Les études empiriques sur le caractère
productif des infrastructures occupent depuis le début des années
90 une place importante dans la littérature économique. Au
delà du travail pionnier de Ratner (1983), ce sont les travaux
d'Aschauer (1989) qui ont stimulé la recherche quantitative dans ce
domaine. Cette recherche s'articule autour de plusieurs approches visant
à identifier la dynamique de croissance à l'oeuvre et les canaux
de transmission du rôle productif des infrastructures. On distingue
notamment : l'estimation sur séries chronologiques de la fonction de
production élargie ou de la fonction de coût des entreprises ; la
recherche de liens de causalité, au sens économétrique du
terme, entre dépenses d'infrastructures routières et croissance
et enfin l'analyse en données de panel reliant pour un ensemble de pays
la part moyenne des dépenses publiques dans la richesse nationale.
En effet, avant Aschauer (1989), c'était en fait
Ratner (1983) qui avait estimé le premier sur séries
chronologiques une fonction de production élargie pour les Etats-Unis.
Sur la période étudiée (1949-73), l'auteur trouve une
élasticité du capital public de 0.056. Ram et Ramsey (1989)
recommencèrent l'exercice pour la période 1949-85. Ils obtiennent
une élasticité beaucoup plus forte du capital public (0.24).
C'est néanmoins suite aux travaux d'Aschauer que le débat sur la
question de l'impact productif des infrastructures s'intensifie.
Aschauer (1989) emploie une fonction de production
Cobb-Douglas et utilise des données de séries chronologiques
agrégées nationales américaines pour examiner la relation
entre le capital d'infrastructure publique et la production
agrégée du secteur privé. Il observe un lien très
grand et très fort entre ces deux variables. Même le rendement du
capital public est beaucoup plus élevé que celui du capital
privé. L'élasticité estimée de la production par
rapport au capital public est de 0,39, autrement dit une augmentation de 1% du
stock de capital public se traduit par une augmentation de la production du
secteur privé de 0,39%. L'élasticité par rapport à
l'infrastructure « de base » qui comprend les routes, le transport en
commun, les aéroports, etc. est d'environ 0,24.
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Réalisé par Fidèle G. AYIKPA et
Patrice DOMINGO
Contribution à l'amélioration du niveau des
dépenses d'infrastructures routières pour soutenir la croissance
économique au Bénin
A la suite des études d'Aschauer, plusieurs auteurs
ont aussi utilisé des données de séries chronologiques
agrégées et une fonction de production Cobb-Douglas, en vue
d'estimer adéquatement le stock d'infrastructures.
Ce sont d'abord les travaux de Munnell (1990) où elle
utilise aussi des données de séries chronologiques
agrégées et une fonction de production Cobb-Douglas tout en
supposant aussi des rendements constants à l'échelle pour tous
les intrants. Mais, au lieu du ratio production/capital privé, elle
utilise la productivité du travail plus connue (c'est-à-dire le
ratio production/travail) comme variable dépendante. Elle confirme le
résultat d'Aschauer selon lequel le capital public a vraiment sa place
dans la production.
Ensuite, ce sont les travaux de Khanam (1996) où elle
examine le lien entre le capital routier et la production économique
dans le « secteur de la production de biens » de l'économie.
Elle estime également une fonction de production Cobb-Douglas et une
fonction de production translog à l'aide de 10 séries de
données provinciales correspondant aux années 1961 à 1994.
Les principaux résultats obtenus indiquent des élasticités
de l'ordre de 0,09 à 0,17.
Khanam (1999), pour une deuxième fois au Canada,
examine les effets du capital routier sur la productivité du travail en
utilisant une fonction Cobb-Douglas et une fonction translog avec des
données de séries chronologiques agrégées. Les
résultats ne diffèrent pas beaucoup de ceux obtenus par Aschauer.
Par exemple, l'élasticité de la production par rapport au capital
routier est de 0,47 (statistiquement significative dans une fonction
Cobb-Douglas sans contraintes).
Par ailleurs, certains auteurs comme Conrad et Seizt (1992),
Shah (1992), Lynde et Richmond (1992, 1993), Nadiri et Manuneas (1994, 1996),
Morrison et Schwartz (1996) utilisent une approche en terme de fonction de
coût pour estimer le stock de capital public. Presque toutes ces
études portent sur une industrie individuelle donnée, notamment
l'industrie manufacturière. Leurs études convergent dans une
grande mesure vers la même conclusion, selon laquelle l'investissement
dans l'infrastructure publique contribue de façon importante à
réduire le coût de production dans le secteur privé.
