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La restructuration de l'habitat précaire: de l'ostracisme a l'inclusion des habitants le cas d'Arafat et Grand Medine a Dakar


par Mouhamadou DIENE
Université Paris Est Marne La Valllée - Master 2015
  

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Partie II : Le PPAB un programme ambitieux et inclusif

1- Présentation du programme

En 2008, l'Organisation des Nations Unies pour les Etablissements Humains ONU-HABITAT a lancé le Programme Participatif d'Amélioration des Bidonvilles (PPAB), en partenariat avec le Groupe des Etats d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), sur financement de la Commission Européenne.

l'objectif global du PPAB est de contribuer à l'amélioration des conditions de vie des populations défavorisées en milieu urbain et de contribuer à l'objectif du millénaire pour le Développement (OMD) 7, notamment la cible C, qui vise à réduire de moitié, d'ici à 2015, la proportion de personnes sans accès durable à l'eau potable et à l'assainissement de base et la cible D qui vise à une amélioration significative des conditions de vie d'au moins 100 millions d'habitants des bidonvilles d'ici 2020 13 . Actuellement, il y a 34 pays et 63 villes parmi les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique participant au programme (voir figure 7).

Il s'agit également de renforcer la capacité des institutions locales, centrales et régionale et les principaux intervenants dans les établissements humains et l'amélioration des bidonvilles à travers la bonne gouvernance et les approches utilisées en gestion ainsi que les projets pilotes. Il contribue également, au cas échéant, à élaborer les politiques et réaliser les cadres institutionnels, législatifs, financiers, normatif, et de la mise en oeuvre. Ce processus se fera par le biais de l'analyse situationnelle des bidonvilles, de la mobilisation des ressources nécessaires et de la mise en oeuvre de stratégies appropriées pour l'amélioration des bidonvilles.

Afin d'institutionnaliser l'approche participative dans les politiques et stratégies de planification urbaine, le PPAB a mis en oeuvre en trois grandes phases d'exécution :

? le pilotage urbain participatif ;

? la planification participative de l'action et la formulation du programme ; ? la mise en oeuvre participative du projet.

13 www.monppab.org

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Phase 1: Profilage urbain

Au cours de la première phase, les villes entreprennent des évaluations rapides, participatives, transversales, multisectorielles, et des actions dans le but de cerner les défis et les mécanismes de réponses. Certaines des méthodes appliquées lors du profilage comprennent la revue des ouvrages existants, entretiens avec les acteurs clés et les consultations nationales. Les thèmes principales analysés sont : gouvernance urbaine, sécurité urbaine, logement, le foncier, genre, développement économique local, services urbains de base, gestion des catastrophes, changement climatiques et l'environnement.

Phase 2: Planification des actions et élaboration du document pour le programme Durant la deuxième phase, construite sur les résultats du profilage urbain, les villes formulent des priorités pour les interventions au niveau des quartiers et analysent la planification ainsi que les cadres du développement pour l'amélioration et la prévention des bidonvilles. En outre, les réseaux pour l'amélioration des bidonvilles sont établies, les renforcements des capacités sont mises en oeuvres et les autorités sont facilitées pour identifier les ressources.

Phase 3: Mise en oeuvre du projet

Au cours de la troisième phase, les autorités des communes, les autorités régionales et les gouvernements centraux sont facilités pour la mise en oeuvre des projets concrets identifiés.

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Figure 7 : Cartographie des pays bénéficiaires du PPAB

(Source : monppab.org)

2- L'approche inclusive du PPAB

La participation des acteurs locaux (collectivités locale et habitants) est un principe majeur du PPAB. Les partenaires PPAB, reconnaissant que le développement urbain est inéluctable, s'efforceront à mobiliser les forces positives d'une urbanisation durable, grâce à la mise en oeuvre de politiques urbaines inclusives et fondées sur le respect des droits. Dans la même mesure, ils adopteront une approche participative à l'échelle de la ville pour satisfaire une ou plusieurs des cinq carences caractérisant les bidonvilles : le manque d'eau potable, d'accès à

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l'assainissement, de durabilité du logement, le surpeuplement et la sécurité foncière. Les principes qui sous-tendent la formulation du PPAB sont soulignés en plusieurs points :

> Aucune expulsion forcée ou illégale des habitants des bidonvilles ne se produira dans les quartiers PPAB ciblés.

