Les effets de la crise financière internationale sur le système bancaire congolais (r.d.c).( Télécharger le fichier original )par Charly MAYANGI KINZUMBA Université de Kinshasa - Licence en économie monétaire 2009 |
CHAPITRE 3LES EFFETS DE LA CRISE FINANCIERE INTERNATIONALE SUR LE SYSTEME BANCAIRE CONGOLAISCe chapitre est divisé en trois sections. La première tente de relever l'impact de la CFI au niveau global ; la deuxième section traite le noeud de ce travail, c'est-à-dire l'impact de la CFI sur le SBC et enfin dans la troisième section, l'on propose quelques mesures et politiques de lutte contre l'impact de la CF. Section 1 : Impact au niveau globalDans cette première section, on prend soin de séparer le contexte international du contexte intérieur ou national, durant les quatre années sous-étude soit de 2006 à 2009. Contexte International En 2006, la longue expansion de l'économie mondiale, entamée depuis une décennie, s'est confirmée en 2006. Au premier semestre, cette phase cyclique a été alimentée par des conditions favorables sur les marchés financiers et par le dynamisme du commerce international. Ces évolutions sont apparues dans un contexte de maitrise de l'inflation, en dépit du niveau élevé des taux d'intérêt et des cours du pétrole. Au second semestre, la croissance économique mondiale s'est ressentie de l'affaiblissement de l'activité économique aux EU, résultant du fléchissement du marché immobilier et de la hausse des prix des combustibles. Dans ce contexte, les banques centrales ont procédé au resserrement des conditions monétaires dans les principaux pays industrialisés, afin notamment de contenir les pressions inflationnistes57. 57 BCC, Rapport Annuel 2006, p. XVIII - 56 - En 2007, en dépit des craintes suscitées par la CF apparu en août 2007, la croissance économique mondiale, quoiqu'en léger repli, s'est maintenue. Selon les indications du FMI, elle s'est située à 4,9 % contre 5 % en 2006. Elle a été principalement le fait des économies émergentes et en développement d'Asie et d'Afrique. Dans les économies avancées, la croissance économique s'est fortement ralentie aux EU, en raison de l'effondrement de la bulle immobilière dans le secteur immobilier. Ce dernier s'est ressenti sur l'activité. La même tendance a été constatée dans la zone euro et au Japon, où il est relevé un fléchissement du PIB en volume respectivement de 2,6 % contre 2,1 % en 2006. Cette évolution tire son origine notamment du renforcement de l'incertitude résultant des turbulences sur les marchés des capitaux au second semestre de l'année. Dans les économies émergentes, le rythme de l'activité économique est demeuré vigoureux et a constitué le principal moteur de l'expansion du PIB mondial en 2007. En ce qui concerne l'Afrique subsaharienne, la croissance économique est en nette progression en 2007, s'établissant à 6,2 % contre 5,7 % en 2006. Cette évolution est consécutive, en terme de l'approche par les VA, à l'accroissement de la production pétrolière et en terme de l'approche par la dépense, à l'augmentation des investissements intérieurs58. En 2008, depuis le début du second semestre, des bouleversements brusques et rapides caractérisent l'évolution de l'économie internationale. En effet, après plus d'une décennie d'expansion remarquable, les économies avancées, principalement celles des EU, de l'Europe et du Japon, sont entrées en récession. Il importe de relever qu'en ce qui concerne les EU, le début de cette phase cyclique a été confirmé dès l'exercice 2007. Ainsi, de la CF, l'économie internationale est actuellement en proie à une crise économique sévère dont l'ampleur et l'incertitude quant à sa durée, font craindre l'apparition d'une crise sociale découlant de l'augmentation du taux de chômage et du coût de la vie. Les craintes quant à la durée de la récession expliquent notamment l'évolution baissière des cours boursiers et des matières premières. 58 BCC, Rapport Annuel 2007, p. XVII - 57 - Par ailleurs, l'accumulation des impayés suite à l'éclatement de la bulle financière a amené au rationnement du crédit par la plupart des institutions financières. Ainsi, en dépit de la baisse généralisée des taux directeurs par les principales banques au monde, la demande des crédits en vue de la relance de l'économie n'augmente pas. Quant aux économies en développement, elles sont confrontées tant à l'effondrement de la demande internationale qu'à celui des valeurs et des capitalisations boursières des entreprises y opérant. Il en résulte d'une part, la chute des cours des matières premières impliquant la baisse des exportations et , d'autre part, la contraction des investissements tant directs que de portefeuille : la croissance économique s'en trouve fortement affectée59. En 2009, les politiques et initiatives mises en oeuvre dans les