3.3.1.2- Les risques d'envasement des retenues
Sur la base des documents consultés et de nos
observations sur le terrain, il se dégage effectivement des risques
d'envasement des retenues attestant les propos des paysans. La baisse de la
capacité de rétention des barrages est imputable à
l'envasement, l'accumulation de sédiments au fond de l'eau. Ce fait est
perceptible à travers plusieurs aspects dont les plus expressifs sont
:
- L'étalement du plan d'eau : Il est très
remarquable à Guido. En effet, on y constate un agrandissement du lit
majeur surtout en amont du barrage. Pour preuve, une route
réalisée à environ 2 km en amont quelques années
après la réalisation de la dite retenue, est de nos jours
impraticable parce qu'entièrement détruite par l'eau (cf. photo
n°6). A la date de construction de la route, l'eau du barrage n'atteignait
pas ces lieux. La remontée des eaux provoque des oscillations qui ont
érodé cette piste de nos jours. Ce qui signifie que le fond de la
retenue est occupé par des sédiments qui obligent l'eau à
quitter son assiette d'antan et à s'étaler. De plus,
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les champs de mil qui occupaient les terres entre la route et
l'ancienne limite des eaux, sont aujourd'hui exploités en riz. Preuve
que l'eau y stagne à présent.
Photo 6 : Piste érodée par l'eau en amont du
barrage de Guido
Vers le barrage
SANOU David Luther 2008
- Les fentes de dessiccation : celles-ci sont perceptibles sur
les parties asséchées des retenues montrant une accumulation de
vase constituée de limons qui sont des éléments d'apport.
Cet entassement de sédiments allochtones forme une pellicule dont
l'épaisseur varie entre 8 et 14 cm selon les endroits.
Photo 7 : Fentes de dessiccation dans le lit des barrages.
SANOU David Luther 2008
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- Le retrait rapide de l'eau dans le lit mineur : Ce
phénomène prouve davantage que les retenues n'ont plus leur
profondeur initiale. Le volume autrefois occupé par l'eau est à
présent occupé par la vase. Cette eau dépourvue d'espace
de stagnation, soit elle s'écoule par le déversoir, ou
s'étale en fine pellicule à l'arrière des digues. Elle
s'épuise vite face à l'exploitation, l'évaporation et
l'infiltration ; ce qui engendre le retrait rapide dans le lit mineur.
- Outre ces constats, d'autres phénomènes
mettent en exergue la diminution de la capacité des ouvrages. Il s'agit
notamment de l'inondation d'une concession à proximité de la
retenue et du passage de l'eau l'hivernage précédente sur la
digue du barrage de Guido provocant sa destruction partielle. Ces
phénomènes n'ont jamais été enregistrés
depuis la construction du barrage en 1983.
Les manifestations sont plus perceptibles à Guido
qu'à Fara. La situation pourrait s'expliquer d'une part, par l'âge
du barrage de Guido réalisé 10 ans avant celui de Fara et d'autre
part, par l'ampleur des mauvaises pratiques du maraîchage sur les berges
de celui-ci ; notamment le creusement des puits et la confection des
planches.
Les causes du comblement de ces retenues sont diverses et
résultent d'un long processus concernant non seulement les abords
immédiats des plans d'eau mais aussi l'ensemble des bassins versants
respectifs. Selon MANUS M. 1985, cité par OUATTARA I. en 2004 « le
débit d'apport dans une retenue est largement déterminé
par les conditions climatiques. Mais des facteurs tels que le relief, la
végétation, l'activité agricole et la géologie du
site jouent un rôle important ». Ces facteurs interviennent
différemment dans le processus de comblement des lacs à travers
des agents d'érosion tant « climatiques, physiques que zoo
anthropiques » :
? La péjoration climatique agit à travers les
effets des :
? variations thermiques dues à la combinaison de
différents facteurs tels que l'humidité relative, les
températures et l'évaporation ;
? la déflation éolienne résultant de
l'effet des vents qui, relativement à leur force et leur vitesse,
transportent les éléments par reptation, par saltation ou par
suspension et les déposent dans les lacs ;
? la dynamique pluviale qui est le principal agent de la
dynamique érosive en milieu tropical. Dans les zones d'étude,
toutes les pluies sont concentrées sur quatre mois (mai, juin, juillet,
août). Elles accentuent ainsi la sédimentation suite à leur
agressivité sur les sols des bassins versants mal protégés
par le couvert végétal. Cette pluviométrie constitue alors
le principal agent de morphogenèse donc de sédimentation des
barrages.
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? L'impact zoo anthropique :
Il s'agit des effets des « multiples exploitation des
ressources naturelles » (OUATTARA I. 2004). Cet impact s'exprime à
travers la dégradation du couvert végétal et des sols. Ces
derniers aspects sont imputables aux pratiques culturales et au
piétinement des animaux. Pour ce qui est des pratiques culturales de la
zone d'étude, elles demeurent archaïques et fortement
dominées par l'utilisation de la daba. Les sols remués chaque
année se fragilisent et deviennent vulnérables à
l'érosion. Les labours effectués à la charrue sont pour la
plupart perpendiculaires aux courbes de niveau ; toute chose qui joue en faveur
des ruissellements, donc de l'érosion. Seulement 12% des paysans
pratiques la lutte anti érosive. Pour ce qui est de l'exploitation des
berges, le P.I. de Fara et la réalisation des puits et la confection des
planches à Guido restent largement mis en causes. Le piétinement
des animaux est omniprésent sur les deux bassins versants et ce, durant
toute l'année. L'inconvénient est l'ameublissement des sols par
la multiplication des pistes à bétail.
Tous ces paramètres concourent à la
dégradation des retenues en réduisant non seulement leur volume,
mais également en polluant les eaux.
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