> Des stratégies directes et tangibles seront conçues pour autonomiser les communautés des bidonvilles défavorisées en allouant 10% du financement PPAB à des interventions de développement gérées par les communautés.

> Le PPAB sera mis en oeuvre sur la base des principes de la bonne gouvernance urbaine, de la transparence dans la gestion, de la responsabilité, de la participation et de la décentralisation. Ces principes sont inclus au niveau des priorités nationales et dans la Déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide au développement.

> Les ressources locales, nationales et internationales suffisantes seront mobilisées pour les activités d'amélioration des conditions de vie des populations des bidonvilles. Ils devront reconnaître que la conception de stratégies pour améliorer la mobilisation de ces ressources constitue l'élément essentiel pour la résolution des problèmes des bidonvilles à moyen et à long terme.

> Les partenaires PPAB au sein des gouvernements nationaux et locaux s'engageront en mettant à la disposition du programme des allocations budgétaires nationales et en participant au cofinancement des projets pilotes du PPAB.

> Les partenaires PPAB poursuivront les stratégies participatives d'amélioration des bidonvilles par l'intégration de l'approche PPAB fondée sur les Droits de l'Homme, qui comprend : les droits des habitants à un accès aux services urbains de base, le droit à un logement convenable et le droit à la participation au processus de prise de décisions, à l'équilibre entre les genres, en ciblant divers groupes communautaires et en particulier les femmes et les jeunes.

> Le PPAB adoptera une approche de gestion axée sur les résultats de l'analyse situationnelle pour la conception, la mise en oeuvre et le suivi des objectifs nationaux qui ont été identifiés.

Les ateliers de planification participative occupent une place importante dans la communication avec les bénéficiaires du Programme. Ils permettent de présenter d'abord aux populations un état des lieux de la situation des quartiers avec toutes les contraintes qui entravent leur développement économique et social. Ensuite de proposer les différents projets

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retenus (voierie, assainissement, adduction d'eau, équipements...) qui ont pour objectif principal l'amélioration de leur cadre de vie. Ils constituent pour les populations des moments de prise de conscience des problèmes de leur environnement, d'expression de leurs besoins, de partage et de prises de solutions collectives.

3- Le Sénégal, un choix pertinent dans un contexte de forte urbanisation

La croissance urbaine au Sénégal s'est traduite par une occupation non planifiée de l'espace donnant naissance à plusieurs quartiers non planifiés aussi bien en zone urbaine centrale que dans les fronts d'urbanisation. Ainsi les conséquences de cette urbanisation sont entre autres une extension démesurée des espaces urbains, un accroissement des besoins en services urbains de base, une demande en moyens de transport, une demande exponentielle en logements (le déficit en logements est estimé en 2010 à 125.000 unités), une occupation anarchique des extensions urbaines et zones non constructibles sachant que les zones d'habitat spontané représentent plus de 30% de l'habitat dans l'agglomération dakaroise et abritent plus de 3 000 000 d'habitants. Cette situation a accru les problèmes des villes avec comme corollaire, une croissance démographique rapide et une extension démesurée des espaces urbains.

Cette carence en logements a entrainé l'occupation anarchique de certains quartiers non planifiées, par une partie des ménages dont la demande en logements n'arrive pas à être satisfaite par le secteur formel. Le plus souvent, les habitants de ces zones sont confrontés à des conditions de vie précaires, un accès limité aux services urbains et équipements de base (eau, électricité, assainissement, éducation, santé...). En raison d'une absence totale de planification, ces zones non planifiées présentent des risques d'inondations qui surviennent chaque année durant l'hivernage.

4- Les quartiers cibles du PPAB : deux quartiers intégrés au tissu urbain dakarois

Le présent projet va concerner les quartiers d'Arafat (40ha) dans la commune de Grand Yoff et celui de Grand Médine (22ha) dans la commune de la Patte d'Oie situées tous les deux dans

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la ville de Dakar (voir figure 8). La commune de Grand Yoff comptait en 2010 une population estimée à 154.291 habitants avec un taux d'accroissement moyen de la population de 2,12%. Celles de la commune de la Patte d'Oie sont estimées à 32.495 habitants durant l'année 2010 avec un taux d'accroissement moyen de 2,13%. C'est donc une population cumulée supérieure à 186.786 habitants au minimum qui bénéficiera des retombées directes et indirectes du projet.

Tous ces deux quartiers sont constitués d'un type habitat non planifié qui ne favorise pas l'implantation des infrastructures nécessaires pour la fourniture correcte des services de base. Les populations qui y vivent, sont pour la plupart dans l'insécurité foncière car ne disposant pas de titre de propriété. Tout cela constitue un frein aux investissements individuels et collectifs car la plupart de ces bénéficiaires n'ont pas accès aux systèmes structurés de financement et de prêts qui leur permettent d'améliorer leurs conditions de vie. Ces quartiers mal préparés à recevoir les investissements nécessaires, sont occupés par des habitants qui participent difficilement au développement de leur localité du fait de l'enclavement, du manque d'infrastructures et d'équipements. Même les activités microéconomiques ne peuvent y prospérer du fait de la promiscuité et de l'insécurité.

Figure 8 : Localisation des quartiers cibles (Source : Google Map)

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4.1- La restructuration de Arafat, un projet repris trente ans après une première initiative

Arafat se situe dans la Commune de Grand Yoff. Il est limité à l'Ouest par la Route des

Niayes, au Nord par la Cité Millionnaire, à l'Est et au Sud par la Route venant du Camp Pénal (voir figure 9).

« Le quartier Arafat dans la ville de Grand Yoff est un vaste quartier ouvrier dans la proche banlieue de l'agglomération dakaroise et réunit des occupants de nature et d'origine diverse. La réalisation de nouveaux programmes d'habitat planifié dans la zone et la mise en place d'infrastructures routières ont propulsé le quartier dans la hiérarchie des établissements urbains dakarois. La rapidité des rythmes de construction est lié au statut encore irrégulier de certaines zones qui font l'objet de nombreuses transactions foncières. Les effets urbanisant de Grand Yoff sont manifestes ; l'embryon d'équipement mis en place est responsable de l'occupation rapide des zones attenantes. »14

C'est à la suite des opérations de déguerpissement de 1985, que les autorités du Sénégal avaient décidé de procéder à la restructuration et à la régularisation foncière d'Arafat par le biais du Projet DUA/GTZ dans les années 1990. Les organes du GIE avaient été officiellement reconnus et un compte avait été ouvert à la Banque de l'Habitat du Sénégal (BHS) pour le dépôt des sommes versées par ses membres et destinées à la régularisation foncière pour la contribution aux frais d'aménagement de la zone. La fin du Projet DUA/GTZ en Décembre 1999 avait entraîné l'arrêt des activités du programme à Arafat. Cependant, le bureau du GIE mis en place depuis 1995, continuait de gérer les affaires courantes du quartier. En 2012, la Ville de Dakar et ONU-HABITAT ont donné mandat à la Fondation Droit à la Ville de reprendre les activités de restructuration et de régularisation foncière à Arafat. C'est ainsi que :

? Un nouvel état des lieux a été réalisé ;

? Un nouveau plan parcellaire a été élaboré ;

? Un nouveau recensement des ménages et du bâti a été refait ;

? Un renouvellement des organes du GIE a été effectué ;

? Les Groupements de Promotion Féminins de Arafat ont été identifiés, répertoriés et conviés à une rencontre d'informations et de partage des objectifs et recommandations du PPAB.

14 TALL, 2009, Investir dans la ville africaine : Les émigrés et l'habitat à Dakar

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? Une rencontre a réuni les bureaux des Associations Sportives et Culturelles et

Economiques d'Arafat (ASCE) autour desquelles évoluent les jeunes de la localité. Ils ont été informés et sensibilisés sur l'importance des opérations de restructuration et de régularisation de leur zone d'habitation. Ils ont par la suite eu à apprécier la pertinence de la démarche pour leur implication et ont réaffirmé leur engagement à travailler aux côtés des autres acteurs pour la réussite du programme

L'habitat est essentiellement fait de matériaux en dur classiques briques, bétons, ciment... (Voir image 1). Ce qui signifie qu'on n'est pas dans un quartier d'habitat spontané fait de matériaux de récupération. Cela signifie également qu'il y a une stabilité de la trame urbaine et que le squat est quasiment inexistant vu que toutes les emprises destinées à l'habitat sont occupées. Les types d'habitation quelquefois en étage sur plusieurs niveaux et destinés à la location sont caractéristiques du paysage urbain dakarois et témoignent d'une demande immobilière qui ne cesse de croître. Le quartier bénéficie des services de base tels que le réseau d'eau potable, l'assainissement, le réseau électrique, l'éclairage public et même le réseau de téléphone.

