CONCLUSION GENERALE ET
PRINCIPALES IMPLICATIONS
« Dans ce bas monde, rien n'est certain si ce
n'est la mort et les impôts. »,
Benjamin Franklin, cité par Mankiw (2001).
La théorie de l'Etat rentier suggère qu'avec le
temps, les revenus pétroliers diminuent la dépendance envers les
impôts non liés au pétrole. Ils finissent même
éventuellement par remplacer les systèmes fiscaux
préexistants. Ceci libère les gouvernements des Etats producteurs
des exigences des citoyens pour la transparence fiscale et la
responsabilité politique qui viendrait en contrepartie du droit des
gouvernements à taxer la population (Ngodi, 2005). Ce mécanisme
est à la base des résultats liant la richesse en pétrole
et les autocraties (Ross, 2001 et Wantchekou, 2002). Les Nouvelles
théories de la croissance et les crises récurrentes (crise
d'endettement, crise alimentaire, crise financière, réchauffement
climatique, terrorisme...) que vit la planète tendent à justifier
le regain d'intérêt du rôle de la
« Puissance publique » dans
l'activité économique. La théorie économique
attribue désormais une autre mission à l'Etat :
la fonction d'assureur en cas de mauvaise
nouvelle (Semedo, 2001). La fiscalité, instrument
stratégique dont disposent les Pouvoirs Publics pour mener à bien
ses missions était au coeur de ce travail de recherche. L'objectif
principal de la présente étude était de montrer qu'il
était vital pour le Cameroun de mobiliser plus de ressources internes.
Réaliser les OMD à l'horizon 2015 et devenir un pays
émergent à l'horizon 2035 est un grand challenge, pour y parvenir
une plus grande mobilisation des recettes de l'Etat s'avère
primordiale.
L'étude des déterminants de la mobilisation
fiscale au Cameroun conduit à ces principaux résultats.
L'accès facile du Cameroun au financement extérieur freine la
mise en place d'impôts et de relations de responsabilité de la
part de l'Etat camerounais. La structure de notre économie
identifiée ici par les variables (txindus, txagri,
txcom, txpib) expliquent à hauteur de 40,91% la
mobilisation fiscale dans notre pays. La politique monétaire
(txm2) quant à elle a un effet positif, mais non
significatif sur la mobilisation des impôts, ce qui confirme le fait que
l'inflation est maîtrisée dans notre pays. Globalement, les
déterminants macroéconomiques mis en exergue dans le cadre de
cette étude expliquent à hauteur de 49,22% le
prélèvement fiscal au Cameroun, le secteur industriel se
révèle comme le plus prolifique (17,27%), l'agriculture (10,32%)
et le commerce (10,15%) semblent aussi se révéler comme des
secteurs porteurs pour notre pays.
Un financement extérieur néfaste à la
mobilisation fiscale, contraint à devenir de plus en plus rare (crise
d'endettement, crise financière...), une rente pétrolière
qui s'épuise et leurs cours incertains, un secteur agricole
abandonné à lui-même, un secteur industriel où
seules quelques entreprises supportent la charge fiscale, une planète
qui court vers la catastrophe (réchauffement climatique), une
émergence de la criminalité voire du terrorisme, une
administration fiscale incompétente et corrompue, un incivisme fiscal
caractérisé , un niveau de pauvreté toujours
élevé... tels sont quelques tristes constats qui exhortent
à la clairvoyance et au tact des Décideurs politiques de notre
pays.
Afin de pallier à ces dysfonctionnements et renfourner
les caisses de l'Etat, nous recommandons un certain nombre de stratégies
que nous classons en trois catégories aux autorités en charge de
l'administration fiscale.
En premier lieu, les stratégies informelles qui tirent
leur origine de l'idée de la psychologie fiscale. Elles s'appuient
beaucoup plus sur les considérations d'ordre psychologique,
contrairement aux sanctions administratives et pécuniaires. Elles se
traduisent concrètement par la possibilité de porter à la
connaissance du grand public les identités des mauvais contribuables.
Une telle approche est supposée mettre les concernés dans une
situation sociale délicate et les amener peut être à un
changement de comportement dans le sens souhaité.
En second lieu, les stratégies positives qui n'ont
aucun caractère répressif ou contraignant. A travers une
technique de substitution, elles visent essentiellement à amener les
contribuables à comprendre qu'en réalité, c'est toute la
société qui profite des fruits de la mobilisation fiscale. C'est
donc un appel à conscience, dont l'objectif est le changement
« en douceur » des mentalités et des
comportements des contribuables, en leur montrant tous les bienfaits du
paiement des impôts et tous les méfaits pour la
société des actes frauduleux vis-à-vis de l'administration
fiscale. Certes, l'applicabilité de ces mesures n'est pas
forcément adaptée dans des pays comme les nôtres où
la culture du paiement des impôts n'est pas suffisamment
instantanée, où les gens affichent un manque de
spontanéité dans l'acquittement de leurs obligations fiscales.
Néanmoins, on peut penser qu'elles pourront un jour être des voies
exploitables. Les textes seuls ne suffisent pas, un changement de
mentalité conduisant à des changements dans la gestion de la
chose publique et de la gouvernance s'impose. Transparence, Etat
démocratique fort et pouvant réprimer toute collusion entre monde
politique et monde des affaires... Une telle solution s'avère
indispensable car au Cameroun, les conditions de maintien de la fraude fiscale
et d'autres malversations néfastes aux finances publiques sont encore
perceptibles.
Enfin, les stratégies formelles ou dissuasives. Aux
deux méthodes qui précèdent, on peut compléter avec
les méthodes classiques consistant à infliger des sanctions
pécuniaires aux contribuables reconnus coupables de pratiques mafieuses.
Il est important de souligner enfin que la fraude est un problème social
et institutionnel : existence des groupes de pression, collusion entre le
monde politique et celui des affaires..., qu'il conviendrait d'éradiquer
autrement.
Les principales difficultés rencontrées pour la
réalisation de ce travail de recherche sont relatives aux manques de
données. En effet, certaines variables dont les statistiques
n'étaient pas disponibles dans le « World Developpment
Indicators Data base 2008 » ont dû être exclues du
modèle, de même que l'horizon temporel a dû être
réduit à 26 années au lieu de 30 années comme le
suggère la théorie économétrique, les responsables
des finances publiques (DGI, MINFI) ne nous ayant pas donné accès
à leurs statistiques comme nous l'avons suggéré.
Il convient de relever également que ce travail de
recherche, malgré sa pertinence souffre de quelques insuffisances.
L'étude des déterminants macroéconomiques ne nous a permis
d'expliquer la mobilisation fiscale du Cameroun qu'à hauteur de 49,22%.
Ce qui signifie que d'autres variables non intégrées dans notre
modèle économétrique expliquent à hauteur de 50,78%
la mobilisation fiscale dans notre pays. Les travaux à venir permettront
sans aucun doute de mieux affiner le présent travail. Ces travaux vont
davantage se focaliser sur l'impact de la mauvaise qualité des
institutions camerounaises non seulement sur la mobilisation fiscale, mais
également sur les autres indicateurs de performances économiques
et de bien-être social des populations camerounaises.
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