Etat car il est le premier représentant
supérieur de l'Etat. (34)
L'évolution contemporaine des relations internationales
a conduit à faire une place toujours grande aux chefs d'Etats à
travers des contacts institutionnalisés comme les réunions
périodiques au sommet ; les contacts directs entre chefs d'Etats en cas
des problèmes particulier. Bien plus le rôle au premier plan
joué par le chef de l'Etat dans les relations extérieures ne se
trouve renforcés que par le fait que c'est lui qui «
accrédite les ambassadeurs et envoyés extraordinaires
auprès des puissances étrangères, qui reçoit les
lettres des créances des ambassadeurs et de leurs envoyés
extraordinaires des puissances extérieures ou étrangères
» tout en jouant également un rôle important en ce qui
concerne les traités et accords internationaux. (35)
C'est à ce titre qu'il a droit à des honneurs
spéciaux et quand il est à l'étranger, il a un
régime d'immunités complètes, c'est-à-dire
l'inviolabilité de sa personne, les immunités de juridiction
pénale, civile, administrative d'exécution. (36)
En d'autres termes, le chef de l'Etat bénéficie
à l'étranger d'une protection absolue contre toute poursuite
judiciaire afin de pouvoir exercer ses fonctions en toute liberté.
(34) CHARPENTIER, op.cit., P. 202
(35) Idem
(36) Louis LEFUR, Précis de droit international public,
4ème édition ; DALLOZ, Paris, P. 252.
(37) La convention de vienne sur les relations diplomatiques
du 18 avril 1961 entrée en vigueur le 24 avril 1964 dans ses
dispositions.
[19]
§2. Le premier ministre
En tant que chef du gouvernement, le rôle du premier
ministre dans la participation à la politique internationale de l'Etat
est en proportion inverse avec celui du chef de l'Etat car dépendant de
la constitution de chaque pays. En effet, dans le régime
présidentiel où le chef de l'Etat dispose des pouvoirs
réels, le premier ministre, s'il existe, n'est qu'un coordonnateur de
l'action gouvernementale. Par contre dans les régimes parlementaires,
nous voyons le chef du gouvernement prendre une grande place sur la
scène internationale, le président ou le chef de l'Etat n'y
jouant qu'un rôle honorifique.
C'est le cas en Allemagne, Belgique, où c'est le
premier ministre qui est habilité à engager l'Etat et qui joue le
principal rôle dans l'élaboration et la conduite de la politique
étrangère. Ainsi tenant compte de la grande charge qu'a le
premier ministre sur le plan international et suivant chaque pays, il faut le
souligner, lui également bénéficie des immunités
complètes le préservant contre les poursuites pénales dans
l'exercice de ses fonctions lui assignées. (37)
§3. Le ministre des affaires
étrangères
Les ministres qui sont membres du gouvernement participent
également à la définition et à l'application de la
politique étrangère et jouent de plus en plus un rôle
très important dans les relations extérieures mais il convient de
noter d'abord que c'est le ministre des affaires étrangères qui
coordonne et conduit cette politique étrangère. Cela
étant, le ministre des affaires étrangères est le membre
du gouvernement spécialisé dans l'élaboration et la
conduite de la politique étrangère de son pays. A l'origine il
n'était qu'un simple porte-parole de son gouvernement, par la suite ; il
prend de plus en plus de l'importance dans les affaires de l'Etat et quand il
possède une personnalité marquante, il jouit d'une autonomie et
peut contribuer à déterminer la politique étrangère
du pays. Devenu aujourd'hui instrument privilégié des rapports
internationaux de l'Etat, le ministre des affaires étrangères
représente l'Etat, se déplace facilement à
l'étranger, participe à des nombreuses conférences
diplomatiques occasionnelles, à des conseils et autres assemblées
d'organisations internationales et même pour l'Etat des
négociations diverses, c'est pourquoi il doit voir l'autorité
d'engager l'Etat par ses propos ou par sa signature.
Il sied alors de souligner qu'il bénéficie des
privilèges et immunités diplomatiques sur base du droit
international et de la courtoisie internationale afin de lui permettre de bien
exercer
[20]
ses fonctions en toute tranquillité ; sur base
également d'une interprétation large de la convention de vienne
de 1961 dans son fond. (38)
Ainsi donc, autant que le chef de l'Etat, le ministre des
affaires étrangères bénéficie des immunités
diplomatiques complètes lui assurant l'indépendance et la
liberté nécessaire à la bonne conduite de la politique
extérieure du pays.
S'agissant des autres ministres, ce sont des ministres
techniques qui participent à la vie politique internationale et qui
pourraient concurrencer le ministre des affaires étrangères et
c'est ainsi qu'il est nécessaire d'établir un organe ou une
procédure de coordination sous le contrôle des affaires
étrangères. (39) Le statut des autres ministres du gouvernement
s'apparente à celui des fonctionnaires en mission, car ils jouissent
entant que représentant de l'Etat des immunités réelles,
limitées à la durée de leur séjour à
l'étranger. (40)
Quoiqu'il en soit, on doit noter que les organes
gouvernementaux des relations extérieures que sont : le chef de l'Etat,
le ministre des affaires étrangères, le premier ministre et les
autres ministres techniques bénéficient d'une protection
diplomatique totale qui les placent pour l'intérêt de leur
fonctions, à l'abri de toute atteinte à leur personne,
liberté ou dignité c'est-à-dire à l'abri de toute
forme de détention ou d'arrestation et de toute compétence
juridictionnelle des Etats étrangères.
A. Les limites à la protection diplomatique
Les agents diplomatiques jouissent nous l'avons dit, d'une
protection diplomatique internationale faite d'immunités et
privilèges divers. Mais comme toute règle, la protection
diplomatique connait des limitations dans le cas de violation de certaines
normes du droit international.
1. Les principes du « jus cogens
»
Le jus cogens est défini par la convention de vienne de
1969 dans son article 53 comme une norme acceptée et reconnue par la
communauté internationale des Etats dans son ensemble entant que norme
à laquelle aucune dérogation n'est permise et qui ne peut
être modifiée que par une nouvelle norme du droit international
général ayant le même caractère.(41)
Quoique le problème du processus de formation de ces
normes du jus cogens n'est pas réglé aujourd'hui de façon
satisfaisante et définitive. (42)On peut dire que les valeurs
(38) CHARPENTIER, Op.cit., P. 101
(39) Idem, P. 40
(40) BORGHI, L'immunité des dirigeants politiques en
droit international, Genève 2003, P. 48
(41) DREYFUS, Op.cit., P. 54.
(42) VERHOLVEN, Op.cit., P. 202.
[21]
d'humanité et des droits de l'homme font partie
intégrante des normes de jus cogens. Ainsi donc, comme l'affirme
SIANGANU DIMBUNGU « les violations des valeurs d'humanité entant
que des valeurs qui constituent des infractions du droit international
humanitaire, lui-même partie intégrante du jus cogens sont
incompatibles à la notion des immunités diplomatiques ». Les
immunités diplomatiques tombent de façon tout à fait
automatique devant les normes du jus cogens parce qu'insusceptibles de toute
dérogation.
2. La mise en oeuvre de la protection diplomatique
A qui revient la compétence de réprimer la
violation du principe du jus cogens ? Cette question simple en apparence, est
d'une importance capitale. En effet, à l'anarchie qui aurait
prévalu sur la scène internationale, si tous les Etats se
réclamaient la compétence ou compétents pour
réprimer ces violations, les Etats ont préféré
l'institution d'un ordre juridique dotée du principe de la
compétence universelle.
