Section 3 : Les organes bénéficiaires de
la protection diplomatique
L'expression agent diplomatique utilisée par la
convention de vienne du 18 avril 1961 est restrictive en ce sens qu'elle laisse
penser que cette protection diplomatique n'est stipulée qu'au profit des
ambassadeurs accrédités auprès de différents
Etats.
§1. Les organes au sens large
Point n'est besoin de souligner que tous les sujets de l'ordre
juridique international sont à ce jour des êtres abstraits, ce qui
ne préjuge toutefois pas de la personnification qui est
prêtée à tort ou à raison, à des personnes
physiques lorsqu'il leur est accordé par le traité un droit
d'accès devant une autorité juridictionnelle internationale. Tous
réels qu'ils soient, ces
(22) DUPUY, Droit international public, 2ème
éd. DALLOZ, Paris 1993, P.82
(23) Idem, P. 83
(24) NGUYEN QUOC, Droit des relations internationales
4ème édition, CUJS, 1998, P. 47.
(25) SALOMON Jean ULB, manuel de droit diplomatique ; Brulant,
Deltat, Bruxelles, 1994, P. 28-32.
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sujets abstraits ne peuvent dès lors
concrètement agir qu'à l'intermédiaire des personnes
physiques à qui les actes sont imputés aux conditions que fixe la
loi. (26)
On conçoit en pareille perspective que les
privilèges et immunités soient le cas échéant,
accordés aux organes sujets de droit international quand bien même
ces derniers ne bénéficient pas toujours d'un traitement
privilégié, ils pourraient d'ailleurs aisément se faire
octroyer néanmoins des immunités en raison du rôle
décisif qu'ils jouent dans la matérialisation d'une
capacité juridique qui est appelée à demeurer virtuelle si
elle ne trouve pas des organes pour la réaliser.
Ainsi, il y a lieu d'entendre par organes toutes les personnes
(agents, fonctionnaires etc.) dont les actes engagent l'Etat en droit
international. Ces organes ainsi compris sont très diversifiés,
cette diversité se comprend sans peine, elle reflète tout
à la fois la multiplicité des sujets du droit international et la
liberté d'organisation interne dont ceux-ci jouissent normalement
lorsqu'ils ne doivent pas leur existence et leur personnification à un
acte conventionnel. Il est vrai que cette multiplicité est
réduite et que la liberté évoquée n'est pas
totale.
§2. Les relations diplomatiques et consulaires
A vrai-dire ; la qualité des relations diplomatiques
est relative. Elle est fonction des facteurs historiques, culturels,
idéologiques, politiques, économiques et psychologiques. Il est
certain que le passé colonial a un poids dans les relations entre une
ancienne colonie et une ancienne puissance coloniale. Comme il est
évident qu'entre pays arabes, la langue arabe et la religion musulmane
entre autres, influent sur la qualité de leurs relations mutuelles.
L'élément économique joue dans les relations entre japon
et les Etats unis par exemple alors que le facteur psychologique pèse
dans les relations entre la chine et les Etats unis etc.
Les relations diplomatiques sont fort anciennes mais ce n'est
qu'à partir de 1648 avec les traités de WESPHALIE qu'est apparue
la diplomatie permanente. Elles ont d'abord été
coutumières avant d'être codifiées. La première
codification intervient au congrès de vienne de 1815 par l'adoption du
règlement de vienne sur les agents diplomatique. Ce dernier sera
complété le 12 novembre 1818 par le protocole d'AIX-la chapelle.
Il a fallu attendre les incidents de la guerre froide pour voir enfin
l'assemblée générale des nations unis s'intéresser
à ce sujet, par le vote de la résolution 685 du 5 décembre
1952, l'assemblée a demandé à la commission du droit
international d'étudier en priorité la codification des relations
diplomatiques. Une autre résolution votée par la suite en son
sein décida de la convocation
(26) BARKEN state immunity diplomatic; immunity and act of state,
Delta, Bruxelles 1994.
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d'une conférence qui devrait se réunir à
vienne, ainsi la convention de vienne sur les relations diplomatiques fut
adoptée le 18 avril 1961 et entrée en vigueur le 24 avril 1964.
(27)
Quant aux relations consulaires, leur règlementation
est issue des coutumes ; des décisions de juridictions nationales. La
convention sur les relations consulaires a été adoptée
à vienne le 24 avril 1963, lors d'une conférence de codification.
Elle est entrée en vigueur en mars 1967.
§3. Les organes chargés des relations
diplomatiques
Il est à noter que l'Etat agit à travers
notamment les organes politiques et des organes administratifs.
a) Les organes politiques
Il va sans dire que les relations entre entités
politique par excellence que forment les Etats empruntent en ordre prioritaire
les canaux politiques, c'est à ce niveau que se lèvent des
options fondamentales qui gouvernent les relations entre membres de la
communauté internationale. (28)
Ordinairement l'organe exécutif joue un rôle
moteur de la politique extérieure de l'Etat. Encore que l'organe
législatif dispose des moyens relatifs d'un régime à un
autre de contribuer, sinon à l'énoncé de grandes
orientations de la politique étrangère ; tout au moins à
posteriori de contrôler la conduite de celle-ci.
Habituellement le chef de l'Etat joue un rôle essentiel
dans les relations internationales. Toutefois une évolution
récente depuis le déclin des régimes monarchiques. Dans
les Etats où le chef de l'Etat ne dispose plus que des fonctions
symboliques, c'est le chef du gouvernement qui tend à assumer la
première place dans les relations extérieures. Comme on peut s'en
apercevoir, il s'agit là des situations exceptionnelles à la
pratique générale des Etats.
Au sens du gouvernement, le ministre des affaires
étrangères par définition joue ou a un rôle
considérable. Il peut cependant s'ajuster au rôle du chef de
l'Etat et éventuellement du chef du gouvernement. D'autre part, le
développement de la coopération internationale dans les domaines
de plus en plus spécialisés permet ainsi aux autres membres du
gouvernement d'intervenir dans des relations internationales.
L'accroissement de la technique des rapports
intergouvernementaux font qu'aujourd'hui plusieurs autorités
évoluent et agissent sur la scène internationale en
(27) BULA BULA Sayeman ; Notes de cours de Droit international
public, G3 UNIKIN, 2008, inédit
(28) Idem.
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prétendant toutes aux statuts d'agents diplomatiques.
C'est ainsi que cette qualité est reconnue aux personnes telles que :
? Le chef de l'Etat ;
? Le chef du gouvernement ;
? Le ministre des affaires étrangères.
Il sied de noter que nous allons plus nous intéresser
au ministre des affaires étrangères qu'aux autres dans le cadre
de la rédaction de notre objet d'étude.
Alors pour ce qui est des ambassadeurs ; des consuls, membres
des missions diplomatiques permanentes, eux représentent leur Etat
auprès de l'Etat accréditaire, ils protègent les
intérêts de leurs Etats et de leurs ressortissants, informent
leurs gouvernements sur la vie politique, sociale et économique, font
connaître et apprécier leurs Etats et les réalisations en
assurant la promotion de leurs intérêts et négocient enfin
avec les Etats de résidence.
Au personnel diplomatique, il lui est reconnu les
privilèges et immunités suivants :
? Les agents diplomatiques bénéficient de
l'inviolabilité personnelle. Ce principe oblige l'Etat
accréditaire d'assurer une protection complète au personnel
diplomatique des Etats accréditant. Ce personnel doit
bénéficier de la liberté de déplacement et de
circulation sur l'ensemble du territoire sauf dans les zones des tensions ou de
guerre où l sécurité ne peut être garantie ;
? Les personnes diplomatiques bénéficient aussi
de l'immunité juridictionnelle c'est-à-dire qu'elles ne peuvent
être jugées par les juridictions de l'Etat accréditaire
excepté le cas où elles exercent des activités
libérales ou commerciales en dehors de leurs fonctions officielles.
Elles bénéficient également des exemptions fiscales. Leurs
membres de famille bénéficient de mêmes privilèges
et immunités. (29)
Pour les relations consulaires, nous dirons d'abord que le
poste consulaire est une représentation administrative chargée de
la protection des intérêts de l'Etat et de ses ressortissants, de
favoriser les relations commerciales, économiques, culturelles et
scientifiques, d'exercer des fonctions vis-à-vis des nationaux
liées à l'Etat civil, l'assistance judiciaire, la
délivrance des passeports, d'accorder des visas aux étrangers qui
désirent se rendre dans le pays d'envoi etc.
(29) VERHOLVEN, Droit international public, Bruxelles, Lanciers
2000, P. 204.
[17]
Les relations consulaires ne doivent pas connaître
d'entraves car elles contribuent au développement des relations amicales
entre les nationaux, elles assurent une protection et assistance aux
étrangers qui résident sur le territoire d'un autre Etat. De ce
fait, le consulat et les agents consulaires jouissent des privilèges et
immunités conformément au droit international mais à un
degré moindre que les membres des missions diplomatiques.
Pour ce qui est des fonctionnaires en missions diplomatiques
ad hoc ; ils sont désignés pour remplir auprès d'un ou
plusieurs Etats ou organisations internationales et avec leur accord, des
missions d'une portée limitée, dans le temps et pour leur objet
et dans toutes circonstances dont l'importance justifie l'intervention des
responsables de haut niveau ou dont le contenu exige celle des personnels
spécialisés possédant des compétences
spécifiques. (30) Tel est le cas du secrétaire
général des nations unies et de ses nombreux représentants
spéciaux, qui interviennent dans les relations internationales dans le
cadre du maintien de la paix tendant au règlement pacifique des
différends, c'est aussi le cas des envoyés spéciaux des
chefs d'Etats.
La mission spéciale se définit comme une mission
temporaire ayant un caractère représentatif de l'Etat,
envoyé par un Etat auprès des autres Etats avec le consentement
de ce dernier pour traiter des questions déterminées ou pour
accomplir une tâche déterminée. (31)
Il est à préciser que les statuts de ces
diplomates ad hoc sont très semblables à celui des diplomates de
carrière. Des immunités leur sont reconnues dont l'étendue
varie selon la personnalité et qui n'ont bien entendu qu'une
durée limitée puisque liées à l'accomplissement des
missions déterminées. (32)
S'agissant des experts, ils sont souvent appelés par un
Etat ou une organisation internationale pour mettre à sa disposition
leur compétence technique. Ils sont inviolables et ne sauraient faire
l'objet d'arrestation et de détention puisqu'ils jouissent de
l'immunité de juridiction étant limitée aux actes
officiels. (33)
(30) Convention sur les relations consulaires du 24 avril
1863 entrée en vigueur en 1967 lire dans son ensemble
(31) Convention des Nations unies sur les missions
spéciales adoptées le 16 décembre 1969 dans sa
résolution 2530 entrée en vigueur le 21 juin 1995, art. 1.
(32) BULA BULA Sayeman, op.cit., P. 186
(33) Idem.
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CHAP. II : PROTECTION DIPLOMATIQUE DU CHEF DE L'ETAT, DU
PREMIER MINISTRE ET DU MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES ET DE LA COOPERATION
INTERNATIONALE
Le chef de l'Etat et les autres ministres en exercice
spécifiquement le ministre des affaires étrangères
représentent l'Etat. Pour cela, il faut que nous puissions approfondir
l'étendue de la protection diplomatique dont jouissent certaines
personnes jouant un grand rôle pour les intérêts de la
nation avant d'étudier les limites que peut connaître cette
protection en cas des violations par elles des principes impératifs du
droit international désignés sous l'expression « jus cogens
».
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