Des auteurs et des travaux comme ceux de James T.
REASON37 sont utilisés depuis quelques années pour
comprendre le mécanisme des erreurs humaines qui contribuent à la
survenue redoutée et évitable des évènements
indésirables en établissement de santé. Docteur en
médecine, il publia de nombreuses publications couvrant un large
éventail de sujets qui sont largement répertoriés
aujourd'hui dans les domaines de l'aéronautique, du nucléaire et
de la santé. Les plus connues, parlent du mal des transports, de
l'inattention, de l'erreur humaine, de la culture de sécurité ou
encore de la gestion des risques d'accidents organisationnels. Avec «
Human error » (parution 1990), REASON pose les fondements
d'une typologie des erreurs du quotidien. Il distingue les erreurs
fondées sur la défaillance dans la planification des tâches
à accomplir de celles liées à la non-exécution
d'une ou plusieurs tâches.
« Dans le premier cas, les erreurs
surviennent par manque de connaissances ou d'informations (souvent
insuffisantes ou erronées), par la mauvaise application des
règles, ou par l'échec de leur mis en oeuvre.
Dans le second cas, les erreurs se produisent
lors d'activités routinières et donc largement
répétitives, paradoxalement connues et
maîtrisées38 ».
L'HAS va plus loin lorsqu'elle reprend ces travaux pour faire
évoluer la gestion des risques en milieu hospitalier vers une analyse
approfondie des évènements indésirables associés
aux soins (EIAS) et la prise en compte du contexte organisationnel et technique
dans lequel les soins ont été
délivrés39.
« Cette approche internationale, moins
culpabilisante, ouvre ainsi la perspective de pouvoir apprendre et agir sur les
erreurs qui surviennent ». Avoir une approche
systémique, c'est avoir une vision plus large qui est axée sur
des problématiques multiples. La seule cause, d'origine professionnelle
ne suffit plus et les compétences techniques ne justifient pas
uniquement cela. On cherche davantage à investiguer les causes
profondes, moins identifiables que l'erreur humaine. Elles sont le plus souvent
liées à une mauvaise organisation et coordination.
L'HAS conclue ainsi : « Que la mauvaise
organisation du travail, l'ambition excessive du rendement, un personnel mal
formé ou en nombre insuffisant, des coordinations mal pensées,
une gouvernance locale instable et peu présente, sont la source
principale des catastrophes observées, bien avant les questions de
manque de
37 REASON J. Human error: models and management BMJ
2000; 320: 768-70
38 Franck GUARNIERI, Denis BESNARD -
Redécouvrir « l'Erreur humaine » de James T. REASON, traduit
de l'anglais par Jean-Michel Hoc, Presses des Mines, 2012.
39 Haute Autorité de Santé - Causes
systémiques ou latentes des évènements indésirables
associés aux soins -
has-sante.fr, novembre 2013.
22
compétences techniques de chaque acteur
impliqué40 ». L'aspect multifactoriel
(comportemental, contextuel et conceptuel) des EI associés aux soins est
alors pris en compte pour améliorer la sécurité des
patients.
L'aviation est un bon exemple d'activité industrielle
qui s'est saisi de l'étude des facteurs humains pour améliorer la
sécurité. L'Organisation Mondiale de la Santé, dans son
rapport l'explique : « Depuis les années 1980
(l'aviation) (...) reconnaît le caractère inévitable de la
faillibilité humaine. Ainsi, au lieu d'exiger la perfection constante,
qui n'est pas atteignable, et de sanctionner publiquement les erreurs, elle a
mis au point des systèmes dont l'objectif est de réduire l'impact
de l'erreur humaine. Le bilan de l'aviation en matière de
sécurité témoigne de l'efficacité de cette approche
(...)41 ».