La difficulté de la mise en application des droits sociaux économiques. Un exemple à travers le droit à l'alimentation.( Télécharger le fichier original )par Donald MARDY Faculte de droit et des sciences economiques des gonaives - Licencie en droit 2015 |
INTRODUCTION« Dans de nombreux pays en développement, l'agriculture n'est pas vraiment performante, pour toute une série de raisons et notamment parce que les femmes n'ont ni les ressources voulues, ni la possibilité d'utiliser le temps dont elles disposent de manière plus productive. Qu'elles soient agricultrices, travailleuses ou entrepreneuses, les femmes rencontrent presque toujours des difficultés plus grandes que les hommes pour accéder aux ressources productives, aux marchés et aux services. Ce fossé entre les hommes et les femmes freine la productivité des femmes et réduit leur contribution à la croissance du secteur agricole et à la réalisation d'objectifs plus généraux de développement économique et social. La société a donc tout à gagner à combler ce fossé, pour obtenir les résultats suivants: augmentation de la productivité agricole, réduction de la pauvreté et de la faim et promotion de la croissance économique1(*).» Cette réalité inspire la honte et devrait interpeler la conscience de tous. En Haïti, l'amendement de la constitution de 1987 nous laisse penser que celle-ci va changer car cette constitution en son article 17.1 réclame un meilleur traitement aux femmes et une meilleure représentation de ce groupe2(*). En effet, l'activité de promotion internationale des Droits de l'Homme s'est considérablement développée après la seconde guerre mondiale, elle a progressivement pris, sous l'égide de l'Organisation des Nations Unies une envergure systémique au lendemain de ce conflit. Cependant le système de la protection des Droits de l'Homme comporte outre les instruments de l'ONU des mécanismes nationaux, et plusieurs systèmes régionaux plus ou moins élaborés. Au départ, ces règles et institutions cherchaient à garantir les droits civils et politiques, de la personne, au fil du temps, elles ont intégré les droits économiques, sociaux et culturels, éléments importants de l'identité et de la dignité humaine. Le droit à l'alimentation fait partie de cette dernière catégorie et constitue l'essentiel de notre étude. Le droit de l'homme à l'alimentation est un droit fondamental, il est contenu implicitement dans la constitution haïtienne quand ce texte dans son préambule reconnait les droits imprescriptibles et inaliénables de l'Haïtien à la vie ... et la poursuite du bonheur pourtant beaucoup de citoyens haïtiens continus de faire face à la faim et sont sujets à des souffrances atroces dues à ce fléau. Pour bien traiter et saisir correctement le sujet, il est nécessaire d'expliquer certains termes et concepts. Il n'est pas facile de définir les droits de l'Homme, chaque auteur le conçoit à sa manière. Gérard Cornu définit les droits de l'homme comme « des facultés et prérogatives considérées comme appartenant naturellement à tout être humain dont le droit public s'attache à imposer à l'Etat le respect et la protection en conformité avec certains textes de portée universelle3(*) » Le Professeur Philippe Gérard définit les droits de l'homme comme « un ensemble de droits subjectifs fondamentaux qui appartiennent à tous les individus en tant qu'être humain et qui s'imposent aux autorités publiques dans la mesure où celles-ci sont tenues, non seulement de respecter ces droits, mais aussi d'assurer leur jouissance effective par des dispositions adéquates. » Dans le cadre cette étude, nous entendons par droits de l'Homme l'ensemble des droits et facultés permettant à la personne humaine de jouir sans discrimination de la liberté et de la dignité tout en bénéficiant de garanties normatives et institutionnelles. Pour définir le droit à l'alimentation, nous faisons appel au sociologue suisse Jean Ziegler, ancien rapporteur spécial auprès de l'ONU sur la question du droit à l'alimentation dans le monde de 2001 à 2008. Il le présente comme étant « le droit d'avoir un accès régulier, permanent et non restrictif, soit directement, ou au moyen d'achats financiers, à une alimentation quantitativement et qualitativement adéquate et suffisante, correspondant aux traditions culturelles du peuple auquel le consommateur, appartient, et qui lui procure une vie physique et mentale, individuelle et collective, épanouissante et exempte de peur » libre d'angoisse, satisfaisante et digne ». Vincent Pierre-Marie quant à lui, définit le droit à l'alimentation comme « l'ensemble des règles juridiques qui régissent la production, le traitement, le transport, le commerce et la