Les résultats obtenus par les études faites
dans le contexte canadien font voir à peu près le même
profil que les études américaines. En effet, Keeler et Ying
(1988),
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Réalisé par Fidèle G. AYIKPA et
Patrice DOMINGO
Contribution à l'amélioration du niveau des
dépenses d'infrastructures routières pour soutenir la croissance
économique au Bénin
dans une étude portant sur les avantages des
investissements réalisés dans l'infrastructure routière et
ceci dans le cadre de l'aide fédérale sur les coûts de
l'industrie américaine du transport par camion utilisent des
données se rapportant à neuf régions de 1950 à
1973. Ils constatent que le capital investi dans l'infrastructure
routière a amélioré sensiblement la productivité de
l'industrie du camionnage. Les avantages des investissements routiers
représentés par les économies réalisées au
plan du coût des camions sont très importants, couvrant à
eux seuls presque le tiers des coûts en capital du réseau routier
bénéficiant de l'aide fédérale entre 1950 et
1973.
Ces différentes études ont
déclenché un vaste débat sur les conséquences d'une
telle conclusion au plan des politiques économiques et ont fait
ressortir des questions économétriques importantes. A la suite de
ces auteurs, plusieurs études ont analysé la relation entre
l'investissement public en infrastructures routières et la croissance
économique. Par exemple Véganzonès (2001) a fait
apparaître sur un panel de 87 pays comprenant 25 pays d'Afrique
Subsaharienne, un impact positif de l'investissement public en infrastructures
routières sur la croissance et une relation de
complémentarité entre l'investissement public et l'investissement
privé. Knight et al. (1993) et Nelson et Singh (1994) ont mis en
évidence un effet significatif de l'investissement public en
infrastructures routières sur la croissance économique dans un
échantillon de pays en développement, notamment au cours des
années 1980. Easterly et Rebelo (1993) arrivent au même
résultat en considérant les investissements publics en transport
et communication.
Dans les pays en développement, en particulier en
Afrique, les études relatives aux effets des infrastructures
routières sur les performances économiques restent
limitées. Toutefois, au Nigeria, Lee et Ana (1992) ont trouvé que
le manque d'infrastructures, notamment pour le secteur de
l'électricité et des transports constituait une contrainte
majeure pour les entreprises nationales et étrangères. Mobilisant
des séries de données chronologiques, Kwandjeu Kuitcha (2005) a
également montré l'impact positif qu'ont les infrastructures de
transports sur la croissance économique du Cameroun.
L'élasticité du capital public ainsi trouvé est de l'ordre
de 0,19. Il en est de même pour Akowe et Alokpo (2004) qui, en
considérant les investissements publics au sens large au Bénin
ont trouvé une élasticité de l'ordre de 0,34.
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Contribution à l'amélioration du niveau des
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économique au Bénin
Cependant, certaines études tentent à
démontrer que les infrastructures de transport n'ont pas d'effet sur la
croissance économique. C'est le cas de l'étude de Keho (2008)
qui, en étudiant la causalité entre dépenses publiques et
croissance économique, parvient au résultat selon lequel c'est la
croissance économique qui influence le niveau des dépenses en
infrastructures de transport et non le contraire. Mais, il explique que le fait
que les dépenses en infrastructures de transport n'influencent pas le
niveau de la croissance comme le prédisent les modèles de
croissance endogène, peut être dû à leur mauvais
état.
Milner, Morrissey et Rudaheranwa (2000) indique dans leur
étude qu'en Afrique le coût commercial des mauvaises
infrastructures de transport ne cesse d'être relevé et qu'il
représente par exemple deux tiers (2/3) de la valeur ajoutée des
exportations de l'Ouganda. Willoughby (2003) va plus loin en précisant
que les infrastructures expliquent très largement les différences
régionales de pauvreté à l'intérieur même des
pays. Selon lui, l'impact sur les populations défavorisées peut
être compris de trois façons. Tout d'abord, les infrastructures
étendent les marchés locaux et nationaux en les intégrant
à d'autres, élargissant ainsi le champ des opportunités
économiques que les populations pauvres peuvent saisir ; elles
réduisent en somme les coûts de transaction, ce qui permet aux
marchés de fonctionner plus efficacement. Deuxièmement, la mise
en place d'infrastructures et de services de base plus sûrs (transport,
santé, énergie, irrigation etc.) réduit la
vulnérabilité des populations aux chocs et aux crises qui
constituent des obstacles majeurs au développement économique. La
réduction de ces risques peut débloquer le potentiel de
régions entières. Enfin, les infrastructures améliorent
significativement la productivité agricole et par suite le revenu des
foyers, leur nutrition, leur santé, leur éducation ou encore leur
usage du planning familial du fait que chaque dimension du développement
humain est directement ou indirectement concernée par une ou plusieurs
infrastructures, et donc potentiellement favorisée par des
investissements.
