1.2.2. Méthodes d'irrigation
1.2.2.1 L'arrosage
L'arrosage manuel constitue l'unique système
d'irrigation dans le Gandiolais. C'est une technique rudimentaire. Le
matériel est constitué de deux seaux d'environ 10 litres chacun,
d'une corde adaptée à la longueur du puits le plus profond (voir
photo 9 planche 2). Les plantes sont repiquées sur de petites cuvettes
aménagées par le maraîcher, appelées aussi
assiettes. Celles-ci sont agencées en forme de damier et peuvent mesurer
50 cm de long sur 20 à 25 cm de large. Entre chaque deux colonnes, il y
a une issue qui permet au maraîcher de circuler librement entre les
assiettes. Une parcelle aménagée en petites cuvettes peut parfois
mesurer 100 m2 ou plus. Certaines cuvettes peuvent prendre 2 seaux
d'eau, ou 3 seaux pour 2 cuvettes. Les plantes doivent être
arrosées chaque jour pendant au moins trois mois. Sur une parcelle
d'oignons, on peut compter jusqu'à 900 assiettes au minimum. Le
maraîcher ou son employé doit faire la distance entre le puits et
les cuvettes autant de fois qu'il y en aura dans la parcelle. Certaines
assiettes se trouvent juste à côté du puits, d'autres
peuvent en être distantes d'une centaine de mètres. C'est ainsi
qu'un exploitant utilise trois à quatre puits pour un seul terrain
aménagé. Cette technique d'arrosage nécessite beaucoup de
force physique à cause de la lourdeur des seaux, d'un puisage difficile
et d'un long parcours (va et vient) à faire tout au long de la
journée. L'arrosage peut durer 10h à 12h d'horloge par
journée (de 4h du matin à 16h le soir). La population a
tenté de remplacer cette méthode par les pompes « Djambar
» avec l'aide de la CARITAS.
1.2.2.2. Les pompes Djambar
Les pompes Djambar ont été introduites dans le
Gandiolais par la CARITAS vers les années 1989. Il s'agissait pour cette
technique de pomper l'eau pour remplir un bassin de 2 m de diamètre,
construit à côté du puits. A partir de ce bassin, le
maraîcher devait puiser l'eau avec deux seaux pour aller arroser les
plantations.
Planche 2 : L'arrosage, méthode
traditionnelle d'irrigation très utilisée dans le
Gandiolais
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Une corde de 8 à 10 m de long au minimum
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Cuvettes d'environ 40 à 50 cm de long sur 20 à 25
cm de large
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Seaux de 10 litres d'eau
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Photo 9 : Une parcelle de tomate de 300
cuvettes à Mboumbaye Gandiol. Dans cette parcelle de tomate de 17 jours,
le sourgha utilise un seau d'eau par petite cuvette.
Photo 10 : Une parcelle d'oignon
à Mboumbaye. Photo 11 : Dans cette même
parcelle,
Le sourgha fait plus d'une dizaine de mètre
(va et le sourgha puise de l'eau d'un puits
vient) pour arroser une parcelle de 1.200 cuvettes. au milieu
des plantations.
Clichés photos : P.D. Diop, juillet 2005
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La CARITAS cherchait à alléger les travaux
maraîchers en modifiant le système de puisage. La technique n'a
pas connu de grands succès dans cette zone. La population juge que ce
système constitue un double travail. Le système de puisage
consistait à tirer directement de l'eau à partir du puits et
d'aller la verser sur les plantes (cf. photos 10 et 11 planche 2). Le
système de pompage consiste d'abord à remplir le bassin en eau de
puits à partir de la pompe. Ensuite, il fallait puiser cette eau du
bassin pour arroser les plantations (enquêtes personnelles 2004). La
population maraîchère du Gandiolais, après avoir
testé cette méthode, a préféré le puisage
direct du puit. Le pompage nécessite des forces physiques, car pour
remplir un bassin, il faut pomper debout avec les deux mains pendant une
demi-heure. La machine présentait également un débit
faible et elle tombait souvent en panne. Le bassin, une fois rempli, pouvait
être vidé en moins d'une demi-heure. Et en plus un bassin ne
pouvait pas alimenter plus d'une cinquantaine de cuvettes, si on sait qu'il
faut 2 seaux pour une cuvette ou 3 seaux pour deux cuvettes. C'est d'ailleurs
pour cette raison que les maraîchers prenaient l'habitude de remplir le
bassin le soir pour gagner du temps le lendemain. Aujourd'hui, la population
souhaite une nouvelle technique de puisage, qui sollicite moins de force
physique et de temps. C'est ainsi qu'en 2004, le système de goutte
à goutte a été expérimenté dans la zone.
