§2- Les facteurs
exogènes.
Il n'est de doute aujourd'hui pour personne qu'il existe une
connexité entre l'instabilité politique au Tchad et la guerre qui
sévit au Darfour55(*). Cette connexion s'explique tant par des raisons
démographiques, historiques et politiques. Mais surtout par la posture
de Déby dans la gestion de la crise soudanaise (A) qui trouve
échos du côté du gouvernement du Soudan (B).
· A-La posture d'Idriss Déby dans la gestion de
la crise du Darfour
Ayant bénéficié du soutien logistique et
financier du régime de Khartoum lors de sa conquête du pouvoir en
1990, Idriss Déby, en guise de reconnaissance, est resté un
allié loyal du régime soudanais jusqu'au début du conflit
du Darfour. Cette loyauté s'est traduite par le refus opposé par
ce dernier lorsque les groupes de rebelles du Darfour et du sud soudan ont
sollicité son concours56(*).
Mais à partir de 2003, Déby n'était plus
en mesure d'empêcher les deux mouvements rebelles du Darfour,
l'armée de Libération du soudan (SLA) et le mouvement pour la
justice et l'égalité (JEM), de faire du Tchad une base
arrière, de lever des combattants et de rechercher le soutien des
Béri tchadiens.
Malgré ses nombreux gestes de fidélité
(l'envoi en 2003 des troupes tchadiennes pour lutter contre le SLA et le JEM,
l'arrestation par les autorités tchadiennes de deux leaders57(*) pour les livrer au Soudan,
l'acceptation de jouer la carte de Khartoum en créant des divisions au
sein de JEM), Deby ne bénéficie plus de la sympathie de Khartoum.
Il est plus que jamais pris en étau entre son alliance avec EL Bechir et
sa solidarité avec les Béri soudanais, les deux camps
qui lui ont permis d'accéder au pouvoir. Cette situation fait planer le
doute sur un double jeu possible58(*).
En 2005, Idriss Déby ne résiste plus et
cède à la pression Béri pour accorder aux
rebelles zaghawa du Darfour des équipements et le droit de se
servir du Tchad comme base arrière. Ce revirement place Idriss
Déby dans la catégorie des anciens alliés devenus
encombrants et qu'il faut remplacer ; d'où le soutien de Khartoum
aux rebellions en prise avec le pouvoir de N'djamena.
* 55 Lire la Revue
Outre Terre le numéro 20/3 2007. Dans ce numéro
plusieurs articles traitant la crise du Darfour donnent d'importants liens de
connexions du conflit tchadien et soudanais.
* 56 Tanner, Victor et
Jérôme Tubiana, Divided they fall. The fragmantation of
Darfour's rebel group, HSBA working paper n°6, 2007.
* 57 Bachar Idris Abu Garba
le numéro deux du mouvement (vice président et secrétaire
général), et Jamal Idris-ed-Din, tous deux zaghawa du Soudan.
* 58 Il faut observer que
bien des documents font état du soutien financier de Daoussa
Déby, le grand frère de Idriss Deby, au JEM. Khalil Ibrahim,
responsable de JEM est lié à Timan Déby par sa
mère. Cf. International Crisis Group, Tchad. Vers un retour de la
guerre ? Op. cit. ET Jérôme Tubiana, la guerre par
procuration entre le Tchad et le Soudan, op. cit.
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