La repression du terrorisme dans le droit pénal burkinabèpar Florent OUEINA UCAO/UUB - Licence Droit 2015 |
PARAGRAPHE I : LA CONSTITUTION« La constitution est tout d'abord la loi suprême du pays42 », c'est-à-dire une norme dont la valeur juridique est supérieure à celle de toute autre norme juridique, du point de vue de sa définition formelle. Au sens matériel elle peut aussi être définie comme étant l'ensemble des normes fondamentales se rapportant à l'organisation et au fonctionnement de l'Etat. La définition formelle de la constitution est l'approche qui est la plus répandue dans les Etats modernes, dans la mesure où elle permet une meilleure protection des matières constitutionnalisées telles que les droits fondamentaux43. Au Burkina Faso, avec la mise en oeuvre de la question prioritaire de constitutionnalité, la IV République a progressé vers « la constitution garante des droits », et comme l'espérance d'une démocratie intègre44, modèle de la démocratie libérale et le législateur doit concilier la liberté et la sécurité. En matière de lutte contre le terrorisme, la "constitution" et le "terrorisme" sont deux termes a priori antinomiques45. Le terrorisme s'oppose radicalement à l'idée même de « Constitution » puisqu'il vise à remettre en cause de l'ordre établi, à mettre à mal des valeurs proclamées par les Constitutions démocratiques. Ainsi, pour mieux appréhender le sujet, il est important d'analyser les textes constitutionnels (A) Burkinabè réprimant ce fléau et voire les décisions constitutionnelles (B) prise dans ce sens. 42 V. Pr Abdoulaye SOMA La constitution du Burkina Faso, l'espérance d'une démocratie intègre, Ouagadougou (Burkina Faso), Ed. Temple du Savoir, Mars 2012, p. 19. 43 Augustin LOADA, Luc Marius IBRIGA, Droit constitutionnel et institutions politique, collection précis de droit burkinabè, mars 2007, p. 13 44 Pr. Abdoulaye SOMA, La constitution du Burkina Faso, l'espérance d'une démocratie intègre, Op.cit. p. 13. 45 Caroline CERDA-GUZMAN, La constitution : Une arme efficace dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, Atelier no 8 : « Constitution et terrorisme mondiale », p.1 et s. le texte est disponible sur le site: www.camlaw.rutgers.edu/statecon/workshop11greece07/workshop8/cerda.pdf. Consulté le 11 aout 2015. OUEINA Florent Page 15 A- Les textes constitutionnels«La constitution est l'instrument pour éradiquer définitivement toute activité terroriste46 ». De manière générale, nous remarquons que les textes constitutionnels n'abordent pas directement le phénomène terroriste. Il s'ensuit que les solutions qu'ils proposent ne sont pas nécessairement adaptées au terrorisme, de sorte que les règles constitutionnelles qui peuvent aujourd'hui être utilisées n'ont pas toutes la même efficacité. La constitution de juin 1991 de la quatrième (4ème) République du Burkina Faso, ne contient rien qui soit directement relié au terrorisme. Nous pouvons penser que les régimes spéciaux prévus par la constitution sont susceptibles de constituer le socle d'une réponse au terrorisme. Cependant, on peut bien observer que les pouvoirs exceptionnels du Président du Faso (art. 5947, Const. de juin 1991), l'état de siège (art. 5848, Const. de juin 1991), la défense et le maintien de l'intégrité territoriale (art.1049, Const. de juin 1991), ne sont pas adaptés pour répondre à des actes de terroristes. Il serait également important de souligner ce point essentiel de la constitution qui énonce un grand nombre de garanties et de droits substantiels et procéduraux applicables aux personnes faisant l'objet de poursuites pénales et fondés notamment sur l'art.350, art.12551, Const. 11 juin 1991 et sur l'art. art.752, 46 Les propos de Franciso Camps, le Président de la Generalitat de Valence lors de la 3ème commémoration des attentats d'Atocha le 11 mars 2004. Bien que ces propos concernent au premier chef de l'Espagne, ils résument parfaitement l'ensemble des interrogations qui assaillent actuellement les principales démocraties contemporaines. 47 Titre III : Du Président du Faso, art. 59 « Lorsque les institutions du Faso, l'indépendance de la Nation, l'intégrité de son territoire ou l'exécution de ses engagements sont menacées d'une manière grave et immédiate et/ou que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président du Faso prend, après délibération en Conseil des ministres, après consultation officielle des Présidents de l'Assemblée nationale et du Conseil constitutionnel, les mesures exigées par ces circonstance. Il en informe la Nation par un message. En aucun cas, il ne peut être fait appel à des forces armées étrangères pour intervenir dans un conflit intérieur. L'Assemblée nationale se réunit de plein droit et ne peut être dissoute pendant l'exercice des pouvoirs exceptionnels ». 48 Op.cit. art. 58 « Le Président du Faso décrète, après délibération en conseil des ministres, l'état de siège et l'état d'urgence.» 49 Titre I : Des droits et devoirs fondamentaux, art. 10 « Tout citoyen Burkinabé a le devoir de concourir à la défense et au maintien de l'intégrité territoriale. Il est tenu de s'acquitter du service national lorsqu'il en est requis ». 