§2 Nécessaire équilibre avec le
principe de liberté de l'employeur
Afin de garantir un certain équilibre entre
liberté de l'employeur et liberté fondamentale des
salariés, la jurisprudence a, au fil de ses arrêts, admis le
caractère relatif de certaines libertés du salarié en
matière de religion (A.). Cela étant, la question du
prosélytisme religieux en entreprise ne fait, quant à elle, aucun
doute ; il doit être prohibé dès lors qu'il porte atteinte
à la liberté de conscience des autres salariés (B.).
A. Caractère relatif de certaines libertés
religieuses du salarié
La liberté religieuse en tant que liberté
fondamentale n'est pas remise en question, en revanche il n'en est pas de
même pour ses différentes manifestations en entreprise qui peuvent
être relativisées selon les cas.
1- Tenue vestimentaire
Au sens de la Cour de cassation, la liberté
vestimentaire en entreprise ne constitue pas une liberté fondamentale.
Elle a ainsi pu confirmer le licenciement d'un salarié qui s'obstinait
à venir travailler en bermuda, en considérant dans un attendu de
principe que « la liberté de se vêtir à sa guise au
temps et au lieu du travail n'entre pas dans la catégorie des
libertés fondamentales »126. Mais lorsque le
vêtement en question est directement attaché à la pratique
d'une religion, il fait l'objet d'une protection plus renforcée dans la
mesure où il découle d'une liberté fondamentale.
L'employeur pourra y apporter certaines restrictions, mais à condition
de prouver qu'elles tiennent à des
126 Cass. Soc. 28 mai 2003, n°02-40273
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règles d'hygiène et de sécurité
dans l'entreprise - comme cette salariée de maison de retraite
licenciée pour faute grave, qui s'obstinait à garder son voile
islamique en cuisine alors que les règles d'hygiène imposaient le
port d'une charlotte exclusivement127 - ou encore à son image
de marque128.
En tout état de cause, les restrictions à la
liberté vestimentaire du salarié doivent être
justifiées par la nature de la tâche à accomplir et
proportionnées au but recherché, au sens de l'article L.1121-1 du
Code du travail.
2. Pratiques alimentaires
De la même façon, les pratiques alimentaires
inhérentes à la religion du salarié n'impliquent pas pour
autant un traitement de faveur.
Ainsi, un salarié ne peut prétendre à
l'indemnisation de ses repas non pris, dès lors que le choix de
jeûner lui appartenait129. A l'inverse, un employeur n'est pas
non plus en droit d'imposer à ses salariés un régime
particulier en opposition avec leurs convictions religieuses130.
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