économies du centre commencent à porter des fruits. Les contrecoups de la CF notamment la récession ou le ralentissement de l'activité, l'accentuation du chômage, le repli des flux réels et financiers de la balance des paiements sont progressivement en train d'être amortis. Aux EU, pour la première fois depuis le début de la crise en août 2007, le taux de chômage a légèrement baissé en juin 2009, passant de 9,5 % à 9,4 %. Cette tendance commence aussi à se profiler dans la zone euro. La stabilisation tant de l'activité que des marchés financiers dans les économies avancées, principalement aux EU, augure des perspectives optimistes en matière de reprise économique. Cependant, la reprise serait timide, en raison du temps nécessaire pour restaurer la confiance des agents économiques. Ces évolutions favorables peuvent être capitalisées dans les économies en développement, à condition de maintenir des politiques macro-économiques saines et des réformes résolument tournées vers la bonne gouvernance60. En Afrique subsaharienne, les conséquences nettement négatives de la crise se ressentent encore sur les performances 59 BCC, Impact de la CFI sur l'économie de la RDC, déc. 2008, p. 3. 60 BCC, Evolution économique récente, août 2009, p. 1. - 58 - macroéconomiques réalisées par la sous-région. En effet, après la longue période d'expansion, la croissance économique tomberait à 1 % en 2009. Cette décélération de la croissance constitue un frein évident pour la lutte contre la pauvreté avec l'augmentation du chômage ainsi que les ajustements budgétaires liés à l'amenuisement des recettes publiques. D'une manière générale, la chute des bourses mondiales a entraîné la dégradation de la situation financière des banques qui les a amenées à accorder des prêts de façon plus sélective. La CF affecte l'investissement des ménages et des entreprises par le canal du crédit. Ces agents font face à des coûts plus élevés pour se financer et à un durcissement des conditions d'octroi de crédits61. L'impact négatif de la crise sur l'activité se traduit par une demande d'importation plus faible et une contraction du commerce international perceptible dès la fin de l'année 2008. Les pays les plus touchés par la crise seraient le Japon, l'Allemagne, le Royaume-Uni et les EU (cf. tableau 02). Tableau 02 : Impact estimé de la crise sur les principales économies avancées. (Impact sur la croissance en points de PIB).
Source : J.C. BRICONGNE et al., « la crise des subprimes : de la crise financière à la crise économique », in notes de conjoncture, Insee, mars 2009, p.42. Les pays les plus touchés par la contraction du commerce international sont de loin l'Allemagne et le Japon, du fait de la contribution prépondérante des exportations à leur croissance et bien que ce facteur puisse aussi représenter un atout en période 61 Il sied de rappeler que, bien que les BC aient baissé leur taux directeur, les banques commerciales sont réticentes à la baisse de leur taux débiteur. - 59 - de reprise. La part des exportations dans le PIB est en effet de 47 % pour l'Allemagne en 2007. En outre, les exportations allemandes sont constituées en grande partie de biens d'investissement, dont la demande mondiale a particulièrement diminué à cause des restrictions de crédit et de la contraction des débouchés. Le Japon, malgré une part des exportations dans le PIB de 16 % seulement, a été frappé de plein fouet par la chute des importations chinoises, dont le contenu en produits japonais est très élevé, à partir du quatrième trimestre 2008. Il a également été fortement pénalisé par l'appréciation du yen depuis l'été 2008, qui profite aux pays exportateurs concurrents. Alors que l'Allemagne et le Japon subiraient surtout la chute de leurs exportations, les EU et le Royaume-Uni souffriraient du retournement de leur marché immobilier, à l'origine de la crise des crédits subprimes. La dévalorisation des patrimoines financier et immobilier dans ces deux pays contribuerait ainsi à des effets de richesse plus négatifs que dans les autres pays.62 D'autres pays moins exposés à la crise, en particulier parce qu'ils sont endettés en monnaie étrangère, comme l'Islande et l'Ukraine, ont connu une forte dévaluation de leur monnaie et sont entrés dans une situation de cessation de paiement qu'une aide financière du FMI a résolue63. Contexte Intérieur Généralités En 2006, au plan économique, il sied de relever la non conclusion de la 6 è revue du Programme formel financé par la Facilité pour la Réduction de la Pauvreté et la Croissance (FRPC). La suspension de ce programme a eu comme conséquence le gel des appuis 62 J.C. BRICONGNE et al., « la crise des subprimes : de la crise financière à la crise économique », in Notes de conjoncture, Insee, mars 2009, pp. 37-42. 