Ainsi donc, c'est avant tout la compétence territoriale
de l'Etat qui s'affirme ici, sauf disposition expresses contraires. Cependant
parce que certains Etats recouvraient les auteurs des violations graves des
principes de jus cogens des immunités pénales du droit interne,
certains Etats invoquaient la compétence universelle, pour
prétendre à la répression de ces crimes. Ce qui entraine
que les immunités ou des règles de procédure
spéciale, qui peuvent s'attacher à la qualité officielle
d'une personne, en vertu du droit international ou du droit interne
n'interdisent pas à la cour pénale internationale d'exercer sa
compétence à l'égard de cette personne. (43) De ce qui
précède, nous pouvons retenir que la mise en oeuvre de la
violation des principes du jus cogens, spécialement des normes du droit
international humanitaire, appartient concurremment à l'Etat dans lequel
le délit a été commis et à la cour pénale
internationale dans le respect des principes du jus cogens et de « non,
bis in idem ». Les autres Etats ne peuvent intervenir qu'à titre
secondaire en respectant les immunités, dont pourraient jouir certains
personnes lesquelles doivent préalablement être levées pour
permettre les poursuites judiciaires. (44)
(43) AKELE ADAU P. et SITA AKELE MWILA, le crime contre
l'humanité en droit congolais, CEPAS, Kinshasa 1999, P. 30
(44) Cour international de justice, affaire du mandat
d'arrêt du 11 avril 2002 contre mémoire de la Belgique.
[22]
Section 2 : Les juridictions en droit
congolais
§1. Les règles générales en
matière de compétence
La compétence peut se définir comme l'aptitude
d'une juridiction à connaitre d'une affaire. C'est une portion du
pouvoir juridictionnel qui est conféré par la loi à une
juridiction pour connaître de certaines affaires données. Bien que
le pouvoir juridictionnel soit confié par la constitution en RDC aux
cours et tribunaux, un tribunal ne peut examiner n'importe quelle affaire qui
peut lui être soumis ; en effet le pouvoir juridictionnel de chaque
juridiction est limité.
Il faut distinguer le pouvoir juridictionnel de dire le droit
reconnu à toutes les juridictions de la compétence qui
délimite l'étendue du pouvoir juridictionnel pour chaque
juridiction. La compétence est subordonnée à l'existence
du pouvoir juridictionnel partagé par tous les types de juridiction.
Ainsi, un tribunal est compétent quand le litige peut être
jugé par lui en vertu d'une portion du pouvoir qui lui est dévolu
en cette matière. Par contre, le tribunal est incompétent lorsque
le litige sort de ses prérogatives du pouvoir. (45)
§2. Les ordres de juridiction
En République Démocratique du Congo, il existe
trois ordres de juridiction notamment :
? L'ordre judiciaire ;
? L'ordre constitutionnel ;
? Et l'ordre administratif.
S'agissant des juridictions de l'ordre judiciaire, c'est la
loi organique N° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation,
fonctionnement et compétence des juridictions qui est d'application.
S'agissant des juridictions de l'ordre constitutionnel, c'est
la constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi
de 2011 à son article 157, qui est d'application y compris la loi
organique N° 13/016 du 15 octobre 2013 portant organisation de la cour
constitutionnelle.(46)
S'agissant des juridictions de l'ordre administratif c'est la
loi organique N° 16/027 du 16 octobre 2016 relative à
l'organisation au fonctionnement et à la compétence qui est
d'application. (47)
(45) Constitution de la RDC modifiée par la loi N°
11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la
constitution du 18 février 2006
(46) Idem, art 157
(47) La loi organique N° 16/027 du 16 octobre 2016
relative à l'organisation ; au fonctionnement et à la
compétence des juridictions de l'ordre administrative ; lire dans son
ensemble.
[23]
Les juridictions de l'ordre judiciaire sont les
suivantes :
a) Les juridictions civiles : il
s'agit :
+ Du tribunal de paix ;
+ Du tribunal de grande instance ;
+ Du tribunal de commerce ;
+ Du tribunal du travail ;
+ De la cour d'appel
+ Et de la cour de cassation.
Cela étant, il nous faut souligner ici que le tribunal
du travail et le tribunal de
commerce sont régis par des lois particulières
qui les instituent c'est-à-dire par la loi
N° 002/2001 du 03 juillet 2001 portant création,
organisation et fonctionnement des
tribunaux de commerce et par la loi N° 016/002 du 16
octobre 2002 portant création ;
organisation et fonctionnement des tribunaux du travail en
RDC.
b) Les juridictions militaires : il
s'agit du, de :
+ Tribunal militaire de police ;
+ Tribunal militaire de garnison ;
+ La cour militaire ;
+ La cour militaire opérationnelle ;
+ La haute cour militaire.
Il convient de préciser que la loi distingue parmi les
juridictions de l'ordre judiciaire
les juridictions civiles et celles pénales ou
répressives. Il s'agit en réalité de mêmes
organes généralement qui connaissent des
procès civils et répressifs avec les mêmes
magistrats, la distinction réside en ce que les
procès civils sont jugés selon les règles
de la procédure civile tandis que les procès
pénaux sont les règles de la procédure
pénale. (48)
S'agissant des juridictions de l'ordre administratif,
nous distinguons :
+ Les tribunaux administratifs ;
+ Les cours administratives d'appel ;
+ Le conseil d'Etat.
(48) Pierre KANSEWU ; Notes de cours de l'introduction au droit
judiciaire G2 droit, UMD 2016 - 2017, inédites.
[24]
Il existe également des juridictions administratives
spécialisées notamment la cour de compte, les juridictions
disciplinaires des administrations publiques ou des ordres professionnels,
lesquelles juridictions sont régies par les lois particuliers
visées par l'article 149 alinéa 5 de la constitution congolaise.
(49)
Pour ce qui est de l'ordre constitutionnel il ne doit
être fait mention que la cour constitutionnelle régie par la loi
organique N° 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et
fonctionnement.
§3. Le caractère d'ordre public en
matière de compétence pénale
Les lois pénales sont d'ordre public parce qu'elles
ont pour but de régler les conflits pouvant intervenir entre Etat,
gardien de l'ordre, et de la sécurité et certains particuliers
qui refusent ou négligent de s'y soumettre.
Il est donc logique que les règles de
compétence en matière pénale entrainent les
conséquences suivantes :
? L'incompétence d'un tribunal peut être
soulevée en tout état de cause même pour la première
fois en cassation ;
? Elle peut être invoquée, par toutes les parties
;
? Elle doit être soulevée même d'office par
le juge ;
? On ne peut pas déroger à la compétence
d'un tribunal répressif au moyen des conventions
particulières.
§4. Les diverses distinctions à faire en
matière de compétence
a) La compétence
matérielle : elle consiste dans l'étendue ou la
portion du pouvoir de dire le droit confiée à un tribunal pour
connaître d'une affaire. En matière pénale, elle est
relative aux prérogatives de différents types des juridictions et
porte sur la nature et l'importance des poursuites ainsi que sur les
circonstances de faits fixant le taux de la peine.
b) La compétence personnelle :
elle est définie en fonction de la qualité de l'inculpé ;
elle peut se référer soit au statut, au grade ou encore à
la fonction publique etc.
c) La compétence territoriale
: chaque juridiction ne peut exercer sa compétence qu'à
l'intérieur d'une portion géographique appelée
« ressort » au-delà des limites de ce ressort
; elle devient incompétente.
La compétence territoriale est l'étendue
territoriale du pouvoir juridictionnel confié à une juridiction.
En matière pénale, les règles de la compétence
territoriale sont d'ordre public
(49) Art. 149 alinéa 5 de la Constitution de la RDC,
Op.cit.
[25]
contrairement à la matière de droit privé
où l'incompétence doit être soulevée «
in limine litis ».
Alors de nos jours, il faut noter qu'aucune juridiction en
droit congolais ne peut siéger sans le concours du ministère
public, y compris le tribunal de paix qui, autrefois pouvait siéger sans
celui-ci.
La présence du ministère est d'une grande
importance car il a un grand rôle à jouer en ce qui concerne la
justice, qui se résume en ce qui suit :
+ Rechercher les infractions, traduire les
présumés coupables devant les juridictions et soutenir les
accusations ;
+ Instruire les affaires pénales ;
+ Mettre l'action publique en mouvement, apprécier
l'opportunité des poursuites car tout acte contraire ne doit pas
obligatoirement être poursuivis ;
+ Représenter les parties lésées en cas
d'allocation des dommages et intérêt d'office par un tribunal ;
+ Exécuter les jugements en ce qui concerne la peine de
mort, la servitude pénale, des dommages et intérêts
d'office et contrainte par corps ;
+ Condamner les témoins absents ou récalcitrants
etc. (50)
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