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Du travail de l'enfant en droit positif congolais et en droit international. Enjeux et défis juridiques. Cas observé dans le site minier de Kanina à  Kolwezi.


par Lucien MUJINGA
Université de Kolwezi ( UNIKOL) - Licence de droit 2019
  

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Section 3 : Des conventions internationales sur le travail des enfants

§1- Analyse de la convention n°138 de l'OIT sur l'âge minimum de travail de l'enfant

Depuis sa création, l'OIT a adopté plusieurs conventions relatives spécifiquement au travail des enfants. Cette organisation a principalement fixé un âge minimum d'admission à l'emploi ou au travail, soit pour un secteur particulier de l'économie soit pour l'ensemble des secteurs économiques, tout en permettant certaines exceptions. Les instruments de l'OIT les plus récents et les plus complets sur le travail des enfants sont la convention n° 138,22 et la recommandation n°146 sur l'âge minimum, datant de 1973. Cette convention se substitue à tous les instruments antérieurs applicables à des secteurs économiques limités. Elle fait obligation aux Etats parties de spécifier un âge minimum d'admission à l'emploi et au travail et de poursuivre une politique nationale visant à assurer l'abolition effective du travail des enfants.23

20 Article 17 de l'Arrêté ministériel N° 12/CAB.MIN/TPSI/045 /08 du 08 août 2008 fixant les conditions de travail des enfants.

21 Ibidem, Article 18.

22 Convention n°138 sur l'âge minimum d'admission à l'emploi, adoptée le 26.06.1973 ; date d'entrée en vigueur le 19.06.1976.

23 Article 1 et 2 de la Convention n°138 sur l'âge minimum d'admission à l'emploi.

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La recommandation n°146 qui l'accompagne fixe le cadre d'action et les mesures essentielles à mettre en oeuvre pour prévenir et éliminer le travail des enfants.

Cette convention et la recommandation qui l'accompagne constituent d'importantes avancées dans le domaine des normes internationales sur le travail des enfants. Elles sont en effet les premières à avoir reconnu la nécessité d'intégrer la législation fixant un âge minimum à une politique nationale globale ayant pour but d'abolir totalement le travail des enfants. Il est toutefois plus exact de parler d'âges minimums, au pluriel, car l'âge fixé varie selon la nature de l'emploi ou du travail.

La convention établit un principe fondamental selon lequel, l'âge minimum d'admission à l'emploi ou au travail ne devrait pas être inférieur à celui auquel cesse la scolarité obligatoire, ni en tout cas à 15 ans. Elle prévoit également que l'âge minimum devrait être progressivement élevé à un niveau permettant aux adolescents d'atteindre le plus complet développement physique et mental. Elle permet, toutefois, l'emploi des adolescents de 13 à 15 ans à des travaux légers, c'est à dire à des travaux qui ne risquent ni de porter préjudice à leur santé ou à leur développement, ni de nuire à leur assiduité scolaire, à leur participation à des programmes d'orientation ou de formation professionnelle, à leur aptitude à bénéficier de l'instruction reçue.

La convention prescrit de fixer cet âge à 18 ans pour tout travail dangereux, c'est à dire, « tout type de travail qui, par sa nature ou les conditions d'exercice, est susceptible de compromettre la santé, la sécurité ou la moralité des adolescents ».24 La convention dispose aussi que les types d'emploi ou de travail visés seront déterminés par la législation nationale ou l'autorité compétente, laissant ainsi à chaque pays le soin de cette décision. La recommandation accompagnant cette convention propose des critères de détermination indiquant, qu'il convient de prendre en compte des normes internationales du travail pertinentes, par exemple, celles concernant les substances ou agents toxiques ou les procédés dangereux, le transport de charges lourdes et les travaux souterrains. Elle dispose en outre que la liste des types d'emploi ou de travail dont il s'agit devrait être réexaminée périodiquement à la lumière notamment des progrès de la science et de la technique, en consultation avec les organisations d'employeurs et de travailleurs. L'âge minimum, pour les types de travail visés, devrait être de 18 ans.

24 Article 3 alinéa 1 de la Convention n°138 sur l'âge minimum d'admission à l'emploi.

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La recommandation renforce ce principe en indiquant que, lorsque l'âge minimum est encore inférieur à 18 ans, des mesures devraient être prises, sans délai, pour le porter à ce niveau. Toutefois, la convention dispose, que cet âge peut être abaissé à 16 ans à condition que la santé, la sécurité et la moralité des enfants soient pleinement garanties et qu'ils aient reçu dans la branche d'activité correspondante, une instruction spécifique et adéquate ou une formation professionnelle.

