1.2. Contraintes relatives à la main-d'oeuvre
Partout dans le Gandiolais, la réduction du temps de
jachère a lourdement affecté les sols. Celle-ci se traduit par la
baisse de la teneur en matière organique, la dégradation de la
structure des sols, l'appauvrissement minéral les rendant moins
productifs et plus vulnérables à l'action érosive des
vents. Aspirant à de meilleures conditions de vie, les jeunes, qui
composent l'essentiel de la force active, se dirigent vers les grandes villes.
A cette situation d'exode rural, s'ajoute la division des familles après
le mariage des adultes.
Ainsi, pour compenser leur manque en main-d'oeuvre, les
maraîchers font appel aux saisonniers. C'est une main-d'oeuvre allochtone
non qualifiée. Malgré la prépondérance
remarquée des temporaires dans le Gandiolais, ces sourgha
commencent ces derniers temps à orienter de plus en plus leur
séjour vers d'autres secteurs maraîchers dont les conditions
d'emploi (la prise en charge et le système de partage) seront beaucoup
plus favorables. Parmi les zones ciblées, il y a le secteur de Potou,
Bango, Rao, Sakal et le lac de Guiers. Quelques raisons qui pourraient
expliquer ce choix de destination ont été avancées par les
sourgha rencontrés à Mouit, Dégou Niayes,
Mboumbaye et Lahlar. Selon ces sourgha, dans les secteurs de Potou et
de Sakal, par exemple, les conditions de vie sont meilleures qu'à
Gandiol. Dans ces secteurs, en dehors des engagements préalables (le
partage et la prise en charge), le repas est mieux servi qualitativement et
quantitativement. Le sourgha bénéficie également
d'un hébergement chez son associé. Alors qu'à Gandiol,
l'hébergement chez l'employeur n'est pas partout assuré (cf.
photos 14 et 15).
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1.3. Contraintes relatives aux intrants et aux
crédits
En raison de la cherté des produits chimiques, les
maraîchers du Gandiolais prennent le risque d'utiliser n'importe quel
type d'engrais mis à leur disposition. Le plus souvent, ce sont des
engrais non adaptées aux exigences du milieu ou de la
variété cultivée. Il en résulte une
détérioration de la qualité des produits
récoltés et une mévente sur les marchés de la
ville. Par exemple, les oignons appelés « gagne mbaye
» ne supportent pas les opérations de grande mobilité.
Ils sont gorgés d'eau et pourrissent vite en quelques jours (cf. photo
24).
Photo 24 : La pourriture, première cause de la
mévente des oignons
Cliché : P. THIAM, mars 2005 à Mouit
Gandiol
Quelques oignons pourris déterrés des plantations
par le sourgha en mars 2005. Le produit était en abondance
sur le marché et le producteur, explique son employé, avait
choisi d'attendre quelques semaines, le temps que les prix montent. Le mois
de mars correspond à une période où la première
récolte est déjà prête. La variété
« gagne mbaye » très fragile, ne pouvant pas
résister la chaleur, la pourriture s'ensuit.
Ils sont cultivés en saison froide entre
novembre/décembre et février. Ainsi, après la
première semaine qui suit la récolte entre février et
mars, les producteurs sont obligés de les vendre à bas prix (120f
en mars 2005) aux premiers commerçants qui se présentent devant
eux. Les bana-banas, premiers clients qui interviennent dans la zone,
sont conscients de ce fait. Dès la récolte de cette
variété, ils fixent leur prix aux producteurs. Là
où les maraîchers demandent 170 francs le kg, ils leurs proposent
100, 110 ou au maximum 120 francs. Ceux-ci, au bout d'une semaine, ne pouvant
plus tenir, préfèrent la vente à perte que le
pourrissement. En une semaine donc, le prix d'un kg d'oignon blanc peut
basculer jusqu'à 70 ou 75 francs. Dès le mois de juin,
après la récolte de la seconde saison d'oignon, les
maraîchers peuvent vendre leur produit jusqu'à 250 voir 300 francs
le kg.
Les semences recherchées par les maraîchers ne
sont pas toujours disponibles au moment voulu. Très souvent, le paysan
est obligé de se contenter de ses propres semences qu'il
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a laissées fleurir dans sa parcelle
maraîchère. Cette pratique affaiblit la graine et rend les
produits de la prochaine récolte fragile.
L'utilisation excessive des engrais procure des rendements
élevés, mais à long terme, elle baisse la fertilité
des sols. L'engrais chimique est utilisé une fois pour les
pépinières et chaque semaine pendant un mois 15 jours
après les semis (enquêtes personnelles 2004). Le surplus d'engrais
sur les terres de cultures fragilise la structure du sol qui devient de plus en
plus sensible à l'érosion pluviale : l'eau, au lieu de
s'infiltrer dans le sol, ruisselle et emporte sur son passage tous les
éléments nutritifs. Quant à la fumure organique, elle est
utilisée avant ou au début des pépinières. Elle est
déposée en surface (cf. photo 6). Ce dépôt de fumier
en surface engendre une perte d'azote dans l'air, sous le soleil et une
brûlure du feuillage des plantes. Le milieu se dégrade ainsi et
progressivement, perd ses aptitudes écologiques.
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