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Contribution de la culture maraà®chère (échalotes et pommes de terre) aux revenus des exploitations agricoles dans la zone office du Niger : Cas de la zone agricole de Niono


par Awa Drabo
Université Paris-Sorbonne - Master 2 2017
  

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II. Le maraichage source de richesse pour les exploitants ?

1. Le maraichage une activité auxiliaire pour les ménages P56

2. Une activité gage de justice sociale et d'équité en genre et en âge P62

3. Dans un contexte d'urbanisation galopante, le maraichage, perçu comme

l'aboutissement de l'inéluctable changement des régimes alimentaires P67

III. Le maraichage de la zone ON : un succès en demi-teinte.

1. Une pression foncière croissante : germe de la théorie malthusienne ? P72

2. Des contraintes face à l'accès à l'eau, aux semences de qualité et en quantité,

et aux engrais P79

3. La conservation et la transformation : de véritables défis à relever P86

4. Une commercialisation peu rémunératrice pour les producteurs ainsi que pour

les autres maillons de la chaine P96

IV. Perspectives : Immobilisme masqué pour les maraichers ?

1. Le développement inclusif demeure un leurre pour les exploitants sans

soutien de l'État P107

2. Le développement d'unités industrielles et semi-industrielles P118

Conclusion P128

Bibliographie P130

Annexes P137

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Introduction

L'utilité du maraichage n'est plus à exposer. En France, depuis la loi de santé publique de 2007, il suffit pour s'en rendre compte de regarder les publicités sur les produits alimentaires, conseillant de « manger au moins cinq fruits et légumes par jour » par exemple, pour rester en bonne santé.

Au cours de notre vie, les fruits et des légumes ne manqueront pas de se trouver dans nos assiettes. L'Afrique n'y fait pas exception, et le maraichage s'y développe à vitesse grand « V ».

En ce sens, ces dix dernières années, le maraichage connaît une véritable évolution en Afrique de l'Ouest. Entre 2004 et 2014, les productions de fruits et légumes ont augmenté de 50 %1 et ont été accompagnées d'une augmentation des surfaces cultivées (+ quatre millions d'hectares en dix ans). Ceci prouve les avancées de la production de fruits et légumes en Afrique, qui sans conteste est aujourd'hui une activité de rente pour les exploitants (Lalande, 1996). Elle permet certes en partie l'autoconsommation, mais constitue surtout un gage de gain monétaire par sa commercialisation.

Dans le cas du Mali, l'avancée de cette filière porteuse est très visible dans la zone Office du Niger (ON). C'est un grand bassin de production au Mali, disposant d'eau en abondance et de terres arables. La culture commerciale de légumes s'est inscrite dans le paysage de la zone. En contre-saison, les casiers rizicoles accueillent les échalotes, tomates, gombos, piments, pommes de terre, entre autres. Car les terres de l'ON sont aujourd'hui plurifonctionnelles, basées sur une ou plusieurs activités (Adamczewski, et al 2013). On y trouve des « sols » maraichers (MA) (Pasquier, 1996), des casiers rizicoles (R) ainsi que des parcelles double saison (DS) qui sont occupées par le maraichage ou la riziculture en contre-saison, et par la riziculture en hivernage.

C'est une activité d'une grande importance ; elle génère un chiffre d'affaires de 30 milliards de FCFA dans la zone ON (FAO, 2010), soit plus de 45 Millions d'euros, avec une prééminence la culture d'échalotes. Spéculation dominante, celle-ci est pratiquée dans toute la zone.

1 Douet, M (2017) Agriculture : Succès du maraichage en Afrique Francophone, Jeune Afrique, [en ligne] 19 avril 2017.

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Aujourd'hui, c'est une activité commerciale qui s'inscrit dans une activité professionnelle ; c'est la raison pour laquelle elle est qualifiée de maraichage. C'est une activité gage de diversification des activités, d'amélioration des revenus des exploitations agricoles, mais aussi d'amélioration de la valeur nutritionnelle des ménages.

Elle est relativement récente en zone ON. La coopération entre le Mali et le Pays-Bas a été le véritable catalyseur de son émergence. Leur savoir en la matière a permis de mettre en valeur des potentialités encore aujourd'hui sous-exploitées, et de promouvoir une chaine de valeur maraichère plus moderne.

L'échalote constitue l'assaisonnement de base dans les plats maliens ; elle est donc très demandée par les cuisinières maliennes. Elle provient à 100% de la zone ON de mars à août. Aujourd'hui, dans un pays comme le Mali, le maraichage est présenté comme une filière d'avenir, capable de relever les défis liés aux problématiques alimentaires, qui sont toujours une réalité. Le pays est toujours victime de la malnutrition et de la pauvreté « ordinaire ».