1.2.2.3. L'irrigation moderne
Cette technique était totalement méconnue dans
le Gandiolais. Ce n'est qu'en mai 2004 que le système de goutte à
goutte a été testé pour la première fois à
Gandiol dans le village de Dégou Niayes pour la production d'oignon.
C'est un système de pompage plus moderne que les pompes Djambar. L'eau
tirée du puits passe par des tuyaux percés de petits trous. Ces
tuyaux percés, allongés le long des plantations, servent à
arroser ces dernières par petites gouttes d'où le nom «
goutte à goutte ». Contrairement aux pompes Djambar qui
fonctionnent manuellement, le système de goutte à goutte (ou
motopompe) fonctionne avec du carburant.
Le propriétaire de la parcelle sur laquelle s'est faite
cette installation, O.B.26 semble ignorer totalement le mode de
gestion de cette technique. La machine est gérée par son fils
âgé de 17 ans (en 2004). M. O.B. déclare que dans les
premiers jours qui font suite à son installation, la machine
fonctionnait bien. Entre 6h et 10h de la matinée, il arrivait à
arroser toute sa parcelle. Pour lutter contre les parasites animaux et
végétaux nuisibles aux cultures, le maraîcher traitait les
cuvettes avec des pesticides à partir de la machine. Il s'agit d'un
traitement par ferti-irrigation27 utilisé en association avec
l'irrigation au "goutte à goutte". Les
26 Entretien du 20 juillet avec Ousmane Bâ le
propriétaire de la parcelle qui abrite le système de goutte
à goutte.
27 Il s'agit de faire le traitement des plantations
tout en les arrosant en même temps.
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produits phytosanitaires et les engrais solubles sont
directement injectés dans le système d'irrigation. Très
satisfait du fonctionnement de la machine, le vieux O.B. avait ensablé
tous les quatre puits qui lui servaient auparavant d'arroser les assiettes.
Mais au bout de trois semaines, des problèmes surgissent. La machine
consomme beaucoup de carburant, 1 litre de super par jour, soit 500 à
630 francs le litre (juillet 2004). Le vieux a décaissé
près de 40.000f pour le carburant de la machine en deux mois dix jours.
Elle tombe fréquemment en panne et handicape les activités
agricoles. Il est obligé à chaque fois d'aller chercher un
technicien à Saint Louis pour la réparation de la machine. Il lui
arrivait parfois de rester une journée entière sans irriguer une
seule cuvette. Comme solution, O.B. était obligé d'aller
recreuser ses anciens puits pour arroser ses parcelles
maraîchères. Il déclare que le principal problème de
ce système était lié à la gestion technique de la
machine et à l'achat quotidien du carburant. En plus, le grand puits
foré qui alimentait en eau la motopompe était installé sur
une dune (photo 12). La quantité d'eau disponible du puits était
insuffisante par rapport aux besoins de la machine. O.B. était
obligé de prendre une pose de temps en temps, une façon de
permettre à la nappe de se recharger. Il déclare que s'il avait
subi une formation préalable sur la gestion et l'entretien de la
machine, il aurait pu faire une bonne saison maraîchère. Cette
année 2004 a été pour lui une grande perte : perte de
semences, d'argent et de temps. Un tel changement technique du système
d'irrigation dans le Gandiolais devrait être accompagné d'une
formation des maraîchers, allant dans le sens d'une maîtrise
technique, d'une bonne gestion de l'eau et de l'amélioration de cette
technique.
Photo 12 : Le " goutte à goutte ", un
système d'irrigation moderne en test dans le Gandiolais
Le système «goutte à goutte »
actuellement abandonné pour des raisons techniques.
Le puits foré qui sert à alimenter la
motopompe.
Cliché : P. D. Diop, juillet 2005 à
Dègou Niayes
Les premiers tests de l'irrigation au "goutte à goutte"
n'ont pas réussi dans le Gandiolais. L'absence de maîtrise
technique est la raison qui explique cet échec. Une formation
préalable aux producteurs est indispensable pour la réussite de
cette technique d'irrigation moderne.
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Sa réussite dans le Gandiolais contribuerait à
réduire le gaspillage de l'eau, à faciliter le puisage et
à économiser beaucoup plus de temps. Il permettrait
également d'éviter les pertes d'eau par évaporation.
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