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évaluation de l'inclusivité de la croissance économique dans la zone CEEAC.par Randy KAMBANA MOISE Université Catholique du Congo - Licence en économie et développement 2019 |
B. Facteurs endogènesLes facteurs endogènes du sous-développement de l'Afrique centrale s'expliquent à travers l'inefficacité des politiques économiques engagées par la majorité de pays depuis leurs indépendances. En effet, le processus de développement entamé par la plupart de ces pays depuis la période postcoloniale s'est soldé par un échec cuisant. En effet, au lendemain de l'acquisition de leur souveraineté nationale et internationale, plusieurs pays de la sous-région se sont lancés dans des investissements publics faramineux. Ces investissements, au lieu de stimuler la croissance, ont provoqué de problèmes récurrents de financement. L'épargne intérieure étant insuffisante, il a fallu donc pour ces pays de se tourner vers les capitaux étrangers qu'ils ont acquis par endettement. Des principaux facteurs endogènes qui explicatifs du sous-développement des pays de la sous-région de l'Afrique Centrale, nous retenons dans le cadre de cette étude la dépendance extérieure face aux matières premières, l'endettement, a) Dépendance face aux matières premières : De tous les facteurs endogènes liés au sous-développement, la dépendance face aux matières premières est la plus fulgurante. Il n'est cependant plus à démontrer que la santé des économies de la région tient dans la vente des principaux produits d'exploitation tels que le cacao, le café, etc. Depuis la fin de l'ère coloniale, les pays africains n'ont pas su diversifier leurs exportations de manière à se protéger contre les aléas internationaux et à se forger une forte résilience. Ainsi, la spécialisation dans les produits de base de la plupart des pays de la sous-région ne contribue qu'à accentuer la détérioration des termes de l'échange au fil des ans. Il s'en est suivi, au fil de temps, des déficits remarquables et répétés de balances commerciales comme l'indique la figure suivante : 63 Graphique 2-8 : Solde de la balance commerciale de la sous-région d'Afrique centrale de 1977 à 2018 En milliards USD courants Solde de la balance commerciale de 1977 à 2018
Source : Elaboré par nous-mêmes sur base des données de la Banque Mondiale de tous les 9 pays de l'Afrique centrale (WDI, 2020) Le graphique no2-8 ci-dessous indique que les années 2001 et 2018 se sont encore soldées par des déficits creux malgré l'évolution à la hausse des prix des matières premières depuis 1999. La manne financière dégagée par la flambée des prix des matières premières a inextricablement amorti le déficit subséquent de la balance des comptes courants durant la première année du vingt et unième siècle (c'est-à-dire durant l'an 2000) où le pourcentage de la sous-région s'est fixé à 7,98 %. Finalement, après quatre décennies d'erreurs de politiques économiques, de détérioration de l'environnement institutionnel et d'endettement, les pays de la sous-région centrale africaine n'ont jamais trouvé le sentier du développement. 64 b) Endettement : Alors que dès les années 60, les pays du Sud s'endettent massivement, incités par des puissances postcoloniales désireuses d'écouler leurs liquidités et, après le choc pétrolier de 1973, par des banques occidentales regorgeant de pétrodollars, deux tendances vont les plonger, au tournant des années 70 et 80, dans une situation économique intenable : l'augmentation déraisonnée des taux d'intérêts et la chute drastique du cours des matières premières, dont ils sont particulièrement dépendants. C'est le début d'une spirale infernale qui débouchera sur la crise de la dette et la « décennie perdue » pour le développement87. Néanmoins, même si tous les pays de la sous-région n'ont pas connu le problème de la dette au même moment et de la même manière, néanmoins, les conséquences de la dette extérieure a fragilisé les opportunités de développement déjà entamées par certains d'entre eux. Que cela ne tienne, une chose est demeurée certaine : c'est que la volatilité des prix des matières premières et la chute des termes de l'échange combinés avec la faiblesse de l'aide internationale, ont poussé à l'explosion de la dette extérieure des pays de ladite région. A propos, comme le dit simplement le prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz, « La dette de la majorité des pays du Sud a très mal tourné, mettant en péril des millions de vies humaines et la souveraineté de dizaines de pays. Jamais il n'a été question pour les créanciers de partager ni même de reconnaître officiellement leurs responsabilités. Celles-ci sont pourtant lourdes, comme en attestent les milliards de dollars de prêts accordés par les pays occidentaux pour armer l'Irak de Saddam Hussein, soutenir le Zaïre de Mobutu, l'apartheid en Afrique du Sud ou les dictatures latino-américaines, sans même se soucier de leur solvabilité88. 87 Plateforme Dette et développement, « Dette odieuse : à qui a profité la dette des pays du Sud ? », Lantier, Paris, 2000, p. 12. 88 J. STIGLITZ, cité dans Dette odieuse : à qui a profité la dette des pays du Sud, p. 23. 65 c) Mauvaise gouvernance : La plupart des économies de la sous-région d'Afrique centrale sont réputées de n'être pas très transparentes en termes de gestion des recettes issues des produits de rente suite aux malversations des dirigeants politiques, à la corruption, à l'abus de pouvoir et à la confusion des rôles. En effet, l'Afrique centrale est la sous-région la moins bien classée sur l'indice de perception de la corruption (IPC). Les auteurs tels que Leite et Weidmann (1999), Ross (2001) et Isham et al. (2005) ont cependant démontré que l'abondance des produits de base favorisait la corruption et la mauvaise gouvernance, qui sont les deux principales causes de la faiblesse de la croissance économique89. Lors de deux dernières publications de Transparancy International, les cinq pays sous-examen ont tous malheureusement occupé l'avant dernière place comme on peut le constater dans le tableau no2.10 suivant : Tableau no2.10 : Indices de la corruption
Source : Elaboré par nous-mêmes sur base des données de Transparancy International. Les données reprises dans le tableau no2.10 ci-dessus indiquent assez clairement que les différents pays de la sous-région de l'Afrique centrale n'ont pas amélioré leur gestion de la chose publique. D'une année à une autre, les indices sont passés de moindres aux pires révélant ainsi que lesdits pays se sont plongés d'une année à une autre dans le gouffre de la mauvaise gouvernance dont les conséquences sur les conditions sociales et économiques se sont empirés 89 D. AVOM et F. CARMIGNANI, « L'Afrique centrale peut-elle éviter le piège de la malédiction des produits de base ? », dans Revue d'économie du développement, Vol. 18, No2, 2010, pp. 47-72, [En ligne], URL : https://www.cairn.info/revue-d-economie-du-developpement-2010-2-page-47.htm (Consulté le 11 juillet 2020). 66 en faisant bénéficier les ressources publiques à une minorité au pouvoir au détriment de la grande majorité de la population. Les données de ce tableau sont représentées dans le graphique suivant : Graphique 2-9 : Evolution des IPC INDICE 170 165 160 155 150 145 140 135 163 ANGOLA CENTRAFRIQUE CONGO BRAZZA RDC TCHAD PAYS 164 145 159 159 147 147 146 156 159 Source : Elaboré par nous-mêmes suivant les données du tableau ci-dessus |
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