En période de soudure, de juin à août 2018, plus de trois millions de personnes seront en situation critique. En d'autres termes, 10 % de la population, si elle n'est pas aidée, n'aura pas de quoi manger jusqu'à la récolte en septembre de cette même année2. L'insuffisance de la production pour se nourrir toute l'année entraine des carences alimentaires.

En février 2017, un peu plus d'un quart des ménages maliens, soit 25,6 %, étaient en situation d'insécurité alimentaire au niveau national3 (essentiellement dans sa forme modérée, 22 %, contre 3,6 % pour la forme sévère). Ce qui reste considérable dans un pays essentiellement agricole. En ce sens, « la situation nutritionnelle reste préoccupante dans le pays du fait de l'insécurité alimentaire, de l'insécurité civile et de la prévalence des maladies liées aux mauvaises conditions d'hygiène » indique le Food Security Cluster.

Les défis demeurent donc très nombreux. L'agriculture malienne devra relever le double défi de la sécurité alimentaire ainsi que celui de la sécurité nutritionnelle. Ses exploitants doivent être mis au centre des politiques s'ils veulent éradiquer la faim

2 Site de l'ON.

3 ENSAN « ENQUETE NATIONALE SUR LA SECURITE ALIMENTAIRE ET NUTRITIONNELLE » Février 2017.

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(Brunel, 2017). Le Mali doit assurer une augmentation rapide de sa production agricole afin de pouvoir nourrir sa population, au regard de sa démographie galopante. Il devra également envisager l'inéluctable diversification des régimes alimentaires avec l'émergence des classes moyennes et l'urbanisation croissante, dans un contexte de changement climatique.

Au delà de la dimension nutritive, le Mali doit aussi se doter d'un système de santé efficace, éduquer sa population, la protéger et la maintenir sur son territoire ; autant de défis difficiles à relever dans un contexte de conflits (au nord et au centre du pays), hypothéquant le développement agricole du pays.

Ainsi dans la théorie, l'agriculture est mise au centre des préoccupations. On tente de minimiser l'exode rural en menant des politiques visant à améliorer les techniques agricoles en les modernisant et en les réhabilitant, afin d'augmenter les rendements et atteindre une autosuffisance alimentaire.

Politiquement, des efforts sont faits ; des lois donnent des directives et un cadre stratégique pour le développement agricole.

Ainsi, les accords de Maputo datent de juillet 2003. L'Union Africaine (UA) et la CEDEAO4 ont adopté le Programme Détaillé pour le Développement de l'Agriculture en Afrique (PDDAA). Il vise une augmentation de 6 % de la production agricole annuelle (Brunel, 2014) ; les pays doivent en outre consacrer 10 % de leur budget national à ce secteur. En ce sens, depuis 2013, le Mali consacre 15 % de son budget au secteur agricole, selon l'ex-ministre de l'agriculture Kassoum Dénon (2016-2017)

Le Mali s'est également doté d'une loi d'orientation agricole (2006), d'une grande importance pour les plans d'actions de développement agricole. La LOA a été promulguée en 2006 et pause les jalons de la stratégie agricole du Mali. Elle indique les directions à prendre et les actions à mener, et met au coeur de sa stratégie les exploitations familiales et les entreprises agricoles notamment les industries agroalimentaires. Son but est l'accès à une agriculture compétitive moderne et durable, pour des produits de qualité à des prix abordables. Afin de « garantir la souveraineté alimentaire et à faire du secteur agricole, le moteur de l'économie nationale en vue d'assurer le bien-être des populations È (LOA, 2006).

4 Communauté Économique des États de l'Afrique de l'Ouest.

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Elle s'appuie sur une gestion décentralisée et un désengagement de l'État au profit des acteurs locaux, LOA donnera lieu notamment à une politique de développement agricole en 2013 (PDA).

Ainsi, dans un cadre juridique, les objectifs et les plans d'actions sont précisés. La diversification faisant partie de ces objectifs, le maraichage est fortement soutenu en zone ON. De nombreux partenaires de ce développement y mènent des projets pour la valorisation de la chaine de valeur, concernant l'échalote notamment. Toutefois, cette filière reste encore aujourd'hui confrontée à des limites qui conditionnent son développement. En ce sens, depuis 2000, on tente de minimiser la prééminence de cette spéculation et de diversifier l'activité. C'est le cas avec l'insertion de la culture de la pomme de terre. Les colons et l'organe de gestion de l'ON la présentent comme une spéculation d'avenir. Sa consommation est de plus en plus courante au Mali. Les principaux bassins de production sont Sikasso et Kati. Ainsi, 204 000 tonnes de pommes de terre sont produites au Mali, réalisées par plus de 50 000 exploitants familiaux. La région de Sikasso à elle seule a produit 50 % de la production nationale, soit 111 000 tonnes lors de la campagne 2016-20175. La zone ON ne représente encore qu'une infime partie de la production, soit 28 938 tonnes. C'est une culture qui, par les potentialités qu'offre l'ON, pourrait concurrencer le bassin de Sikasso et relever le défi de l'autosuffisance alimentaire du Mali.

Car aujourd'hui, la consommation de la pomme de terre est telle que la production ne suffit pas pour répondre à toute la demande. Le manque est importé de Hollande ou encore du Maroc.

L'ON, fort des réussites des autres bassins de production, s'oriente vers un développement de la spéculation dans sa zone, à l'image de l'expansion des terres qui se produit. Lors de la campagne 2012-2013, la production de pommes de terre a été réalisée sur 200,39 hectares, contre 826,8 hectares lors de la campagne 20162017. Les prix sont plus rémunérateurs que d'autres spéculations comme l'échalote, ce qui incite de plus en plus d'agriculteurs à cultiver la pomme de terre. Cependant, l'échalote reste l'aliment le plus cultivé, du fait d'une meilleure connaissance des techniques agricoles et de son accès facilité aux semences.

5 Elle rapporte entre 10 à 13 Milliards de FCFA aux maraichers de Sikasso. (Plus de 15 millions d'euros).

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En ce sens, dans le cadre de ce mémoire, on se demandera quel est la contribution du maraichage (échalote et pomme de terre) aux revenus des exploitants dans la zone de l'ON ?

Cette question permettra de mieux cerner les améliorations qu'il a engendrées et les perspectives pour les colons de la zone, mais aussi d'identifier les contraintes auxquelles il fait face. La zone de Niono étant un espace relativement bien documenté, où le maraichage est répandu, les enquêtes porteront sur trois villages dans son périmètre.

Concernant la démonstration, nous présenterons dans un premier temps le terrain d'étude et la méthodologie adoptée ; dans une seconde partie, nous décrirons les apports du maraichage dans la vie des colons ; dans une troisième partie, nous exposerons les défis auxquels la filière est confronté ; dans une dernière partie, il s'agira d'étudier les perspectives pour cette chaine de valeur maraichère, au Mali.

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I. Présentation générale du terrain

d'étude et de la méthodologie

d'enquête

1. État de l'art

Le maraichage est une activité qui consiste à produire des légumes. À la différence d'un potager ou d'un jardin, cette production a une visée commerciale, dont le but est d'approvisionner en légumes les villes du pays ainsi que, souvent, celles de la sous-région.

Aujourd'hui, il est fréquent de trouver dans les villes des pays du nord, mais aussi du sud, notamment en Afrique, une production de légumes dans les zones interstitielles (Alvin, 2015) ou périphériques des villes. Un exemple en est le village de Samanko, ou celui de Baguineda, près de Bamako. On peut alors parler de maraichage urbain, plutôt que d'agriculture urbaine6, qui permet de fournir à ces maraichers un circuit de commercialisation « court ». La zone de production, proche des zones de consommation, procure un véritable avantage comparatif aux maraichers urbains. Cette activité est souvent le reflet de la précarité, du chômage, de la quête d'une sécurité alimentaire et d'une justice alimentaire, dans les villes du sud comme du nord (Alvin, 2015). Si ce maraichage existe dans les espaces urbains il en est de même pour les zones rurales. La superficie disponible permet à ces campagnes de mener un maraichage sur des superficies viables économiquement.

Le maraichage en Afrique, notamment en Afrique de l'Ouest dans des pays comme le Niger, la Côte d'Ivoire (Bastin, Fromageot, 2007) ou encore le Mali, est une activité complémentaire à la céréaliculture pluviale en zone rurale. Pour cette raison, elle est souvent présentée comme une agriculture de contre-saison.

S'il est vrai que la pratique de culture de légumes a toujours existé dans ces pays d'Afrique de l'Ouest, il n'en va pas de même pour son caractère commercial, apparu il y a moins d'une quarantaine années. Il s'agissait jusque-là d'un jardinage, dont le

6 Site: Potage-Toit

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but était principalement l'autoconsommation. On produisait ainsi les condiments nécessaires pour les sauces qui accompagnent le riz, le mil ou encore le sorgho. Progressivement, à partir du début des années 1980, cet aspect commercial a pris de l'ampleur dans des pays comme le Mali. Les politiques comme les exploitants ont pris conscience de son potentiel, donnant lieu à une vulgarisation des techniques culturales, à la création de terres à destination du maraichage (Projet Rétail, 1984) et tout un ensemble de politiques de développement pour la promotion des cultures maraichères.

Ce changement, ce développement de la dimension commerciale s'inscrit dans un contexte, pour ces pays d'Afrique de l'Ouest.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci