B - LES SANCTIONS PENALES
La défaillance des emprunteurs bancaire est
désormais passible de sanctions pénales. Il s'agit des peines
d'emprisonnement de 06 mois à 5ans et /ou d'une amende 100 000 à
100 000 000 FCFA en fonction du montant du crédit244. En
plus, il y'a des sanctions spécifiques qui pourront être
prononcées par exemple pour présentation de faux documents par
l'emprunteur.
Les personnes morales sont passible des amendes et des peines
accessoires pour des infractions commises pour leur compte par leur dirigeants
ou préposés ce qui n'exclue pas la responsabilité de toute
personne physique auteur ou complice des mêmes faits 245 . Les
dispositions du code pénal relatives à la tentative, à la
coaction, ainsi qu'à la complicité246 sont applicables
aux préposés des établissements assujettis qui se sont
rendus coupables de l'infraction.
Par ailleurs il y'a possibilité de prononcer des
interdictions résultant de la faillite ou de la banqueroute
frauduleuse247. À cet effet L'article 203 de l'AUPCAP Dispose
que la faillite emporte interdiction générale de faire le
commerce et notamment de diriger, gérer, administrer ou contrôler
une entreprise commerciale à forme individuelle ou toute personne morale
ayant une activité économique. Elle emporte également
Interdiction d'exercer une fonction publique élective ou d'être
électeur, interdiction d'exercer une fonction administrative judiciaire
ou de représentation professionnelle.
Toutefois, il convient de préciser que seuls les
emprunteurs de mauvaise foi sont concernés par ces sanctions
pénales248. Donc il reviendra à l'établissement
de crédit de prouver la mauvaise foi de son débiteur pour obtenir
la sanction du juge répressif, en principe la bonne foi se
présume249. L'absence de mauvaise foi mettrait plutôt
en oeuvre la responsabilité civile contractuelle du débiteur
laquelle se résout en dommages et intérêts tel qu'il est
écrit à l'article 1147 du code civil en ces termes : «
le débiteur est condamné s'il y'a lieu, au payement de
dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution
de l'obligation, soit en raison du retard dans l'exécution toutes les
fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause
étrangère qui ne peut lui être imputée encore qu'il
n'y ait aucune mauvaise foi de sa part. ».
244 KALIEU ELONGO (Y.R.), op.cit.
245 Article 27 de la loi du 24 décembre 2019,
op.cit.
246 Il s'agit respectivement des articles 94, 96, et 97 de la loi
n° 2016 / 007 du 12 Juillet 2016 portant code pénal.
247 Article 25 op.cit.
248 Article 20 in fine ibid.
249 KALIEU ELONGO (Y.R.), op.cit.
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La victime ou toute personne intéressée dispose
d'un délai de soixante jours pour engager les poursuites pénales
sous peine de forclusion.
Il est bien prévu que le prononcé de ces
sanctions ne libère pas l'emprunteur de son engagement et que les
mesures d'exécution forcées et de réalisation des
suretés peuvent toujours être mises en oeuvre.
On ne le dira pas assez, l'accumulation des créances en
souffrance peut être fatale pour la banque. Leur encadrement est
conçu dans l'optique de les éradiquer. Les sanctions des
établissements bancaires contrevenant ont pour but de remédier
aux dégâts des créances en souffrance aussi bien que de
dissuader ces établissements de tout mépris des règles en
place. Considérant que les créances en souffrance sont
également le fait du débiteur, des sanctions pénales ont
été instituées à l'encontre de ce dernier, qui
n'excluent pas son devoir de remboursement.
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CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
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Le recouvrement effectif des créances en souffrance
n'est pas une certitude, la procédure de recouvrement qui a
été entamée peut être semée d'embuches.
L'ouverture d'une procédure collective à l'égard du
débiteur empêche le banquier d'exercer les poursuites pour le
recouvrement de sa créance. Parfois, le débiteur est une personne
publique bénéficiant de l'immunité à l'encontre de
laquelle le banquier ne peut pas pratiquer des mesures d'exécution
forcée. Quand aucun de ces obstacles ne lui bloque la voie, le banquier
doit encore faire face à un système judiciaire malade avec une
faible garantie d'exécution des décisions.
