Section 2 : L'évolution de la politique
monétaire en République de Guinée
Après avoir favorisé pendant des
décennies le recours à l'action directe sur la liquidité
bancaire, la Banque Centrale de la République de Guinée (BCRG) a
procédé au cours des années 1986, à la refonte de
sa politique monétaire en optant, notamment, pour les instruments
indirects. Ces différentes phases seront passées en revue dans
cette section.
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2.1 La politique monétaire avant les années
1985
Jusqu'en 1985, la Banque Centrale de la République
suivait des objectifs classiques, notamment, ceux visant la stabilité de
la valeur interne et externe de la monnaie nationale en faveur de la lutte
contre l'inflation, l'équilibre de la balance des paiements, le plein
emploi, le développement et la croissance économique.
Pour atteindre ces objectifs assignés pendant cette
période, elle utilisait les instruments classiques que sont, le
contrôle direct de crédit, le réescompte et l'open Market,
les réserves obligatoires, le taux d'intérêt et le
contrôle de change.
(i) Le contrôle direct de
crédit
Dans le souci de limiter la progression rapide du
crédit bancaire, la Banque Centrale pratique dès novembre 1964,
le contrôle quantitatif et qualitatif du crédit. Pour agir sur la
quantité du crédit, il fut institué un Comité
Spécial de crédit sous la tutelle de la Banque Centrale qui
devrait s'assurer de la conformité de toutes les demandes soumises par
les banques spécialisées par rapport à la politique et aux
priorités du Gouvernement.
Aussi, une politique de sélectivité de
crédit a été mise en place pour faciliter l'accès
aux crédits de certains secteurs et certaines activités. Cette
politique favorisait les crédits aux entreprises publiques notamment
à travers le financement du secteur agricole, des collectivités
locales, des entreprises publiques. Quant aux entreprises privées
industrielles, elles n'avaient accès aux crédits que si leurs
activités étaient jugées prioritaires par le plan de
développement et si elles étaient aussi solvables.
(ii) Le réescompte et l'open market
La Banque Centrale de la République de Guinée
pour agir sur la liquidité des banques commerciales réescomptait
au taux de 2.5% leurs effets de commerce. La manipulation de ce taux a permis
d'agir sur la liquidité des banques primaires. L'année 1965 avait
été marquée par une étatisation très
poussée de l'économie Guinéenne dont le secteur public
représentait 80% de la valeur ajoutée et
bénéficiait 73% des crédits à l'économie.
S'agissant de l'open market, son utilisation était
conditionnée par l'existence d'un marché monétaire actif,
et cela n'était possible que si les acteurs potentiels disposent
d'actifs importants et entourés de garantie suffisante, les rendant
facilement négociables. Ce qui a conduit à l'abandon du
réescompte et de l'open market.
(iii) Les réserves obligatoires
La politique des réserves obligatoires avait
été instituée le 27 juillet 1960 et mise en vigueur en mai
1993. Ce retard s'explique par le fait que les banques primaires des pays de la
CEDEAO n'avaient pas toutes la maitrise de leurs dépôts liquides
dont la conversion en monnaie fiduciaire était très
élevée. C'est ce qui expliquerait l'importance de la circulation
fiduciaire dans la masse monétaire, qui représentait près
de 57% en 1975 et 40% en 1979. Cette situation avait poussé les banques
à appliquer un coefficient de liquidité très
élevé dans le but de répondre à la demande de
retrait par la clientèle. Ce contexte ne permettait pas à la
Banque Centrale d'imposer aux banques des charges supplémentaires en les
obligeant de constituer des réserves obligatoires. Par
conséquent, cet instrument n'a été utilisé
qu'à partir de 1993.
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(iv)
Le taux d'intérêt
La Banque centrale pratiquait la politique des taux bas dans
l'espoir de stimuler les investissements pour accélérer le
développement économique et permettre la production de biens et
services à des prix de revient modérés afin de contenir
l'inflation et préserver le niveau de vie de la population. Elle
pratiquait de 1961 à 1967 des taux débiteurs
différenciés par secteur d'activité alors que les taux
créditeurs étaient fonction de la nature de l'instrument
d'épargne privilégié.
Sous la pression des partenaires techniques et financiers
(FMI et Banque Mondiale), la structure des taux d'intérêt
débiteurs sera modifiée en 1981. Elle sera fonction du secteur
bénéficiaire et de la nature de crédit.
(v) Le contrôle de change
Il a été utilisé dans le seul but de
favoriser les entrées et sorties de devises dans le pays en vue de
permettre l'équilibre du compte courant, d'une part, et de stabiliser le
taux de change, d'autre part. Dans le souci d'un contrôle de change, le
Gouvernement a créé l'Office de change2 en 1960 ayant
pour attribution de s'occuper de la législation et de la
réglementation de change.
Malgré la création de l'Office, le taux de
change pratiqué n'a presque pas varié pendant 26 ans entre 1960
et 1985. Cette situation s'expliquerait par une absence du marché de
change, et l'inconvertibilité de la monnaie, préjudiciable au
développement des échanges extérieurs. Cette
inconvertibilité était doublée d'une fixité rigide
du taux de change avec une surévaluation de la monnaie impactant
négativement l'investissement direct en Guinée.
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