CHAPITRE II : HISTORIQUE ET EVOLUTION DU
PHENOMENE DES ENFANTS ET JEUNES DES RUES
2.1Les enfants des rues au nord et au sud
Selon l'ONU (1998), la famille est le cadre idéal pour
l'épanouissement et le développement harmonieux de la
personnalité d'un enfant. Tout enfant devrait par conséquent
grandir au sein d'une famille, dans une atmosphère de protection et de
sécurité. Cependant, à travers le monde, de 50 à 80
millions d'enfants vivent sans famille, dans la rue (Combier, 1994, p. 26).
Lorsqu'aux heures tardives les citadins des grandes métropoles se
pressent pour rentrer chez eux, ces enfants abandonnés, pour qui il n'y
a pas de foyers où ils puissent se rendre en toute
sécurité, sont obligés de dormir dans la rue, sous les
ponts, dans les allées et dans les maisons abandonnées.
Ils sont contraints de vivre dans la rue et de la rue. Dans
cette vie de rue, pour survivre quotidiennement, les gestes simples comme
manger, boire, se soigner et dormir deviennent complexes et incertains.
Au Nord comme au Sud, les situations sont relativement
comparables sauf en ce qui les conditions matérielles associées
à la vie de rue et aux facteurs explicatifs (Lucchini, 1996, p.
226-227). En Amérique du Nord, ce sont en général,
l'individualisme, la mauvaise redistribution des richesses,
l'inaccessibilité des loyers aux populations les plus démunies,
les violences physiques et psychologiques qui ont conduit de nombreux jeunes,
dans les rues, dans des familles d'accueil, dans des foyers ou refuges publics.
Ici, on parle beaucoup plus de jeunes de la rue (Parazelli, 2002,O'reilly,
1993) que d'enfants de la rue; car dans ces pays les enfants (mineurs)
abandonnés ou victimes de violence sont rapidement recueillis par les
organismes de protection des enfants et placés dans des institutions
(centres jeunesse ) ou en famille d'accueil toujours sous l'égide des
directions de protections de la jeunesse.
D'autre part, la notion de jeunes ou d'enfants de la rue est
socioculturelle et expliquerait, en partie, la différence des
expressions utilisées dans les recherches sur ce phénomène
de marginalisation urbaine. En effet, en Occident le statut d'enfance ou de
jeunesse est plus lié à l'âge chronologique et l'on fait
ainsi une nette distinction entre l'adolescent, l'enfant et le jeune (on parle
même de «jeune adulte »). Par contre, en Afrique un jeune peut
être considéré comme un enfant car la notion d'enfant ou de
jeune n'est pas liée au seul critère de l'âge, mais surtout
au statut social. Le terme jeune désigne lui-même souvent une
tranche d'âge relativement large, allant de l'adolescent à
l'adulte de 30 ans. Aussi, un jeune célibataire de 20 ou 25 ans au
chômage, toujours dépendant et n'ayant aucune charge sociale ne
peut êtredésignésuccessivement comme un enfant ou un jeune.
Les écrits africains sur la marginalité de cette tranche
d'âge témoignent de cette confusion et de l'utilisation
fréquente de l'expression «enfants de la rue» contrairement
aux recherches nord-américaines ou européennes (Arnaud,
2001;Combier, 1994; Ebigbo, 2003).
Cela ne signifie pas cependant qu'il n'y ait pas d'enfants
dans les rues de ces capitales nord-américaines (Boster, 1991, p. 173)
où l'on observe, en marge de l'abondance de certains, la misère
d'un nombre de plus en plus important de familles pauvres qui ont besoin d'une
aide de l'État (sous forme de sécurité sociale ou d'aide
sociale) pour survivre.
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