Ces difficultés se soldent parfois en une perte de la
créance pour la banque. Cette perte lui est néfaste. Elle affecte
sa rentabilité, et ses conséquences peuvent aller jusqu'à
la liquidation de l'établissement bancaire, et à grande
échelle l'effondrement du système bancaire de tout un pays. C'est
pour éviter une telle situation que le législateur camerounais
prévoit des peines pour les emprunteurs qui, de mauvaise foi sont
incapables à terme de payer leurs dettes à l'égard des
banques. C'est une initiative née d'une intention louable, mais dont
l'efficacité reste à prouver.
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CONCLUSION GÉNÉRALE
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Les créances en souffrance sont une catégorie
particulière de créances bancaire, leur grand nombre en zone
CEMAC et au Cameroun en particulier est sujet d'inquiétude. Cette
inquiétude est justifiée, car leur croissance peut être
désastreuse sur le système bancaire. D'où la
nécessité de leur consacrer un encadrement adéquat en vue
de limiter leurs dégâts sur les banques. Le législateur a
aménagé pour cette catégorie de créance un
régime distinct, il était alors question de savoir quel est le
régime des créances en souffrance des établissements
bancaires. L'analyse a révélé que leur régime n'est
pas celui de créances perdues, car le recouvrement des créances
en souffrance des établissements bancaire est possible, bien qu'il y'ait
un risque élevé de les perdre.
Ce recouvrement est précédé de
l'identification et de la classification des créances en souffrance. En
fonction de la durée de l'impayé et des caractères de la
créance, elles sont classées dans une catégorie bien
précise de créance en souffrance qui suit des règles de
provisionnement adaptées. Le provisionnement est institué pour
prévenir le risque de non remboursement de la créance, et limiter
les dégâts qu'il peut avoir sur la santé de la banque avant
d'entamer tout effort de recouvrement amiable ou judiciaire.
Le banquier peut recouvrer ses créances en
réalisant les suretés au préalable constituées sur
le patrimoine du débiteur. Il peut s'avérer que ces
dernières ne soient pas réalisables à cause d'un
défaut de constitution, le banquier dispose alors d'une issue dans les
mesures conservatoires que sont la saisie conservatoire et l'hypothèque
forcée judiciaire. Il peut également restructurer la
créance si le débiteur justifie d'un bon plan de
relèvement et de bonnes chances de remboursement. La restructuration est
la voie que préfèrent emprunter de nombreux banquiers quand la
créance s'y prête. Cela se justifie car elle mène plus
rapidement et plus fréquemment au recouvrement que les procédures
simplifiées de recouvrement et les voies d'exécution.
Les procédures simplifiées de recouvrement et
les voies d'exécution intentées pour recouvrer la créance
ont des issues incertaines. En plus de l'immunité des personnes
publiques et les procédures collectives qui peuvent empêcher le
banquier d'exercer ses droits, la précarité du système
judiciaire est un frein au recouvrement des créances en souffrance. Le
faible taux de créances recouvrées a motivé la politique
d'incitation au recouvrement que mène le législateur Camerounais,
tant sur le plan fiscal que pénal. Désormais,
l'exonération des provisions pour créances en souffrance est
subordonnée à l'ouverture d'une procédure de recouvrement,
L'emprunteur de mauvaise foi est passible de peines d'emprisonnement et ou d
`amende.
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Le faible taux de créances en souffrance
recouvrées montre à souhait que le régime de celles-ci
reste à parfaire. Mais les efforts doivent commencer en amont avec des
règles qui encadrent l'octroi du crédit et répriment le
surendettement. En outre, une révision de certaines dispositions des
actes uniformes s'impose afin de mieux prendre en compte les
intérêts du banquier créditeur. Ces efforts doivent se
finaliser par l'assainissement du système judiciaire camerounais pour
une bonne exécution des décisions de justice.
Somme toute, un équilibre doit être maintenu
entre le respect des droits du créancier et la protection du
débiteur. Les nouvelles infractions visent en particulier l'emprunteur
indélicat quid de certains comportements frauduleux des
établissements préteurs. A titre d'illustration, un
établissement assujetti qui en connaissance de cause encourage de
manière directe ou indirecte une personne en surendettement en lui
accordant de nouveaux prêts demeure sous le régime de la
responsabilité contractuelle ou délictuelle. Dans un souci
d'équité, ces établissements fautifs ne devraient-ils pas
également être pénalement sanctionnés ?
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BIBLIOGRAPHIE
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