50 Op.cit. art.3 « Nul ne peut être privé de sa liberté s'il n'est poursuivi pour des faits prévus et punis par la loi. Nul ne peut être arrêté, gardé, déporté ou exilé qu'en vertu de loi. 51 Titre VIII : Du pouvoir judiciaire, art. 125 « Le pouvoir judiciaire est gardien des libertés individuelles et collective. Il veille au respect des droits et libertés définis dans la présente Constitution. » 52 Art.7 « Tous sont égaux devant la loi et ont droit sans distinction à une égale protection de la loi. Tous ont droit à une protection égale contre toute discrimination qui violerait la présente Déclaration et contre toute provocation à une telle discrimination. » OUEINA Florent Page 16 art.853 et art.954 de la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948. Ces droits et garanties naturellement bénéficient aux personnes poursuivies pour terrorisme. L'inscription du terrorisme dans la Constitution peut viser directement ou indirectement le terrorisme. En effet, la prise en compte du terrorisme dans la constitution dépend, pour beaucoup, de l'histoire de chaque pays. Ainsi certains Etats qui ont été confrontés à des attentats terroristes sur leur sol de manière plus ou moins fréquent ont énuméré le terme "Terrorisme" dans leur constitution. Prenons l'exemple des dispositifs des constitutions suivantes : art. 3755 de la Constitution du Pérou, donne aux autorités étatiques les moyens de répondre à des situations exceptionnelles, de crise grave ou de péril imminent pour l'État pouvant inclure une situation de terreur; art. 11656 de la Constitution espagnole, énonce la sanction encourue en cas de condamnation pour terrorisme; art. 14057 de la Constitution du Pérou, définit les droits fondamentaux pouvant être suspendus dans le cadre de la 53 Art.8 « Toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales contre les actes violent des droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la constitution ou par la loi. » 54 Art.9 « Nul ne peut être arbitrairement, arrêté, détenu ou exilé ». 55 Art.7 « L'extradition est accordée uniquement par l'exécutif après un rapport de la cour suprême, en conformité avec la loi et les traités et selon le principe de réciprocité. L'extradition est refusée si elle estime qu'il a été demandé afin de poursuivre ou de punir sur la base de la religion, la nationalité, d'opinion ou de la race. Exclus de l'extradition les persécutés pour délits politique ou connexes avec les faits liés. Ils ne sont pas considérés comme génocide ni assassinat ni de terrorisme. » La constitution est disponible sur le site: http://www.wipo.int/wipolex/fr/details.jsp?id=6544. Consulté le 10 juin 2015. 56Art.116 « 1. Une loi organique réglementera l'état d'alerte, l'état d'exception et l'état de siège, ainsi que les compétences et les limitations correspondantes. 2. L'état d'alerte sera déclaré par le Gouvernement par un décret pris en Conseil des Ministres pour une période maximum de quinze jours. Il en sera rendu compte au Congrès des députés qui se réunira immédiatement à cet effet et sans l'autorisation duquel ce délai ne pourra être prorogé. Le décret déterminera le territoire auquel s'appliquent les effets de la déclaration. La motion de Censure la démission du Gouvernement La dissolution des Chambres l'état d'alerte. 3. L'état d'exception sera déclaré par le Gouvernement par un décret pris en Conseil des Ministres, après autorisation du Congrès des députés. L'autorisation et la proclamation de l'état d`exception devront déterminer expressément les effets de celui-ci, le territoire auquel il s'applique et sa durée, qui ne pourra pas excéder une période de trente jours, renouvelable pour la même durée et dans les mêmes conditions. 4. L'état de siège sera déclaré à la majorité absolue du congrès des députés sur la proposition exclusive du Gouvernement. Le congrès déterminera le territoire auquel il s'applique, sa durée et ses conditions. 5. On ne pourra procéder à la dissolution du congrès aussi longtemps que sera en vigueur l'état d'alerte, l'état d'exception ou l'état de siège. Les Chambres seront automatiquement convoquées au cas où elles ne seraient pas en session. Leur fonctionnement, ainsi que celui des autres pouvoirs constitutionnels de l'État, ne pourra pas être interrompu tant que seront en vigueur les états mentionnés. Lorsque le congrès aura été dissous ou que son mandat aura expiré et que se produit l'une ou l'autre des situations donnant lieu à l'un des états indiqués, les compétences du congrès seront assumées par sa députation permanente. 6. La déclaration de l'état d'alerte, de l'état d'exception et de l'état de siège ne modifiera pas le principe de la responsabilité du Gouvernement et de ses agents reconnu dans la constitution et dans les lois. » 57 Art. 140 « La peine de mort ne peut être appliquée pour le crime de trahison en temps de guerre, et le terrorisme, selon les lois et les traités auxquels le Pérou est partie. » OUEINA Florent Page 17 lutte contre le terrorisme, art. 55-258 de la Constitution espagnole également intervient dans le même sens. L'utilisation des dispositifs constitutionnels pour lutter contre le terrorisme est de plus en plus considérée comme étant le moyen le plus efficace pour faire face au terrorisme, puisque le droit constitutionnel permet d'établir la liaison entre le droit national et le droit international. En outre il n'est pas exclu de faire recoure à la jurisprudence constitutionnelle (B) dans cette lutte. |
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