III.I.1.2 - LA CONTRAINTE DES RATIOS PRUDENTIELS
Pour éviter les errements d'avant les réformes
monétaires et financières de 1990, il a été
créée comme cela a été souligné plus haut,
la COBAC, qui est un organisme de surveillance et de contrôle de
l'activité bancaire. La COBAC a mis en place des ratios prudentiels qui
s'imposent aux banques et qu'elles sont tenues e respecter à titre
indicatif, on peut citer :
Le but de ces ratios est de limiter la prise de risques
inconsidérés par les banques (ratios de solvabilité) et de
garantir aux déposants de pouvoir récupérer leurs
placements dès qu'ils le désirent (ratios de liquidité).
Selon le rapport d'activité de la COBAC de 1992/93, "la
solvabilité s'entend comme l'aptitude d'un établissement de
crédit à faire face en toutes circonstances à ses
engagements au moyen de ses ressources propres". Selon le même rapport,
"la liquidité d'un établissement de crédit est sa
capacité à honorer ses engagements à vue ou à
très court terme". Du fait de ces ratios, les banques ne peuvent
transformer toutes les ressources qu'elles ont collectées.
Relation Banque-Entreprise et croissance économique
au Cameroun
III.I.1.3 - L'IMPORTANCE DES CREANCES DOUTEUSES ET
IRRECOUVRABLES
Bien que les banques camerounaises aient été
restructurées, leurs bilans étaient en 1995 encore
encombrés par les créances douteuses qui représentaient en
moyenne 32 % des portefeuilles. Cette situation a même empiré, les
créances douteuses ayant atteint 36 % des portefeuilles à la date
du 28 février 1997, soit un montant de plus de 110 milliards. De 1997
à 1999, leur progression a été de 34 %. Bien que, entre
2000 et 2001, la tendance soit plutôt à la baisse, le niveau des
créances douteuses reste préoccupant ; on a même
enregistré une légère progression depuis 2003. Les
ressources collectées dans le passé étaient
immobilisées et ne pouvaient être dirigées vers de nouveaux
investissements. Si toutes les catégories d'agents économiques
sont responsables des créances douteuses, beaucoup d'entre elles
proviennent de l'Etat28 et des organismes publics : selon la Banque
Mondiale, en 1995, les arriérés du secteur public (Etat plus
entreprises publiques) envers les banques commerciales se chiffraient à
246 milliards de FCFA129. La part des crédits accordés
à l'Etat a considérablement progressé depuis les
premières restructurations de 1989, passant de 10 % à 31 % des
crédits totaux accordés par les banques et ce malgré
l'exclusion à partir de 1991 des bilans des banques liquidées. Du
point de vue des banquiers, les mesures accompagnant la dévaluation ont
permis d'alléger la dette extérieure mais n'ont pas
concerné la dette de l'Etat et ce sont les banques qui continuent de la
financer de manière indirecte. Certes, il est vrai, le problème
du financement de l'Etat est en fait beaucoup plus large que les
créances douteuses qu'il a directement suscitées. Dans cette
optique, PEYRARD (1992) estime en effet que l'Etat et le secteur public sont
à l'origine d'une bonne part des créances douteuses du secteur
privé. Les entreprises privées n'ont pu honorer leurs engagements
car le secteur public n'a pas payé ses commandes. Cet aspect est
fondamental même aujourd'hui, pour comprendre la frilosité
actuelle des banques à l'endroit des entreprises. Il est vrai, l'Etat a
certes respecté certaines des conditionnalités imposées
par le FMI, mais il a masqué le déficit public en le
transférant dans le système bancaire.
Il reste que malgré la restructuration, la
vulnérabilité du secteur bancaire camerounais
28 Les crédits destinés
à l'Etat posent également un problème d'efficacité.
Selon King et Levine (1992), les pays au sein desquels le ratio "crédits
destinés à l'Etat / crédits totaux " est le plus important
sont ceux pour lesquels le secteur financier a peu d'effet sur la croissance
économique via l'efficacité des investissements.
29 Les sources de calcul de la Banque
Mondiale et du bulletin des Etudes et Statistiques de la BEAC sont
différentes car selon les données BEAC, la totalité des
créances (saines et douteuses) accordées à l'Etat et aux
entreprises publiques n'est que de 217 milliards de FCFA au 31/12/1995.
Relation Banque-Entreprise et croissance économique
au Cameroun
S'est sensiblement accrue depuis bientôt une dizaine
d'année. En effet, il y a maintenant quatre banques menacées
d'insolvabilité et une cinquième serait elle aussi en
difficulté (contre trois à fin 2010) pour trois raisons :
y' ces banques sont confrontés à des
problèmes de mauvaise gestion, dus en particulier à leurs
prêts à des parties liées;
y' il demeure impossible de mettre sur pied des plans de
restructuration viables pour les banques qui sont déjà en
difficulté;
y' les ressources humaines de certaines banques sont mal
équipées pour faire face aux exigences des conditions changeantes
du marché.
Les fonds propres nets négatifs liés aux pertes
sur prêts non productifs (PNP) de l'une des plus grandes banques
intérieures ont été estimés à 60 milliards
de francs CFA (contre des actifs évalués à 113 milliards
de francs CFA), outre le montant estimé à 20 milliards de francs
CFA pour les autres banques en difficulté. Le nombre des banques en
difficulté et la part importante du marché de détail sous
leur contrôle constituent un risque. Il est vrai que la quasi-inexistence
de prêts interbancaires réduit le risque de contagion, mais la
faillite d'une banque pourrait toutefois précipiter une perte de
confiance dans d'autres banques sous-capitalisées. Le principal risque
lié aux éventuelles fermetures bancaires serait donc de nuire
à la réputation des banques en ébranlant la confiance du
public dans le système bancaire et le pouvoir des instances de
contrôle.
La situation ci-dessus décrite conduit à se
poser la question de savoir si le système bancaire camerounais est en
crise permanente et sa restructuration également permanente.
Il est clair qu'un climat bancaire et financier non assaini
conduit évidemment les banques à être plus regardantes par
rapport aux risques qu'elles prennent et donc à rendre plus difficile
l'accès des entreprises aux différents crédits
bancaires.
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