Conclusion partielle
Ce chapitre a été consacré au fondement
général de l'étude. La première sections'est
basée sur le cadre conceptuel du sujet en définissant les
concepts opératoires. La tertiarisation entendue comme une montée
en puissance des activités des services dans une économie
donnée.
La deuxième section quant à elle a abordée
l'état de l'art théorique et empirique de la tertiarisation. A la
lumière de cette dernière, deux conceptions se dégage sur
la croissance tertiaire ; la première dite post industrielle qui
soutient le rôle prépondérant des services sur la
croissance économique et la deuxième dite néo-industrielle
qui reconnaît l'industrie comme le moteur de la croissance.
CHAPITRE II : LES FAITS
STYLISES DE LA TERTIARISATION
Introduction partielle
La tertiarisation des économies a souvent
été analysée comme un phénomènede
désindustrialisation devant mener, à terme, à une
économie de services.L'analyse des limites de cette approche permet de
contester l'idée d'unedissociation stricte entre secteur industriel et
secteur des services.En réalité, ces deux secteurs sont fortement
connectés et l'une des caractéristiquesmajeures de
l'évolution des économies développées est plus
précisément la croissance des services à l'industrie, ce
qui permet de soutenir l'idéeque les économies avancées
restent des économies de service.
Les difficultés d'analyse du phénomène de
«tertiarisation» des économiesdéveloppées
proviennent de la délicate caractérisation de ce que l'on
appellegénéralement «le tertiaire». En effet, ce
dernier n'apparaît pas comme unsecteur au sens strict du terme, mais
plutôt comme un ensemble
d'activitéshétérogènes.Le fondement commun de ces
activités est de ne pas produire de biensmatériels, mais de
fournir un produit «intangible», difficilement mesurable.
Le présent chapitre nous présente les principaux
traits caractéristiques du secteur tertiaire ainsi que les
différentes analyses de la tertiarisation.
Section 1 : Le
fondement trisectoriel
Société tertiaire et tertiarisation sont deux
expressions qui mettent en relief des formes particulières
d'organisation économique et sociale [A. Barcet et J. Bonamy (1988)], et
la terminologie «primaire, secondaire et tertiaire» remonte au
début des années 30 [C. Linchtenstein (1993)]. C'est à
partir du moment où la part des activités non agricoles et non
industrielles va dépasser celle des activités industrielles
qu'est élaborée la théorie des trois secteurs [J.
Fourastié (1963)].
[C. Linchtenstein (1993)] note que Fisher est le premier
auteur, bien que la paternité en soit souvent conférée
à C. Clark, à avoir dégagé trois étapes
principales dans la société, à partir de l'observation des
habitudes de dépenses des individus ; cette observation lui permet de
généraliser ce qui doit arriver quand des sociétés
pauvres pensent pouvoir dépenser plus que ce qu'elles
dépensaient auparavant [J.De Bandt et Petit (1992)]. Partant de cette
observation, il définit trois étapes qui successivement sont
complémentaires par rapport au développement
économique.
Selon Clark qui a formulé cette loi, toute
économie suit le schéma suivant : « dans un
premier temps le secteur secondaire se développe rattrape puis
dépasse le secteur primaire, il devient le plus important et la
population active du secteur primaire diminue au profit du secondaire (exode
agricole puis rural) » [P. Jaccard, (1995)].
Figure 1 : La loi de trois secteurs selon Colin
Clark

Source : [P. Jaccard, (1995)]
Dans le type d'analyse proposé par C. Clark (1914) nous
fait savoir [P. Jaccard (1955)], à mesure que le temps passe et que les
communautés atteignent un stade plus avancé de
développement économique, la main-d'oeuvre agricole tend à
décroître par rapport à la main- d'oeuvre industrielle qui,
elle-même, tend à décroître par rapport aux effectifs
employés dans les services. Partant de l'analyse de Clark qui se
réfère alors à W. Petty qui en 1691, se demandant pourquoi
le revenu des Hollandais de son temps était plus élevé que
celui des Anglais, avait trouvé l'explication dans le fait que, pour une
plus forte part, les Hollandais vivaient de l'industrie et du commerce [M.
