CHAPITRE 2 : LE TRAITEMENT JURIDIQUE DE LA
CYBERCRIMINALITE AU
BURKINA FASO
La cybercriminalité fait référence aux
actes posés dans le cyberespace avec intention criminelle. Ainsi comme
partout dans le monde, au Burkina Faso les technologies de l'information et de
la communication prennent progressivement une place de choix dans le quotidien
des citoyens. Le ministre de la justice burkinabè de l'époque,
René BAGORO déclare « Si cette plongée dans la
société du numérique est une belle opportunité
d'amélioration de la qualité de vie des personnes et de
développement d'une nouvelle économie, on constate aussi qu'elle
présente de nouvelles menace ». De cette affirmation nous nous
inclinerons à traiter des mesures mises en oeuvre par les
autorités burkinabè pour répondre à la
problématique relative aux infractions liées aux NTIC. Pour s'y
faire, il serait judicieux d'évoquer la politique préventive sur
la cybercriminalité (section 1), d'une part, ainsi que
de la répression de ce phénomène d'autre part
(section 2).
Section 1 : La prévention de la
cybercriminalité
La cybercriminalité constitue la nouvelle menace du
21e siècle 50 . Les Etats,
préoccupés par le risque que les NTIC soient utilisées
pour commettre des infractions pénales décident de renforcer leur
coopération en matière de lutte contre la
cybercriminalité. Cette coopération se matérialise par la
mise en place de mesures légales de prévention
(paragraphe 1), ainsi qu'une mise en place de mesures
institutionnelles (paragraphe 2) de lutte contre la
cybercriminalité.
Paragraphe 1 : Les mesures légales de
prévention
Tout comme pour les infractions de droit commun, la
prévention de la cybercriminalité requiert la mise en place d'un
arsenal juridique constitué par un ensemble de normes de conduites et
d'utilisation des NTIC tant sur le international que interne. Ainsi se
manifeste pour les Etats le besoin d'une législation pénale
appropriée à la lutte contre la cybercriminalité. Dans la
suite de notre analyse, nous traiterons en premier lieu du cadre juridique
international (A) en matière de
cybercriminalité, et voir en second lieu le cadre juridique interne
(B) adoptés par les autorités compétentes
qui encadrent les infractions en matière informatique.
50 Myriam QUEMENER, Joël FARRY, la
cybercriminalité, défis mondial, op.cit. p. 156
Présenté par IDI MOUMOUNI Illiassou 16
L'approche juridique de la cybercriminalité dans la
législation Burkinabé
A- Les textes internationaux
Il faut dire qu'en matière de crime informatique,
générés par l'évolution technologique bien que leur
expansion soit récente, l'arsenal juridique burkinabè est assez
consistant pour réprimer les infractions liées aux NTIC. C'est le
cas notamment de la convention de Budapest une référentielle en
matière de lutte contre la cybercriminalité. Cet accord vise
à harmoniser les différentes législations sur la
cybercriminalité en vue d'une prévention efficace du
phénomène. N'ayant pas été ratifié par le
Burkina Faso, cette dernière constitue tout de même une
référence en matière de lutte contre cette nouvelle menace
de la cybercriminalité.
Entrée en vigueur le 27 juin 2014 à Malabo, l'UA
à travers la convention sur la cyber-sécurité et la
protection des données à caractère personnel fixe une
stratégie de répression de la cybercriminalité. Cette
dernière entre en vigueur 30 jours après dépôt de
l'instrument de ratification ou d'adhésion51. En vue de sa
ratification, en juillet 2021 les autorités compétentes
burkinabè ont adoptées un projet de loi. Les Etats parties
s'engagent dès lors à adopter des mesures législatives
qualificatives d'infraction, des actes qui affecte la confidentialité,
l'intégrité, la disponibilité des NTIC52.
Contrairement à la convention de Budapest qui ne constitue qu'une
référence pour le juge Burkinabè, les dispositions de la
convention de l'UA font l'objet d'application sur le territoire national.
Au rang des textes anti-cybercriminalités53
la Communauté Economique Des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) dont
est membre le Burkina Faso désireuse d'adopter une cadre légale
de prévention contre ce phénomène, signe une Directive
portant lutte contre la cybercriminalité dans l'espace de la CEDEAO le
19 aout 2011. Cette dernière invite les Etats membre à se
conformer à ses dispositions au plus tard le 1er janvier
201454. La particularité de cette convention tient du fait
qu'elle définit un cadre structuré d'infractions liées aux
NTIC.
Au vue de la recrudescence d'actes
répréhensibles dus aux nouvelles technologies, il s'impose pour
les Etats de protéger droits et libertés fondamentaux au cours de
cette nouvelle ère. Pour ce faire, en plus de l'Union Africaine (UA),
l'Union Européenne (UE), ainsi que la CEDEAO ont mis en place de mesures
légales spécifiques pour protéger les personnes à
l'ère du numérique. Par ces initiatives, l'objectif est de
rationnaliser l'utilisation des nouvelles
51 Art 36 convention UA sur la
cyber-sécurité et la protection des données à
caractère personnel.
52 Art 25 convention UA sur la
cyber-sécurité et la protection des données à
caractère personnel.
53 Les textes législatives et ou
réglementaires qui traitent des infractions au moyen des nouvelles
technologies de l'information et de la communication.
54 Art 35 de la directive C/DIR/1/8/11 portant lutte
contre la cybercriminalité dans l'espace de la CEDEAO.
Présenté par IDI MOUMOUNI Illiassou 17
L'approche juridique de la cybercriminalité dans la
législation Burkinabé
technologies, garantir un espace numérique de
confiances pour les personnes à l'égard des données
personnelles.
Ces conventions sont respectivement la convention pour la
protection des personnes à l'égard du traitement
automatisé de données à caractère personnel
adoptée en 1985 à Strasbourg à l'initiative de l'UE,
connue sous le nom de la convention 108. Cette dernière est
ratifiée par le Burkina Faso en mars 2017. En réponse donc
à cet accord, le 16 février 2010 la CEDEAO adopte l'acte
additionnel relatif à la protection des données à
caractère personnel dans l'espace de la CEDEAO.
B- Les textes nationaux
À défaut d'enrayer la cybercriminalité,
les Etats s'organisent pour limiter les dégâts causés par
cette nouvelle forme de criminalité. A l'instar de plusieurs Etats
africains ayant pris des mesures préventives face aux risques
engendrés par les NTIC comme la cote d'ivoire ou le
Sénégal, les autorités burkinabè agissent en
conséquence et répond ainsi aux recommandations
transposées par la directive de la CEDEAO55.
Ainsi, compte tenu de la difficulté de
légiférer de façon générale le domaine de la
cybercriminalité, à partir des années deux milles les
autorités compétentes burkinabè mettent progressivement
à la disposition des acteurs de la justice un ensemble de textes
législatifs et ou règlementaires destinés à
régir des normes de conduite en matière électronique.
C'est le cas notamment de la loi 045-2009/AN relative à la
règlementation des services et transactions électroniques au BF.
L'objet de cette loi est de règlementer les services et des transactions
au moyen des NTIC56. Par cette initiative, le législateur
entend définir son champ d'application ainsi garantir le
développement de la société de l'information.
La cybercriminalité présente des
conséquences économiques pour les Etats. Pour protéger les
personnes ainsi que les systèmes bancaires, est adoptée le 16
juillet 2009 la loi 021-2009/AN portant loi uniforme relative à la
répression des infractions en matière de chèques, de
cartes bancaires et d'autres instruments et procédés
électroniques de paiement. Par conséquent, cette loi puni d'une
peine de cinq ans et une amende de dix millions quiconque dans le but de se
procurer un avantage économique illégal ou de le procurer
à un
55 Art 2 « la présente Directive a pour
objet d'adapter le droit pénal de fond et la procédure
pénale des Etats membres de la CEDEAO au phénomène de la
cybercriminalité ». Directive C/DIR/1/08/11 du 19aout 2011.
56 Art 1 Loi 045-2009 portant règlementation
des services et des transactions électroniques au Burkina Faso.
Présenté par IDI MOUMOUNI Illiassou 18
L'approche juridique de la cybercriminalité dans la
législation Burkinabé
autres, introduit, altère, efface ou supprime des
données informatique ou perturbant le fonctionnement d'un système
informatique »57.
En outre, dans l'optique de protéger les personnes
à l'égard du traitement des données à
caractère personnel, fut adoptée le 30 mars 2021 une loi en la
matière. La loi portant protection des données à
caractère personnelle ayant pour objet de protéger les droits et
libertés fondamentaux des personnes physiques en matière de
traitement de leurs données à caractère
personnel58, quels qu'en soient la nature, le mode
d'exécution ou les responsables59. Par cette initiative,
l'objectif du législateur est d'empêcher l'utilisation
illégale des données à caractère personnel, souvent
moyennant une rémunération.
|