Figure 9 : Arafat, un quartier qui s'est intégré dans le tissu urbain environnant. Par contre la trame
viaire à l'intérieur du quartier se caractérise par son irrégularité

(Source Google Map)

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Image 1 : Quelques rues à Arafat (Sources : FDV)

La voirie reste malgré tout relativement étroite et n'est pas bitumée, ce qui est caractéristique des quartiers populaires. L'accessibilité est par conséquent difficile pour les automobilistes. Par ailleurs on remarque que plusieurs interstices sont occupés par des cantines faits de matériaux comme le zinc et destinés à des activités d'artisanat, de menuiserie, de restauration, de vente de pain, de charbon de bois... On peut en déduire effectivement que la non planification de ce quartier par les pouvoirs publics ou du moins l'occupation spontanée du quartier n'a logiquement pas pris en compte des zones destinées aux activités économiques, commerciales de moindre envergure ou aux équipements. Par conséquent ces activités sont confinées dans des petits ateliers qui occupent pour la plupart la voie publique.

4-2- La restructuration urbaine de Grand Médine

Le quartier se situe dans la Commune de Patte d'Oie. Il est limité à l'Ouest par le Stade Léopold Sédar SENGHOR, au Nord par les Parcelles Assainies, au Sud par l'Autoroute, et à l'Est par la Route des Niayes (Voir figure 10).

Le quartier a été fondé en 1963. Il faut dire que cette localité située à coté du stade Léopold Sédar Senghor a été mis sur pied par les déguerpis de Baye Gaïndé, une localité qui abrite l'actuel marché HLM. Depuis sa création, le quartier Grand Médine est secoué par plusieurs difficultés notamment les inondations, le problème du lotissement, d'éclairage, etc.

La restructuration et la régularisation foncière de ce quartier ont été entamées par la Ville de Dakar qui avait confié le programme au Bureau d'Etude ENGESAHEL en 2000/2001. C'est ainsi que des études préliminaires ont été réalisées: état des lieux, plan parcellaire, enquêtes socio-économiques, recensement des ayants droit et du bâti, mise en place des organes du GIE des bénéficiaires de parcelles. Des ateliers de planification participative ont aussi été

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organisés. Cependant, à cause de l'indisponibilité du financement prévu, la réalisation du programme de restructuration et de régularisation foncière a été suspendue.

En 2012 la Ville de Dakar et ONU-HABITAT ont donné mandat à la Fondation Droit à la Ville pour reprendre les activités de restructuration à Grand Médine.

Le renouvellement et la mise en place des organes du GIE ont été effectués. Il reste l'ouverture du compte bancaire pour le dépôt et la gestion des contributions financières des bénéficiaires de parcelles pour la régularisation foncière et pour les participations aux frais d'aménagement. Les Groupements de Promotion Féminine ont été identifiés, répertoriés et conviés à une rencontre d'information et de partage des objectifs et recommandations du Programme Participatif pour l'Amélioration des Bidonvilles.

Les représentants des Associations Sportives Culturelles et Economiques ont été rencontrés, informés et sensibilisés sur l'importance des activités de restructuration et de régularisation de leur zone d'habitation.

Figure 10 : Situation géographique de Grand Médine (Sources : Google Map)

Image 2 : Quelques rues à Grand Médine (Source : FDV)

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A Grand Médine, un quartier aux rues très étroites et en grande partie inaccessibles aux automobilistes. Les habitations se limitent pour la plupart en rez-de-chaussée. En plus de cela, certains bouts de rue sont occupés par des habitations faits de matériaux de récupération qui s'insèrent dans la trame urbaine. (Voir image 2).

L'omniprésence de matériaux de constructions (briques, sable et béton) dans la rue (Voir image 2) témoigne de l'activité intense de transformation, construction et rénovation, en cours dans les quartiers. Par ailleurs les enclos de moutons font partie intégrante du paysage et ont tendance à empiéter sur les voies de passage et l'existence de petites activités économiques (ventes de nourriture) est assez fréquente dans ce quartier.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery