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La présomption d'innocence et la pratique judiciaire congolaise


par Giresse Emery Kasaka Ngemi
Université Révérend Kim - Licence 2017
  

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A. Actori incumbit probatio126(*)

En matière pénale, le problème de la preuve ne se pose pas de la même manière qu'en matière civile. Par conséquent, le principe est « Actori incumbit probatio127(*)».

En effet, l'article 67 de la loi organique du 11 avril 2013 prévoit qu' « en matière répressive, le Ministère public recherche les infractions aux  actes législatifs et réglementaires qui sont commises sur le territoire de la République. Il reçoit les plaintes et les dénonciations, accomplit tous les actes d'instruction et saisit les Cours et tribunaux128(*)».

Cela revient à dire que, le Parquet ou le Ministère Public étant Misus publicus, c'est-à-dire l'envoyé, le représentant du peuple, a une énorme charge d'apporter la preuve de l'accusation qu'il porte à charge de la personne présumée innocente, car le Professeur Tasoki Manzele pense que, lorsque le juge fonde sa conviction sur la circonstance que le prévenu ne fournit pas la preuve de ses dénégations des faits qui lui sont reprochés, il viole le principe mettant le fardeau de la preuve à charge de l'accusateur129(*). En vertu de la jurisprudence, une telle décision sera annulée130(*).

C'est le cas, à Kinshasa (TGI Kinkole/RP135 du 9 septembre 2017131(*)) de l'affaire Ministère public contre le prévenu CPB, poursuivi pour viol sur la dame EB, faits prévus et punis par l'article 170 du code pénal congolais livre II. A l'audience, le procureur rapporte qu'il s'avère qu'en date inconnue, mais vers le mois de mars, la victime E était violée par plusieurs personnes inconnues et dont elle ignore les visages. Ainsi, elle porte plainte contre inconnu en date du 25 mars 2017. Curieusement, la victime EB va se plaindre après les faits, en date du 28 mars 2017 à 22 heures pour viol contre le prévenu C, surnommé Immortel, sans préciser le nom de CPB, lequel fera l'objet d'une question en date du 2 avril de la même année. Malheureusement, loin de se constituer partie civile, la victime désiste de l'action publique initiée afin de sauvegarder les relations familiales, sans fournir des preuves de ses allégations. Et lorsque le médecin apporta l'expertise, celle-ci établie le viol, malgré cela, elle indique qu'il a eu lieu en date du 27 mars par 5 hommes. Tout à coup, la victime déchira le papier en disant avoir été violée en date du 28 mars. A l'audience publique du 19 juillet, par manque de preuve, le juge acquitte le prévenu Christian Pongo Bukasa du chef de viol, parce que le doute profite à l'accusé et le déclare innocent.

A notre avis, cette affaire ne devrait pas donner lieu à un mandat d'arrêt, ni à une détention quelconque, parce qu'on n'arrête pas un justiciable sans éléments compromettants ni preuve plausible lui imputant la faute, et, le ministère public n'a pas démontré qu'il s'agit bel et bien du prévenu poursuivi, pourtant il a la mission aussi d'établir l'identification exacte de la personne poursuivie, afin de dire qu'elle n'est pas autrement identifiée. Pourtant, Cédric a fait 5 mois de détention qui a abouti à un non-lieu.

Il en est aussi, au Cameroun, de l'affaire Ngami François contre Ministère et Jonas Nguem Eyango, dans l'arrêt n°99/P du 16 avril 1998, où « le ministère public accusa le prévenu pour corruption de la jeunesse, et lui demanda d'apporter la preuve du contraire. L'avocat de la défense, Maître Etienne Ntsamo, Avocat à Nkongsamba, après l'instance et l'appel, s'est pourvu en cassation. Parce qu'il a argué que le prévenu bénéficie de la présomption d'innocence et qu'il revient à l'accusation de prouver sa culpabilité. Et le juge de la Cour Suprême a cassé et annulé l'Arrêt n°256/co rendu le 9 décembre 1986 par la Cour d'Appel de Doula. Il a renvoyé l'affaire à la Cour d'Appel de Baffoussam132(*)».

En réalité, cette affaire ne devrait pas donner lieu à un mandat d'arrêt, parce qu'on n'arrête pas un justiciable sans éléments compromettants pour lui demander de prouver les raisons de son arrestation.

De même, le principe actori incumbit probatio résulte d'un autre grand principe, celui de la présomption d'innocence, qui impose à ce que la charge de la preuve incombe à l'accusation, c'est-à-dire à la partie poursuivante.

Ainsi, quiconque affirme quelque chose doit le prouver. C'est pour cette raison que le Ministère Public dans sa nature de représentant de la nation a la charge de prouver l'élément légal de l'infraction, ce qui veut dire l'existence d'un texte de loi qui punit les agissements reprochés ; il a en outre la charge de prouver les éléments matériels réunis ou sa matérialisation et l'élément moral de ladite infraction. Le Ministère Public a également la charge de prouver l'imputation de l'infraction à la personne accusée133(*), étant donné que la responsabilité pénale égale imputabilité plus culpabilité134(*).

D'évidence, bien que tous les éléments constitutifs de l'infraction soient réunis et que celle-ci ait eu un résultat nuisible, son auteur peut cependant ne pas être pénalement responsable s'il se trouvait au moment des faits, privé d'intelligence, ou sous l'emprise d'une contrainte irrésistible. Il est alors couvert par ce que l'on appelle, les causes de non-culpabilité135(*).

Ainsi, la charge de la preuve de tous les éléments constitutifs de l'infraction et de l'absence des causes d'exonération incombe tout entièrement au Ministère Public. Ce principe est de bon sens et répond à l'exigence de sécurité des citoyens.

Par ailleurs, il incombe au prévenu la charge de la preuve dans la mesure où il invoque un moyen spécial de défense ou une exception, et là, il devient comme un demandeur. Et par conséquent, il doit démontrer l'existence : reus in excipiendo fit actor136(*).

De surcroît, l'expression elle-même incombe logiquement au prévenu présumé avoir commis une infraction (tout en étant innocent jusqu'à ce qu'il soit reconnu coupable par un jugement définitif) de prouver que son acte peut se justifier légalement.

D'évidence, la personne poursuivie n'a pas, en pratique, une attitude passive.

Au contraire, elle va chercher à démontrer son absence de culpabilité. En effet, rien n'interdit au suspect d'être un sujet actif dans son propre procès et d'agir en vue de contredire les éléments allégués à son encontre, attitude souvent adoptée puisqu'il en va de son intérêt de s'y prêter. Il s'agit là d'un droit à la riposte voire à la contre-attaque en lien avec la nécessité de débattre contradictoirement de tous les éléments de preuve. Abordons le doute qui profite à l'accusé (B).

* 126 LUZOLO BAMBI LESSA E-J.,  Op. cit, Pp410-411; NGOY ILUNGA WA NSENGA Th., Contribution à la systématisation du droit congolais de la preuve, Thèse, UNIKIN, 2012, 433 pages ; TASOKI MANZELE J-M., Op. cit, p156

* 127 LUZOLO BAMBI LESSA E-J.,  Op. cit, p410.

* 128La loi organique n°13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire.

* 129 TASOKI MANZELE J-M., Op. cit, p156.

* 130 Arrêt du 2 août 1973, M.P c/O. et M., in revue juridique du zaïre, 1974, n°1, p56 cité par TASOKI MANZELE J-M., Op. cit, p156

* 131 Saisie par le requête aux fins de fixation de la date n°530/RMP 1405/PR 025/15 du 8 août 2017 du procureur de la République de Kinshasa près le TGI Kinkole.

* 132 DIAPANDA MOUELLE A., Droit pénal, Répertoire chronique de la jurisprudence de la Cour Suprême du Cameroun, Tome 1, Deuxième partie, 1980-2000, p1231, cité par MONEBOULOU MINKANDA H-M., Op. cit, p80.

* 133 NYABIRUNGU mwene SONGA, Op. cit, p280.

* 134Idem.

* 135 MICHIELS O., JACQUES E., Principes de droit pénal, Notes sommaires et provisoires - 3e édition, ULG, 2014-2015, Pp105-124.

* 136 TASOKI MANZELE J-M., Op. cit, p157.

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