En Afrique, le faible niveau des indicateurs de base sur la
couverture et la performance du secteur des transports résulte selon
certains auteurs de l'insuffisance des investissements estimés à
moins de 20% du PIB. Mlambo et Oshikoya (2001) estiment à cet
égard que le ratio d'investissement en Afrique est trop faible pour
assurer le remplacement et l'accroissement du capital physique et humain. A
l'opposé,
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Contribution à l'amélioration du niveau des
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économique au Bénin
Devarajean, Easterly et Pack (2001) situent le
problème dans l'insuffisance de la productivité de
l'investissement. Ces auteurs soulignent plutôt la faible utilisation des
capacités et le manque de compétences. En outre, leur analyse sur
29 pays africains montre qu'à l'exception du Lesotho et du Botswana,
l'investissement aussi bien public que privé n'est pas
corrélé à la croissance économique. Ils concluent
en disant qu'il est illusoire de vouloir stimuler la croissance
économique africaine à l'aide d'un volume d'investissement accru
sans chercher à identifier les facteurs à l'origine du faible
rendement de l'investissement.
Adoptant une approche vectorielle autorégressive,
Ansari et al. (1997) ne trouvent aucune évidence en faveur des effets
keynésiens des dépenses publiques au Ghana, au Kenya et en
Afrique du Sud. En adoptant la même approche, Cheng et Lai (1997)
établissent une causalité réciproque entre les
dépenses publiques et la croissance économique en Corée du
Sud. Ghali (1999) examine la causalité entre les dépenses
publiques et la croissance dans 10 pays de l'OCDE en utilisant les techniques
de cointégration. Les résultats indiquent que les dépenses
publiques totales causent au sens de Granger la croissance économique
dans tous les pays de l'échantillon avec cependant des disparités
concernant la proportion avec laquelle les dépenses publiques
contribuent à expliquer les évolutions des taux de croissance.
Par ailleurs, utilisant des techniques
économétriques, plusieurs études ont
démontré le lien direct entre l'investissement en infrastructure
rurale et la pauvreté rurale. Analysant les facteurs expliquant
l'accès au marché, Escobal (2001) montre l'importance des
infrastructures routières dans la réduction des coûts de
transaction et l'amélioration des revenus des paysans Péruviens.
Jalan et Ravallion (2002) affiment que la densité routière exerce
un effet positif significatif sur la consommation des ménages agricoles
des régions pauvres de la Chine. Il conclut en disant qu'un
accroissement de 1% du kilométrage de routes par habitant accroît
la consommation des ménages de 0,08%.
La Banque Mondiale, dans son rapport publié le
mercredi 11 novembre 2009, juge que "l'état déplorable des
infrastructures dans l'Afrique subsaharienne (...) freine la croissance
économique des pays de deux points, chaque année, et limite
jusqu'à 40 % la productivité des entreprises". L'étude a
porté sur les infrastructures en matière
d'électricité, d'eau, de routes, de communications et de
technologies de l'information
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Contribution à l'amélioration du niveau des
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économique au Bénin
dans vingt-quatre (24) pays, dont onze (11) francophones. De
même, celui antérieur à 2009, publié en 1994, avait
déjà abordé largement le lien entre les infrastructures et
le développement économique, notamment le rôle moteur des
infrastructures dans la croissance économique et la
nécessité de concilier l'accroissement indispensable de la
quantité de capital d'infrastructure avec l'amélioration de la
qualité des services. Le rapport souligne que « l'infrastructure
peut beaucoup pour la croissance économique, la lutte contre la
pauvreté et la préservation de l'environnement, mais seulement
quand elle assure des services qui répondent à la demande
effective et qu'elle le fait bien ».
Le secrétaire d'État adjoint aux affaires
africaines, M. Johnnie Carson, lors d'une allocution prononcée le 28
avril 2010 à Washington, à l'occasion de la Quatrième
Conférence États-Unis-Afrique sur l'infrastructure qui se tient
tous les ans sous les auspices du Corporate Council on Africa (CCA) indiquait
que « L'Afrique (...) ne peut pas espérer combler son retard en
matière de développement ou parvenir au rang des régions
à revenu moyen si elle ne développe pas son infrastructure dont
l'insuffisance constitue actuellement une entrave fondamentale au commerce, aux
investissements et à la croissance. Le mauvais état des routes,
des voies ferrées et des ports ajoute de 30 à 40% aux coûts
des échanges commerciaux entre les pays sur le continent.»
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routières pour soutenir la croissance économique au
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