2. La consolidation de l'Accord du Touquet par le
Traité de Sandhurst
656. Dispositions plus contraignantes sur les
filières de transit. C'est le « décret n°
2018-263 du 11 avril 2018 portant publication du traité entre le
gouvernement de la République française et le gouvernement du
Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif au renforcement de
la coopération pour la gestion coordonnée de leur
frontière commune, signé à Sandhurst le 18 janvier 2018
»634 qui est venu modifier l'Accord du Touquet en apportant des
dispositions plus contraignantes.
633 Projet de loi présenté au Sénat en
session ordinaire, Annexe au procès-verbal de la séance du 8
octobre 2003, 433 rectifié (2002-2003), texte n°8, Accords du
Touquet. Accord publié dans JORF n°0037 du 13 février 2004
page 2949, institué par un décret du 6 février 2004.
634
https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000036794301&categorieLien=id
657.
219
La surveillance policière entreprise par les Parties
s'expriment par l'échange d'officiers de liaison selon l'article 5 du
Traité, par la création de centres conjoints d'information et de
coordination (CCIC) soutenant la lutte contre les filières de passeurs
situés dans le Nord Pas de Calais grâce à une
coopération entre les services compétents en sachant que ces
centres sont habilités à faciliter les enquêtes judiciaires
diligentées à l'encontre des réseaux transfrontaliers,
selon l'article 6.3 du présent Traité, par des actions conjointes
avec les pays sources d'immigration illégale selon l'article 8 du
même Traité. Par conséquent, un maillage policier a
été renforcé dans la zone transmanche notamment en vue de
contrôler plus efficacement les filières de transit souhaitant
rejoindre l'île britannique.
658. Pragmatisme politique. Cet accord
démontre le pragmatisme existant entre des Etats qui ne font pas partie
d'un même espace politique et géographique dans le but de faire
respecter l'ordre et de faire prévaloir la sécurité
publique des Etats malgré des différends politiques. Il existe
donc des accords politiques prônant une surveillance policière
très efficace qui permettent de lutter contre les filières
d'entrée, de maintien et de sortie d'immigration illégale
hébergeant des trafiquants de faux documents.
659. Bilan et transition. En cela, une
surveillance policière émanant d'accords politiques
européens, multilatéraux et bilatéraux se trouve
entièrement adaptée au trafic international de faux documents
d'identité. Plus concrètement encore, il s'agit de proposer une
surveillance policière d'investigation opérationnelle applicable
aux trafiquants qui participent à la vente de faux documents
d'identité.
220
Section II. Une surveillance policière
opérationnelle sur les trafiquants participant à la vente
secrète du faux document d'identité
660. Refonte définitionnelle récente.
La surveillance policière opérationnelle correspond aux
« techniques spéciales d'enquêtes »635
policières. Ces techniques englobent notamment les enquêtes
discrètes, les surveillances, les infiltrations et les livraisons
surveillées transfrontalières636 dans le but de
révéler la matérialité d'une infraction
pénale faisant partie du régime de la criminalité
organisée. Plus précisément, ces techniques
d'investigation entrent dans la catégorie des « techniques
spéciales transfrontalières d'investigations
»637. En outre, le législateur a procédé
récemment « à une refonte des actes d'investigation
»638 en unifiant le régime des techniques
spéciales d'enquêtes sur le fondement des nouveaux articles
706-95-11 et suivants du CPP, dispositions qui entrent en vigueur le
1er juin 2019 selon la loi du 23 avril 2019. En ce sens, « les
modalités d'autorisation, de prolongation et de contrôle de ces
mesures, telles que les sonorisations, les intrusions informatiques ou le
recours aux IMSI catchers, sont unifiées
»639.
661. Intérêts : procédure
dérogatoire et identification de l'objet et des sujets de la vente
secrète des faux documents d'identité. Ces techniques
très particulières sont utilisées pour lutter contre la
grande criminalité, et sont régies aux articles 694 à
694-9, 706-80, 706-81 à 706-87-1, 706-95 et suivants, 706-95-11 et
suivants du CPP640. Par l'utilisation de ces méthodes
investigatrices, « il s'agit donc de
635 HERRAN (T.), Essai d'une théorie
générale de l'entraide policière internationale,
préc., n° 530, p. 262.
636 Ibid., n° 990, p. 496.
637 Ibid., n° 338. p. 178.
638 FUCINI (S.), « Loi de réforme de la justice :
principales dispositions pénales : Cons. const. 21 mars 2019,
décis. n° 2019-778 DCL. n° 2019-222, 23 mars 2019, de
programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice »,
préc., : « Le législateur avait souhaité rendre
applicables les techniques spéciales, outre la criminalité et la
délinquance organisées, pour tous les crimes, ce qui a
été censuré par le Conseil constitutionnel compte tenu du
« recours à des techniques d'enquête particulièrement
intrusives pour des infractions ne présentant pas nécessairement
un caractère de particulière complexité », sans
l'assortir de garanties suffisantes (Cons. const. 23 mars 2019, préc.,
§ 164). Il a également censuré la possibilité qui
avait été prévue de permettre, en cas d'urgence, au
procureur de la République d'autoriser pour vingt-quatre heures le
recours à ces techniques spéciales d'enquête (§ 166).
En revanche, les articles 706-95-1 et 706-95-2 permettent l'interception de
correspondances électroniques stockées pour tous les crimes, en
plus de la criminalité et de la délinquance organisées.
Là encore, l'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions est
reportée au 1er juin 2019 ».
639 Ibid.
640 Par exemple, selon le nouvel article 706-95-12 du CPP
« les techniques spéciales d'enquêtes sont autorisées
: 1° Au cours de l'enquête, par le juge des libertés et de la
détention à la requête du procureur de la République
; 2° Au cours de l'information, par le juge d'instruction, après
avis du procureur de la
221
surveiller le cheminement de l'objet »641 du
crime de faux et le cheminement des sujets porteurs de cet objet à
travers les frontières. La révélation du secret de la
vente et l'existence d'un commerce illicite de faux documents d'identité
recouvrant sont les buts ultimes de la mise en place d'une surveillance
policière sur le terrain. Il s'agit d'identifier les trafiquants auteurs
de la vente du faux document d'identité et les trafiquants complices de
la vente du faux document d'identité au sein des filières
d'entrée, de maintien et de sortie. Avant de mettre en place des
techniques spéciales d'investigations policières, il sera
nécessaire de qualifier juridiquement le rôle de chacun des
trafiquants dans les filières d'entrée, de maintien et de sortie.
Effectivement, le droit international, le droit européen et le droit
français permettent d'appréhender l'ensemble des rôles de
chacun des trafiquants participant directement ou indirectement à la
vente d'un faux document d'identité.
662. Plan. En ce sens, une surveillance
policière opérationnelle sur les trafiquants de faux documents
d'identité faisant partie soit d'une filière d'entrée (I),
soit d'une filière de maintien (II), soit d'une filière de sortie
(III) sera proposée.
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