Lengelle (1966)].
Ainsi, les activités économiques sont-elles
divisées en trois catégories (Fisher, 1935 et 1945). La
première catégorie comprend le travail agricole et minier qui a
pour objet direct la production des aliments et des diverses matières
premières. La seconde recouvre les industries de transformation sous
toutes leurs formes. La troisième, enfin, est composée du reste,
c'est-à-dire d'un vaste ensemble d'activités consacrées
à la fourniture de «services» allant des transports au
commerce, en passant par les loisirs, l'instruction, la création
artistique et la philosophie [P. Jaccard (1955)].
On constate alors que l'emploi et les investissements n'ont
cessé de glisser des activités primaires essentielles et sans
lesquelles la vie, même sous les formes les plus primitives, serait
impossible, vers les activités secondaires et tertiaires. Le glissement
de la main-d'oeuvre vers les productions secondaire et tertiaire,
révélé par les statistiques, est l'inéluctable
conséquence du progrès économique : l'un ne va pas sans
l'autre [M. Lengelle (1966)].
[C. Linchtenstein (1993)] note que le terme tertiaire fut
inventé avec l'objectif de la construction d'un schéma conceptuel
qui pouvait aider à analyser des domaines de l'activité dans
lesquels, à un moment donné, une croissance rapide devait
étroitement s'harmoniser avec les exigences du progrès
économique.
C. Clark cite W. Petty : «il y a beaucoup plus à
gagner par l'industrie que par l'agriculture et beaucoup plus par le commerce
que par l'industrie. Nous pouvons constater qu'à mesure que le commerce
et les «arts curieux» se développent, l'agriculture doit
décliner, ou bien les salaires agricoles doivent augmenter et les rentes
foncières diminuer en conséquence» [P. Jaccard (1995)] .
Dans son ouvrage, C. Clark (1914) qualifie les remarques de W.
Petty de «loi de Petty» et explique que le degré de
prospérité d'un pays est en relation directe avec la
répartition de ses travailleurs dans les trois secteurs
généraux de la vie économique [C. Linchtenstein (1993)] .
Plus la proportion est forte dans le secondaire et surtout dans le tertiaire,
plus le progrès économique et sociale est manifeste [P. Jaccard
(1995)] . Dans le prolongement des analyses sectorielles, d'autres types de
travaux créent un élément nouveau : le découpage
sectoriel doit s'appuyer sur le progrès technique [J Fourastié
(1963)].
Ainsi, [M. Lengelle (1966)] considère les
définitions précédentes comme des
énumérations purement formelles. C'est un choix alternatif qui
est pris, basé sur le degré d'intensité du progrès
technique dans les diverses activités[C. Linchtenstein (1993)] . Le
primaire se trouve caractérisé par un progrès technique
modéré, le secondaire, par un progrès technique plus
rapide et le tertiaire, par un progrès technique négligeable,
voire inexistant [J Fourastié (1963)].
Fugure 2 : La transformation structurelle en
fonction de Fourastié Source : [J. Fourastié, (1963)]
Cette figure illustre les pourcentages de l'économie
d'un pays constitués par différents secteurs. La figure montre
que les pays ayant un niveau de développement socio-économique
plus élevé tend à avoir moins d'économie
composée de secteurs primaire secondaire et tertiaires. Les pays les
moins développés présentent le modèle inverse.
La répartition des effectifs entre les trois secteurs
progresse à travers les différentes étapes, comme suit,
selon Fourastié.
1° Phase : les civilisations
traditionnelles
Quotas de main-d'oevre
· Secteur primaire : 65%
· Secteur secondaire : 20%
· Secteur tertiaire : 15%
Cette phase répresente une société qui
n'est pas encore très dévéloppée scientifiquement,
avec une utilisation négligeable des machines. L'état de
dévéloppement correspond à celui des pays Européens
au début du Moyen âge ou celui d'un pays en
dévéloppement moderne.