63 http://fr.wikipedia.org/wiki/crise financi%C3%A8re de 2008 voir la crise financière de 2008 - 60 - budgétaires et des aides à la balance des paiements. Pour maintenir le dialogue avec les partenaires multilatéraux, les autorités ont convenu avec ces derniers, de la mise en place, pour une durée maximale de 18 mois, du Programme de référence dénommé Programme de consolidation, PRC en sigle ou encore Programme Suivi par les Services du FMI (PSSF). La situation économique, financière et monétaire du pays s'est déclinée globalement comme suit : Les données à fin juin indiquaient au niveau du secteur réel, le tassement des tensions inflationnistes et la consolidation de la croissance économique64. En 2007, avec une variation du PIB réel de 6.3 %, l'économie congolaise a enregistré pour la sixième fois consécutive un taux de croissance économique positif, consolidant ainsi son ancrage dans la phase d'expansion économique. Les mines, les télécommunications et le commerce de gros et de détail ont constitué les principales sources de cette croissance65. En 2008, deux évolutions ressortent globalement de la situation économique et financière de la RDC : ? Le premier semestre marqué par une forte augmentation de la croissance économique et une accélération notable de l'inflation tirée par la hausse des prix des produits pétroliers et alimentaires sur le marché mondial ; ? Le second semestre caractérisé par le ralentissement notable de la croissance à la suite, notamment de l'écroulement de l'activité dans le secteur minier (...) et une certaine décélération de l'inflation à la suite de la baisse des prix des produits pétroliers et alimentaires sur le marché mondial66. En 2009, trois périodes ressortent de la situation économique et financière de la RDC aux neufs premiers mois de l'année 2009. 64 BCC, Rapport Annuel 2006, p XVIII 65 BCC, Rapport Annuel 2007, p VI 66BCC, Impact de la CFI sur l'économie de la RDC, p. 3. - 61 - Au premier trimestre, l'économie congolaise a été en proie à une forte inflation et à une rapide dépréciation de la monnaie locale dans un contexte de recul de l'activité de production (voir tableau 03 et graphique 01). Cette conjoncture défavorable tient aux à-coups de la CFI et aux chocs internes tant budgétaires que monétaire, se traduisant par l'expansion non prévue de la base monétaire, la hausse généralisée des prix intérieurs et l'incertitude croissante à l'effet de plomber la relance des activités. Au deuxième trimestre, une nette amélioration de la conjoncture a été relevée à la suite de signes de reprise de la demande internationale et des cessions régulières des devises de la BC sur les marchés des changes. Il en a résulté le ralentissement de la volatilité des prix intérieurs et du taux de change couplé à une réduction sensible de la dégradation de l'activité économique. Comme réponse à cette évolution, l'inflation a sensiblement baissé, conférant ainsi la possibilité au taux d'intérêt réel de la BCC. Cette situation améliore les conditions d'allocation efficientes des ressources et la lutte contre les activités spéculatives, notamment en matière de crédit et de refinancement. Au troisième trimestre, la situation s'est caractérisé par la résurgence de nouvelles tensions tant sur le marché des changes que de biens et services, à la suite de l'aggravation, en milieu des mois, du déficit public, base solde budgétaire intérieur, depuis juin. Cependant, il importe de relever que l'exécution du TOFE que la situation monétaire intégrée à fin du mois demeure globalement en ligne par rapport à la programmation. Le mois d'octobre 2009 reste marqué par la poursuite des pressions sur les marchés des changes et des biens et services, en raison de la persistance du déficit public infra mensuel. Tableau 03 : Evolution du taux d'inflation et de croissance de 2006 à 2009 (%).
Source : http : //www.bcc.cd/dowloads/pub/not conj/note-30-12.pdf - 62 - On remarque une évolution à la hausse de la croissance jusqu'en 2007 de 0.9 point suivie d'une évolution baissière de 2008 à 2009 et une reprise en fin décembre 2009. Graphique 01 : Taux de croissance économique et taux d'inflation 50 taux d'inflation 0 taux de croissance taux de croissance taux d'inflation 2006 2007 2008 2009 Synthèse Ici, il est question de voir les conséquences de la crise financière sur le secteur réel de l'économie congolaise, sur les relations extérieures et sur les finances publiques. 1.1.1.1. Impact sur le secteur réel Le tableau suivant nous montre l'évolution des cours des matières premières de 2006 à 2009. Tableau 04 : Evolution des cours des matières premières d'origine minérale de déc. 2006 à déc.2009
