2. La mise en place d'une surveillance policière sur
les voleurs agissant sur commande des fabricants de faux documents
379. Hypothèse n°1 : distribution
à une seule source et une source s'approvisionne dans un seul lot.
Dans la première hypothèse, le lot de passeports
français vierges issu d'un vol « est distribué à une
seule source et une source s'approvisionne dans un seul lot
»439. La seule source qui va réceptionner ce lot
volé de vrais passeports aura pour mission d'inscrire de fausses
informations sur un vrai support. Ce peut être soit un faussaire, soit un
atelier de fabrication qui s'approvisionnent uniquement dans ce lot. Selon
cette première hypothèse, le(s) criminel(s) qui attaque(nt) les
convois pour voler les lots de documents les distribue(nt) à une seule
source- soit un faussaire, soit un atelier. Cette situation indique que le
voleur a travaillé sur commande d'un fabricant de faux documents.
380. Qualification d'association de malfaiteurs.
Or, lorsque deux personnes au minimum s'entendent préalablement
sur un forfait délictuel, l'article 450-1 du CP s'applique.
L'association de malfaiteurs fait partie du crime organisé, c'est
pourquoi des mesures policières de surveillances pourraient être
mises en place pour identifier ce groupement.
381. Sécurisation des convoyeurs de documents
officiels. Par exemple, « de nombreux lots de souches officiels
vierges ont été volé en France principalement en 2003 et
2004 lors de plusieurs attaques spectaculaires de convois circulant entre
l'imprimerie nationale et les préfectures, où les passeports
devaient en principe être officiellement personnalisés
»440. Il est donc possible de déterminer le moment du
vol ainsi que le lieu du vol, et d'identifier les agents pénaux. Afin de
sécuriser le transport de vrais passeports français, le Premier
ministre « peut autoriser l'utilisation d'un dispositif technique
permettant la localisation en temps réel d'une personne, d'un
véhicule ou d'un objet » selon l'article L. 851-5 du CSI, pour
garantir la sécurité publique. En l'espèce, le dispositif
technique permet de localiser et de surveiller le véhicule transportant
les documents officiels entre l'Imprimerie Nationale et la
Préfecture.
439 Ibid.
440 Ibid., p. 326.
382.
133
Faire appel à une société
privée. En pratique, ce sera une société
privée spécialisée dans l'installation de caméras
ou de micros qui travaillera pour une entreprise de transports des documents
officiels. Les services de police vont réquisitionner sur le fondement
des articles 60-1 du CPP et L.853-1 III du CSI une entreprise
spécialisée dans la sécurité privée.
L'objectif de la mission de cette société est de poser des micros
et/ou des caméras dans les convois de supports d'identité pour
qu'il soit possible de surveiller une agression par une bande criminelle. Ce
n'est que l'objet à l'intérieur du convoi qui nécessite la
mise en place d'une technique administrative de recueil de renseignements, dans
le but de surveiller la circulation du convoi entre l'Imprimerie Nationale et
la Préfecture.
383. Surveillance des bâtiments et des
emplacements dédiés aux convoyeurs de documents officiels.
En outre, il est possible de mettre en place une surveillance des
bâtiments et des emplacements où les convois de documents
officiels se postent au départ et à l'arrivée du
transport, sur le fondement de l'article L.613-10 du CSI, uniquement si un
décret en Conseil d'Etat est pris en ce sens, afin de surveiller «
les valeurs » qui y sont confiées. Une fois que les voleurs ont
accompli leurs forfait, les services de renseignements pourront localiser en
temps réel le moment et le lieu de l'attaque du convoi. A partir de ce
moment-là, des équipes de police, faisant partie du peloton de la
Direction Départementale de la Sécurité Publique par
exemple, pourront mettre en place une filature pour aller identifier le lieu de
rencontre entre les voleurs et le faussaire - seule source de fabrication des
documents officiels - qui va procéder à la personnalisation des
vraies souches de documents officiels. Concernant la compétence
territoriale des officiers de police qui vont poursuivre les malfaiteurs, elle
s'exerce de plein droit sur le territoire national441, et la
filature pourra continuer en dehors du territoire national en sachant que les
OPJ seront « dans l'impossibilité de procéder, à
peine de nullité, aux actes traditionnels pour lesquels l'extension est
autorisée »442.
441 La compétence territoriale en matière de
« surveillance de personnes », assimilable à la filature, est
régie par l'article 706-80 du CPP, nécessitant obligatoirement
l'ouverture d'une procédure dérogatoire de droit commun au
préalable. « Cette possibilité est étendue à
la surveillance de l'acheminement et du transport des objets, biens ou produits
tirés de la commission » des infractions de l'article 706-73 ou
servant à les commettre. « Sont informés le (ou les)
procureur(s) de la République compétent(s) dans les ressorts
où l'opération de surveillance est susceptible de se
dérouler ou, le cas échéant, le procureur de la
République près la juridiction interrégionale
spécialisée », V. en ce sens VLAMYNCK (H.), Droit de la
police, Vuibert Droit, 5ème éd., 2015, p. 28.
442 Ibid., p. 27.
384.
134
Hypothèse n°2 : distribution à une
seule source et une source s'approvisionne dans plusieurs lots. Dans
la seconde hypothèse, le vrai passeport français volé
vierge « est distribué à une seule source et une source
s'approvisionne dans plusieurs lots »443. Plusieurs voleurs ont
commis plusieurs vols sur plusieurs transporteurs contenant des vrais
passeports français. Ces voleurs ont alimenté la même
source - soit un faussaire, soit un atelier de personnalisation de documents
officiels. Les criminels ont donc attaqué plusieurs convois sur commande
d'un fabriquant de faux documents d'identité.
385. Qualification de bande organisée et
réponses policières identiques à la première
hypothèse. Ici la qualification juridique dépasse celle
de l'association de malfaiteurs puisque le rôle déterminé
de chacun des voleurs agissant pour le compte du même faussaire
détermine la qualification de la circonstance aggravante de la bande
organisée sur le fondement de l'article 131-72 du CP. Le régime
juridique des techniques de surveillances policières prévues aux
articles L.851-1 et suivant du CSI seront similaires à celles
proposées quant à la première hypothèse, afin
d'identifier le fabricant de faux documents d'identité, source
réceptionnant plusieurs lots de documents officiels volés
vierges.
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