II.II - LE MARCHE BANCAIRE CAMEROUNAIS APRES LES
REFORMES MONETAIRES ET FINANCIERES DE 1990 : UN MARCHE CONCENTRE NE COMPRENANT
QUE LES BANQUES CREATRICES DE MONNAIE
En 1990, les pouvoirs publics ont engagé des
réformes économiques et financières. Sur le plan
financier, ces réformes ont concerné aussi bien les banques pour
lesquelles un vaste programme de restructuration a été mis en
place, que la politique monétaire de la BEAC qui est devenue plus
rigoureuse, du fait de l'orientation monétariste prise par elle.
II.II.1 - LA RESTRUCTURATION DU SYTEME BANCAIRE : UNE
NECESSITE
Dès 1989, les pouvoirs publics camerounais ont
entrepris de restructurer le système bancaire du pays,
complètement sinistré. La restructuration bancaire est une
opération qui a pour but non seulement de résoudre les
difficultés présentes du système bancaire, mais aussi de
prévenir les risques de fragilisation ultérieures (TAMBA et
TCHAMANBE, 1995 ; ADAM MADJI, 1997 ; BEKOLO-EBE, 1998). Elle se traduit
concrètement aussi bien par la liquidation des banques insolvables et
irrémédiablement compromises pour assainir le système que
par la restauration durable de la solvabilité, la liquidité et la
rentabilité des banques restant en activité, seul gage d'un
système bancaire sain et solide (SERVANT, 1993).
Au Cameroun, la restructuration bancaire24 a
été menée entre 89 et 90 (LENOIR, 1989). Les banques
solvables en difficulté ont été recapitalisées et
les banques insolvables ont été fermées (Tableau 2 pour
les détails). Les plans d'assainissement élaborés avaient
deux objectifs majeurs : tout d'abord, rembourser intégralement, dans
les structures de liquidation, les créanciers privés. La solution
retenue a consisté à privilégier les petits
déposants et à les dédommager dans un délai court.
Ensuite, restaurer durablement la solvabilité, la rentabilité et
la liquidité des banques encore en activité.
Dans un premier temps, les experts en charge de la
restructuration bancaire ont reécrit, conformément aux
règles d'usage, les bilans bancaires qui étaient le plus souvent
falsifiés pour ne pas dire « habillés ». Et dans un
second temps, la régulation bancaire a consisté en
l'assainissement du secteur. Ainsi sur les 12 banques en activité en
1989, seules deux banques
24 Des missions d'évaluation des
systèmes bancaires dans tous les pays de la zone avaient
été diligentées par la Banque Centrale. La
redéfinition de la carte bancaire était la ligne directrice des
conclusions de ces missions : liquidation des banques
irrémédiablement compromises, restauration de la
solvabilité et de la rentabilité des banques pouvant être
restructurées.
Relation Banque-Entreprise et croissance économique
au Cameroun
étaient saines et n'avaient dès lors pas besoin
d'intervention. Trois banques ont été liquidées en 1989,
quatre ont été restructurées, trois ont fusionné
même si celles ayant fusionné ont encore fait faillite (cas de la
BMBC). Les trois banques liquidées sont respectivement : la Banque
Camerounaise de Développement (BCD), la Cameroon Bank Limited (CAMBANK)
et la Banque de Paris et des Pays Bas (Paribas Cameroun).
Au milieu des années 90, plus de 15 milliards de francs
CFA ont été nécessaires pour la restructuration des
banques en faillite.
La restructuration bancaire s'est traduite par la disparition
des banques de développement. Bien que depuis 2011 les pouvoirs publics
aient annoncé à plusieurs reprises la création d'une
banque de développement des PME et une banque de développement
agricole, il reste que pour l'instant, le marché bancaire camerounais
est dominé par les banques créatrices de monnaie à savoir
: Afriland First Bank, la BICEC, la Banque Atlantique Cameroun, la BGFI, la
Citi Bank, Commercial Bank Cameroon, ECOBANK, National Financial Credit, la
Société Commerciale de Banque, la SGBC, Standard Chatered Bank,
Union Bank of Africa ; soit un total de 12 banques créatrices de
monnaie. Les implications sur les entreprises de ce marché bancaire
dominé par les banques commerciales seront analysées
ultérieurement.
Pour ne pas se retrouver dans le laxisme et les erreurs du
passé, des réformes visant à mieux réguler le
système bancaire ont été mises en oeuvre (Groupe ESF,
1990). Par exemple, sur le plan institutionnel, la Commission Bancaire de
l'Afrique Centrale (COBAC) a été créée en 1992 et
s'est substituée aux organes nationaux de régulation.
L'entrée en fonction de cette commission sous-régionale de
contrôle et de surveillance de l'activité des banques a
été complétée quelques mois plus tard par
l'Harmonisation de la Réglementation Bancaire en Afrique Centrale
(HRBAC). Avant la mise en place de ces conventions de régulation
institutionnelle, l'Etat à travers la Société de
Recouvrement des Créances (SRC) a absorbé une grande partie du
passif des banques et a assuré le coût administratif de leur
liquidation et/ou de leur restructuration.
Toutes ces mesures ont conforté les banques dans leur
attitude et modifier la relation avec la clientèle qui existait avant
les réformes de 1990, les rendant encore plus méfiantes
vis-à-vis des PME.
Relation Banque-Entreprise et croissance économique
au Cameroun
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