1985
Entre 1972 et 1985, la politique de crédit des banques
peut être qualifié de généreuse ; celle-ci a
été favorisée par deux facteurs : l'importance prise par
les pouvoirs publics dans le système bancaire et financier depuis les
Accords de Brazzaville d'une part, et l'implication effective des banques dans
le financement de la croissance d'autre part.
II.I.1.1 - L'IMPORTANCE PRISE PAR LES POUVOIRS PUBLICS
AU SEIN DU SYSTEME BANCAIRE
Après l'indépendance du Cameroun, le
développement économique, conçu sous le signe du dirigisme
économique et de l'endettement extérieur a beaucoup
influencé le mode de financement économique établi dans le
pays (BEKOLO-EBE, 1990 ; MATHIS, 1992 ; et EZE EZE, 2001). Le financement du
développement était tel que les crédits que les banques
locales consentaient devaient compléter le prêt extérieur.
En plus, ces banques pouvaient redistribuer les fonds que l'Etat obtenait des
prêteurs extérieurs et qui leur étaient
rétrocédées, à charge pour ces banques de
gérer les crédits. Dans un cas comme dans l'autre, l'influence de
l'Etat était patente. L'Etat s'engageait ainsi dans la consolidation du
secteur financier privé, en y prenant des parts de capital et en mettant
en place des organes de contrôle. En ce qui concerne l'émission de
la monnaie, la BCEAEC (Banque Centrale des Etats de l'Afrique Equatoriale et du
Cameroun) devient la Banque des Etats de l'Afrique Centrale (BEAC). Cette
transformation s'est faite dans le sens d'un rééquilibrage des
pouvoirs entre les pays africains et la France15
15. Les conventions signées entre les différents
partenaires prévoyaient la mise en place d'un organe de concertation (le
comité mixte).
Relation Banque-Entreprise et croissance économique
au Cameroun
En fait, en 1960, le secteur bancaire camerounais était
très embryonnaire. Plus précisément, il se
caractérisait par une forte concentration (ABEGA, 1995). Jusqu'en 1970,
seules quatre banques filiales des banques françaises étaient
répertoriées par le Conseil National du Crédit (CNC) et
auxquelles il convient d'ajouter la Banque Camerounaise de
Développement. En 1984, l'effectif s'élevait à 11 banques.
Le système bancaire était composé majoritairement de
banques privées étrangères16 au rang desquelles
on peut citer : la Société Générale de Banque au
Cameroun (SGBC), la Banque Internationale pour le Commerce et l'Industrie du
Cameroun (BICIC), la Société Camerounaise de Banque (SCB) et la
Banque Internationale pour l'Afrique Occidentale au Cameroun (BIAOC). Ces
quatre banques représentaient plus de 75 % des actifs du système
bancaire, collectaient plus de 80 % des dépôts et distribuaient
près de 90 % des crédits. En réalité, toutes ces
banques n'auront véritablement leurs agréments qu'après
« l'ambitieuse réforme » du système bancaire
camerounais de 1973.
Dès 1970, une nouvelle banque est venue s'ajouter au
paysage bancaire camerounais, la Cameroon Bank Limited (CAMBANK) dont le
capital était entièrement détenu par les
intérêts publics camerounais. En 1971, le Cameroun comptait 05
banques commerciales17 parmi lesquelles les 4/5 étaient
détenues par les intérêts français et 47 agences
dont 8 pour la CAMBANK. Le 30 août 1973, une réforme est venue
bouleverser le paysage bancaire camerounais. Cette réforme,
au-delà de l'implication des nationaux dans le domaine financier,
prévoyait la possibilité d'une ouverture des banques
étrangères non françaises dans le système bancaire.
Pourtant, jusqu'en 1978 le paysage bancaire n'a pas beaucoup
évolué, hormis la multiplication d'agences commerciales des
banques existantes sur le territoire national qui sont passées de 47
à 103. En 1978, la Banque Camerounaise de Développement (BCD) a
été restructurée dans le sens de la suppression du
crédit à la consommtion et à l'habitat ; désormais,
cette banque dite de développement, devait s'occuper de la distribution
du crédit aux PME et à l'Artisanat, aux campagnes agricoles,
à la création et/ou l'extension des sociétés de
développement et enfin au secteur indutriel.
Au début des années 80, le paysage bancaire a
connu une entrée des banques anglo-saxonnes pour la plupart
américaines. Il s'agit de la Chase Bank Cameroon (CBC)
créée en
16 La quasi-totalité de ces banques
n'étaient que des émanations des banques françaises
à savoir : la Société Générale, la BIAO de
Paris, la Banque Nationale de Paris (BNP) et du Crédit Lyonnais (CL).
17 La SCB était la plus importante au
regard du montant du capital [5 milliards de FCFA), et la BICIC la plus
importante en terme de crédits distribués (plus de 180 milliards
de FCFA)] et de dépôts collectés (125 milliards de
FCFA).
Relation Banque-Entreprise et croissance économique
au Cameroun
1979, la Boston Bank Cameroon (BBC) en 1980, la Bank of
America Cameroon (BAC) et la Standard Chartered Bank Cameroon (SCBC) en 1981,
et la Bank of Credit and Commerce (BCC) en 1983. L'installation de ces banques
a entraîné un accroissement rapide des agences bancaires. Le
nombre d'agences est passé de 103 à 145 en 1984. A cette
période, le Cameroun comptait alors 11 banques commerciales et deux
institutions de financement de développement.18
En dehors de la CAMBANK et la Banque Unie de Crédit
(BUC) dont le capital était entièrement détenu par des
camerounais, la participation de l'Etat au capital sociale des autres banques
atteignait les 67 % en moyenne. Dans cette optique et dans la plupart des cas,
l'Etat était l'actionnaire principal. Le gouvernement était
omniprésent dans les processus de prise de décision au sein des
banques, directement ou par le biais des entreprises publiques alors
actionnaire dans ces banques. Indépendamment de la présence du
financement extérieur, le gouvernement a souhaité contrôler
la distribution du crédit interne dans le but de mieux planifier les
investissements dans des secteurs ciblés et inscrits dans les plans
quinquennaux du pays. Cette politique d'encadrement de crédit s'est
malheureusement traduite par le non-respect des normes de prudence.
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