consommation des denrées alimentaires brutes ou transformées ». A partir de là, nous pouvons dire que le droit à l'alimentation est un droit attaché à l'être humain et dont il doit jouir soit en produisant lui-même son alimentation soit en l'achetant. Le droit à l'alimentation est inscrit dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme adoptée le 10 décembre 1948, dont l'article 25 stipule que: « Toute personne a droit à un niveau de vie normal pour s'assurer sa survie et, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, les soins médicaux, le logement, l'habillement (...)». D'autres textes ont renforcé ce droit cependant son caractère oppressif a été stipulé, pour la première fois, en l'article 11, au premier paragraphe du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels : «Les Etats parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu'à une amélioration constante de ses conditions d'existence4(*) (...)». La force de ce droit a, en outre, été spécifiquement réaffirmée à l'égard de certaines catégories de personnes tels que les enfants5(*), femmes, les victimes des conflits armés, les peuples autochtones...etc. Ce caractère contraignant du droit à l'alimentation a été renforcé par certains engagements étatiques. Le plus important est celui du Sommet Mondial de l'Alimentation (S.M.A) de 1996, où les Chefs d'Etats et de gouvernement présents ont affirmé leur volonté de réduire de moitié le nombre de personnes souffrant de la faim et de la malnutrition d'ici l'an 2015. Il s'agit d'un objectif noble et c'est dans le but d'apporter notre faible contribution à sa réalisation que nous avons orienté notre travail de recherche sur le thème « La Difficulté de la mise en application des droits économiques et sociaux en Haïti : un exemple à travers le droit à l'alimentation » Haïti, malgré ses efforts, reste un pays pauvre où bon nombre de personnes vivent avec un revenu de moins de 200 dollars US environ par an ce qui donne un revenu journalier inférieur à moins de 1 dollar US. En conséquence, les populations des contrées les plus reculées d'Haïti vivent en dessous de ces montants ; ils ont difficilement accès à l'eau potable et à la nourriture. A cet effet, on a assisté à des épidémies de cholera à partir d'octobre 2010 et des famines dans plusieurs régions du pays. Pourquoi y a-t-il toutes ces difficultés alimentaires quand on sait que les ressources planétaires actuelles permettent de nourrir le double de la population mondiale ? Quelle est la portée du droit à l'alimentation dans un pays comme Haïti ? Comment peut-on reconnaître qu'une personne jouit pleinement de ce droit? Existe-t-il de garanties pour son effectivité ? Pourquoi son effectivité est-elle problématique ? Quelles dispositions nécessaires faut-il prendre pour que chaque personne puisse en jouir sans discrimination ? Pour répondre à ces interrogations, nous proposons une étude critique du thème, assortie de perspectives en vue de son amélioration. Notre étude s'appuiera sur les données concernant les systèmes universels et régionaux de protection des droits de l'homme et s'inspirera des expériences et des progrès réalisés par certains Etats tout en s'évertuant à apporter une originalité constructive. Le droit à l'alimentation est consacré par une multitude d'instruments et est protégé par une série d'institutions. Mais à ce jour, son effectivité reste préoccupante. Nous étudierons à cet effet d'une part, la volonté manifeste de protection du droit à l'alimentation et, d'autre part, les conditions favorables à l'effectivité dudit droit. * 1 Rapport de la FAO 2010-2011 : La situation de l'alimentation et de l'agriculture, le rôle des femmes dans l'agriculture : Combler le fossé entre les hommes et les femmes pour soutenir le développement, » consulté le 1 avril 2013, www.fao.org * 2 Cet article stipule : « le principe du quota d'au moins trente pour cent (30%) de femmes est reconnu à tous les niveaux de la vie nationale, notamment dans les services publics. * 3 CORNU Gérard, Le vocabulaire juridique, Edition PUF, Paris, 2001, P. 329 * 4- Le PI.DESC a été adopté par l'Assemblée Générale de l'ONU (A.G.N.U) dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966. Entré en vigueur le 3 janvier 1976, le PI.DESC est l'instrument de référence en matière de garantie internationale du droit à une nourriture suffisante. Il a été ratifié par le Bénin le 12 mars 1992. * 5 - Cf. art. 24. let. c) et 27.3 de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant (C.D.E) du 20 novembre 1989, entrée en vigueur le 2 septembre 1990 et ratifiée par tous les 192 Etats membres de l'ONU. |
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