Section 2 : Attributs de variété et
échange intracommunautaire.
La prise en compte des préférences des
consommateurs en terme de variétés des produits peut favoriser
une intensification massive des échanges dans une zone. Les analyses de
la Nouvelle Economie Internationale montre que l'essentiel des échanges
dans les zones (Europe, ALENA...) montrent que le commerce intra-branche
(horizontale et verticale) explique à plus de 70% les échanges.
La prédominance des échanges de qualité est très
nette au niveau des échanges intra-Union européenne ; la part du
commerce intra-branche en différentiation verticale est plus de deux
fois supérieure à celle du commerce en différentiation
horizontale (17, 2%) (Fontagné, Freudenberg, 2000).
Le commerce croisé de produits similaires (issus d'une
même branche de l'industrie), fortement substituables, de qualités
équivalentes (donc différant en principe peu en termes de prix
dans une économie fortement intégrée), mais se
différenciant par certaines attributs (couleur, forme...) fait
référence à la différenciation horizontale.
La présence sur le marché de produits
différenciés horizontalement permet aux consommateurs de
satisfaire leur goût pour la variété, ou de se rapprocher
de leur variété idéale. Les facteurs de demande ont un
rôle important.
Dans l'approche de Lancaster, (1966 et 1975 ; 1971 et 1979),
les produits s'apparentent à des paniers de caractéristiques et
chaque consommateur exprime une préférence spécifique pour
un certain panier. En raison de la présence d'économies
d'échelle internes aux firmes, qui limite l'éventail des
variétés rentables sur le marché, seuls certains
consommateurs ont accès à leur
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DIFFERENCIATION PAR ATTRIBUTS DANS LA
CEMAC
variété idéale, tandis que les autres
cherchent à se procurer la variété disponible qui s'en
approche le plus. A cet égard, la différenciation horizontale
à la Lancaster s'inspire de la différenciation spatiale de
Hotelling, (1929). L'approche de Lancaster est appliquée au commerce
international notamment par Lancaster, (1980) et Helpman, (1981).
Les firmes étant nationales et les économies
d'échelle assurant qu'aucune variété n'est produite par
plus d'un producteur (concurrence monopolistique), chaque variété
est produite dans un seul pays. Dans ce contexte, l'échange dans une
zone assure aux consommateurs l'accès à de nouvelles
variétés (celles importées de l'étranger), de sorte
qu'ils peuvent en général se procurer une variété
s'approchant davantage de leur idéal. De même, les firmes ont
accès à un marché plus large leur permettant de mieux
exploiter les économies d'échelle. La combinaison de la
diversité des préférences des consommateurs et des
économies d'échelles constitue donc un puissant moteur à
l'échange.
Dixit et Stiglitz, (1977) modélisent une
différenciation horizontale des produits de formalisation plus simple
dans une concurrence monopolistique. Les consommateurs y sont
agrégés en un consommateur représentatif valorisant la
variété d'un produit différencié
horizontalement.
L'utilité de ce consommateur représentatif est
une fonction CES, qui croît non seulement avec la quantité de
chaque variété mais aussi avec le nombre total de
variétés disponibles. Anderson, de Palma et Thisse (ET, 1989 ;
LE, 1992) ont établi une équivalence formelle entre la
modélisation à la Dixit-Stiglitz d'un consommateur
représentatif ayant du goût pour la variété et
l'approche de Lancaster (1966, 1975, 1971 et 1979) où des consommateurs
exprimant une diversité de préférences cherchent à
s'approcher de leur variété idéale. En d'autres termes, le
consommateur représentatif de Dixit-Stiglitz peut être
considéré comme une agrégation de consommateurs exprimant
une diversité de préférences à la Lancaster.
Krugman, (1979a, 1980, 1981) met en évidence l'importance du
modèle Dixit et Stiglitz dans ce cadre, l'échange international
de
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DIFFERENCIATION PAR ATTRIBUTS DANS LA
CEMAC
biens permet de mettre à disposition des consommateurs
une plus grande variété de produits, tandis que les firmes
bénéficient, comme chez Lancaster, d'économies
d'échelle accrues.
La différenciation des produits peut être une
justification du libre-échange : en s'ouvrant à la concurrence
étrangère, un pays offre à ses consommateurs un choix plus
large dans chaque catégorie de biens, et ce d'autant plus que la
différenciation des produits est importante. On peut même dire
qu'en retour, l'intensification de la concurrence pousse les entreprises
à se différencier les unes des autres, autant que possible, ce
qui accroît cette "offre de diversité".
La faiblesse des échanges des zones telles que la zone
CEMAC s'explique par le fait de l'inexistence des échanges
croisées des produits similaires dans cette zone. Or cette zone
gagnerait à y instaurer ce type d'échange car ses pays ont des
structures économiques homogènes et les consommateurs ont des
préférences hétérogènes. Plus des pays sont
similaires et plus ils échangent entre eux, sous forme de commerce
intra-branche.
Un cas d'école illustrant ce raisonnement nous est
fourni par le modèle de Krugman (1981), qui considère
l'échange dans un modèle à deux pays et deux industries,
où les avantages comparatifs sont définis par des dotations en
facteurs spécifiques associés à chacune des deux
industries ; dans ce modèle, un pays peut exporter un grand nombre de
variétés dans chaque industrie, et l'intensité de
l'échange intra-branche dépend de l'importance relative des
échanges croisés à l'intérieur de chaque industrie
et des échanges de produits de la première industrie contre ceux
de la seconde industrie. Il apparaît alors que l'intensité de
l'échange intra-branche et la diversification de l'économie sont
tous deux des fonctions croissantes de la similarité des deux pays,
définie par la différence de leurs dotations factorielles.
Le développement de l'échange intra-branche, qui
est favorable au bien être en permettant de disposer d'une plus grande
diversité de produits, et de bénéficier d'une plus grande
efficacité économique en raison de la réduction des marges
de monopole, est tout à fait cohérent avec la recherche d'une
plus grande
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DIFFERENCIATION PAR ATTRIBUTS DANS LA
CEMAC
diversification de l'économie : plus il y a
d'échange intra-branche, plus le nombre de produits qui font l'objet
d'une production de la part des entreprises nationales est grand.
DIFFERENCIATION PAR ATTRIBUTS DANS LA
CEMAC
![](La-diffrenciation-par-attributs-dans-la-CEMAC6.png)
COMMUNAUTE ECONOMIQUE ET MONETAIRE D'AFRIQUE CENTRALE
DETERMINATION DE LA DIFFERENCIATION PAR ATTRIBUT DANS LA
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