Source : http//www.bcc.cd/downloads/pub/not conj/NOTE-31-01-2009.pdf En 2006, il ya eu augmentation des prix de presque tous les produits miniers. Les facteurs à l'origine de cette hausse de prix sont notamment le resserrement de l'offre mondiale face à une importante demande marquée par les fortes consommations chinoises. - 63 - Ainsi de 21,6 $ le carat en 2005, le cours du diamant est passé à 24,9 $ une année après, soit une progression de 15,3 %. Quant au pétrole, au cuivre et au cobalt, leurs prix en 2006 ont été respectivement de 66,2 $ le baril, 5496,31 euros la tonne métrique et 17,2 $ la livre poids contre 56,1 $, 3140 euros et 15,9 $ une année plus tôt. En 2008, tous les cours des produits exportés par la RDC connaissent des baisses importantes, le chemin vers la hausse en 2009. A travers les tableaux 05 et 06 suivants, voyons l'évolution des cours des produits agro-alimentaires et des produits pétroliers. Tableau 05 : Cours des principaux produits agro-alimentaires
Sucre Cts/Ib Farine de soja Cts/boisseau Bois cts/bdft Cotton New york Cts/Ib Jus d'orange Cts/Ib Maîs Eur/tonne Farine de blé Eur/tonne Riz Cts/Ib - Arabica New york cts/Ib Déc. 2006 481,3 - - - - - - 562,9 52,6 1315,8 109,6 147,7 Déc. 2007 3105 234,8 67,9 259 254,5 219 1850 113,1 11 143 13,6 1203 Déc. 2008 48,1 68,6 940,5 1765 108 1467 172 136 11,4 137,5 15,7 119 Déc. 2009 2580 205 75,91 288 - - - - - - 1294 135,9 Pics observés Valeurs Dates 2753 4298 268,8 331,5 295 24,68 220 86,88 165 14,18 149,85 1656,3 05mar08 03mar08 03mar08 04mar08 21aoû08 20déc07 24avr08 03juil08 04juil08 14aoû08 16juin08 17mar08 Source : www.bcc.cd/downloads/pub/not conj/note-30-12.pdf Il convient de souligner que la tendance générale des produits agro-alimentaires est à la hausse et que le niveau actuel des prix, par rapport à leurs valeurs historiques, demeure élevé pour des populations démunies. - 64 - Tableau 06: Cours des produits pétroliers
(1) juin 2009 Source : Ministère de l'économie (structure des prix des produits pétroliers). Au regard de l'évolution du cours de baril, on remarque les deux phases de la CF actuelles : l'envolée des cours jusqu'en juillet 2007 où le pétrole a atteint le 147 $/baril puis la phase descendant accompagnée par l'effondrement du cours du baril. 1.2.2.2. Impact sur les Finances Publiques (Voir tableau 07). Tableau 07 : Budget de l'Etat (en milliards de CDF) de 2007-2009
(1) trois premiers trimestres de 2009 Source : BCC - 65 - S'agissant des recettes, la part relative des recettes provenant des douanes et accises a régressé en passant de 36% en 2007 à 34.6% en 2009, et celle des recettes pétrolières a sensiblement diminué de 20.3% à 6.1%, sous l'effet de la baisse du volume des échanges extérieurs et de la détérioration des termes de l'échange. Par contre, les recettes mobilisées par la Direction générale des impôts (DGI) et par la direction générale des recettes administratives, judiciaires et domaniales (DGRAD) ont accru en importance, lissant ainsi voir que le coût de l'ajustement du secteur public aux deux chocs précités a été supporté en grande partie par la fiscalité sur les activités intérieures. La progression des dépenses publiques a été plus importante que l'accroissement des recettes ; ce qui s'est répercuté négativement sur l'évolution du solde budgétaire à partir de décembre 2008 et requis un financement monétaire croissant des déficits publics. L'impact du gonflement du crédit net à l'Etat est évident sur l'évolution de l'inflation en 2008-200967. 1.2.2.3. Impact sur les relations extérieures Tableau 08 : Evolution des réserves de change (en millions de USD)
Source : BCC
R I : Réserves internationales RMI : Réserves en mois d'importation RSI : Réserves en semaine d'importation Graphique 02 : Evolution des Réserves de change 67 IRES, « crise financière internationale : où en sommes-nous en RDC ? » in Lettre mensuelle, FASEG, UNIKIN, lettre n°4, janvier 2010, p.9. - 66 -
RB RI 1200 1000 800 600 400 200
- baisse du niveau des Réserves internationales avec pour conséquence l'amenuisement de la capacité d'intervention de la BC sur le marché des changes. - Risque d'emballement du taux de change suite à la rareté de la devise. Les réserves internationales de change de la BCC ont atteint un niveau historiquement bas fin 2008, suite à la chute des recettes d'exportation (mines, pétrole,...), menaçant la capacité du pays à financer ses importations. Ces réserves en forte baisse amplifient en ce moment la dépréciation du franc congolais. En 2009, la RDC a échappé au pire, celui d'atteindre le niveau zéro des réserves internationales de change. En effet, grâce au flux extérieurs notamment l'assistance financière du FMI de 195,5 millions de $, au titre de Facilité contre les Chocs Exogènes (FCE) en mars 2009, la RDC, pays à faible revenu et à économie fragile, a pu renforcer le niveau des réserves internationales de change de la BCC et faire face aux conséquences de la crise. |
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