B.L'inscription des
représentations autour de l'auto-gynécologie dans des cadres
psychosociaux préexistants : la pensée et la pratique
Ces premiers résultats nous permettent
d'appréhender de manière plus concrète les
représentations de l'auto-gynécologie et leur inscription dans
d'autres cadres de références préexistants. Un
développement en est proposé à travers la figure 5, qui
matérialise la génèsede l'auto-gynécologie en
fonction de ses ancrages culturels.
Figure 5. Génèse et fonction de
l'auto-gynécologie
CULTURE + REPRESENTATIONS + EXPERIENCES =
OPERATIONNALISATION DE L'AUTO-GYNECOLOGIE
En définitive, la pratique de l'auto-gynécologie
naît d'une combinaison de l'expérience, en tant que rencontre
entre les dimensions sociales, interactives, cognitives, psychiques ou
émotionnelles du sujet, de sa culture et de ses représentations.
L'analyse des données fait état de facteurs déterminants,
le premier lié à des problématiques autour du
corps, de l'intimité et de la féminité, et le
deuxième lié aux ancrages dans des valeurs,
qu'il s'agisse de l'intérêt pour la nature, du féminisme,
et/ou de la remise en cause de l'institution médicale. Ainsi, en
fonction de la position d'une participante sur le continuum des valeurs
représenté par les bulles à gauche du schéma,
l'opérationnalisation de l'auto-gynécologie se retrouvera au
même endroit sur le continuum des représentations de
l'auto-gynécologie situé à droite du schéma.
Enfin, l'implication du sujet dans l'auto-gynécologie
est liée à sa fonction, qui vient nourrir et apporter une valence
positive à la relation à soi. Les différentes pratiques de
l'auto-gynécologie en fonction de leur inscription dans des
systèmes de valeurs, croyances et normes seront présentées
et développées à l'aide d'exemples.
L'auto-gynécologie, une
pratique cristallisée par un ancrage dans un système de
valeurs
Les représentations de l'auto-gynécologie
semblent se cristalliser autour de trois idées principales, qui peuvent
être liées et imbriquées entre elles ou non.
Caractérisées par une visée pratique, elles renvoient
chacune à une mise en application de l'auto-gynécologie
différente.
L'auto-gynécologie
comme pratique sanitaire alternative naturelle
La première représentation, autour des soins et
de la santé naturelle, est issue de représentations
préexistantes autour des valeurs du "naturel". Le discours des
participantes concernées par cette représentation se
développe autour d'une valorisation des médecines et traitements
alternatifs naturels, ainsi qu'une dévalorisation et d'un rejet des
médications traditionnelles chimiques. Les pratiques
d'auto-gynécologie, comme pour les soins dans d'autres domaines de
santé, se développent autour de soins naturels,
pour éviter d'avoir recours à des traitements
médicamenteux. Cette représentation se développe et
évolue autour de la
tension« naturel-artificiel ».
Maud : « les antibio ça finit par abimer
la flore intestinale, `fin ça fait pas trop le tri entre les bonnes et
les mauvaises bactéries quand ça attaque euh... du coup j'essaie
d'éviter au maximum les médicaments forts, quand je peux faire
autrement, je fais même les plantes euh... les huiles essentielles... des
trucs doux » ; « Euh... ça a été
jusqu'à me mettre une gousse d'ail dans le vagin, pour soigner une
mycose, [rires] »
Morgane : « Bah... pour faire simple, j'ai
quasiment jamais pris d'aspirine, de Spasfon, euh... en gros les
médicaments génériques je connais que de nom, les
antibiotiques je connais que de nom c'est... quand je suis malade, alors j'ai
jamais été très malade, genre j'ai fait des gastros quoi
ou des petits trucs classiques, mais généralement je suis malade,
`fin j'ai un rhume une fois par an en gros, et, et après ben quand je
suis enrhumée `fin je mets de l'huile essentielle de Ravinstara sur le
torse, et je prends des capsules à l'origan, je dors beaucoup, et puis
euh... alors c'est sûr que ça met trois, quatre jours contre un ou
deux jours pour des médocs plus costauds, mais je sais que j'ai pas de
répercussion sur le foie, sur l'état général quoi,
je préfère ça. » ; « Donc
ouais j'essaie aussi de faire ça de manière naturelle, quand...
pour tout mon corps. » ; « j'avais des rapports
avec mon mec après quand ça me brûlait je mettais de
l'huile de nigelle, bien efficace. Euh j'utilisais l'huile de coco comme
lubrifiant, après j'ai eu, à un moment j'avais eu je sais plus un
petit bouton je sais plus ce que c'était, genre une petite verrue, enfin
je sais pas si c'était vraiment une verrue, enfin bon j'avais un bouton
quoi sur les grandes lèvres il me semble, et je sais plus ce que j'avais
mis dessus... mais il me semble que c'était une huile à
appliquer... »
Eve : « c'est être à l'écoute
de cette partie-là du corps ou de ce qu'elle peut avoir à dire,
c'est de faire des choix qui ne vont pas contre sa nature, je dirais,
c'est-à-dire que par exemple pendant un moment, j'ai pris la pilule, et
puis je me suis vite rendue compte que ça n'allait pas du tout, donc
j'ai arrêté ça, donc pas de molécules
chimiques » ; « Quand je sais pas comment faire au
naturel, ou quand je suis pressée, ou quoi, il m'arrive de prendre de la
chimie, mais c'est rare. Mais j'ai été élevée aussi
dans un contexte de famille qui utilise quasiment pas de médicaments, et
on fait par soi-même, ouais. »
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