Approche des droits sociaux en Haiti au regard de la constitution haitienne de 1987 et des conventions internationales et leurs applications effectives de 1987 à nos jours.par Carnes BELLE-VIL Université d'état d'Haiti /Ecole de droit de Jacmel - Licence de droit 2019 |
2) Le droit à l'alimentationLe droit à l'alimentation est essentiel à une vie digne et fondamentale pour la réalisation de plusieurs autres droits, dont le droit à la santé et à l'éducation. L'alimentation est importante non seulement pour la survie, mais aussi pour le plein développement des capacités physiques et mentales de chacun. Les États sont tenus d'adopter, individuellement et au moyen de la coopération internationale, différentes mesures de production, de conservation et de distribution des aliments de façon à ce que tout le monde ait accès à une nourriture suffisante pour être à l'abri de la faim et de la malnutrition. Pour la réalisation du droit à l'alimentation, il faut aussi prêter attention à des concepts comme la sécurité alimentaire (la durabilité de l'accès à l'alimentation pour les générations présentes et futures) et la souveraineté alimentaire (le droit des peuples à définir leurs propres systèmes alimentaires et agricoles). Le droit à l'alimentation ne se limite pas simplement à avoir un certain 54 Le Nouvelliste, Le gouvernement fixe les responsabilités sur les décès survenus suite à l'ingestion de boissons alcoolisées (16 mars 2016), Page 9. Rédigé et soutenu par Carnes Belle-vil/Ecole de Droit de Jacmel(EDJ) Page 67 2019 Approche des droits sociaux en Haïti au regard de la constitution haïtienne de 1987 et des conventions internationales et leurs applications effectives de 1988 à nos jours. nombre de calories et les nutriments nécessaires dans son alimentation ; il suppose que toute personne ait physiquement et économiquement accès, à tout moment, à une nourriture suffisante, a de l'eau potable ou aux moyens de se les procurer. Il n'est pas un secret pour personne : L'eau potable n'existe pas dans les milieux ruraux Haïtiens et l'Etat ne faire rien. La DUDH article 11 et le PIDESC article 11 reconnaissent et prévoient expressément le droit à une alimentation suffisante. De plus, d'autres conventions internationales qu'Haïti a ratifié font référence implicitement au droit à une alimentation suffisante par exemple: la Convention relative aux droits de l'enfant (articles 24, 27) et la Convention relative à l'élimination de discrimination à l'égard des femmes (articles 12, 14). De plus, la Constitution reconnaît expressément le droit à l'alimentation (article 22). Selon le Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation : « le droit à l'alimentation est le droit d'avoir un accès régulier, permanent et libre, soit directement, soit au moyen d'achats monétaires, à une nourriture quantitativement et qualitativement adéquate et suffisante, correspondant aux traditions culturelles du peuple dont est issu le consommateur, et qui assure une vie psychique et physique, individuelle et collective, libre d'angoisse, satisfaisante et digne.»55 Le Conseil des droits économiques, sociaux et culturels a dit que le contenu essentiel du droit à l'alimentation comprend les éléments suivants «la disponibilité de nourriture exempte de substances nocives et acceptable dans une culture déterminée, en quantité suffisante et d'une qualité propre à satisfaire les besoins alimentaires de l'individu ; l'accessibilité ou possibilité d'obtenir cette nourriture d'une manière durable et qui n'entrave pas la jouissance des autres droits de l'homme »56. En Haïti, plus de la moitié de la population souffrent de sous-alimentation chronique57. Quand une population ne trouve à manger que difficilement, on dit qu'elle se trouve dans une situation de famine. En ce sens, le prête jésuite Claude Souffrant, dans son ouvrage « Littérature et société » publié en 1991, parle du peuple haïtien comme étant une société de la faim. Plus loin, il parle même d'une culture de la faim. Ces difficultés de trouver à manger et cette culture de la faim existent toujours aujourd'hui, et le gouvernement n'a pas fait assez de les améliorer. C'est évident qu'en pratique le droit à l'alimentation suffisante n'est pas garanti en Haïti. « Au total, 1,5 millions Haïtiens souffrent d'insécurité alimentaire sévère et 3,6 millions souffrent d'insécurité 55 Rapporteur spécial sur le droit a l'alimentaton, htp://// www.ohchr.org//FR//Issues//Food//Pages//FoodIndex.aspx. 56 Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Observation Générale no. 12 sur le droit a l'alimentation (1999), 8. [CDESC] 57Organisaton des Natons Unies pour l'alimentaton et l'agriculture, La faim recule dans le monde, mais 805 millions de personnes soufrent encore de sous-alimentation chroniquue (16 septembre 2014), htp://// www.fao.org//news//story//fr//item//243863//icode. Rédigé et soutenu par Carnes Belle-vil/Ecole de Droit de Jacmel(EDJ) Page 68 2019 Approche des droits sociaux en Haïti au regard de la constitution haïtienne de 1987 et des conventions internationales et leurs applications effectives de 1988 à nos jours. alimentaire, indique une étude récente menée par le Programme alimentaire mondiale (PAM), l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et la Coordination nationale pour la Sécurité alimentaire en Haïti (CNSA). Dans certaines régions, jusqu'à 70% de la population est confrontée à la faim. »58 De son coté, le Programme Alimentaire Mondial (PAM) présente des chiffres assez significatifs d'après lesquels, « 100 000 enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition aiguë tandis qu'un enfant sur 3 souffre de retard de croissance et 1/3 des enfants et des femmes Haïtiens sont anémiques».59 |
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