L'erreur au service de l'enseignement du FLE
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Analyse et interprétation des résultats
du questionnaire
Introduction
Nous consacrerons cette partie à une analyse
approfondie des réponses du questionnaire présentées par
un groupe d'enseignants du français du cycle primaire et
collégial exerçant dans des établissements scolaires
publics et privés au Maroc. Il est à noter que, nous sommes, dans
le cadre de cette analyse loin de juger les pratiques pédagogiques de
ces enseignants. Notre souci primordial est de relever le statut et le mode de
traitement de l'erreur en classe de FLE, de présenter les
spécificités de chaque méthode et de proposer
éventuellement des pistes de remédiation. Cette partie analytique
sera divisée en quatre sous parties.
· Démarche méthodologique
adoptée
Avant de commencer l'analyse et l'interprétation des
résultats du questionnaire, nous avons pensé en premier abord
à expliciter dans ce premier chapitre la démarche
méthodologique adoptée dans le cadre de cette analyse. Nous
appuierons en effet cette démarche sur une comparaison
compréhensive aussi bien des différentes conceptions que les
enseignants du français ont de l'erreur et de son statut en classe de
langues que de leurs méthodes pédagogiques
déployées en vue de traiter/gérer l'erreur de leurs
élèves. Nous rappelons à cet effet que l'objectif
principal de cette comparaison est de mettre en relief les pratiques des
professeurs et les méthodes qu'ils mettent à la disposition de
leurs élèves pour remédier aux erreurs. Comme nous l'avons
mentionné précédemment, l'inventaire du questionnaire a
été fondé sur un ensemble d'interrogations et de constats
qui nous interpellaient avant la réalisation de l'enquête. Notre
démarche consiste dans un premier temps à établir un
inventaire des représentations des enseignants sur l'erreur et de
circonscrire en second lieu sa problématique.
1) Le statut et rôle de l'erreur dans les
pratiques des enseignants
Comme nous le savons tous, l'erreur représente
actuellement un outil indispensable dans l'enseignement/apprentissage du FLE.
En effet, beaucoup de recherches en didactique des langues ont commencé
depuis une dizaine d'années à donner de l'importance à
l'erreur et à s'intéresser à son étude. L'erreur
est très souvent considérée comme un élément
perturbateur qui dérange en quelque sorte le processus d'apprentissage
de l'élève. En d'autres termes, lorsqu'un élève par
exemple commet une erreur ou se trompe, l'enseignant a tendance à penser
qu'il a échoué dans sa mission ou qu'il n'a pas bien
expliqué la leçon. Ce qui est le cas des enseignants du primaire
qui ont participé à la réalisation de notre enquête.
En effet, on remarque que tout le long de leurs réponses, ils rejettent
la présence de l'erreur et la perçoivent comme étant un
frein dans l'apprentissage de la langue. Ces enseignants sont par ailleurs
confrontés au quotidien à un certain nombre de difficultés
liées à la remédiation des erreurs. Dans cette
perspective, Marquillo-Larruy précise
qu'« interpréter les erreurs sera toujours une
pratique risquée du métier d'enseignant (car jamais totalement
définitive et jamais totalement certaine) mais elle est pourtant
indispensable car seule une réaction réfléchie prenant en
compte les spécificités des productions de chaque
élève nous semble à même de permettre un
étayage pertinent qui accompagnera l'élève sur le
chemin de l'apprentissage. Pour la plupart d'entre eux, le
problèmeémane tantôt de l'apprenant (son niveau, ses
besoins, ses attentes et son profil d'entrée) tantôt de la
complexité de la langue française.
Notre avancée dans l'élaboration de l'analyse
des résultats du questionnaire nous ont poussé à changer
nos représentations préalables sur le mode de traitement de
l'erreur dans les classes marocaines. Cependant, il est très important
à souligner que la gestion ou remédiation de l'erreur de la part
d'enseignants exerçant dans une école privée
diffère de celles d'enseignants travaillant dans une école
publique. Il est à noter que dans tous les établissements publics
au Maroc, les enseignants du français ont à leur charge plusieurs
classes (soit environ 160 élèves voir des fois 180 dans les zones
rurales) et sont suivis par un programme défini qu'ils doivent terminer
avant la fin d'année, contrairement aux écoles privées
où les enseignants ont à leur charge un nombre de classes moins
élevé. De cet effet, la remédiation des erreurs ne peut
pas se faire d'une façon individuelle, ce qui signifie, entre autres,
que le temps (restreint à la classe) ne suffit pas à
l'explicitation des origines et causes de l'erreur en classe de FLE et à
amener en même temps leurs élèves à en prendre
conscience.
