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Do not disturb: étude observationnelle des interruptions de tàches dans la pratique des infirmiers anesthésistes au bloc opératoire.


par Christopher Jean-Baptiste
Institut Régional de formation des infirmiers anesthésistes diplômé d'Etat (IRIADE, La Réunion 974)) - Infirmier Anesthésiste 2019
  

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10 CONCLUSION

Pour aborder le thème des interruptions de tâche, j'ai dû m'intéresser à tous les mécanismes qui décrivaient entre autres les concepts de gestion des risques et de « faillibilité humaine » pour reprendre les termes de la Haute Autorité de Santé. J'ai pu comprendre ainsi, d'après certaines études, que ce phénomène touchait particulièrement les professionnels de santé et notamment les infirmiers qui étaient interrompus 6 à 7 fois par heure en moyenne lors de la préparation des médicaments. Des résultats, d'après ces mêmes études, mettaient en avant le lien étroit entre les interruptions et le fait que l'équipe soignante, avec qui les IDEs collaborent, était une source importante d'IT. Lorsque j'ai traité la notion de travail d'équipe dans mon cadre conceptuel, je me suis aperçu qu'il n'était pas aisé de faire le rapprochement entre facteur humain et interruptions car cet « esprit » d'équipe est indispensable dans nos établissements de santé, surtout au bloc opératoire. Cependant j'ai appris, malgré tout, qu'il pouvait y avoir un grand nombre d'évènements indésirables en lien avec les IT provoquées par les professionnels de santé en général. Avec mon expérience en tant qu'étudiant, il m'a semblé intéressant de pouvoir faire l'analyse de ces interruptions de tâche dans la pratique de l'IADE.

Rédiger ce mémoire professionnel fût très enrichissant tant d'un point de vue personnel mais aussi en tant que futur professionnel. En effet, j'ai pu acquérir de vraies connaissances sur le sujet des interruptions de tâche mais il m'importe davantage de pouvoir le partager, plus tard, avec mes futurs collègues, car c'est une notion qui tend à être observée et évaluée de plus en plus par nos sociétés savantes. La Haute Autorité de Santé en a déjà publié un fascicule numérique en 2016. J'ai appris entre autres que des formations sur les erreurs médicamenteuses (fortement impactées par les IT) étaient aussi dispensées aux IDEs de l'île de La Réunion depuis peu, ce qui renforce l'idée que ce thème est très actuel.

Les cours et les rendez-vous pédagogiques que j'ai suivi à l'Institut Régionale de formation des Infirmiers Anesthésistes Diplômés d'État de Saint-Pierre (IRIADE) m'ont permis de mieux cibler les études et les documents dont j'avais besoin pour construire mon travail de recherche de fin d'étude.

La situation d'appel dans laquelle j'explique les raisons de ce choix pour ce thème m'ont amené finalement à me poser cette question de départ :

Les interruptions de tâche sont-elles fréquentes au bloc opératoire et de quelles manières se manifestent-elles dans la pratique IADE de l'ouverture de salle (ouverture de site en début de journée et entre chaque intervention) jusqu'à l'incision ?

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Pour répondre à cette question, j'ai donc fait le choix, d'une enquête observationnelle en utilisant une grille d'évaluation élaboré par la Haute Autorité de Santé qui a fait ses preuves lors d'une précédente étude sur le phénomène des IT. J'ai néanmoins dû la modifier pour l'adapter à ma recherche dans le cadre de la pratique IADE. Elle a été séquencée en cinq domaines d'activités, eux-mêmes détaillés par les différentes tâches que l'IADE effectue pendant ces périodes.

Cette enquête, comprenant 45 observations, m'a apporté des réponses essentielles et m'a permis d'affiner mon approche et de comprendre précisément qu'il existait un grand nombre d'IT, de différents types, motifs et pour des raisons assez diverses. J'ai surtout appris, en observant les réactions des IADEs, qu'elles n'étaient pas toutes gérées de la même façon.

D'après mes résultats, sur 164 IT identifiées, les interruptions se manifestent spontanément pendant la période de l'induction jusqu'à l'installation chirurgicale finale avant l'incision. L'IADE, en collaboration avec le MAR, est interrompu majoritairement lors de la pré-oxygénation. L'équipe (IBODE, MAR, chirurgien, IDE de salle) au complet à ce moment précis de la PEC pourrait être une des raisons pour laquelle l'IADE est si souvent interrompu durant cette tâche. Cependant, ces motifs d'IT sont pour la plupart « justifiés ». Il a été également relevé que les cinq tâches les plus interrompues, dans chaque séquence, regroupent à elles seules presque la moitié des IT qui peuvent être responsables d'évènements indésirables évitables. Des solutions existent mais sont-elles adaptées à la pratique IADE et à l'organisation complexe du BO ? Comment discerner, à l'échelle des professionnels les IT « justifiées » et celles « non-justifiées » ? Nous pouvons certainement cibler nos efforts sur ces cinq tâches ou la séquence couvrant la période de l'induction jusqu'à la finalisation de l'installation pour diminuer significativement les IT. Cependant, de nouvelles études plus qualitatives et un travail collectif de sensibilisation (qui concernerait tous les acteurs du BO) semblent être nécessaires afin de mettre en lumière les véritables axes d'amélioration que nous pourrions élaborer. Lutter contre les IT « non-justifiées » ne doit pas entraver l'ambiance qui peut régner dans une équipe du BO mais peut faire l'objet d'une collaboration interdisciplinaire afin de faire émerger une communication adaptée en fonction des tâches de chacun dans une démarche commune de sécurisation des soins.

Les IADEs qui ont été observés, se laissent peu interrompre dans la majorité des cas et parviennent même à poursuivre leurs tâches, malgré les interruptions auxquels ils sont confrontés. Ce qui confirme l'hypothèse, développer dans mon cadre conceptuel, que l'IADE semblerait « s'immuniser » contre ce phénomène grâce à une technique de résistance mentale qui lui permet de faire plusieurs choses en même temps tout en restant concentré et sécuritaire dans sa pratique. Habitué à partager et collaborer avec tous les acteurs du BO, l'IADE semblerait se prémunir de manière

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efficace car d'après mes observations, peu d'interruptions ont perturbé sa pratique de manière durable. De par sa formation, j'ai pu mettre en avant que celui-ci pouvait jouer un rôle important dans la gestion du facteur humain au bloc opératoire et donc qu'il participe activement à la culture de sécurité qui est primordial au BO. Cependant est ce que cela est véritablement perçu de façon formelle par les IADEs et les autres membres de l'équipe du BO et surtout applicable préventivement ? Dans une période où l'ambulatoire semble se développer à grande vitesse, pourrions-nous continuellement « banaliser » ce phénomène alors que l'on tend vers des interventions de plus en plus courtes et rapides ?

Mêmes si ces IT ont une durée moyenne inférieure à 1 minute et se déroulent généralement au sein de la salle d'opération, car la plupart des tâches de l'IADE s'y effectuant, elles ne doivent pas être sous-estimées.

Cette enquête observationnelle a su révéler les différentes facettes des IT (localisation, types, origines, motifs, durée) que j'ai rencontré au bloc opératoire des deux CHU de l'île de La Réunion.

C'est pourquoi, dans l'objectif d'une amélioration de la sécurité des soins, une sensibilisation sur ce phénomène est nécessaire. En effet, ce type de pratique de plus en plus « banalisé » et présent dans notre organisation de travail, mériterait d'être mis en lumière au sein de nos établissements de santé afin de promouvoir une meilleure gestion des risques et une plus grande efficience dans la prévention des évènements indésirables.

D'après un projet de recherche mené par une équipe du groupe QualiREL santé (structure régionale d'appui à la qualité et à la sécurité des soins des Pays De La Loire) qui cherche à « mesurer l'impact interventionnel portant sur les interactions entre professionnels d'une équipe de soins sur l'évolution des caractéristiques des IT évitables », celui-ci conclu : « Les conséquences des IT sont largement démontrées sur la sécurité des soins : altération de la prise de décision, retard, oubli d'information, erreur humaine, charges mentales et psychiques des professionnels. Renforcer le travail en équipe, pour permettre d'augmenter la performance, la satisfaction du travail et diminuer les omissions dans les soins, est un enjeu majeur de réflexion pour la gestion des IT évitables ».

Plusieurs ouvertures sont alors possibles et peuvent être soulevées après avoir été sensibilisé sur les IT. Cependant, une a particulièrement retenu mon attention.

En effet, à travers la recherche que j'ai essayé d'apporter à ce mémoire pour éclairer sur le fond de mon contenu et mes observations sur le terrain, je me suis souvent interrogé sur la manière dont les IADEs s'adaptaient face aux IT. Même

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s'ils suivent la même formation, j'ai pu découvrir néanmoins que chaque individu ne réagissait pas de la même façon. L'expérience peut-elle répondre efficacement aux IT ? Un outil, tel qu'un questionnaire destiné aux IADEs, aurait pu nous donner une partie de la réponse à cette question. Est-ce une question d'habitude ? Existe-il un modèle de résistance « individualisé » aux phénomènes des IT ? Le concept de résilience est-il un outil neurocognitif parlant pour les IADEs et si oui est-il utilisé de façon naturelle, étudié en formation ou encore appris de manière autodidacte ? La priorisation des actes peut-elle renforcer le sentiment d'être moins vulnérable aux risques inhérents du BO ? Autant de question qui m'amène à croire sur la nécessité de poursuivre cette enquête sous un autre angle, en privilégiant cette fois-ci le vécu, l'expérience et les capacités propres misent en oeuvre pour lutter contre ce phénomène. Laisser s'exprimer les l'IADE ainsi que les autres membres de l'équipe pluridisciplinaire du BO pourrait être un complément d'enquête utile pour déterminer de nouveaux axes de compréhension sur les IT.

« Le progrès fait rage, le futur ne manque pas d'avenir... » (Philippe MEYER, écrivain et journaliste sur France Inter).

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984