A - La circulation :
Le premier système est ce qu'il nomme la circulation.
Il s'agit, dans la perspective vidalienne, du principe de
changement2. Dans trois domaines3 (politique,
économique et culturel) la circulation s'exerce sur l'espace
géographique et « déstabilise » celui-ci. Elle le
déstabilise dans le sens où elle opère des mouvements
déstructurant un ordre géographique déjà
établi. Gottmann nous parle ainsi du déplacement des «
hommes, des armées, des idées [...] des marchandises, des
capitaux, des marchés »4. La circulation
désorganise puis réorganise ainsi l'espace géographique.
Elle consiste à « déplacer » puis rassembler de nouveau
autour d'un lieu privilégié pour ses capacités de
captation de flux. Ces lieux se situeront aux croisements de voies de
circulation. Ceux-là mêmes deviendront des
privilégiés quand d'autres subiront les effets néfastes de
la nouvelle donne géographique.
Habilement, au concept de circulation se substitue celui de
réseaux5. Car qu'est-ce que la circulation si ce n'est un
réseau de connections entre plusieurs lieux déjà
créés par les évolutions de la circulation. C'est donc une
double dynamique que la circulation provoque sur l'espace géographique :
elle désorganise et décloisonne par ses mouvements aussi
inattendues que multi-scalaires (migrations de populations, de
marchandises...), puisqu'elle restructure tout un espace, et elle met en
connexion ces espaces par le biais des nouveaux réseaux qu'elle
élabore.
Malgré sa capacité à se renouveler en
permanence, la circulation reste dans une certaine mesure
déterminée par des contraintes physiques6. La
circulation n'est donc pas totalement libérée des contraintes
physiques. En effet, les voies navigables restent de formidables canaux de
circulation tant qu'elles ne sont pas objets de convoitises entre deux Etats
pour son contrôle. Et même si le progrès technique permet de
ne plus tenir compte du tout des données physiques, il n'en reste pas
moins que la mémoire des influences physiques demeurera7.
La circulation demeure donc une force déstabilisante
pour les sociétés, qui doivent en réponse proposer des
mécanismes de protection et de défense de leurs
intérêts. Face aux déséquilibres
géographiques que la circulation entraine (par exemples des
différences de richesses entre
1 JEAN GOTTMANN, 1952 : 214
2 PREVELEAKIS, 2001 : 43
3 JEAN GOTTMANN 1952 : 215
4 JEAN GOTTMANN, ibid
5 PREVELAKIS, 2001 : 47
6 JEAN GOTTMANN, 1952 : 215
7 PREVELAKIS, 2001 : 44
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deux lieux d'une même région ou d'un même
pays), il faut, pour l'autorité politique en place, maintenir une
certaine cohésion sociale, une cause nationale, pour éviter les
ardeurs sécessionnistes.
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