1.3. Les modes d'exploitation des terres de culture
Dans le Gandiolais, une bonne partie des producteurs agricoles
travaille en dessous de leurs moyens financiers. La plupart d'entre eux n'ont
pas les capacités financières leurs permettant de mettre en
valeur leur terre. Ainsi, plusieurs méthodes sont utilisées pour
l'exploitation des terres de culture.
1.3.1. La location de la parcelle
« Plus rare est l'eau douce, plus la ressource devient
précieuse, plus sa valeur l'emporte sur celle de la terre » (Dresch
J., 1982 : 188). Cette phrase de Jean Dresch se vérifie dans le
Gandiolais. La nappe d'eau douce qui alimente les puits forés par les
maraîchers devient de plus en plus salée. Certains
maraîchers abandonnent leurs exploitations devenues salées
à cause de la remontée de la nappe et se dirigent vers d'autres
terres où la nappe est d'eau douce. C'est ainsi que dans le Gandiolais,
la valeur de l'eau l'emporte sur celle de la terre. La location des parcelles
de cultures se fait par rapport aux puits y existant et non par rapport
à sa superficie. Le locataire paye le nombre de puits que compte la
parcelle et non la taille de la parcelle elle-même. Autant il y a de
puits dans la parcelle, autant le prix de la location augmente. Par exemple,
pour une parcelle d'un hectare avec 6 puits, la location est de 10.000f par
puits soit 60.000f la parcelle ; alors qu'une parcelle de 3 hectares ne
disposant que de 4 puits, la location est à 40.000f la parcelle. Cette
pratique est très répandue dans le Gandiolais, surtout pendant la
période de la culture maraîchère. Plusieurs hectares sont
aujourd'hui abandonnés dans le Gandiolais à cause de la
remontée du sel en surface (cf. photo 13). Ces terres, inaptes à
toute exploitation agricole, sont devenues des parcours de bétail en
toute saison. Comme solution, leurs anciens propriétaires louent des
parcelles dans d'autres secteurs moins menacés. Les maraîchers des
villages de Ndiol Gandiol, de Ndiébène Gandiol et de
Tassinère, par exemple, louent des parcelles de cultures à Mouit,
Ricotte, Dégou Niayes ou Mboumbaye. La location se fait suivant le
nombre de puits dont dispose la parcelle. Un puits est loué à
10.000 francs par saison. La location d'une parcelle est juste pour une
production de la saison. Pour deux productions, il faut renouveler le contrat
de location. En raison de la forte demande de parcelle, certains producteurs
payent à l'avance la location pour la saison prochaine.
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Photo 13 : Terres de cultures abandonnées à
cause du sel
Puits salés et abandonnés
Parcelle abandonnée
Cliché : P. D. Diop, juillet 2005 à
Ndiol Gandiol
En revanche, pour les cultures pluviales, les actifs
rencontrés déclarent tous être propriétaires de leur
champ ; on n'a pas pu trouver une seule parcelle louée ou un seul paysan
locataire. Plusieurs raisons justifient ce constat. Du fait de
l'irrégularité des pluies et de la courte durée de la
saison sèche, les cultures sous pluies mobilisent de moins en moins de
monde. Les crédits accordés sur les semences et les engrais en
saison sèche ne sont pas attribués aux paysans pendant la saison
des pluies. Les faibles rendements enregistrés depuis plus de trois
décennies et le caractère de l'agriculture (subsistance) font que
l'aspect économique est peu favorisé pour les cultures sous
pluies.
Ce système de location de parcelles agricoles entre les
propriétaires et non propriétaires montre les limites de
l'application de la loi sur le domaine national, qui ne prévoit dans ses
textes la vente, encore moins la location d'une parcelle par son occupant. Elle
reflète des pratiques individuelles sur les terres de cultures qui ne
correspondent ni tout à fait aux systèmes coutumiers, ni à
la loi sur le domaine national.
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