Les podcasts dans le monde du livre en France.par Camille CAPRON Université de la Sorbonne Paris Nord - Master Commercialisation du livre 2020 |
b) L'auteur.rice au coeur du podcast littéraire ?Dans un podcast littéraire, l'auteur.rice peut généralement y être cité.e, être lu.e, lire un ou plusieurs extraits, participer à une conversation, ou encore être le sujet d'un épisode. Pour certains podcasts la présence physique a son importance. Certains sont construits autour de cela. C'est le cas du podcast littéraire Des livres et moi qui donne la parole, pour chaque épisode, à un des auteurs du groupe Editis, mais également pour La Page Blanche qui transmet des conversations entre la podcastrice et un.e auteur.rice lors de chacun des épisodes. D'autres n'accueillent cette figure physique que ponctuellement. C'est le cas de podcasts littéraires qui en donnent la parole aux auteurs et autrices qu'occasionnellement, comme le fait Claire Jéhanno dans son podcast Pile sous forme d'Hors-série. Pour d'autres, la présence va être autre que physique. L'auteur.rice a alors une place dans le podcast via l'évocation de son oeuvre ou de sa vie. On peut observer cela dans les podcasts de France Culture, par exemple. Est-il alors si important de donner une place à l'auteur dans un podcast littéraire ? Si oui, sous quelle forme ? Quelle place l'auteur/l'autrice y a-t-il /t-elle réellement ? Et pourquoi sa présence y est-elle majoritairement récurrente ? Un podcast sans auteur.rice serait-il encore « littéraire » ? Pour répondre à ces questions, on s'intéressera à la présence physique de l'auteur.rice, ayant alors participé à l'enregistrement du podcast. Nous laisserons donc de côté la présence de l'auteur via la mention de son nom, l'évocation de son livre, ou encore la lecture de celui-ci. Si l'auteur.e est à l'aise dans l'exercice de lecture,
il peut intervenir en lisant des La présence de l'auteur.rice dans un podcast littéraire n'est pas veine. Elle sert et participe à la dynamique de l'échange. Comme Justine Souque le précise, « c'est avant tout la personnalité de l'auteur qui compte [...] et ce que sa voix, sa présence, apporte [au podcast] » mais également la « complicité » existante ou possible entre le podcasteur / la podcatrice et l'auteur/ autrice. C'est en ce sens que la définition du podcast, comme « un contenu vivant et attractif » prend forme. C'est pourquoi, il est parfois préférable pour un podcasteur/ une podcastrice de parler au nom de 34 l'auteur.rice ou de n'aborder seulement que son oeuvre. En effet, si un.e auteur.rice n'est pas à l'aise avec le principe du podcast, l'échange n'aura pas l'effet voulu. Ce n'est donc pas parce qu'un podcast est littéraire que la présence de l'auteur.rice est indispensable. En effet, comme nous l'avons vu précédemment, la définition du podcast littéraire n'inclut pas une présence obligée de l'auteur.rice dans ce processus. Justine Souque développe davantage cela en précisant que « les oeuvres doivent pouvoir vivre indépendamment de la présence de l'auteur » et que le fait de parler de tel ou tel livre dans un podcast n'inclue pas forcément d'y inviter l'auteur.rice en question. Chaque texte est libre à être interprété, commenté et analysé dans les podcasts. C'est ce que l'on voit dans la plupart des épisodes de Pile dans lesquels plusieurs livres sont abordés sous forme de conseil de lecture, ceci sans la participation ou l'intervention de l'auteur.rice pour appuyer ou développer les propos énoncés. On pourrait alors se dire que cette non présence permet une certaine impartialité. Etant donné que l'auteur.rice n'est pas là pour appuyer les propos ou défendre son point de vue, cette non présence permet plus de liberté. A contrario, on pourrait se demander si la présence d'un.e auteur.rice dans un épisode de podcast est promotionnelle et réfléchie en ce sens par les podcasteurs.rices, les auteurs.rices et les professionnels.elles. Cette question d'impartialité se pose davantage lorsque l'on s'intéresse aux podcasts professionnels, créés par des maisons d'édition. On peut se demander si le premier but de ceux-ci ou celles-ci n'est pas purement marketing. Il n'y a pas d'éclectisme dans le choix des auteurs.rices qui y interviennent puisqu'il sont tous et toutes publiés.ées chez le même éditeur ou du moins dans le même groupe éditorial. Et, en plus d'être, pour certains, présents sur les plateformes d'écoute, ils sont également disponibles sur les sites des maisons d'édition, poussés par l'image de celles-ci et plus largement du groupe éditorial. Derrière ces podcasts professionnels ne se cache pas un.e amateur.e de livre mais une image de marque et les enjeux économiques qui s'en suivent. Pour la plupart des podcastrices34 interrogées, la promotion n'est pas le but du podcast puisqu' « il était important [...] de ne pas faire un podcast qui soit un pur produit marketing de promotion. »35. Pour Justine Souque, « si l'auteur.e vient dans un but uniquement promotionnel, c'est une publicité à peine subtile qui n'ajoutera pas de contenu qualitatif au podcast. [...] l'invitation d'un ou d'une auteur.e lors d'un podcast ne doit pas être un prétexte, mais bien l'occasion d'approfondir un sujet. ». C'est donc en cela que réside l'enjeu du podcast, celui « de transformer [le] moment en 34 Podcastrices amateures et professionnelles. 35 Entretien avec Margaux Rol. 35 une rencontre authentique » pour ne pas tomber dans l'enjeu marketing qui détournerait les auditeurs et auditrices de l'écoute, comme l'exprime Justine Souque. Ainsi, il est important de faire la différence entre le contenu du podcast (ce qu'il nous raconte) et sa visée (marketing ou de partage). La présence dans un podcast programmé par une maison d'édition perd en spontanéité. Les auditeurs se doutent qu'il s'agit d'une invitation promotionnelle, et tout l'enjeu sera de transformer ce moment en une rencontre authentique. L'avantage d'un podcast amateur est double, non seulement pour le ou la podcasteur.rice qui, selon la notoriété de l'auteur.rice, va voir les chiffres de son audience augmenter, et pour l'auteur.rice, qui se sentira davantage dans une conversation moins formelle, et donc plus intimiste. Ainsi, on peut se demander de quelle manière les auteurs et autrices sont présents dans notre corpus ? De quels types d'auteurs et autrices s'agit-il ? Si ils et elles sont présents.es sur différents podcasts ? Si ils et elles demandent à y être présents.es ? Si leur présence a forcément un lien avec une sortie récente de livre ou de best-seller ? La particularité des podcasts du corpus est qu'ils accueillent tous des auteurs et autrices. Ils et elles sont, pour la plupart sujet du podcast, celui-ci portant comme titre leurs noms ou sinon le titre de leur dernier livre. Ils et elles y sont invités.ées pour parler de leurs dernières parutions mais surtout évoquer leurs parcours, leurs vies, leurs écritures. La différence entre les podcasts professionnels et amateurs, à ce niveau, réside en la cause de cette présence. Une podcastrice amateure va choisir de parler de tel ou tel auteur, telle ou telle autrice, à la suite d'une lecture. Alors que le podcast professionnel accueille l'auteur ou l'autrice à la suite d'une publication récente d'un de ses livres. Dans Des Livres et Moi, l'échange porte principalement sur le dernier ouvrage de l'auteur.rice alors que dans La Page Blanche, il est centré sur son écriture. Ainsi, le podcast et la présence de l'auteur.rice en son sein fait partie du parcours du produit livre, de sa campagne promotionnelle. On remarque également que, dans les podcasts professionnels, l'échange va être plus formel. Ceci se voit via les questions posées mais également via le ton de l'échange. C'est ainsi que l'on peut entendre des rires, des références à la vie privée ou autres dans des podcasts tel que Pile. On remarque que le format du podcast attire les auteurs et autrices. Même si ils et elles ne vont pas demander aux podcastrices et podcasteurs amateurs.es d'être présents.es dans un épisode, être contactés.ées dans ce but est une chose qui leur plait. C'est ce qu'a ressenti l'autrice Anne-Gaëlle Huon, à plusieurs reprises lorsqu'elle a été contactée pour participer à des podcasts tel que Pile. 36 En effet, même si elle est plus attachée au format du livre audio qu'à celui du podcast, elle aime le côté ouvert et familier du podcast qui lui permet de s'exprimer plus librement que lors d'une simple interview. Et cette attirance pour le podcast n'a pas de barrière face au genre littéraire dont fait partie les auteurs et autrices ou encore face à leurs personnes. Les podcasts de notre corpus accueillent aussi bien des primo-romanciers.ères, que des auteurs.rices de best-sellers ou encore des écrivains.es internationaux. Cette richesse reflète celle du podcast mais également le fait qu'il n'y a pas un modèle d'auteur.rice invité.ée. En effet, tout auteur.rice, s'il/elle le souhaite, peut participer à un podcast. Le podcast littéraire doit donc être authentique pour attirer et répondre aux demandes de son auditoire. Cela passe par des caractéristiques propres aux podcasts, qu'amateurs.rices et professionnels.elles choisissent en accord avec leur sujet et leur cible. Mais cela peut également passer par le choix de faire intervenir un auteur ou une autrice dans son contenu. Toutefois, il n'existe aucune recette miracle et aucun de ces parti-pris ne donne vie à un podcast littéraire idéal. Ainsi, un podcast peut très bien être littéraire sans accorder une place d'honneur à l'auteur.rice. 37 |
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