2° Phase : la période de
transition
Quotas de main d'oevre
· Secteur primaire : 40%
· Secteur secondaire : 40%
· Secteur tertiaire : 20%
Pendant cette phase, un plus grand nombre des machines sont
déployées dans le secteur primaire, ce qui réduit le
nombre de travailleurs nécessaire. En conséquence, la
démande pour la production de machines dans le secteur secondaire
augmente.
La voie ou la phase de transition commence par un
évenement qui peut être identifié avec
l'industrialisation : la mécanisation à grande echelle, (et
donc l'automatisation) de fabrication, telle que l'utilisation de bandes
transporteuses. A cette phase, le secteur tertiaire commence à se
dévélopper, tout comme le secteur financier et le pouvoir de
l'Etat.
3° Phase : les civilisations à
majorité tertiaires
Quotas de main-d'oeuvre
· Secteur primaire :10%
· Secteur secondaire : 20%
· Secteur tertiaire : 70%
Les secteurs primaire et secondaire sont de plus en plus
dominés par l'automatisation et la demande de main-d'oeuvre baisse dans
ce secteurs. Il est remplacé par les demandes croissantes du secteur
tertiaire.La situation correspond maintenant aux sociétés
industrielles moderne et à la société du future, au
service ou à la société post-industielle.
Aujourd'hui, le secteur tertiaire a pris une telle ampleur
qu'il est parfois divisé en secteur quaternaire fondé sur
l'information et même en un secteur quinaire fondé sur les
services à la personne [J. Bouchez, (2012)].
De manière générale, un critère
sûr pour reconnaître le tertiaire repose sur l'identité du
rendement du travail dans l'espace [J.De Bandt et Petit (1992)]. En effet, la
constance dans le temps entraîne une constance dans l'espace. Telle est
la propriété fondamentale du tertiaire : le rendement du travail
y est le même dans tous les pays [J. Geours (1982)]. Toute fois,
l'utilisation du progrès technique a pour objectif d'introduire des
critères d'homogénéité dans le secteur tertiaire,
considéré jusqu'ici comme résiduel et fortement
hétérogène [J Fourastié (1963)].
II.1.1Les grandes
caracteristique du secteur tertiaire
1.Les activités
Le secteur tertiaire se distingue des secteurs primaire et
secondaire par la nature de ses activités [M. Debonneuil (2017)]. Le
tertiaire s'étend ainsi des services de distribution comprenant le
commerce, le transport et la communication, aux services sociaux comme ceux
de la santé, de l'éducation, des services publics
administratifs et des activités à but non lucratif, en passant
par les services aux entreprises tels que les services financiers,
l'immobilier, l'ingénierie ou encore le conseil, et l'HORECA, les
activités culturelles et récréatives et la
réparation de véhicules ou encore les services personnels
qui regroupent les services domestiques [Rapport ICDD (2009)].
Dans nos régions industrialisées, le secteur
tertiaire est le secteur économique qui a connu la plus forte
croissance en termes d'emplois et produit le plus de valeur
ajoutée depuis les années septante [Rapport OCDE (2015)]. Il a
donc hautement contribué à la croissance économique
globale et à l'absorption au moins partielle des pertes d'emplois
enregistrées dans les secteurs primaire et secondaire (industriel) [M.
Lengelle (1966)].
[C. Linchtenstein (1993)] affirme que l'économie en
général est confrontée depuis plusieurs années
à des changements structurels qui ont favorisé l'expansion des
activités du secteur tertiaire, il cite entre autre :
- l'organisation industrielle évoluent vers une
externalisation de certains services autrefois internes tels que le conseil
juridique, la comptabilité, etc.
- les technologies de l'information et de communication qui
ont bénéficié d'un progrès technologique
considérable, ce qui a permis de démultiplier les
capacités d'échange et l'exploitation d'information, d'images et
de sons.
- La dérégulation et l'ouverture à la
concurrence d'un certain nombre de marchés tels que l'énergie,
les transports, les services financiers, etc.
Malgré leur importance, les branches
d'activité composant le secteur tertiaire restent méconnues en
raison de leur hétérogénéité mais aussi
de l'absence de données [M. Debonneuil (2017)]. Mais par contre
l'évolution des services marchands est la mieux
appréhendée mais le comportement des branches qui les composent
est peu analysé [C. Linchtenstein (1993)] .
2. Les produits
Selon [B. Bertrand (2009)], le secteur tertiaire se
caractérise par l'hétérogénéité, la
périssabilité ainsi que l'intangibilité de ses
prestations. Une précision non de moins de taille est celui de [J.De
Bandt et Petit (1992)] Qui disent que les secteurs primaire et secondaire
se concentrent sur la production des biens, le secteur tertiaire regroupe
l'ensemble des services marchands ou non-marchand, individuels ou
collectifs.
Cette dichotomie entre biens et services n'est cependant pas
évidente dans la mesure où la production des services consiste
parfois à réaliser un produit standardisé commun
à plusieurs consommateurs et consommable en différé,
comme c'est le cas pour la production de services médias [D. Cohen
(2001)].
En outre, [M. Lengelle (1966)] ajoute que la production des
biens manufacturés fait également intervenir des
activités de services tels que la recherche et le
développement ou le marketing. [M. Debonneuil (2017)] fait savoir que
ces dernières sont considérées comme des
activités de service lorsqu`elles sont réalisées par des
entreprises dont c'est l'objet principal. Elles sont par contre
assimilées à des activités industrielles quand elles
sont réalisées par des entreprises dont l'objet premier est la
production industrielle [Rapport ICDD (2009)].
1.3 Les acteurs
[B. Bertran (2009)] conclut que la diversité et
l'hétérogénéité des activités du
secteur tertiaire mènent inévitablement à une multitude
de fournisseurs de services diversifiés du point de vue de leur
mode d'organisation. Pour [J.De Bandt et Petit (1992)] les types
d'entreprises impliquées dans la fourniture de services sont
très diversifiés. Ils vont de l'individu travaillant pour son
propre compte, qui fournit une prestation de service, à l'entreprise
multinationale opérant à l'échelle mondiale. Toutefois,
la grande majorité des entreprises engagées dans le secteur
des services sont de petites structures locales.
En outre, les acteurs du secteur tertiaire font partie
à la fois du secteur public et du secteur privé [Rapport ICDD
(2009)]. Les clients du secteur tertiaire sont également
diversifiés. Ils vont du particulier aux entreprises en passant par
les collectivités [C. Linchtenstein (1993)]. Le secteur tertiaire sert
en réalité souvent d'intermédiaire entre les
différents secteurs d'activités [P. Jaccard (1995)].
Selon le [Rapport OCDE (2015)] il existe donc 4
catégories de services : les services aux producteurs, les services
de distribution, les services aux particuliers et les services sociaux.
· Les services aux producteurs interviennent en tant
que consommation intermédiaire dans des activités de production
ultérieure. Ils consistent souvent en de la sous-traitance de
services qui pourraient être effectués en interne. Ce sont donc,
par exemple, les services aux entreprises, les services financiers et
assurances et les services immobiliers (les activités d'immobilier et
de location servent d'intermédiaire entre le secteur de la
construction et les utilisateurs des bâtiments).
· Les services de distribution font intervenir des
produits, de l'information et des individus. Ce sont les commerces de
détails et de gros, les transports et la communication. Par exemple,
les activités de commerce remplissent un rôle
d'intermédiaire entre les industries manufacturières qui
produisent les biens et les clients finaux tels que les particuliers. Les
activités de transport, d'entreposage et de communication font
également le lien entre les fournisseurs de biens
intermédiaires, les producteurs et les distributeurs vers le
consommateur final.
· Les services aux particuliers sont
caractérisés par un contact direct entre le consommateur et
le prestataire de services. Ce sont les services hôtel, restaurant et
café, les activités récréatives et culturelles,
les services domestiques et les autres services aux particuliers.
· Les services sociaux se caractérisent par un
statut généralement non-marchand. Ce sont les administrations,
les soins de santé, l'éducation et les services sociaux
divers.
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