Le groupe d'enseignants ayant affirmé que les erreurs
proviennent du niveau bas de leurs élèves et du profil
d'entrée qui ne correspond pas à la réalité
décevante des classes (niveau catastrophique des élèves)
se retrouvent dans ce contexte, dans l'obligation d'établir un
diagnostic et de revoir les bases de langue avec leurs apprenants. Les
enseignants se retrouvent alors dans une autre problématique, ce qui
explique alors la réapparition de certaines erreurs chez les
élèves. Le socle sur lequel ces enseignants construisent leurs
apprentissages est très fragile voir même des fois inexistant. Il
faut bien évidemment prendre les besoins et attentes des
élèves en compte, cependant il ne faut pas perdre de vue qu'il
existe en effet plusieurs stratégies et mécanismes sous-jacents
à l'apprentissage d'une langue étrangère. Le
français, est à cet effet pour les élèves
marocains, une langue étrangère et son usage/pratique demeurent
très restreints. Il faut dans ce sens noter que la majorité des
élèves marocains dans les établissements publics
pratiquent le français qu'au sein de la classe, durant les quatre heures
consacrées au cours de français (ce qui n'est pas du tout
suffisant).
En outre, leur entourage familial et social ne les encourage
pas à pratiquer cette langue en dehors de l'établissement, cela
explique leur niveau très bas et leur profile d'entrée
inexistant. Pour remédier aux erreurs et impliquer les
élèves dans ce processus, la majorité des enseignants
optent le plus souvent pour une correction collective en classe n'incitant pas
en conséquent leurs apprenants à prendre conscience
individuellement de leurs erreurs. On reconnait que l'erreur est un indice
d'apprentissage important qui permet à l'enseignant de pouvoir situer la
progression de ses élèves en classe, par ailleurs cette
progression se retrouve malheureusement entravée par le manque
d'implication individuelle des élèves dans la phase de
remédiation.
2) Comprendre le statut et rôle de
l'erreur du point de vue des enseignants
· Attitude des enseignants vis-à-vis de
l'erreur en classe de FLE
Afin de mieux assimiler l'erreur et son statut dans
l'enseignement/apprentissage du FLE, il est nécessaire de l'identifier
et de connaitre à quoi elle est liée. Les erreurs sont des
indices du processus didactique de l'apprenant, des différentes
tâches cognitives et conceptuelles qu'il effectue et des
difficultés rencontrées, l'erreur est de ce propos
inhérente au processus d'apprentissage. Nous remarquons cependant, qu'il
existe toujours cette conception négative/rejet de l'erreur de la part
des enseignants du français. L'erreur demeure pour eux regrettable. Ils
acceptent en effet l'erreur, la repère, l'identifie, essaient d'y
remédier mais ont toujours cette conception qu'elle symbolise un signe
d'échec de l'apprenant qui n'a pas réussi à mettre en
place des mécanismes d'apprentissage efficaces et pertinents pour
intérioriser l'erreur, se l'approprier et y remédier. En effet,
les moyens et supports pédagogiques qu'utilisent les enseignants du
français au Maroc (programme éducatif chargé, manuels
scolaires comportant des exercices de langue n'induisant pas les
élèves à réfléchir eux-mêmes sur leurs
erreurs) ne les préparent pas à transformer la production de ces
dites erreurs d'un obstacle d'apprentissage à un outil au service de
l'acte d'apprendre, comme nous le dicte le modèle constructiviste. Et
encore faut-il savoir qu'il n'est pas évident, dans le cadre de ce
modèle, de déconstruire les représentations
préalables profondément ancrées et stimuler un changement
de comportement.
Les perceptions qu'ont les enseignants du français sur
l'erreur et son rôle dépendent largement de leur contexte
d'enseignement et des besoins réels des élèves dans la
situation didactique. Néanmoins, l'attitude que doivent avoir ces
enseignants à l'égard des erreurs doit être positive en vue
de libérer les apprenants de la phobie de l'erreur. Jacques Attali
affirme dans ce sens : « Quand on aura compris qu'on
apprend en se trompant, on reconstruira l'école différemment. (Le
monde Éducation 10 novembre 2010 ». Parmi les
difficultés que les enseignants du français rencontrent lors de
la correction des copies des élèves et la phase de
remédiation, le manque d'implication des apprenants dans ce processus et
leur niveau très bas en français, qui, entrave le bon
déroulement de la remédiation des erreurs.
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