Ces sept zones de l'ON sont gérées par un
organe, dénommé Office du Niger.
C'est une « entreprise parapublique »
initiée par les colons, dans les années 1920, pour la culture du
coton afin d'approvisionner les entreprises textiles de la métropole.
Après l'indépendance du Mali, l'établissement est mis au
centre du développement de la politique agricole du pays et abandonne la
culture du coton au profit de la riziculture. L'Office du Niger compte
aujourd'hui parmi les plus grands aménagements hydro-agricoles du
continent africain (près de 200 000 ha aménagés,
près de 500 000 tonnes de riz produit).
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Logo de l'entreprise Office du Niger
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Source : Site ON
Elle gère les bras morts du fleuve (Défluents),
soit la partie occidentale du Delta central nigérien, qui pendant les
temps géologiques était traversée par le fleuve, mais
s'est progressivement asséchée.
C'est une des principales zones de production agricole du
Mali, connue pour sa production de riz, qui représente la culture
dominante de la zone. Dans cette zone du delta intérieur du Niger, trois
saisons permettent la culture : L'hivernage, la contre-saison chaude et la
contre-saison froide. Le maraichage est une culture favorable à la
dernière saison.
En effet, sa caractéristique ancienne et son potentiel
agricole ont été rapidement mis en exergue par les colons, qui
n'hésitent pas à investir entre 1928 à 1939 quatre
milliards de francs.
Ainsi, sous l'impulsion de l'administration coloniale
française, un ingénieur, Émile Bélime, a
l'ingénieuse idée de mettre en place un réseau hydraulique
très hiérarchisé, dont le but est d'irriguer la plaine,
estimée aujourd'hui à plus de 2 000 000 d'hectares, afin d'en
faire un grenier à coton pour la métropole, mais aussi un grenier
rizicole pour nourrir ses indigènes (E. Schreyger, 1984).
Pour ce faire, un système gravitaire a
été créé, basé en amont sur le barrage de
Markala, pour réguler l'eau et permettre une maitrise totale de la
ressource (Voir carte 2).
Barrage de Marakala
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Photographie du 10 janvier 2018
Ce barrage est l'élément central de tout ce
système. Sa construction débute en 1934, pour s'achever en
1947.
C'est un pont-barrage en métal qui mesure plus de 800
m de longueur; c'est l'un des plus grands barrages hydrauliques au Mali. Il a
une triple fonction.
D'une part, comme le montre la photographie, il permet aux
populations de se rendre sur la rive gauche du fleuve, où se trouvent
les terres de la zone ON ; dans le sens contraire, les habitants peuvent se
rendre sur la rive droite, ce qui donne accès aux routes pour les
grandes villes comme Ségou à 35 kilomètres et Bamako
à 275 kilomètres
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D'autre part, il permet la régulation du fleuve
grâce à sa fonction de stockage, qui pallie le déficit en
eau durant les périodes d'étiage (période de basses eaux)
qui durent de six à neuf mois.
Sa troisième et dernière fonction, tout aussi
essentielle est permanente : il s'agit de la dérivation de l'eau servant
à l'irrigation des terres agricoles de toute la zone ON, en
élevant notamment la cote de l'eau de 5,5 pour dériver l'eau vers
le canal adducteur.
Ce canal adducteur de 9 km fait prise sur la rive gauche du
Fleuve qui, au point A se segmente en trois canaux partant dans des directions
distinctes.
A droite, le canal Sahel, qui à sa prise
possède cinq passes et une écluse pour la navigation. Il
possède ensuite trois biefs (Points B & C, qui sont mis en eaux). Ce
canal alimente ainsi un falla, le falla de Molodo, un défluent.
Au centre, le canal Costes-Ongoïba possède deux
passes sur sa prise.
Enfin, à gauche se trouve le canal du Macina ; ce
dernier possède à sa prise cinq passes également et une
écluse pour la navigation. Il fait 20 km et alimente le falla de
Boky-Wéré.
Ces canaux principaux permettent d'alimenter les
différents fallas, qui assurent le prolongement afin d'alimenter un
réseau de distributeurs, de partiteurs et d'arroseurs, qui par le biais
des rigoles, permettent d'irriguer les parcelles de la zone ON par
gravité. Un réseau d'évacuation, caractérisé
par les drains, existe également. Chaque distributeur, partiteur et
arroseur procèdent un drain. Placé toujours en parallèle
des canaux d'emmené d'eau.
Ainsi, la régulation se fait notamment par le biais de
rigoles, de vannes plates, modules à masque, de vannes automatiques...
Tout ceci permet d'apporter mais aussi de retirer de l'eau (Voir carte ci
dessous).
Enfin, sur la rive droite du fleuve, contournant le barrage,
se trouve le canal de navigation, une écluse qui aboutit au fleuve Niger
au niveau du village de Thio. Il mesure deux kilomètres.
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Carte
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Source : Géophile
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C'est donc un périmètre irrigué avec un
véritable réseau organisé qui met en valeur un
système « naturel » déjà existant.
I. 4 .2.c. L'installation des populations en zone
ON
De ce fait, la mise en valeur de cet espace autrefois
abandonné a été repeuplée par les colons, par le
biais d'une installation forcée de populations, afin de suivre des
directives agricoles. C'est ainsi que du point de vue humain, on y trouve une
grande diversité culturelle, un melting-pot d'ethnies : des Bambara, des
Peuls, des Maures, des Bozos, des Mossis, des Samogho, mais aussi des
réfugiés, comme les Tamachek et des Bellah, venus après
les sècheresses des années 1983-1985.
Par ailleurs, cette relocalisation généralement
forcée pendant la période coloniale est l'une des raisons de
l'inefficacité du système. Le caractère dirigiste,
très encadré, des choix des cultures a modérément
incité à l'augmentation de la production les exploitants.
Les années d'indépendance suivent sensiblement
le même processus. Arrivé au pouvoir, Modibo Keita vise l'atteinte
de l'autosuffisance alimentaire. Les zones de production se
spécialisent. La zone de l'ON est alors consacrée à la
riziculture.
La politique du gouvernement des indépendances inscrit
l'agriculture malienne dans une dynamique socialiste collectiviste, dans le but
de moderniser le secteur. Cela se traduit par la création de champs
collectifs « les Maliforo », qui se révèlent être
30 % moins productifs que les exploitations familiales. Les paysans
n'intervenant pas directement dans la prise de décision, les politiques
sont alors uniformes et obligatoires.