La Convention n°138 sur l'âge minimum faisait espérer la fin du travail des enfants. Cependant, il n'en fut rien car les pays en développement ne pouvant ou ne voulant pas intégrer cette convention dans leurs législations nationales, ont eu recours aux souplesses d'application contenues dans cette convention.

En effet, tout en fixant un âge minimum applicable en principe à tous les secteurs d'activité, que des enfants y travaillent ou non comme salariés, la convention n°138 contient des dispositions qui lui donnent une certaine souplesse destinée à en permettre l'application progressive. Ainsi, les pays dont l'économie et les institutions scolaires ne sont pas suffisamment développées peuvent spécifier, en première étape, un âge minimum de 14 ans au lieu de 15,25 ce qui a pour effet d'abaisser l'âge minimum pour les travaux légers de 13 à 12 ans. Toutefois, il n'existe pas d'exception correspondante pour les activités dangereuses, en application du principe selon lequel le niveau de développement ne peut servir d'excuse pour permettre que des enfants soient affectés à des tâches susceptibles de compromettre leur santé, leur sécurité ou leur moralité.

La convention n°138 présente aussi une certaine souplesse en ce qui concerne les secteurs ou activités visés puisqu'elle autorise les Etats à exclure des catégories limitées d'emploi ou de travail, lorsque son application à ses catégories soulèverait des difficultés d'exécution spéciales et importantes.26 Elle ne précise pas ces catégories, mais il a été fait mention, au cours des travaux préparatoires, de l'emploi dans les entreprises familiales, des services domestiques chez les particuliers et de certains types de travaux effectués en dehors du contrôle de l'employeur, par exemple le travail à domicile. Ces exclusions tiennent essentiellement aux difficultés pratiques que soulève l'application de la loi aux catégories visées, et non bien sûr à l'absence de risques d'exploitation ou d'abus.

25 Article 2 alinéa 4 de la Convention n°138 sur l'âge minimum d'admission à l'emploi.

26 Idem, Article 4 alinéa 1.

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Par ailleurs, la convention donne aux pays en développement la possibilité de limiter initialement son champ d'application en précisant les branches d'activité économique ou les types d'entreprises auxquelles elle s'applique : l'article 5 stipule que « tout membre dont l'économie et les services administratifs n'ont pas atteint un développement suffisant pourra, après consultation des organisations d'employeurs et de travailleurs intéressées, s'il en existe, limiter, en une première étape, le champ d'application de la présente convention ».

Cependant dans ce même article il est précisé que le champ d'application de la convention devra au moins comprendre les sept secteurs suivants : les industries extractives ; les industries manufacturières ; le bâtiment et travaux publics ; l'électricité, gaz et eau ;les services sanitaires ; les transports, entrepôts et communications ; les plantations et autres entreprises agricoles exploitées principalement à des fins commerciales ( à l'exclusion des entreprises familiales ou de petite dimension ).27 Différentes autres dispositions prévoient des exceptions ou des dérogations, par exemple celle qui exclut les travaux effectués dans le cadre de certains types d'enseignement ou de formation ou celle qui permet d'autoriser la participation des enfants à des spectacles artistiques ainsi que la possibilité de fixer l'âge minimum de l'apprentissage à 14 ans. S'il s'agit d'activités dangereuses, l'application de ces dispositions exige les plus grandes précautions.

Ainsi, la participation à des spectacles artistiques peut présenter de graves risques pour la santé ou la moralité des jeunes. C'est pourquoi certains pays interdisent de les faire travailler dans les établissements tels que boîtes des nuits, cabarets et cirques, où il existe en outre un risque d'exploitation sexuelle. D'autres pays au contraire, comme la Thaïlande, permettent le travail des enfants dans les night-clubs et les bars à partir de 15 ans.28 Quant à la formation, elle peut être un subterfuge permettant aux employeurs d'imposer de façon continue un travail pénible à des enfants n'ayant pas atteint l'âge minimum. Il est donc essentiel de procéder à des contrôles et à des inspections pour s'assurer que les jeunes reçoivent une véritable formation dans des conditions convenables et ne sont pas contraints à cette occasion d'effectuer des tâches dangereuses. La convention fait obligation à l'autorité compétente de prendre toutes les mesures nécessaires y compris des sanctions appropriées, en vue d'assurer l'application effective de ses dispositions. Les sanctions visées ici sont celles qui seront prévues par la législation nationale pour les infractions aux dispositions donnant effet à la convention.

27 Article 5 alinéa 4 de la Convention n°138 sur l'âge minimum d'admission à l'emploi.

28 UNICEF, La situation des enfants dans le monde, Rapport 1997, New York.

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La quasi-totalité des pays se sont aujourd'hui dotés d'une législation visant à interdire l'emploi des enfants n'ayant pas atteint un certain âge et à réglementer les conditions de travail pour ceux qui ont atteint l'âge minimum. La plupart ont fixé un âge plus élevé pour les travaux dangereux, interdisant certaines activités aux jeunes de moins de 18 ans. Néanmoins, de nombreuses lacunes demeurent surtout en ce qui concerne le champ d'application de ces lois et leur mise en application concrète, parfois faute de ressources nécessaires pour en assurer le contrôle et l'application, parfois faute de volonté politique, mais souvent simplement parce que les autorités sont désarmées face à un phénomène largement invisible et qui prospère sur des fléaux sociaux aussi profondément enracinés que la pauvreté, la discrimination et les préjugés culturels.

L'examen des différentes législations des 155 Etats membres de l'OIT a permis de constater que, si la plupart des pays ont adopté une législation prévoyant un âge minimum de base pour l'admission des enfants à l'emploi ou au travail, nombre d'entre eux ne se conforment pas à la convention n°138 qui prescrit de fixer un âge minimum unique pour l'admission à tous les types d'emploi : seuls 33 pays l'ont fait, et cela n'est pratique courante qu'en Europe. La formule habituelle consiste à fixer un âge minimum qui ne s'applique qu'à certains secteurs ou activités. Une autre formule, pour laquelle un quart des pays membres a opté, consiste à fixer des âges différents pour divers secteurs économiques, tout en excluant totalement certains secteurs ou activités. Environ 45 pays se conforment à l'esprit de la convention puisqu'ils fixent l'âge minimum d'admission à l'emploi à 15 ans et 37 pays le fixe à 14 ans. La limite de 15 ans a surtout cours en Europe et celle de 14 ans dans le reste du monde.

L'âge minimum est de 16 ans dans 23 pays et de 15 à 16 ans dans quatre autres. Par conséquent, 122 pays au minimum disposent d'une législation interdisant le travail des enfants de moins de 14 ans, au moins dans certains secteurs. En revanche, dans 30 pays, les enfants de moins de 14 ans ont le droit de travailler et dans 6 l'âge minimum n'est que de 12 ans. C'est en Afrique et en Asie, les plus gros fournisseurs de main d'oeuvre enfantine que la fourchette minimum est la plus large : l'âge minimum y varie de 12 à 16 ans. De plus, du fait de la relative souplesse de la convention n°138, l'agriculture est exclue de son champ d'application dans 38 pays situés pour la plupart en Asie. Par contre, les activités industrielles rentrent toujours dans le champ d'application de la convention, et ce dans tous les pays. L'une des exclusions les plus courantes, prévue par une soixantaine de pays, porte sur les entreprises familiales, définies de manière plus ou moins large, ainsi que les services domestiques.

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Environ la moitié des pays autorisent les enfants d'un âge inférieur au minimum général à effectuer certains types de travaux légers : 13 pays soustraient certains types de travaux à toute restriction, mais la majorité fixe pour ces travaux un âge minimum de 12,13 ou 14 ans.29

Ces exclusions mettent parfaitement en évidence les graves lacunes juridiques ou tout au moins les importantes limites quant au rôle que la législation est censée jouer dans la lutte contre le travail des enfants. En effet, comme nous l'avons vu précédemment ce sont dans ces secteurs d'activités exclus, c'est-à-dire dans le secteur agricole et les services domestiques, ainsi que dans les petits ateliers et les entreprises familiales opérant dans le secteur non structuré, que l'on trouve la plupart des enfants qui travaillent. Pour remédier à ces lacunes, la communauté internationale a décidé d'adopter une grande convention reprenant tous les principes devant régir les droits des enfants, par le biais de l'Organisation des Nations Unies.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery